Séfarades

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Séfarades
(he) סְפָרַדִּי / Sfaraddi

Populations importantes par région
Drapeau d’Israël Israël 1 400 000
Drapeau de la France France 300 000 à 400 000
Drapeau des États-Unis États-Unis 200 000 à 300 000
Drapeau de l'Argentine Argentine 50 000
Drapeau de la Turquie Turquie 26 000
Drapeau du Maroc Maroc 6 000
Drapeau de la Grèce Grèce 6 000
Drapeau du Royaume-Uni Royaume-Uni 8 000
Drapeau de la Tunisie Tunisie 2 000
Drapeau de la Bosnie-Herzégovine Bosnie-Herzégovine 2 000
Population totale 2 200 000[réf. nécessaire]
Autres
Langues Judéo-espagnol, haketia, judéo-catalan, arabe, shuadit, hébreu
Religions Judaïsme
Ethnies liées Ashkénazes, Juifs Mizrahim, Samaritains,

Les Séfarades (parfois orthographié Sépharade) constituent une branche du judaïsme qui suit le judaïsme liturgique espagnol et portugais (en particulier dans la prononciation des mots des prières). Certains ont contribué aux sciences et techniques en al-Andalus comme Maïmonide, Abraham ibn Ezra, Juda Halevi, Nahmanide, Salomon ibn Gabirol, Moïse de Léon. Le terme « Séfarade » désigne aussi souvent les Juifs non ashkénazes[1] qui ont souvent adopté le rite séfarade au contact des Juifs issus de l'émigration consécutive à l'expulsion des Juifs d'Espagne.

Étymologie

Un juif d'Alger photographié en 1890.

Les Séfarades tirent leur nom de l’hébreu Sefarad qui désigne la péninsule Ibérique. Ce mot est un hapax, c’est-à-dire un terme dont on ne connaît qu'une occurrence (pour celui-ci dans la Bible), et désignerait Sardes, la capitale de la Lydie sur le fleuve Pactole, dont le fameux Crésus fut roi au VIe siècle av. J.-C. Un rapprochement de sonorité avec les Hespérides, nymphes de l’occident, n’est pas exclu.

Il est possible aussi de voir dans le mot « séfarade » un lien avec l’akkadien et surtout l’arabe safar (« voyage »), qu’on retrouve dans safari en swahili. En effet l’idée du perpétuel exil, du Juif errant, la nécessité de fuir sans cesse les persécutions peut avoir produit une appropriation patronymique du concept de voyage, d’errance (ce que ce mot signifie aussi en akkadien).

Au sens étroit, Sefarad qui, en hébreu, veut dire « Espagne », désigne ce pays et les Juifs originaires de cette région.

Une autre origine possible voudrait que le mot sfarad soit l'anagramme du mot pardes, avec une permutation du p et du s aboutissant à la racine trilitère spard, d'où sepharad, terme désignant ceux qui étudient le sod, littéralement la kabbale[réf. nécessaire].

Lato sensu, le terme désigna progressivement les communautés juives ayant adopté certaines formes rituelles propres aux Juifs d’Espagne et du Portugal. Ceux-ci, après les pogroms de 1391 et leur expulsion d’Espagne (1492) puis du Portugal (1496), se sont en effet répandus à travers le bassin méditerranéen (et dans une moindre mesure aux Pays-Bas, à Bordeaux et dans quelques autres points d’Europe du Nord-Est), influençant les populations juives locales. En Israël, le grand rabbin séfarade représente surtout les Juifs issus des anciens pays arabes, bien plus que ceux se réclamant d’une identité ibérique, désormais fortement diluée.

Diaspora

Contraints par le décret de l’Alhambra signé par la reine Isabelle la Catholique en 1492 de quitter l’Espagne, les Séfarades conservent néanmoins une langue proche du castillan du XVIe siècle : il s'agit du judéo-espagnol, parlé encore aujourd’hui, et connaissant des expressions voisines telles que le judéo-catalan, le judéo-portugais et le ladino.

Les Juifs d’Espagne s’exilent essentiellement en Afrique du Nord (principalement au Maroc et en Algérie)[2], dans les Balkans, en Grèce et en Anatolie alors sous le contrôle de l’Empire ottoman, et aussi auparavant en Italie. Les Juifs du Portugal emmènent aussi la tradition séfarade vers les Pays-Bas. Les Séfarades émigrent aussi dans le Nouveau Monde ; ce furent les premiers Juifs d’Amérique. Au Brésil, à Recife, des Juifs luso-néerlandais constituent la Synagogue Kahal Zur Israel, première congrégation religieuse juive des Amériques en 1636.

