Carte postale

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Une carte postale anglaise de 1910.
Les Folies-Bergères, photo colorisée.

La carte postale est un moyen de correspondance écrite qui se présente sous la forme d'un morceau de papier cartonné rectangulaire, de dimensions variables (le format le plus courant est le format A6, soit 10,5 x 14,8 cm), envoyé sans enveloppe, l'adresse et l'affranchissement y étant porté directement, aux côtés du message.

Fonctions de la carte postale

La carte postale sert principalement à l'envoi d'un message court, sans enveloppe. Souvent, les administrations postales ont un tarif « carte postale », moins élevé que celui de la lettre habituelle, ce qui explique, à l'origine, sa raison d'être, et son succès à une certaine époque.

Dans les années 1900 à 1920, âge d'or de la carte postale, l'usage en était pratiquement quotidien, de sorte qu'avant la diffusion générale du téléphone, il n'était pas rare de l'utiliser d'un quartier à l'autre de la même ville, par exemple pour se donner rendez-vous le lendemain.

Selon les modèles et les époques, un des côtés peut porter une illustration dessinée ou photographique, à vocation, notamment, touristique, artistique ou humoristique.

Depuis longtemps, la carte postale a pu également être considérée comme un objet de collection.

Histoire de la carte postale

Si l'Angleterre fut le berceau du timbre-poste (en 1840), l'Autriche fut celui de la carte postale. Le docteur Heinrich von Stephan, Directeur Général des Postes et fondateur de l'Union Postale Universelle, en 1865, propose pour la première fois un mémoire sur la carte postale, à la conférence postale de Karlsruhe. L'idée n'est pas reprise tout de suite et il faut attendre le , à Vienne, pour que le professeur Emmanuel Hermann convainque l'administration postale autrichienne de l'intérêt de ce support.

Apparition de la carte postale en France en 1870

Carte-poste de Paris par ballon monté, 1870-1871.

La carte de Strasbourg

En 1870, La Société de secours aux blessés militaires des armées de terre et de mer, future Croix-Rouge internationale émet une carte pour permettre la communication interne entre les comités locaux de cette société.

Le , la ville de Strasbourg, assiégée par l’armée du général Von Werder, refuse toujours de se rendre[1]. Le comité strasbourgeois de la Société de secours aux blessés, qui possède un stock de ces cartes, propose au général prussien de laisser les blessés et les assiégés communiquer avec leur famille. Le général accepte. Les cartes sont affranchies d’un timbre prussien de 6 Kreuzer. Ce courrier sera censuré à Karlsruhe, puis transitera par Bâle !

Les premières cartes postales à circuler en France sont transmises par deux administrations étrangères, allemande et suisse, et sont affranchies avec un timbre prussien[2].

La carte-poste

Durant le siège de Paris, la section des Postes de la capitale crée les cartes-poste[3], pour « envoi ouvert » par ballon monté, avec l'adresse du destinataire d'un côté et la correspondance de l'autre.

Une carte postale de 1874, recto.
Même carte postale de 1874, verso.

La carte postale

Le , la loi de finance, sur proposition du député Louis Wolowski, introduit en France de façon officielle la carte postale[4]. L'utilisation de la carte postale officielle n'intervint, en France, que le .

Deux types de cartes postales furent d'abord mis en vente dans les bureaux de poste. L'une, de couleur jaune, affranchie à 10 centimes, était destinée à circuler à découvert en France et en Algérie, dans l'intérieur d'une même ville, ou dans la circonscription d'un même bureau. L'autre, affranchie à 15 centimes, pouvait circuler de bureau à bureau. La seule illustration (si l'on peut dire) de cette carte postale officielle est une frise de 4 mm d'épaisseur, encadrant la partie réservée à l'adresse du destinataire et portant le timbre d'affranchissement et les indications administratives. Le public fit à cette première carte un accueil favorable. Sept millions d'exemplaires s'écoulèrent en une semaine.

