Saïd Mohammedi

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Saïd Mohammedi
Saïd Mohammedi
Saïd Mohammedi (à gauche)
avec Amar Ouamrane, Mouloud Amrouche et Amirouche Ait Hamouda.

Surnom Si Nacer
Naissance
Larbaâ Nath Irathen (Algérie française)
Décès (à 81 ans)
13e arrondissement de Paris
Origine Algérienne
Allégeance Drapeau de l'Allemagne nazie Allemagne nazie (1941-1944)
Drapeau de l'Algérie FLN (1954-1962)
Arme Wehrmacht
Abwehr
ALN
Grade Lieutenant (Allemagne)
Colonel (Algérie)
Commandement Wilaya III
État-Major Général (EMG)
Conflits Seconde Guerre mondiale
Guerre d'Algérie
Faits d'armes Front yougoslave
Opération Rösselsprung (1944)
Sonderkommando Wimmer
Opération Oiseau bleu
Nombreuses opérations militaires en Wilaya 3 et à la frontière algéro-tunisienne
Distinctions Croix de fer 1re classe
Hommages Musée de mémoire de l'académie militaire interarmes de Cherchell baptisé en son nom (2005)
33e promotion de commandement et d'état-major, 36e promotion de formation fondamentale et 10e promotion de formation spéciale de l'académie militaire interarmes de Cherchell baptisées en son nom (2005)
Hommage de l'association Machaâl Echahid au centre d'El Moudjahid à Alger (2010)
Hommage au musée régional du Moudjahid de Medouha à Tizi-Ouzou (2016)
Autres fonctions Adjoint de Krim Belkacem en Zone 3 (1954-1956)
1er Colonel de la Wilaya 3 (1956)
Chef d'État Major de l'ALN (1957)
Chef d'État Major EST (Wilaya 1,2,3 et 4) (1958)
Ministre d'État du GPRA (1960-1962)
Membre du 1er Bureau Politique et Député de Tizi-Ouzou (1962-Septembre 1963)
2e vice-président du Conseil et Ministre des Anciens combattants et victimes de la guerre (1963-1965)
Membre du Conseil de la Révolution (1965-1968)

Saïd Mohammedi (connu aussi sous son nom de guerre Si Nacer), né le à Larbaâ Nath Irathen en Kabylie et mort le dans le 13e arrondissement de Paris[1], est un militaire et homme politique algérien.

Engagé volontaire dans la Wehrmacht pendant la Seconde Guerre mondiale, puis durant la Guerre d'Algérie colonel responsable de la Wilaya III promu chef d'état-major de l'ALN, il devient après l'indépendance de l'Algérie député, puis ministre et vice-président de la République.

Biographie[modifier | modifier le code]

Enfance et jeunesse[modifier | modifier le code]

Mohammedi Saïd nait le à Aït Frah, près de Fort-National (actuellement Larbaâ Nath Irathen) en Kabylie.

Militant de l'Étoile nord-africaine dès son adolescence puis au Parti du peuple algérien[2], il effectue son service militaire au sein de l'armée française en 1933 comme sous-officier[3] mais refuse de s'y engager comme instructeur ainsi que le lui proposaient ses supérieurs[4].

Engagement dans la Seconde guerre mondiale[modifier | modifier le code]

Pendant la Seconde Guerre mondiale, Saïd Mohammedi s'engage dans la Wehrmacht en 1941 à Stahnsdorf et prête serment avec le grade de Feldwebel au Kradschützen-Bataillon 4 (Panzerdivision) puis rejoint la Légion arabe libre à Zwettl en Autriche avant de servir au sein du Deutsch-arabisches Bataillon 845 pendant 6 semaines en Grèce[5].

Il est par la suite transféré à l'école d'agent de renseignement « Kloster » du haut commandement de la Wehrmacht (Oberkommando der Wehrmacht) à Belzig (Bad Belzig)[5] avant d'intégrer le Sonderkommando Wimmer, commando de choc de la Wehrmacht[6] fondé par le colonel Franz Wimmer-Lamquet (SS-Standartenführer), où il fut parachuté derrière les lignes ennemies dans de nombreuses opérations spéciales de l'Abwehr notamment en Afrique du Nord et sur le front yougoslave contre les partisans de Josep Broz Tito[5]. Le Sonderkommando Wimmer était directement subordonné à Adolf Hitler après la mort de Reinhard Heydrich[5] en juin 1942. Au cours d'un séjour à Berlin il est décoré de la Croix de fer de première classe[5].

Promu Oberleutnant (lieutenant) durant l'été 1944, il est envoyé par l'Abwehr avec cinq autres compagnons d'armes (Allemands et Algériens) en mission de renseignement et de sabotage en Algérie afin de créer un soulèvement nationaliste. Il est arrêté quelque temps après son parachutage dans la région de Tébessa[5]. De cet épisode, il gardera son Stahlhelm (casque allemand)[7] et ses armes qu'il avait confiés à des militants nationalistes algériens avant son arrestation, qui lui serviront pendant la guerre d'Algérie.

