Martial Solal

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Martial Solal
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Martial Solal en 2006, en concert à la Maison de Radio France avec son Newdecaband
Informations générales
Naissance (96 ans)
Alger
Activité principale pianiste, compositeur, arrangeur, chef d'orchestre
Genre musical jazz
Instruments piano
Années actives depuis 1957

Martial Solal est un pianiste de jazz, compositeur, arrangeur et chef d'orchestre français, né à Alger le .

Biographie

Durant la Seconde Guerre mondiale, au Maroc pendant son service militaire, il commence par jouer dans les mess des soldats américains[1]. Devenu professionnel en 1945, il s'installe à Paris le . Il joue avec de nombreux musiciens de jazz d'alors : Aimé Barelli, Chiboust, Benny Bennett, et participe à de nombreux enregistrements, parfois sous le pseudo de Jo Jaguar, pour le label Vogue. Il prend sa liberté en 1953 et joue en clubs, accompagnant les grands jazzmen de passage.

Il crée un quartet avec Roger Guérin à la trompette, Paul Rovère à la contrebasse et Daniel Humair à la batterie. Il enregistre quelques succès alimentaires et compose pour la télévision et le cinéma: À bout de souffle, Léon Morin prêtre, Échappement libre. Un jour, Guy Lafitte lui demande de trouver un accord pour le pont d'un twist et une idée d'arrangement, depuis on le croit seul compositeur de Twist à Saint-Tropez...

En 1957, au Club Saint-Germain, avec Roger Guérin, il compose une œuvre maîtresse Suite en bémol pour quartette, puis viendra en 1960, Suite pour une Frise, autre chef-d'œuvre. 1960 est l'année de la création de son trio avec Guy Pedersen à la contrebasse et Daniel Humair à la batterie, trio qui reste célèbre. Ils libèrent le jeu triangulaire du trio classique : la contrebasse change radicalement devenant plus mélodique et l'esthète Daniel Humair apporte des trouvailles techniques ébouriffantes.

Pilier du Blue Note, il accompagne le guitariste Jimmy Gourley durant plusieurs mois, jouant un répertoire différent tous les soirs, ce qui lui permet de maîtriser parfaitement les thèmes et harmonies de nombres de standards.

Sideman très prisé des grands noms du jazz, Martial Solal a eu d’emblée du succès dès la parution de son premier enregistrement en 1953. Le producteur américain George Wein le découvre en France et le présente en 1963 en vedette aux festivals de Newport (Teddy Kotick à la contrebasse et Paul Motian à la batterie avec lesquels il enregistra le 11 juillet 1963 l'album (At Newport 63) et Monterey, à San Francisco, New York et Montréal. C’est le départ d’une carrière remarquable pour un musicien français qui le conduira de Carnegie Hall à la Maison des Compositeurs de Moscou, de la Fenice de Venise à la Philharmonie de Berlin. Cependant, jeune marié et père d'un fils à Paris, il renonce à une carrière américaine. Ce sera malgré tout en leader de son propre trio et de ses grands orchestres qu’il l’aborde, avec un accent mis sur la composition. Cela lui vaudra que de nombreux metteurs en scènes, de Jean-Luc Godard pour le mythique À bout de souffle à Orson Welles pour Le Procès, lui confient la bande originale de leurs films.

Martial Solal (1988) par Erling Mandelmann.

Puis il se lance dans un grand orchestre, récidive en 1982 et en 2006 avec son Dodecaband puis son Newdecaband. Eric Le Lann est le seul trompettiste à y figurer depuis le début. Solal lui écrit des arrangements de chansons de Piaf et de Trenet.

Martial Solal est connu pour son talent de commentateur, de présentateur et son humour : ses compositions se nomment Nos smokings - Averty c'est moi - Leloir m'est cher - Gavotte à Gaveau - L'allée Thiers et le poteau laid - Basie Like -

Il joue régulièrement en solo, ainsi qu'en duo, avec diverses personnalités : Toots Thielemans, Lee Konitz, Jimmy Raney, Michel Portal, Didier Lockwood... Il a également joué avec, entre autres : Dizzy Gillespie, Chet Baker, Stan Getz, Stéphane Grappelli, Phil Woods, Carmen McRae, etc.

À partir de 1995, il renoue avec les rythmiques américaines[2] Marc Johnson/Peter Erskine, Gary Peacock/Paul Motian, Marc Johnson/Paul Motian.

En 1997, faisant suite à l'album "Just Friends", il tourne en trio avec Gary Peacock à la contrebasse et Paul Motian à la batterie. Puis il crée son trio actuel avec les jumeaux François (contrebasse) et Louis (batterie) Moutin.

Sa maîtrise hors-pair de l'instrument accompagne un talent d'improvisateur inépuisable. Son talent l'a fait reconnaître bien au-delà de l'Europe. Duke Ellington lui-même a dit de Solal qu’il possédait « en abondance les éléments essentiels à un musicien : sensibilité, fraîcheur, créativité et une technique extraordinaire ».

En 1999, il a reçu à Copenhague le Jazzpar Prize, considéré comme le Nobel du jazz, qui parachève l’édifice impressionnant de distinctions qu’il a reçues : prix des festivals de Montreux, La Haye, Milan, prix de l'Académie Charles-Cros, prix du Président de la République, Victoire de la musique, Prix Stan Kenton, prix Django-Reinhardt, prix Boris Vian, 2 Djangodor, prix de la SACEM et en 1993 le grand prix national de la musique...