Jusqu'en 1875, la carte postale est restée un monopole de l'administration des postes, ce qui ne signifie pas que des commerçants et des industriels n'en aient pas fait usage, à titre publicitaire, avant cette date.

Premières illustrations

Dès 1873, les magasins À la Belle Jardinière font reproduire, au recto des cartes officielles, de petites illustrations représentant leurs immeubles de la rue du Pont-Neuf, à Paris.

Une carte postale de 1900, représentant l'entrée de la Grande Mosquée de Kairouan

La carte postale acquiert rapidement ses lettres de noblesse : ainsi, lors de l'Exposition universelle de 1889, une carte dessinée représentant la tour Eiffel sera vendue à 300 000 exemplaires[5].

Le Marseillais Dominique Piazza semble être le premier à avoir commercialisé, en France, des cartes photographiques en 1891. Dès 1892, d’autres villes du sud de la France emboîtent le pas, suivies de Paris. Cependant, les cartes photographiques imprimées restent excessivement rares avant 1897. C'est à cette époque que l'imprimeur Neurdein va éditer des cartes pour chaque ville importante de France, et qu'Albert Bergeret, dès 1898, va produire des cartes illustrant l'Est de la France.

Grüss aus Wasselnheim, de l’imprimeur alsacien Pie Ott à Wasselonne, vers 1890.
Une carte postale de 1903, verso.

Durant la période qui se situe de l’Exposition internationale de 1889 à celle de 1900, outre les cartes officielles constituées surtout d’entiers illustrés, apparaissent les « Gruss ». Ces cartes allemandes, conviviales et à plans multiples, adressent souhaits, salut. Elles allient perfection et raffinement.

La carte postale prend alors un essor considérable, surtout avec l'Exposition universelle de Paris, en 1900. Elle va connaître un âge d'or, jusqu'à la fin de la Première Guerre mondiale. À cette époque, les journaux ne comportent pas de photographies. La carte postale peut être utilisée comme un nouveau média : une espèce de télévision avant la lettre. À côté des grands éditeurs nationaux, de petits photographes locaux vont fixer, pour la postérité, les événements marquants, les scènes typiques de la vie quotidienne, de la vie politique, etc. Des hôtels, cafés, restaurants, des commerces en tous genres, utilisent la carte postale comme moyen publicitaire : le propriétaire pose avec ses employés et sa famille, devant la vitrine. Tous ces petits moments de l'histoire locale sont aujourd'hui précieux et très recherchés.

Jusqu'au début de l’année 1904, il était interdit d'écrire au recto de la carte postale. Trois ou quatre lignes horizontales, sur toute la largeur de la carte, permettaient d'inscrire la seule adresse du destinataire. La photographie (au verso) ne recouvrait pas la totalité de l’espace, pour permettre la correspondance à côté de l’image. On parle alors de « carte nuage » ou « carte nuageuse ».

Le tournant de 1904 : division du recto en deux parties

À partir de 1904, décision est prise d'autoriser à écrire sur le recto de la carte postale, qui, à cet effet, est divisé en deux parties : l'une, à gauche, réservée à la correspondance, et l'autre, à droite, à l'adresse. Dès lors, la photographie peut librement occuper tout le verso.

Si, à l'origine, la carte postale est un document presque exclusivement postal, imprimé par l’administration, à cette époque, des photographes, profitant des nouvelles avancées techniques, vendent leur production à une clientèle aisée sur les principaux lieux touristiques.

La carte postale va aider la photographie à se diffuser à travers le monde et dans toutes les couches sociales. Le public pourra tellement s'approprier l'image qu'on en viendra même à faire développer des photos au format carte postale : c'est ce qu'on appelle les « cartes-photos ».

L'âge d'or de la carte postale

Fichier:Cae-20-legendre48loire30.jpg
Carte postale de la série « Châteaux de la Loire » par Philippe Legendre-Kvater, vers 2000.

