Colombophilie

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Colombophilie
Fédération internationale Fédération colombophile internationale[1] (FCI), Bruxelles
Pratiquants 12 500 (France)
Image illustrative de l’article Colombophilie
Vol de pigeons en cercle avant qu'ils soient appelés par leurs propriétaires pour la soirée.

La colombophilie est l'art d'élever et de faire concourir les pigeons voyageurs.

C'est aussi un « sport ». Il y a de moins en moins de colombophiles, ce qui pose le problème du renouvellement générationnel. Ce sport organise des concours locaux, régionaux, nationaux et internationaux via la Fédération colombophile internationale, dont le siège est à Bruxelles, et des fédérations nationales.

Présentation[modifier | modifier le code]

Objet[modifier | modifier le code]

Un colombophile de l'Allemagne de l'Est en 1980.

La colombophilie est le fait d'élever des pigeons voyageurs et de les faire concourir. Pour avoir une bonne colonie et faire de bons prix, il faut sélectionner ses pigeons sur plusieurs années et garder les pigeons qui font le plus de prix.

La période des concours varie en fonction des régions (19 en France ; auparavant 21, mais 2 ont fusionné), généralement d'avril à août. Les concours se déroulent tous les week-ends, le samedi pour les concours de fond et de grand fond et le dimanche pour ceux de vitesse et demi-fond.

Les bagues[modifier | modifier le code]

Photo d'un pigeon voyageur
Un pigeon voyageur bagué.

Un pigeon possède une bague dite « matricule » qui lui est placée à la patte dès la naissance (entre 8 et 10 jours) et équivaut à sa carte d'identité. De couleur différente chaque année, cette bague est associée à un carton d'immatriculation que le propriétaire doit garder précieusement.

Outre la bague dite « matricule », l'animal doit aussi être muni d'une bague indiquant soit l'adresse de son propriétaire (ou de la société colombophile à laquelle ce dernier est sociétaire), avec le numéro de téléphone, soit simplement celui-ci. Cette dernière bague peut être remplacée par une bague électronique si le colombophile dispose d'un constateur électronique, et sur cette bague doit figurer une adresse ou un numéro de téléphone. Cette bague adresse est obligatoire en France. Tout pigeon participant à un concours doit posséder cette bague « adresse ».

Construite avec des matériaux à la fois solides et légers, elle porte un numéro et, perpendiculairement à celui-ci, l’année d’émission. Une fois disposée autour du tarsométatarse de l’oiseau, la bague ne peut plus être retirée autrement qu’avec une pince adéquate.

Chaque fois que le pigeon est cédé, le titre de propriété correspondant au numéro de bague du pigeon doit être simultanément livré au nouveau propriétaire. Détenir des pigeons bagués sans posséder les titres de propriété appropriés est interdit en France[2].

Déroulement d'un concours[modifier | modifier le code]

Lâcher de pigeons en 1897.

Pour les concours de vitesse et demi-fond, l’enlogement (fait de mettre ses pigeons dans des paniers en vue des concours), a lieu le samedi matin.

Les pigeons sont amenés au local de la société. Une fois que tous les colombophiles sont arrivés, l'enlogement peut commencer. Les numéros matricules de chaque pigeon de chaque colombophile sont énoncés et marqués sur une feuille dite « d'enlogement ». Ensuite, les pigeons sont munis d'une troisième bague, en caoutchouc celle-là. Cette bague est mise par-dessus l'une des deux bagues déjà présentes. Ensuite, ces pigeons sont mis dans des paniers (plombés) qui sont eux-mêmes mis dans un camion qui les emmène au point de lâcher. Pour les colombophiles qui sont à l'électronique, la bague électronique est passée au-dessus du « systemclub »[Quoi ?] qui est lui-même relié au constateur du colombophile. La suite est la même que pour l'enlogement manuel.

Le lendemain matin, les pigeons sont lâchés ; le premier est celui qui revient le plus vite possible à son colombier. Pour finir, les colombophiles retournent au local de la société pour procéder au dépouillement des constateurs.

Le déroulement est le même pour les concours de fond et demi-fond, sauf que l'enlogement s'effectue le mercredi et/ou le jeudi.