Il est jugé au tribunal de Constantine le . Condamné à mort, commué à perpétuité, il est interné dans la prison de Lambèse dans l'est algérien. Le colonel Franz Wimmer-Lamquet présente Said Mohammedi comme son meilleur agent dans son livre Balkenkreuz und Halbmond[8] et précise qu'en cas de succès il aurait été décoré par Hitler en personne[5]. De son côté, dans une lettre du à Wimmer-Lamquet, Said Mohammedi, rappelant l'importance des engagés arabes dans l'armée de l'Allemagne hitlérienne[9], précise que « de nombreux djounoud [combattants de l'ALN] qui combattaient avec l'Allemagne sont tombés au champ d'honneur au cours de notre guerre de libération. »[5]

Engagement dans la Guerre d'Algérie[modifier | modifier le code]

Après sa condamnation à mort commuée de 1944, il bénéficie d'une libération conditionnelle en 1952. Il prend alors contact avec des cadres de la zone III (future Wilaya III) dont Krim Belkacem et Amar Ouamrane avant de passer dans la clandestinité et de participer au déclenchement de la guerre de libération nationale sous le nom de guerre « Si Nacer »[2].

En 1956, il participe au congrès de la Soummam avec Krim Belkacem dont il est le premier adjoint, à l'issue duquel il devient 1er colonel et chef de la Wilaya III, avec comme adjoint les commandants Amirouche Ait Hamouda, Abderrahmane Mira et le commandant Kaci. Il devient également membre du CNRA.

Au printemps 1957, après que certains de ses hommes ont connu des reverts près d'un douar acquis au MNA (Mouvement national algérien), rival du FLN, il ordonne une action de représailles contre celui-ci. Cet épisode est connu sous le nom de massacre de Melouza au cours duquel sont abattus plus de 315 hommes, majoritairement des civils. Si son subordonné Abdelkader Barriki, selon plusieurs témoignages concordants, semble le principal responsable du massacre sur place[10], Saïd Mohammedi en revendiquera plus tard la responsabilité[11],[12].

Connu pour ses discours mobilisateurs, il organisa avec succès les troupes et leur inculqua la rigueur et l'esprit militaire, faisant de la Wilaya III la plus puissante et la mieux organisée des wilayas, fait qui lui vaudra d'être choisi par ses pairs pour rejoindre l'Académie des officiers supérieurs du Caire pour parfaire sa formation militaire supérieure. À la suite de cela, il fut nommé par le GPRA Chef d'État-Major. Il prit ainsi le commandement de l'ALN.

En 1957, il est nommé chef du Comité d'organisation militaire (COM) par le comité de coordination et d'exécution. Après une première réorganisation il s'occupe du COM Est, qui regroupait les représentants des Wilaya l, II, III et une partie de la IV. Lors d'une deuxième réorganisation du COM, il est nommé ministre d'État du GPRA, jusqu'à l'indépendance de l'Algérie.

Dans l'Algérie indépendante[modifier | modifier le code]

Il est élu membre du Bureau politique au congrès de Tripoli, chargé du secteur de l'Éducation et de la Santé publique. Député de Tizi Ouzou le , il est nommé vice-président de la République[13] ministre des Anciens combattants et des victimes de la guerre. Le , il devient 2e vice-président du Conseil, et membre du Comité Central et du Bureau Politique du FLN le . Toujours député, il est écarté par Ben Bella ; il perd son poste ministériel lors du remaniement du , à la suite de son opposition au pouvoir personnel de Ben Bella qui se met en place progressivement. Il appela à rendre la parole au peuple et à des élections libres.

En 1965, il devient membre du Conseil de la Révolution, après le coup d'état de Houari Boumediene. En 1967, lors de la commémoration de la mort d'Amirouche Aït Hamouda au village de Tassaft Ouguemoun, il donne un dernier meeting dans lequel il dénonce la politique autocratique de Boumediene, qu'il qualifie de despote dictateur ; ce dernier l'assigne en résidence surveillée pendant trois ans.

À la fin des années 1980, il apporte son entier soutien au Front islamique du salut. Au sein du F.L.N. et du premier gouvernement de l'Algérie, il penchait déjà pour un retour aux mœurs et règles islamiques[13]. En 1991, dans le documentaire Les Années algériennes, Said Mohammedi justifie le massacre de Melouza[12].

À l'automne 1994, peu avant son décès, alors qu'il était déjà malade et hospitalisé à l'hôpital militaire d'Aïn Naâdja à Alger, son ancien chef de cabinet Chérif Abtroun rapporte dans son livre que les responsables du pays, au plus haut niveau, avaient sollicité Said Mohammedi pour la recherche d'une solution d'apaisement, ce dernier les exhorta à « continuer d’œuvrer dans le bon sens pour rétablir la concorde et le pardon entre les enfants de notre chère patrie »[2].