Un très prestigieux concours international de piano jazz organisé tous les quatre ans porte son nom : le Concours de piano jazz Martial Solal.

Il est le père de la chanteuse de jazz Claudia Solal, qui participe notamment à son orchestre Newdecaband.

Style

Le style de Martial Solal est marqué par des ruptures rythmiques et mélodiques, une grande liberté rythmique, harmonique et tonale et une grande virtuosité. Il est très imaginatif, déconstruisant les mélodies, présentant une idée sous tous ses angles, dans une approche presque cinématographique « avec gros plans, travellings, contre-champs, panoramiques, contre-plongées... autour d’un thème central[3]. »

Il est friand de citations, issues de thèmes jazz ou classique[4].

L'humour est très présent chez Solal[5] : les titres de ses compositions sont régulièrement des calembours (L'allée Thiers et le poteau laid, Solalitude, Impromptulm, Grandeur et cadence...) On peut également citer Ah non !, morceau qui reprend à la main gauche le premier exercide du Pianiste virtuose de Hanon en laissant la main droite improviser librement.

Influences

Le jeu de Martial Solal est très influencé par des pianistes de stride tels que Willie "The Lion" Smith, ainsi que par des musiciens bebop comme Art Tatum, Teddy Wilson ou Charlie Parker. Il reconnaît aussi l'influence de Thelonious Monk, plus dans la conception musicale que dans son jeu de piano. Stefano Bollani note que c'est « le seul pianiste au monde qui n'a pas subi l'influence de Bill Evans[6]. » Malgré tout, il a choisi dès ses débuts de se créer un style personnel et unique.

Technique

Martial Solal n'a cessé de perfectionner sa technique tout au long de sa vie — il est assez critique des pianistes qui arrête de s'exercer avec l'âge[6]. Il a travaillé 4 ou 5 heures par jour entre ses 50 et 70 ans, et considère 45 minutes comme un minimum. Il ne joue pas de morceaux chez lui, pour garder sa fraîcheur lors des concerts[6]. Il a déclaré[Où ?], pour pouvoir travailler la technique pure, avoir un piano droit sans cordes chez lui, de façon à dissocier le travail digital de la création de son et de musique.

Il a étudié durant les années 70 avec le concertiste Pierre Sancan[5].

Compositions

Il a composé pour Elisabeth Chojnacka, Marcel Azzola, les Percussions de Strasbourg, Pierre Charial, Ensemble Concert Arban et bien d'autres.

Parmi ses compositions les plus vastes, on peut citer

  • Suite en bémol pour quartette de jazz (1959)
  • Stress pour trio de jazz, piano, quintette de cuivres et percussion, pièce composée par Martial Solal et Marius Constant (1977)
  • Fantaisie pour 2 orchestres (1984)
  • Concerto pour claviers et orchestre « Nuit étoilée » (1987/1988)
  • Seul contre tous pour basson seul, pièce composée pour et créée par Alexandre Ouzounoff (1982)

Il a également composé une dizaine de concertos ainsi qu'une cinquantaine de pièces pour divers orchestres[7] (quintets de cuivres, ensembles de percussions, ensembles à cordes...)

Musiques de films

Martial Solal a également composé (ou joué) plusieurs musiques de films :

Discographie

Martial Solal a enregistré plus d'une centaine de disques, en solo, duo, trio ou avec des formations plus étendues, dont beaucoup n'ont jamais été réédités et sont aujourd'hui introuvables.

Bibliographie et filmographie

  • Martial Solal, compositeur de l'instant (Entretien avec Xavier Prévost), Michel de Maule/INA, Paris, 2005.
  • Les Cahiers du jazz, n° 3 (nouvelle série), Outre Mesure, Paris, 2006.
  • Ma vie sur un tabouret - autobiographie, Actes Sud, Arles, 2008.
  • Jazz Never Ends, documentaire sur Martial Solal réalisé par Michel Follin, produit par Agat Films, et diffusé sur Arte à plusieurs reprises, 2008
  • La revue GRUPPEN a publié une entrevue d'une quinzaine de pages dans laquelle Martial Solal revient sur son travail d'éternel « chercheur en jazz »[8].

Liens externes

Notes et références

  1. (fr) Guillaume Lagrée, « Un après-midi chez Monsieur Solal », CitizenJazz.com, (consulté le )
  2. Jazz Magazine N°591 Avril 2008
  3. Bob Hatteau, « Critique d'Exposition sans Tableau », sur citizenjazz.com, (consulté le ).
  4. Il cite par exemple la Fantaisie-Impromptu de Chopin dans l'introduction de sa version de Que reste-t-il de nos amours (Jazz 'n (e)motion, 1998).
  5. a et b Philippe Carles, André Clergeat, Jean-Louis Comolli, Dictionnaire du Jazz, Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 1994.
  6. a b et c (en) Ted Panken, « On Martial Solal’s 85th Birthday, a Downbeat Feature and Public Blindfold Test at Orvieto in 2009 », sur tedpanken.wordpress.com, (consulté le ).
  7. « Interview musicale de Martial Solal », sur citizenjazz.com, (consulté le ).
  8. « Sommaire du no2 de la revue Gruppen », sur revuegruppen.com, (consulté le ).