L'âge d'or de la carte postale va de 1900 à 1920, environ. Elles circulent par millions, dans le monde entier. Les éditeurs de cartes postales foisonnent, et le moindre buraliste du plus petit village tient à voir son nom imprimé sur les cartes qu'il ne fait que diffuser, pour le compte d'un grossiste de la région.

Le déclin

On constate déjà, à partir des années 1920, que les productions sont de moindre qualité. Par souci de rentabilité, les éditeurs font le choix de procédés et de matériaux médiocres et, d'autre part, ils diffusent surtout des vues générales, sans caractère, au détriment de scènes plus typées, mais aussi plus rapidement obsolètes.

Mais, surtout après 1918, l'inépuisable créativité de certains éditeurs et illustrateurs ne parvient pas à enrayer une tendance de fond liée à l'évolution des modes de vie. La carte postale connaît un déclin quantitatif continuel, et finit par disparaître de la vie quotidienne, au profit de nouveaux modes de communications (tels que, surtout, le téléphone, puis le courriel) et de nouvelles pratiques de l'image (d'abord avec le développement de la photographie amateur, puis celui des appareils numériques et des pièces jointes).

Selon une enquête réalisée pour le site internet itv.com auprès de 2 000 Britanniques, la carte postale serait désormais en perte de vitesse, supplantée notamment par les courriels. Cette enquête montre, ainsi, que le nombre de cartes postales envoyées, ces dix dernières années, aurait chuté de 75 %, et plus des trois quarts des jeunes trouveraient ce moyen de communication démodé[6]. Le coup de grâce est pratiquement donné par l'apparition de la carte postale virtuelle. Il n'en reste pas moins vrai qu'elle reste le seul moyen simple d'envoyer une vue photographique de son lieu de vacances et que les vues présentées sont généralement plus réussies que celles des photographies amateurs.

Fichier:Concorde carte20ans.jpg
Carte postale Anniversaire des 20 ans du Concorde, « Carte souvenir philatélique »

On distingue deux périodes, au cours de cette longue évolution : celle des cartes dites « semi-modernes » (de 1918 à 1975), puis celle des cartes dites « modernes » (de 1975 à nos jours). Mais, cette distinction, traditionnelle chez les cartophiles, paraît bien artificielle. Elle reflète surtout le point de vue subjectif des théoriciens de la cartophilie, dont l'âge d'or a précisément commencé au milieu des années 1970.

D'autres cartophiles font la distinction entre les cartes postales anciennes (CPA), imprimées grâce au procédé de la phototypie, jusque dans les années 1940, les cartes postales semi-modernes (CPSM), produites par héliotypie et héliogravure, entre les années 1930 et 1970 – les cartes à bords dentelés en sont le modèle le plus connu – et les cartes postales modernes, imprimées par offset[7].

En réaction, on constate chez les éditeurs, depuis la fin des années 1970, un renouveau des sujets proposés : cartes humoristiques élaborées, recours à des photographes célèbres, reproduction d'affiches et de tableaux de maîtres, paysages sublimés ... Par ailleurs, la carte postale redevient un support publicitaire prisé et un moyen de diffusion de la photographie d'art[8].

Différentes catégories de cartes postales

Préfecture de Cruz Alta au Brésil.

La variété des cartes postales est presque infinie.

Catégories de formes

  • Cartes postales aniconiques (sans illustration).
  • Cartes postales dessinées.
  • Cartes postales « précurseurs ».
  • Cartes postales colorisées (par différents procédés techniques).
  • Cartes postales à dépliant.
  • Cartes postales multivues.
  • Cartes-photos.