En octobre 1994, alors qu'il souffrait d'une pathologie pulmonaire, ses médecins ainsi que certains hauts cadres de l'Etat lui suggéraient un transfert vers l'hôpital parisien de la Pitié-Salpêtrière, avec lequel des conventions existaient. Il refusa catégoriquement dans un premier temps[2]. Le mois suivant, son état se dégrada sévèrement et sous la pression familiale, il finit par s'y rendre[2].

Il décède le 5 décembre 1994 à Paris.

Publication[modifier | modifier le code]

  • L'islam porte en lui le socialisme, Le Caire, Dar El Watani, Sd., 59 p. (en français) et 52 p. (en arabe)[3].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Relevé des fichiers de l'Insee
  2. a b c d et e Abtroun, Chérif, 1938-, Si Nasser (Mohammedi Saı̈d, , 181 p. (ISBN 978-9947-62-127-1 et 9947-62-127-8, OCLC 973222740, présentation en ligne)
  3. a et b Jean Déjeux, Dictionnaire des auteurs maghrébins de langue française, éd. Karthala, Paris, 1984.
  4. Cf. le livre d'Abtroun (son chef cabinet) p. 13.
  5. a b c d e f g et h Wimmer-Lamquet, Franz., Balkenkreuz und Halbmond : als Abwehroffizier in Afrika und im Vorderen Orient, Ares, (ISBN 3-902475-18-8 et 978-3-902475-18-3, OCLC 70840679, lire en ligne).
  6. Mahé, Yann, 1980-...., Le règne des Brandebourgeois, vol. 1, Aix-en-Provence, Caraktère presse & éditions, dl 2019, 183 p. (ISBN 978-2-916403-22-9 et 2-916403-22-1, OCLC 1135249594, présentation en ligne)
  7. Si Mohammedi Saïd (1912-1994) sur Hoggar.org, 31 décembre 2009.
  8. (de) Wimmer-Lamquet, Balkenkreuz und Halbmond als Abwehroffizier in Afrika und im Vorderen Orient, Ares, 2006, 199 pp.
  9. Rémi Kauffer et Roger Faligot, Le Croissant et la Croix gammée, Albin Michel, 1990, p. 110.
  10. Philippe Gaillard, L'Alliance : la guerre d'Algérie du général Bellounis, 1957-1958, L'Harmattan, (ISBN 978-2-296-07932-8 et 2-296-07932-6, OCLC 318664823, lire en ligne)
  11. France Inter, Le massacre de Melouza : manipulations et mensonges, 23 mars 2013 (aveu de Saïd Mohammedi à partir de 13'39).
  12. a et b Benjamin Stora, Philippe Alfonsi, Bernard Favre et Patrick Pesnot, Les années algériennes, Ina/France 2/Nouvel Observateur, 1991, 3 films de 52 min, deuxième partie : Les tricheurs (en ligne : site de B. Stora et vidéo Les tricheurs sur Archive). — Présentation du massacre de Melouza par Vidal-Naquet à 27:50 et 28:10/27. — Aveu de Saïd Mohammedi à 28:54 (30:00: « il fallait en finir ») et 34:12 (« c'était des traitres... c'était un devoir sacré ») jusqu'à 29:58.
  13. a et b Maurice Borrmans, Statut personnel et famille au Maghreb de 1940 à nos jours, éd. Walter de Gruyter, 2019, p. 501.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Wimmer-Lamquet, Franz., Balkenkreuz und Halbmond : als Abwehroffizier in Afrika und im Vorderen Orient, Ares, 2005
  • Abtroun, Chérif, 1938-, Si Nacer (Mohammedi Said), Casbah-Editions, Alger, 2016
  • Benjamin Stora, Dictionnaire biographique de militants nationalistes algériens : E.N.A, P.P.A., M.T.L.D., 1926-1954, Paris, Harmattan, (ISBN 978-2-296-34093-0, présentation en ligne)
  • Jean-Louis Gérard, Dictionnaire historique et biographique de la guerre d'Algérie, Hélette, Curutchet, , 206 p. (ISBN 978-2-912932-27-3)
  • Achour Cheurfi, La révolution algérienne, 1954-1962 : dictionnaire biographique, Alger, Casbah éditions, , 495 p. (ISBN 978-9961-64-478-2)

Filmographie[modifier | modifier le code]

  • Benjamin Stora, Philippe Alfonsi, Bernard Favre et Patrick Pesnot, Les années algériennes, Ina/France 2/Nouvel Observateur, 1991, 3 films de 52 min, deuxième partie : Les tricheurs (en ligne : site de B. Stora et vidéo Les tricheurs sur Archive). — Présentation du massacre de Melouza par Vidal-Naquet à 27:50 et 28:10/27. — Aveu de Saïd Mohammedi à 28:54 (30:00: « il fallait en finir ») et 34:12 (« c'était des traitres... c'était un devoir sacré ») jusqu'à 29:58.

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]