École nationale supérieure d'agronomie de Grignon

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École nationale supérieure d'agronomie de Grignon
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L'École nationale supérieure agronomique de Grignon est une école fondée en 1826 qui a été successivement institution royale, école régionale, puis école nationale. La vocation est restée inchangée : former des spécialistes en sciences agronomiques. Le diplôme qu'elle délivre se voit accorder le titre d'ingénieur en 1908. L'école est ensuite intégrée au sein de l'Institut national agronomique Paris-Grignon (INA P-G) en 1971, qui devient « AgroParisTech » en 2007. C'est la plus ancienne des écoles d'agronomie françaises.

Historique[modifier | modifier le code]

Institution royale agronomique de Grignon (1827 - 1848)[modifier | modifier le code]

Le château de Grignon vers 1860.

L'Institution royale agronomique de Grignon a été fondée en 1826 [1] par le roi Charles X[2] à la demande de la Société royale agronomique. Elle est située à Grignon, dans le parc de 500 hectares et le château construit en 1636 par Nicolas de Bellièvre, marquis de Grignon et seigneur de Neauphle.

Cette société, fondée par des grands propriétaires et des savants pour diffuser des connaissances scientifiques, recherchait un site à proximité de Paris avec un grand domaine agricole, pour mener à bien des recherches sur les cultures.

En 1826, le roi Charles X, achète le domaine de Grignon à la veuve du maréchal d'Empire Bessières[3] et en confie le bail pour quarante années à la Société royale agronomique[1] qui y créé l'Institution royale, par ordonnance royale du 23 mai 1827[4].

C'est une école d'agriculture et agronomie qui reçoit ses premiers élèves en 1828 et le premier directeur est Auguste Bella [1].

École d'agriculture régionale, impériale puis nationale (1848 - 1960)[modifier | modifier le code]

L'école régionale d'agriculture (1848 - 1852)[modifier | modifier le code]

À la suite de la loi du 3 octobre 1848 organisant l'enseignement agricole en France, l'école passe sous le contrôle de l'État[5]. Elle devient école régionale d'agriculture au même titre que celle de Grandjouan à Nozay et de l'Institut de la Saulsaie dans l'Ain. Elle obtient alors le titre d'école régionale[1].

L'école impériale d'agriculture (1852 - 1870)[modifier | modifier le code]

Bœuf Durham Schwitz Normand.

Avec le changement de régime politique, ces trois écoles deviennent écoles impériales en 1852[4]. L’État, qui obtient la direction complète de l'établissement en 1866, à l'expiration du bail.

En 1859, l'école est composée, autour du château et des communs, de différents bâtiments tels que la ferme, divisée en deux cours. Il y a aussi une écurie qui abrite vingt juments (percheronne, normande, bretonne, boulonnaise, suffolk, cleveland) et des chevaux hongres. Une bouverie abrite dix bêtes de race schwitz, durham et limousine. La vacherie quant à elle abrite cent bêtes (schwitz, durham, normande et bretonne), dont le principal but est la production de lait. La porcherie abrite quarante truies mères et quatre verrats, de race anglaise (hampshire et berkshire) et sont à Grignon depuis l'origine de l'établissement. Il y a également une bergerie, une basse-cour de trois-cent volailles et une magnanerie pour l'élevage des vers à soie. Une partie de la cour sert de plate-forme à fumier. L'école comprend également une fabrique d'instruments aratoires qui conçoit des charrues, des herses, des bineurs etc. Ainsi qu'un hangar pour la fabrication des tuyaux de drainage construit par M. Grandvoisin, professeur de génie rural. Pour finir, l'ensemble comporte également des silos creusés dans le sable pour conserver les racines, des jardins potagers, des jardins d'étude avec des collections de plantes, une féculerie, une distillerie de betteraves et un magasin pour vendre les outils de la fabrique[6].

Les différents espaces de l'école

La Société agronomique est toujours chargée de l'exploitation du domaine, mais, le bail étant arrivé à terme, la Société agronomique est peu disposée à le renouveler. Pourtant, la fabrique d'instruments agricoles est en pleine prospérité. La fin de parution des Annales de Grignon en 1855 rend les données plus irrégulières, concernant les résultats de l'exploitation, mais les résultats montrent de bons rendements. L'idée est donc proposée d'organiser entre les anciens élèves une nouvelle société agronomique, par actions, pour l'exploitation du domaine, en remplacement de la société agronomique d'origine, tout en laissant l'instruction agricole aux mains du gouvernement[7].

