Manchot

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Manchot [mɑ̃ʃo] est un nom vernaculaire désignant en français des oiseaux marins de l'hémisphère austral, incapables de voler à cause de leur adaptation à la vie aquatique. Ce terme désigne spécifiquement plusieurs espèces de la famille des Spheniscidae à laquelle appartiennent aussi les gorfous ou « manchots à aigrettes ».

Les ailes des manchots, devenues inutilisables pour le vol, se seraient, par contre, merveilleusement adaptées à la nage et à la plongée : le manchot papou peut atteindre 35 km/h à la nage (contre 9 km/h pour le meilleur nageur olympique) et le manchot empereur peut plonger à plus de 520 m pour rechercher de la nourriture, soit le record absolu chez tous les oiseaux.

Le cri des manchots est appelé braiement ou jabotement.

Les différentes espèces de manchots sont souvent appelées par confusion « pingouins » dans le langage courant, à la fois à cause d'une ressemblance physique et à cause d'une ressemblance lexicale entre ce mot et la racine désignant le manchot dans la plupart des langues voisines du français[1].

Terminologie

Deux manchots adultes encadrant leur petit
Manchot empereur (Aptenodytes forsteri).

On confond souvent les termes « manchot » et « pingouin », en raison des légères ressemblances physiques de ces oiseaux, et de la traduction anglaise penguin[2]. Cependant ces deux sortes d'oiseaux n'ont aucune parenté proche : le manchot appartient aux sphéniscidés, tandis que le pingouin appartient aux alcidés. En outre, le manchot vit dans l'hémisphère sud, tandis que le pingouin se rencontre dans l'hémisphère nord, jusqu'en Bretagne et en Afrique du Nord. Enfin, contrairement au manchot, le pingouin sait voler.

Le terme de « manchot » est spécifique à la langue française. Il serait dû à l'ornithologue Brisson qui utilisa le latin mancus (estropié) en référence à leurs ailes réduites[3]. La confusion entre pingouin et manchot, fréquente dans l’esprit du grand public, est en partie la conséquence de mauvaises traductions en français de documents, de livres ou de films étrangers. Ainsi, donc, le mot anglais penguin qui désigne le manchot (ou un gorfou) est souvent traduit à tort par pingouin, (alors que pingouin se traduit en anglais par auk ou plus précisément razorbill pour le petit pingouin). Et le risque d’erreur de traduction vers le français existe aussi depuis la plupart des langues européennes qui utilisent des mots similaires à l’anglais penguin pour désigner un manchot. Notons aussi que les premiers explorateurs et voyageurs francophones de l’hémisphère sud, qui n’avaient pas conscience que ces oiseaux n’étaient pas apparentés aux pingouins de l’hémisphère nord, utilisèrent donc longtemps le terme de pingouin avant l’instauration du terme manchot, pour désigner ces oiseaux. Même le commandant Jean-Baptiste Charcot, dans son journal de l'Expédition antarctique française (1903-1905) préfère encore désigner les sphéniscidés sous le nom de pingouins[4]. Anatole France s'en amuse dans la préface de son roman satirique L'Île des Pingouins[5]. Mais l'Académie des sciences, lors d'un vote certes très serré (à une voix près), a préféré le nom de manchot à celui de pingouin pour ces sphéniscidés, et c’est donc le premier terme qui est utilisé depuis par les ornithologues.

Caractéristiques

Les manchots ne constituent pas un taxon de la classification classique des êtres vivants, c’est-à-dire un groupe homogène d'espèces partageant un patrimoine commun caractéristique.

Cependant, un certain nombre d'aspects sont communs aux manchots :

  • les ailes des manchots, devenues inutilisables pour le vol, sont adaptées à la nage et à la plongée ;
  • les manchots vivent tous dans l'hémisphère austral ;
  • les manchots se nourrissent principalement du fruit de leur chasse en mer et avant tout de krill antarctique ou Euphausia superba ;

Les manchots doivent revenir, à terre ou sur la banquise, dans leur colonie appelée rookerie, pour s'occuper de leurs jeunes. Ils sont célèbres pour leurs exploits en matière d'endurance : le Manchot empereur élève ses poussins en plein Antarctique, dans des conditions parfois extrêmes – températures hivernales inférieures à moins 60 °C et vents avoisinant 200 km/h ! Pendant deux mois, le mâle jeûne, avec pour seul devoir, celui de couver les œufs, qu'il doit maintenir en équilibre au dos de ses pattes pour les isoler de la banquise de glace.

Les manchots Adélie sont moins célèbres pour leurs penchants sexuels extrêmes, car George Murray Levick a autocensuré les découvertes qu'il fit sur ce sujet, lors du séjour de l'expédition Scott dans l'Antarctique de 1910 à 1913[6],[7]. Levick, qui est à ce jour le seul scientifique à avoir étudié le cycle complet de reproduction des manchots, a constaté que ces animaux, pendant la période de reproduction, s'accouplent avec tout ce qu'ils trouvent : de la femelle décédée jusqu'au poussin qu'ils finissent souvent par tuer.

Dix-huit espèces de l'Antarctique à l'Équateur

En dépit du fait que les manchots soient communément associés à l'Antarctique, ces manchots se retrouvent dans nombre d'habitats variés de l'hémisphère austral. Dix-huit espèces différentes de manchots habiteraient dans des régions allant de l'Antarctique à l'Équateur :

Rappelons que la vitesse de nage des petits poissons (et du krill, mets usuel du manchot) double pour une élévation de température de l'eau de °C à 15 °C, sans que l'oiseau pêcheur voie sa propre vitesse croître.

