Paul Koepfler

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Paul Koepfler
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PolignyVoir et modifier les données sur Wikidata
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Service historique de la Défense (AC 21 P 360177)
Service historique de la Défense - site de Vincennes (d) (GR 16 P 321625)Voir et modifier les données sur Wikidata
Plaque commémorative

Paul Kœpfler (Belfort, le Poligny, le ), est un résistant français, passeur entre les zones libre et occupée de la France (entre 1940 et 1942) puis agent de liaison de l'Organisation de résistance de l'Armée. Dénoncé, il est abattu par des agents allemands en mars 1943.

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse à Belfort[modifier | modifier le code]

Né en février 1921 dans une famille d’origine alsacienne, Paul Koepfler[Note 1] est le fils de Caroline Madeleine Kœpfler, veuve et alors sans profession. Le mari de celle-ci, est mort de maladie à la guerre en décembre 1914. Paul Koepfler est de père inconnu après que sa reconnaissance par François Weichinger, le concubin de sa mère, ait été annulée par jugement du tribunal civil de Belfort, le 4 mai 1921. Il a une demi-sœur Émilie Freyermuth (1901-1963), un frère René (1917-1988) et deux sœurs Jeanne (1922-1982) et Marguerite (1924-1992). Il quitte l'école à 13 ans et travaille par intermittence en usine : chez Schwob[1] à Valdoie (1936) et Alsthom à Belfort (1937) ; sinon il est colporteur, voire contrebandier. Engagé volontaire en 1939, il est au centre de formation et d'entrainement local lorsque les Allemands envahissent la France. Fait prisonnier comme environ 40 000 soldats de ce secteur, il s'évade et s'enfuit avec son frère et sa sœur cadette jusqu'à Poligny dans le Jura, en zone libre, à quelques kilomètres de la ligne de démarcation[2].

Passeur[modifier | modifier le code]

Dans cette ville, il fait la connaissance de Fernand Valnet[Note 2] qui assure le passage des fuyards : évadés et juifs notamment, de la zone occupée à la zone libre[Note 3], et recherche des assistants. Valnet initie Koepfler qui se révèle doué et apte à créer son propre réseau quelques semaines plus tard. Il recrute des assistants, dont son frère René et sa sœur Marguerite, et choisit comme lieu de passage inter zones, la liaison entre Port-Lesney et Chamblay. La ferme de la Maisonneuve[Note 4], près de Port-Lesney, devient un lieu de regroupement des candidats au passage, car desservie par les bus reliant Besançon à Mouchard et 3 km à l'est de la voie ferrée Besançon-Mouchard-Lons (il faut dans ce cas descendre du train en marche pour éviter la gare de Mouchard très surveillée). Le parcours d'une dizaine de kilomètres, passe en forêt, longe le ruisseau de la Larine, puis franchit la ligne de démarcation à l'ouest d'Écleux, à moins de 2 km de Chamblay. La police allemande a vent de la complicité de Blanche Saillard qui tient la Maisonneuve ; la jeune femme est arrêtée à Mouchard, le 11 juin 1941. Envoyée dans plusieurs camps de concentration, elle mourra le 31 mars 1945 à l'hôpital[Note 5] de Lubań en Pologne.

Koepfler réussit l'exploit de faire passer 120 personnes dans la nuit du 24 au 25 décembre 1940. Il demande une somme de 100 francs par personne pour vivre et couvrir ses frais, somme raisonnable, par rapport à certains autres passeurs[Note 6], et en dispense les démunis et évadés militaires[3]. Il est condamné à mort par contumace. Arrêté, sur dénonciation[Note 7], le 3 mars 1941, prés d’Arbois, alors qu’il se rendait à Belfort, porteur d’un courrier important, il est transféré à Besançon où il est torturé. Sa condamnation à mort ayant été confirmée, Paul Koepfler se tranche la gorge dans sa cellule, quatre jours avant la date prévue pour son exécution. La blessure est si profonde que les Allemands, le jugeant perdu, le transfèrent à la morgue de l’hôpital Saint-Jacques. Mais le personnel médical réussit à le sauver, puis lui faire gagner la zone libre. Il reçoit des soins à Poligny puis à Lyon car ses cordes vocales ont été entaillées. Il en conserva une large cicatrice et une forte altération de la voix. Le général Aubert Frère, gouverneur militaire de Lyon, lui adresse une lettre de félicitations pour sa conduite héroïque. A l’automne 1941, il reprend ses activités de résistance[2]. On lui a attribué, d'août 1940 à octobre 1942, le passage de 20 000 personnes[4], dont des prisonniers évadés des camps allemands : Ainsi à Chamblay trois cafés hébergent les militaires à leur arrivée en zone libre. Les registres de passage tenus par les tenanciers du restaurant Aigrot, de février 1941 au 10 février 1943, recensent 1 841 hommes : la date de passage, le nom, le prénom, la date et le lieu de naissance, le grade, le régiment, le numéro de Stalag et de matricule. Le 14 décembre 1941, est noté le passage du sous-chef au 23e bataillon d’infanterie coloniale, et futur président de la République française, François Mitterrand[Note 8].

Agent de renseignement[modifier | modifier le code]

A Poligny, Roger de Saule, futur responsable de l'opération Pearl Harbour, est à la tête du district militaire de la France libre, chargé de maintenir l'ordre au sud de la ligne de démarcation dans le Jura ; mais il mène parallèlement des activités clandestines d'espionnage et de fourniture de renseignements à Londres. En 1942, Il recrute Koepfler et Valnet dans son Service de renseignement "le deuxième Bureau"[3]. À la suite de l'invasion de la zone sud, en novembre 1942, la ligne de démarcation devient fictive[Note 9], les deux hommes vont se consacrer principalement à cette activité jusqu'à leurs fins tragiques, à la suite de dénonciations : arrestation et mort en camp de concentration pour Valnet, assassinat pour Koepfler.