Le décret de l’Alhambra de 1492, responsable de l’expulsion des Séfarades d’Espagne, est resté en vigueur officiellement jusqu’en 1967[3].

Israël

Dès 1971, des jeunes inspirés par le mouvement afro-américain des Black Panthers en fondent une version israélienne, luttant pour les droits des séfarades, précédant l'Affaire des enfants de la teigne qui fit scandale en 1974. En 1977, les séfarades israéliens soutiennent activement la candidature de Menahem Begin, chef du parti du Likoud, qui fut élu après le règne jusque-là ininterrompu du sionisme travailliste[4]. Des partis politiques séfarades proches de l'Extrême droite apparaissent : le Tami en 1981, le Shass en 1984 et le Gesher en 1996.

France

En France, en 1984, Raphaël Perez devient le premier grand rabbin séfarade de Strasbourg. De 1980 à 2007, René Sirat devient le premier grand rabbin séfarade de France, fonction traditionnellement allouée à la communauté juive alsacienne[5]. De 2008 à nos jours, Joël Mergui est le premier président séfarade du Consistoire central israélite de France[6].

Espagne

Depuis quelques années, l'Espagne acceptait d'octroyer la nationalité espagnole aux personnes pouvant attester d'une ascendance séfarade, sous certaines conditions. En juin 2014, le gouvernement de Mariano Rajoy lève l'une des clauses les plus décriées, celle imposant l'abandon de la nationalité précédente, et reconnaît dès lors la double nationalité. Cette décision relève de la démarche générale de reconnaissance d'une « erreur historique il y a cinq siècles » par les autorités espagnoles[7]. Depuis, les demandes de naturalisation arrivent régulièrement aux ambassades espagnoles[8].

Spécificités

Salomé, une jeune femme séfarade, peint par Henri Regnault en 1870 en Algérie au Metropolitan Museum of Art.

Outre les différences de prononciation avec les Ashkénazes, il existe des différences mineures dans les programmes de prières et dans la façon de pratiquer certains commandements de la loi juive[9]. Les différences majeures entre Séfarades et Ashkénazes ne sont pas dans le domaine religieux, mais surtout dans le domaine culturel : langue vernaculaire, chansons, musique, poésie, littérature, nourriture…

Notes et références

  1. Séfarade dans l'Encyclopédie Universalis
  2. « SPAIN (table contenue dans l'article du même nom) », sur Jewish Encyclopedia, (consulté le )
  3. Danielle Rozenberg, L'Espagne contemporaine et la question juive : Les fils renoués de la mémoire et de l'histoire, Toulouse, Presse universitaire du Mirail, (ISBN 978-2-85816-864-4, lire en ligne), page 162
  4. Israël, la fracture ouverte, Libération
  5. http://www.lejdd.fr/Societe/Religion/Actualite/La-chute-d-un-grand-rabbin-orgueilleux-601697
  6. Palais de l'Élysée, « Entretien avec M. Joël MERGUI, Président du Consistoire central israélite de France », sur elysee.fr,
  7. AFP, « L'Espagne facilite la naturalisation des descendants de juifs expulsés en 1492 », Le Point - en ligne,‎ (lire en ligne).
  8. [radio] Juliette Senik (réalisation Emmanuel Geoffroy), Un château en Espagne (reportage radiophonique), France Culture, coll. « Les Pieds sur terre », (présentation en ligne, écouter en ligne). Émission de Sonia Kronlund, diffusée le 9 décembre 2014 sur France Culture.
  9. Torat Emet אתר יהדות צפון אפריקה-תורה וחזנות.

Voir aussi

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Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • David Bensoussan, L’Espagne des trois religions, L’Harmattan, Paris, 2007 (ISBN 978-2-296-04134-9)
  • Victor Malka, Les Juifs Sépharades, PUF, coll. Que sais-je ?, Paris, 1986, (ISBN 3 13 039328 4[à vérifier : ISBN invalide]) 124 p.
  • Daniel Schroeter, « La Découverte des Juifs berbères », Relations Judéo-Musulmanes au Maroc : perceptions et réalités, édité par Michel Abitbol, Paris, Éditions Stavit, 1997, p. 169-187 (en ligne)
  • Eva Touboul-Tardieu, Séphardisme et hispanité, Paris, PUPS, 2009.

Articles connexes

Liens externes