Catégories thématiques

Caricature anti-allemande pendant la guerre de 14-18.
  • Cartes postales paysagères
  • Cartes postales ethnologiques
  • Cartes postales artistiques
  • Cartes postales familiales
  • Cartes postales patriotiques
  • Cartes postales historiques
  • Cartes postales artistiques
  • Cartes postales muséographiques
  • Cartes postales touristiques
  • Cartes postales humoristiques
  • Cartes postales aéronautiques
  • Cartes postales érotiques
  • Cartes postales sentimentales

Bibliographie

Carte postale russe de Solomko intitulée À la recherche du bonheur (vers 1900).
  • Alexis Belloc, « 3e République, création des cartes postales, historique », dans A. Belloc, Les Postes françaises, recherches historiques sur leur origine, leur développement, leur législation, Paris, Firmin-Didot, 1886, p. 596 et suivantes, en ligne sur Gallica.
  • Jean-Claude Carré, Guide et argus des cartes postales de collection, en 4 volumes.
  • Clément Chéroux et Ute Eskildsen, La Photographie timbrée. L'inventivité visuelle de la carte postale photographique, à travers les collections de cartes postales de Gérard Lévy et Peter Weiss, Göttingen, Steidl / Paris, Jeu de Paume, 2007. ISBN 978-3-86521-652-6
  • James Eveillard, L'Histoire de la carte postale et la Bretagne, Rennes, Ouest-France, 1999.
  • Nicolas Hossard, Recto-Verso. Les faces cachées de la carte postale, Paris, Arcadia, 2005.
  • Aldo Kyrou, L'Age d'or de la carte postale, Paris, Balland, 1966. (Réédition 1975, ISBN 2-7158-0053-3.)
  • Christian Malaurie, La Carte postale, une œuvre, Paris, L'Harmattan, 2003.
  • Gérard Neudin, L’Officiel international des cartes postales de collection, parution annuelle, de 1976 à 2001.
  • Paul-Noël et Paul-Yvon Armand, Dictionnaire de la cartophilie francophone, Paris, Cartes Postales et Collection, 1990.
  • Gérard Silvain et Joël Kotek, La Carte postale antisémite, de l'affaire Dreyfus à la Shoah, Paris, Berg International, 2005.
  • Martin Willougby, La Carte postale, une histoire illustrée, Paris, Bookking International, 1993.
  • Louis Wolowski, « La Carte postale en divers pays », dans Journal des économistes, janvier-mars 1873, p. 90-98, en ligne sur Gallica.
  • Sébastien Lapaque, Théorie de la carte postale, Actes Sud, 2014.
  • Doizy Guillaume et Pierre Brouland, La Grande guerre des cartes postales, Hugo-Image, 2013, 320 p.

Notes

  1. Le siège de Strasbourg dura du 13 août au 23 septembre 1870. Une carte portant l'estampille de la Croix-Rouge est alors mise en circulation par la Société de secours aux blessés afin de permettre à la population civile de communiquer avec l'extérieur. Il s'agit d'une carte discrètement illustrée d'une croix rouge. On l'achemine non seulement vers la France mais aussi vers la Suisse
  2. La carte de Strasbourg sur le site cartolis.org
  3. « Les cartes-postes sont en carton d'un poids de 3 grammes au maximum, et de 11 centimètres de long sur 7 centimètres de large » et portent, sur « l'une des faces l'adresse du destinataire et, sur l'autre, la correspondance du public » (d'après le texte du second décret du ). Ces « formules postales » seront très utilisées durant les 5 mois suivants. Contrairement aux cartes de 1872, elles seront fabriquées et vendues par des entreprises privées, et affranchies par l'utilisateur.
  4. Alexis Belloc, Les Postes françaises : recherches historiques..., Paris, Firmin-Didot, 1886.
  5. Depuis, ce monument est le plus représenté au monde sur les cartes, avec une estimation de 5 milliards d'exemplaires.
  6. Source: The Telegraph, 19/6/2007.
  7. Cf. les sites de vente en ligne
  8. Site du Conservatoire Régional de la Carte Postale (Bretagne)

Voir aussi

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