Aptenodytes

Ce genre compte deux espèces :

Eudyptula

Ce genre compte une espèce dont une sous-espèce de celle-ci :

Megadyptes

Ce genre compte une espèce :

Pygoscelis

Ce genre compte trois espèces :

Spheniscus

Ce genre compte quatre espèces :

Le manchot et l'homme

Statut de conservation

Au début du XXe siècle, le guano, dans lequel les manchots dissimulent leurs œufs, a été tellement surexploité que les femelles furent obligées de pondre à même le sol, ce dont surent profiter les charognards[réf. nécessaire]. Les manchots forment un groupe très menacé. Selon l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), autorité mondiale en matière d'espèces menacées :

  • 11 des 18 espèces sont sur le déclin et seraient menacées de disparition ;
  • deux espèces seraient considérées comme « stables » ;
  • l'état des 5 autres populations n'est pas connu.

Changement climatique

Si le continent Antarctique se réchauffe dans son ensemble, le réchauffement y est le plus rapide de l'hémisphère austral, dans la péninsule Antarctique – la plus au nord et qui pointe vers l'Amérique du Sud. La banquise à l'ouest de cette péninsule rétrécit et la durée de la prise de la mer en glaces est raccourcie.

  • Le Manchot empereur élève ses poussins sur la partie gelée de la mer fixée à la terre. Si la mer gelée se brise avant que les poussins aient atteint une maturité suffisante avec des ailes imperméables à l'eau, ces derniers, balayés dans l'océan, y périssent presque à coup sûr. Pour l'adulte, la perte d'étendue de mer gelée équivaut à une moindre disponibilité de nourriture avec plus grande mortalité.
  • Le Manchot Adélie, bien qu'il n'élève pas ses poussins sur la mer gelée (nids de galets aux endroits de la côte Antarctique où la glace est absente) est aussi affecté par le changement climatique.

Tous deux auraient sans doute un avenir très sombre en cas de changement global du climat.

Le réchauffement océanique conduirait aussi au déclin l'autre population de manchots habitant les régions sub-antarctiques par le biais d'une raréfaction des sources de nourriture.

Après le passage de El Niño en 1982-1983 et en 1997-1998, la population de manchots des Galapagos a baissé de 77 %, puis de 65 % avec une population de moins de 2 000 individus, la plus faible parmi les manchots en 2010.

Autres menaces

À côté du changement climatique global, la pollution par émissions de gaz à effet de serre serait la cause :

  • de l'élévation du niveau de la mer (noyade de nids côtiers) ;
  • de l'acidification des océans (réduction du taux d'ions carbonate utilisés par le plancton, les coraux et surtout les crustacés, et en ce qui nous concerne ici krill antarctique, nourriture principale du manchot).

Le manchot dans la culture

Cinéma

Littérature

Andreï Kourkov, Le Pingouin ('Смерть постороннего' [Smert' postoronnevo], "La mort d'un intrus", 1996, titre russe actuel Пикник на льду, "Pique-nique sur la glace" ; Liana Levi, 2000 pour la traduction française)[8]. Un Kiévien qui a adopté un manchot quand le zoo de Kiev s'est dessaisi, faute de moyens, de certains de ses animaux, se trouve involontairement plongé, sous l'œil attentif et placide de son volatile, dans d'étranges aventures liées aux mafias.

Télévision

Bande dessinée

Informatique

Notes et références

  1. pinguïn en néerlandais, pingüino en espagnol, pinguin en allemand, pinguino en italien, penguin en anglais, Пингвин (pingvin) en russe, ou encore pingüim en portugais
  2. « penguin », Encyclopedia Britannica, 11th Edition (consulté le )
  3. Informations lexicographiques et étymologiques de « Manchot » (sens 1) dans le Trésor de la langue française informatisé, sur le site du Centre national de ressources textuelles et lexicales
  4. "Nous avons conservé dans ce journal le nom de Pingouin qui est le vrai nom de ces Oiseaux qui furent appelés Pinguinos par les navigateurs espagnols du XVIIe siècle. Il n'y a qu'en français que l'on appelle à tort Pingouins des Oiseaux tout à fait dissemblables du Nord en désignant souvent ceux du Sud, les seuls vraie Pingouins, du nom de manchots" Expédition antarctique française (1903-1905) commandée par le Dr Jean Charcot. Journal de l'expédition--1906,(p. 6 note 2)
  5. "Eh bien ! que ses manchots deviennent ou redeviennent pingouins, c'est à quoi il faut consentir. En les faisant connaître il s'est acquis le droit de les nommer. Du moins qu'il permette aux pingouins septentrionaux de rester pingouins. Il y aura les pingouins du Sud et ceux du Nord, les antarctiques et les arctiques, les alcidés ou vieux pingouins et les sphéniscidés ou anciens manchots" Anatole France, L’Île des Pingouins, cité par Diacritiques
  6. Louise Cuneo, « La vie sexuelle cachée des manchots pervers dépravés », Le Point, (consulté le )
  7. Robin McKie, « 'Sexual depravity' of penguins that Antarctic scientist dared not reveal », The Guardian, (consulté le )
  8. Il est à diverses reprises spécifié dans l'ouvrage qu'il s'agit d'un manchot.

Voir aussi

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