L'école nationale d'agriculture à partir de 1870[modifier | modifier le code]

Portail d'entrée de l'école nationale d'agriculture.

À la fin du Second Empire, en 1870, l'établissement devient une des trois écoles nationales d'agriculture[8] ; délivrant un diplôme d'ingénieur agricole[9].

Avec la loi du , le concours d'entrée devient commun avec les deux autres établissement : l'École nationale d'agriculture de Montpellier qui est la continuité de l'école de la Saulsaie, et l'École nationale d'agriculture de Rennes, qui est la continuité de l'école de Grandjouan[10].

L'école durant les deux guerres mondiales[modifier | modifier le code]

Tout comme d'autres écoles, l'établissement sert de rééducation après les blessures de guerre pour les « mutilés » de la Grande guerre.

Durant la Seconde Guerre mondiale, l'école abrite l’état-major d’un groupe de résistants rattaché au réseau Prosper-PHYSICIAN.

École nationale supérieure d'agronomie à partir de 1960[modifier | modifier le code]

Machinerie de l'école.

La loi d'orientation agricole du réformant l'Enseignement supérieur agricole supprime le diplôme d'ingénieur agricole[10]. L'établissement devient l'École nationale supérieure d'agronomie de Grignon délivrant un diplôme d'ingénieur agronome. Avec le décret du , le concours d'admission devient commun à Grignon et aux autres Écoles nationales supérieures agronomiques[10]. L'école est une école nationale supérieure agronomique.

L'école nationale d'agronomie.

Rattachement à l'institut national agronomique Paris-Grignon[modifier | modifier le code]

En 1971, l'école fusionne en avec l’Institut national agronomique pour former l'Institut national agronomique Paris-Grignon (INA P-G). Le , par fusion avec l'ENGREF et l'ENSIA, elle est devenue AgroParisTech : l'Institut des sciences et industries du vivant et de l'environnement.

Vente des bâtiments[modifier | modifier le code]

Le château de Grignon.
Château de Grignon.

Au printemps 2014, le ministère de l'Agriculture prévoit de mettre en vente une partie du site de Grignon, dans la perspective du déménagement d'AgroParisTech sur le plateau de Saclay. Fin 2015, le club de foot Paris Saint-Germain se déclare intéressé par le rachat d'une partie du domaine pour en faire son camp d'entrainement[11]. Cette annonce suscite plusieurs oppositions[12] en raison du patrimoine géologique et écologique du site[13]. En 2018, le ministère met en vente les 310 hectares du site[14]. Les candidats au rachat du site déposent leur offre auprès de l'État pour le mois de [15], les offres finales et chiffrées devant être faites pour la fin de la même année[16]. En mars 2021, un collectif d'étudiants de l'École occupe les lieux, demandant que le projet le plus respectueux du domaine soit retenu par le gouvernement, et qu'il ne soit pas livré aux promoteurs immobiliers[17]. En août 2021, l'État retient l'offre du promoteur immobilier Altarea Cogedim[18]. Ce choix suscite des oppositions du projet concurrent Grignon 2026, d'élus locaux et d'anciens élèves[19]. En septembre 2021, la communauté de communes Cœur-d'Yvelines (31 communes) dépose un recours gracieux auprès de l'État pour annuler la vente[20]. En novembre 2021, la préfecture des Yvelines annonce l'abandon de la vente au promoteur et le lancement d'une nouvelle procédure de cession au second semestre 2022[21].