Mort et obsèques[modifier | modifier le code]

Après l’occupation de la zone sud en novembre 1942, les services allemands de contre-espionnage se lancent à la recherche de Paul Koepfler. Ils finissent par le localiser grâce à des indicateurs. Le 31 mars 1943, alors que Paul Koepfler se trouve au bar de l’hôtel de ville de Poligny avec des amis, deux policiers allemands en civil entrent dans l’établissement. Le résistant les repère aussitôt et sort. Mais les policiers lui emboîtent le pas et font feu sur lui sans sommation. Mortellement blessé, Paul Koepfler s’effondre juste devant l'hôtel de ville et est achevé d'une balle dans la tête. La nouvelle de la mort de Paul Koepfler, qui pourtant n’est pas un enfant du pays, suscite une émotion considérable dans la ville. Sa dépouille est exposée à la chapelle de l’hôpital. Pour les obsèques, l’ordre de la Kommandantur est formel : « Koepfler sera enterré dans la plus stricte intimité, toute manifestation sera interdite ». Le 3 avril 1943, bravant cette interdiction, 1000 personnes environ participent aux funérailles organisées par la municipalité. Un cortège prend forme entre l’hôpital et l’église. Le cercueil de Paul Koepfler est recouvert du drapeau tricolore. Poligny est une ville morte : les volets des maisons sont clos et les magasins fermés. L’hommage se termine par la célébration de l’office religieux dans l’église[Note 10], une partie de la population devant rester à l’extérieur. Paul Koepfler est ensuite inhumé au cimetière militaire de la ville où les habitants défilent et se recueillent pendant plus d’une heure. En passant outre l’interdiction des autorités allemandes, la population de Poligny a fait preuve d’un acte de solidarité envers la personne de Paul Koepfler, et plus largement envers la Résistance[2].

Reconnaissance[modifier | modifier le code]

  • Les villes de Poligny, Belfort et Mont-sous-Vaudrey ont donné à une rue le nom du résistant.
  • Une plaque sur l'hôtel-de-ville de Poligny rappelle l'endroit où il est mort[5]. Contrairement à ce qui est gravé, ce ne sont pas des agents de la Gestapo proprement dite qui l'on abattu, mais le service de renseignements allemand, le Sicherheitsdienst[6].

Distinctions[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Ecriture incorrecte du nom, généralement adoptée par les historiens.
  2. Il rencontre également d'autres résistants comme l'Alsacien Jean Eschbach et le commissaire Henry Castaing.
  3. Ainsi que des retours en zone interdite, notamment des Alsaciens-Mosellans qui avaient fui, en juin 1940, pour éviter l'enrôlement dans la Wehrmacht, et qui tentaient de revenir chez eux. Certains Français, se livrant au marché noir, faisaient de nombreux aller-retours.
  4. Tenue par Blanche Saillard, née Dromard, dont le mari est prisonnier en Allemagne et dont le frère, Albert, sera recruté par Koepfler.
  5. Sur sa plaque au carré militaire de Port-Lesney, c'est le mot allemand lazarett (pour hôpital militaire) qui est inscrit.
  6. Le prix du passage s'élevait parfois à 300 francs, alors que le salaire mensuel était alors de l'ordre de 1000 francs.
  7. Les recherches de l'historienne belfortaine Marie-Antoinette Vacelet ont révélé que Koepfler avait été dénoncé par un camarade de son quartier à Belfort, nommé Ernest K....
  8. Accompagné de 11 autres évadés. Dans ses mémoires, Mitterand dit avoir traversé la Loue ; ce n'est donc pas avec Koepfer qui se déplaçait en rive gauche de cette rivière.
  9. Les postes de contrôle ne seront supprimés que le 1er mars 1943.
  10. L'historien et syndicaliste franc-comtois Gaston Bordet, dont le père fut ami de Koepfler, était enfant de chœur à cette cérémonie.

Références[modifier | modifier le code]

  1. https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/IA70000091
  2. a b et c Jean-Pierre Ravery, « KOEPFLER Paul, Jean », dans Le Maitron, Maitron/Éditions de l'Atelier, (lire en ligne)
  3. a et b Fabrice Grenard, Le choix de la résistance: Histoires d'hommes et de femmes (1940-1944), Presses Universitaires de France, (ISBN 978-2-13-082233-2, lire en ligne)
  4. « Paul Koepfler: passeur et résistant, de Marie-Claude Pelot : 3 avis et résumés critiques de lecteurs », sur www.gregoiredetours.fr (consulté le )
  5. « Musée de la résistance en ligne », sur museedelaresistanceenligne.org (consulté le )
  6. https://www.fondationresistance.org/documents/cnrd/Doc00122.pdf
  7. « Medailles », sur Musée de l'Ordre de la Libération (consulté le )
  8. « Base des médaillés de la résistance - Mémoire des hommes », sur www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr (consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • La résistance dans le Jura, François Marcot, Cêtre
  • Paul Koepfler, Passeur et résistant, Marie-Claude Pelot, Cadébita
  • La ligne de démarcation, le Jura sous haute-tension 1940-1943, Marie-Claude Pelot, Cadébita
  • Le choix de la résistance, Histoires d'hommes et de femmes (1940-1944), Fabrice Grenard, PUF
  • Gestapistes et agents troubles, Franche-Comté et Bourgogne 1940-1945, Jean-Claude Bonnot, Cêtre

Liens externes[modifier | modifier le code]