Les courses à colombier unique[modifier | modifier le code]

Dans la seconde moitié des années 1990, la course dite « à colombier unique » (« one loft race » en anglais) a été inventée. Le concept est d'envoyer de différentes régions, voire du monde entier, de jeunes pigeons (âgés de 6 semaines) dans un colombier unique où ils sont soignés et entraînés de manière similaire et habitués à ce nouveau domicile. C'est vers celui-ci qu'ils reviendront au moment de la course[3],[4]. S'y est associée l'idée de gains beaucoup plus importants, comme avec la « course à un million de dollars », créée en Afrique du Sud en 1996-1997, avec des frais d'inscription à 1000 dollars, et un premier prix de 200 000 dollars ainsi qu'une voiture neuve[5],[6],[7]. Ce concept a contribué à modifier la pratique de la colombophilie. Car dans la course traditionnelle où chacun élève et entraîne ses pigeons, ce sont non seulement les pigeons, mais également les compétences et l'expérience des colombophiles qui sont en compétition. Avec la course à colombier unique, seuls les pigeons sont en compétition, puisqu'ils sont tous élevés et entraînés de la même manière. Cela a contribué à provoquer une surenchère sur la valeur des pigeons, qui se sont mis à s'acheter jusqu'à des dizaines ou centaines de milliers de dollars, voire dépasser le million d'euros, comme pour le pigeon Armando, surnommé le « Lewis Hamilton des airs », acheté en 2019 par un investisseur chinois dans le but d'obtenir un rendement par la vente de ses descendants très recherchés[8]. Alors que la colombophilie est une activité très prisée parmi les travailleurs, elle est dorénavant également profondément investie par des logiques financières[9]. L'appât du gain a ainsi précipité la fin de la Course à un million de dollar d'Afrique du Sud en 2020[10], en lien à la fois avec de graves problèmes sanitaires ayant occasionné la mort de centaines de pigeons, mais également le choix d'une distance trop longue à parcourir dans des conditions climatiques difficiles, racontée dans le documentaire Une course, des pigeons et des millions de Gavin Fitzgerald (Irlande, 2021)[11],[12].

Organisation colombophile[modifier | modifier le code]

Belgique[modifier | modifier le code]

On dénombre environ 70.000 colombophiles en Belgique dont 21.000 sont actifs. La province de Liège dénombre à elle-seule 97 clubs regroupant 2.800 colombophiles[13]. La Royale Fédération Colombophile Belge est une association à l'échelle nationale[14] et organisant des concours provinciaux, nationaux et participant aux concours internationaux.

La tradition colombophile est très présente sur l'ensemble de la Belgique, et remonte au XVIIIe siècle dans la région liégeoise. La première mention écrite date de 1784 à Verviers. La colombophilie comme sport n'aurait commencé - sur base des textes retrouvés - qu'en 1818[15] et s'est propagé à partir de cette région vers les Pays-Bas, l'Allemagne puis la France.

La sélection et l'étude des pigeons en Belgique a permis d'améliorer les performances des pigeons ainsi que la sélection des meilleurs individus, pour créer finalement le pigeon voyageur tel que nous le connaissons. Les races belges sont considérés comme les meilleures du monde.

À Anvers, les propriétaires de bateaux de transport marchand faisaient emmener sur ceux-ci de nombreux pigeons. Quand les marins n'avaient plus que quelques jours de mer à voyager, ils lâchaient ceux-ci avec des messages indiquant la marchandise transportée. À l'arrivée du bateau, celle-ci était déjà vendue. Avec ses 25.000 pigeons sélectionnés, Anvers était en 1846 la première ville colombophile au monde[16]. La province d'Anvers est encore aujourd'hui un haut lieu de la colombophilie belge.

En 2020, la fédération colombophile belge a proposé la reconnaissance du patrimoine colombophile belge à l'UNESCO[17].

Le 15 novembre 2020, un pigeon voyageur belge est vendu aux enchères à Knesselare en Flandre orientale par la maison d'enchère Pigeon Paradise "PIpa", pour 1 600 000  à un colombophile sud-africain[18] (record mondial). Les pigeons voyageurs belges étant d'excellente réputation, ceci a engendré de nombreux vols organisés par la mafia chinoise notamment dans les années 2009.

France[modifier | modifier le code]

La Colombophilie *
Domaine Jeux
Lieu d'inventaire Hauts-de-France
Nord
Lille
* Descriptif officiel Ministère de la Culture (France)

En France, la colombophilie débute en 1849[15] et l'organisation colombophile est désormais réglementée par la loi du (modifiée depuis). Cette réglementation est la conséquence de l'utilisation militaire du pigeon voyageur comme vecteur de transmission de messages (guerre de 1870 et les deux guerres mondiales). De ce fait, la colombophilie sera interdite pendant la Seconde Guerre mondiale[19].

Bien que le ministère de la Défense entretienne un colombier et un musée au mont Valérien à Suresnes dans la banlieue parisienne (musée colombophile militaire), le rôle militaire du pigeon voyageur a disparu au profit des transmissions hertziennes. La colombophilie est inscrite à l'Inventaire du patrimoine culturel immatériel français depuis 2012[20].

Dans le nord de la France, les éleveurs de pigeons-voyageurs sont dits des « coulonneux »[21].

Fédération colombophile française[modifier | modifier le code]

La Fédération colombophile française[22] fédère les colombophiles français et les associations locales. Elle a son siège à Lille (54, boulevard Carnot) dans le Nord. Elle est administrée par un bureau directeur élu pour quatre ans et constitué d'un président, de deux vice-présidents, d'un secrétaire et d'un trésorier.