Enseignements[modifier | modifier le code]

Témoignage d'un ancien élève[modifier | modifier le code]

Le témoignage coloré de Jean-Pierre Boyer, qui fréquenta l'école entre 1946 et 1949, permet de se faire une idée du contenu des enseignements dispensés dans les années 1950[22] :

« À Grignon, on ne nous avait parlé que de variétés de blé, d'endives ou de poires, ce qui m'avait passablement rasé ! On nous avait parlé des bonnes laitières et du bon foin, ce qui m'avait laissé également indifférent. Les exposés auxquels j'avais eu droit sur les pigments anthocyaniques ne m'avaient guère non plus beaucoup passionné ! Les cours de bioclimatologie me paraissaient aussi assez fumeux ! Seuls, les cours de maths m'avaient vraiment intéressé. Il n'y avait pas de cours de philo, ni de cours de géographie agricole. Quant aux cours de zootechnie, ils ne faisaient jamais appel à la génétique. Toute la génétique qui était enseignée concernait le monde végétal. Exception faite de quelques considérations sur la drosophile ! »

Des cours pratiques[modifier | modifier le code]

Professeurs[modifier | modifier le code]

Quelques uns des professeurs qui ont exercé à l'école de Grignon :

  • M. Briaune, principal puis professeur d'économie rurale (1830 - 1838)
  • M. Philippar, professeur d'horticulture et botanique (années 1830)
  • M. Heuzé, professeur d'agriculture (1849-1868)
  • M. Pouriau, docteur es sciences, sous directeur et professeur de géologie et météorologie (1867)
  • M. Velter, ingénieur de l'Ecole centrale, répétiteur en géologie et météorologie (1867)
  • M. Dehérain, docteur es sciences, chargé du cours de chimie agricole (1867)
  • M. Grandvoinnet, ingénieur, professeur de génie rural (1867)
  • M. Gobin, professeur de zootechnie (1867)
  • M. Reinbold, chef jardinier (1867)
  • M. Henrion, répétiteur d'économie rurale (1867)

Anciens élèves[modifier | modifier le code]

Par ailleurs, l'école a reçu de nombreux étudiants internationaux. Dans l'ouvrage décrivant le pavillon de Grignon à l'exposition universelle de 1867, une carte indique la répartition des anciens élèves par pays. Un très grand nombre de contrées sont représentés entre l'Europe et l'Amérique. En considérant les effectifs les plus importants : vingt-deux anciens élèves sont autrichiens, vingt-quatre sont russes, vingt-deux sont turcs, vingt et un sont anglais, quatorze algériens, treize belges, treize brésiliens, onze espagnols et onze prussiens[24]. Dans un article paru dans le Journal d'agriculture pratique en 1896 sur les taux de réussite aux examens de fin d'étude, parmi les lauréats, on peut compter des étudiants venant de l'Angleterre, la Turquie, l'île Maurice, l'île de la Réunion, ou encore le Portugal[25].

D'après les études statistiques, l'école formait en partie des agriculteurs et en partie des fonctionnaires et des employés. Parmi les promotions 1886-1895, 45 % des anciens élèves ont travaillé pour l'administration ou l'enseignement agricole, dans les industries ou bien devenaient chefs de culture, tandis que 54 % travaillaient ensuite pour leur compte en tant qu'agriculteurs (44 %) ou dans la filières de l'industrie laitière, du commerce de produits agricoles. Cette proportion se renforce pour les promotions 1896-1905, car c'est alors 60 % des élèves qui travaillent à leur compte, dont la moitié en tant qu'agriculteurs, contre 40 % qui sont fonctionnaires ou employés[26].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c et d Léon Dabat 1904, p. 161 à 194.
  2. Thérèse Charmasson et Anne-Marie Lelorrain 1992, p. 25.
  3. Didier Rykner, « Grignon : comment l'État abandonne un domaine national », sur La Tribune de l'Art, (consulté le )
  4. a et b « Institution royale agronomique de Grignon (1827-1848) », sur IDREF
  5. Loi du 3 octobre 1948 organisant l'enseignement agricole.
  6. Guide du visiteur à Grignon : historique de la fondation de l'institut agronomique, Versailles, Beau Jeune, (BNF 33411424), p. 13 - 24.
  7. Lucien Brétignière et L. Risch 1910, p. 139-140.
  8. Lucien Brétignière et L. Risch 1910, p. 149.
  9. « Grignon, patrimoine en danger », Valeurs vertes, no 139,‎ , p. 10 (lire en ligne)
  10. a b et c « 1842-2006 : 164 ans d'histoire à grands traits », site de Montpellier SupAgro.
  11. « Le château de Thiverval-Grignon, dans le viseur du PSG, estimé à 34 millions d’euros », sur Capital.fr, (consulté le )
  12. « Centre d'entraînement du PSG à Grignon? "Un gâchis énorme", selon ses détracteurs », sur Challenges (consulté le )
  13. Par Yves Fossey Le 2 mai 2017 à 20h20, « Thiverval-Grignon : l’avenir incertain du domaine un temps convoité par le PSG », sur leparisien.fr, (consulté le )
  14. Par Jérémy Denoyer Le 26 février 2018 à 19h54, « Thiverval-Grignon : le site d’AgroParisTech est officiellement à vendre », sur leparisien.fr, (consulté le )
  15. « Yvelines. Thiverval-Grignon : les candidats au rachat du domaine de Grignon ont déposé leur dossier », sur actu.fr, (consulté le )
  16. « Yvelines. Thiverval-Grignon : une association retenue parmi les candidats au rachat du domaine de Grignon », sur actu.fr, (consulté le )
  17. Les étudiants de l’Agro défendent le domaine de Grignon
  18. Delphine Evenou, « Le berceau de l'agronomie française en passe d'être vendu. Et ça suscite la polémique », sur www.franceinter.fr, (consulté le )
  19. « La vente du site pédagogique et agricole de Grignon rencontre une vive opposition », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  20. « Thiverval-Grignon : des élus locaux demandent à l'Etat de revoir sa copie », sur Les Echos, (consulté le )
  21. Magazine Marianne, « AgroParisTech : l'État interrompt la privatisation du domaine de Grignon », sur www.marianne.net, 2021-11-15utc16:44:48+0100 (consulté le )
  22. Collectif, Archorales INRA Tome 8 - Les Métiers de la Recherche : Témoignages, INRA, 2002 [lire en ligne]
  23. « Jean-Jules Bodin (notice) », sur IdRef
  24. Exposition universelle de 1867 : pavillon de Grignon (angle sud-ouest du parc) (catalogue des expositions de l'Association amicale des anciens élèves de Grignon), Paris, Imprimerie Dubuisson, (BNF 33384958), p. 29
  25. « École nationale d’agriculture de Grignon », Journal d’agriculture pratique, Paris, Librairie agricole de la maison rustique, vol. 1,‎ janvier à juin 1896, p. 487 (lire en ligne).
  26. Lucien Brétignière et L. Risch 1910, p. 230 tableau statistique des professions exercées.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Jean Boulaine et Jean-Paul Legros, D’Olivier de Serres à René Dumont, portraits d’agronomes, Lavoisier Tec et doc, (BNF 36998560)
  • Lucien Brétignière et L. Risch, Histoire de Grignon, Châteauroux, Impr. de Langlois, (BNF 34117392, lire en ligne)
  • Thérèse Charmasson (dir.) et Anne-Marie Lelorrain (dir.), L'enseignement agricole et vétérinaire de la Révolution à la Libération : textes officiels avec introduction, notes et annexes, Paris, Institut national de recherche pédagogique : Publications de la Sorbonne, (BNF 36655851, lire en ligne)
  • Léon Dabat, Ministère du Commerce, de l'industrie, des postes et des télégraphes. Exposition universelle internationale de 1900, à Paris. Rapports du jury international. Classe 5. Enseignement spécial agricole., Paris, Imprimerie nationale, , 651 p. (BNF 30294202, lire en ligne), p. 161-194
  • Françoise Delfour, L'École d'agriculture de Grignon, de 1867 à 1918 (thèse de doctorat - École nationale des chartes), (présentation en ligne)
  • Françoise Delfour, « Ramener vers l’agriculture des intelligences : l’école d’agriculture de Grignon et ses élèves, 1826-1918 », Actes des congrès nationaux des sociétés historiques et scientifiques « Formation au travail, enseignement technique et apprentissage. Actes du 127e Congrès national des sociétés historiques et scientifiques, « Le travail et les hommes », Nancy, 2002 », nos 127-5,‎ , p. 281-290 (lire en ligne)
  • René Doligé (dir.), Pierre Joly (dir.) et Jean Renaud (dir.), Grignon, de l'Institution Royale à l'INA-PG, deux siècles d'agronomie (ouvrage collectif), Paris, Editagro, , 333 p. (BNF 35814638, présentation en ligne)

Article connexe[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]