Les associations locales recueillent les adhésions des amateurs. Entre la FCF et les associations locales, on trouve les fédérations régionales et les groupements. Tous ces organismes sont à but non lucratif.

En 1900, la fédération de la Seine obtint la médaille d'or du concours organisé dans le cadre de l'exposition universelle et des jeux olympiques. Il y a actuellement[Quand ?] environ 11 500 colombophiles, dont pratiquement la moitié dans le Nord de la France (1re région, Nord Pas de Calais).

Reste du monde[modifier | modifier le code]

La colombophilie est pratiquée dans de nombreux pays du monde. Les organisations sont différentes, mais le but est le même partout : réaliser des compétitions de pigeons voyageurs.

Les nations colombophiles se sont regroupées en une Fédération colombophile internationale[1] (FCI) dont le siège est à Bruxelles. Son conseil d'administration se réunit deux fois par an pour étudier les questions communes à tous mais aussi à certaines fédérations nationales. Les questions peuvent être liées aux pigeons, recherches scientifiques et médicales et protection du pigeon, mais aussi aux compétitions, systèmes de constatation, championnats mondiaux, etc. Pour 2014, les bagues ont la même couleur (or).

Conflits[modifier | modifier le code]

Quelques espèces de rapaces sont spécialisées de manière évolutive dans la chasse aux oiseaux. C'est le cas notamment de l'épervier, de l'autour des palombes, du faucon pèlerin et du faucon sacre[23]. Les élevages, et les vols en cercle des pigeons autour de ceux-ci peuvent attirer ces prédateurs, occasionnant parfois la crainte et/ou la colère de colombophiles, à la suite des modifications de comportement des pigeons stressés par la présence d'un rapaces aux environs, voire aux pertes occasionnées[24]. Ces rapaces sont pourtant pour certains d'entre eux protégés dans de nombreuses législations nationales et internationales, d'autant qu'ils ont pour beaucoup d'entre eux failli disparaître dans les années 1960 en lien notamment avec la généralisation des pesticides, dont le DDT[25]. Le conflit peut dégénérer, lorsque les éleveurs tuent les rapaces suspectés. L'une des méthodes est l'utilisation de poison placés sur le dos de pigeons servant d'appât, et qui tuent instantanément le rapace protégé. Une caméra de surveillance à Zürich, en Suisse, a montré le décès d'une femelle faucon pèlerin ayant capturé un pigeon ainsi préparé[26]. Deux éleveurs de pigeons ont été condamné à Zürich, en 2016 pour ce type de délits[27],[28].

Des associations de protection des animaux mettent également en cause les conditions d'élevage ou le nombre de décès que peuvent occasionner certaines courses de pigeons[29],[30],[31].

Dans la littérature[modifier | modifier le code]

La bande dessinée belge Le Vieux Bleu, créé par François Walthéry en 1974, a pour cadre le milieu colombophile dans la Wallonie des années 1930[32].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Fédération colombophile internationale (FCI)
  2. Guy Brasseur, Premier dictionnaire du pigeon voyageur.
  3. (en-GB) « The Royal Pigeon Racing Association | About One Loft Races » (consulté le ).
  4. (en-US) Denise Bereford, « One Loft Races Explained », sur Pigeonpedia (consulté le ).
  5. « SAMDPR - History », sur samdpr.com (consulté le ).
  6. (en) Paul Smith, « First international press report. The 18th South African Million Dollar » [PDF], sur elimarpigeons.com.
  7. (en-US) Caxton Magazines, « SA Million Dollar Pigeon Race », sur Farmer's Weekly, (consulté le ).
  8. « Voici Armando, le pigeon voyageur qui vaut 1,2 million d'euros », sur Franceinfo, (consulté le ).
  9. « Une course, des pigeons et des millions », sur Les-docus.com, (consulté le ).
  10. (en-US) www.oneloftracing.com, « THE SOUTH AFRICAN MILLION DOLLAR 2020. FINAL RACE », sur ONE LOFT RACING, (consulté le ).
  11. « Million Dollar Pigeons – Gavin Fitzgerald », sur gavfitzgerald.com (consulté le ).
  12. « Une course, des pigeons et des millions - Regarder le documentaire complet », sur ARTE (consulté le ).
  13. « LIEGE:LE PIGEON A VOL D'OISEAU HISTOIRES TENACES DE VOLATILES », sur Le Soir (consulté le ).
  14. « Photo’s – KBDB-RFCB » (consulté le ).
  15. a et b « NOS RACINES SONT ICI (XVIII): LA COLOMBOPHILIE, NEE A VERVIERS? », sur Le Soir (consulté le ).
  16. « Le Pigeon Voyageur - Historique de la Colombophilie », sur colombophiliefr.com (consulté le ).
  17. « La colombophilie patrimoine UNESCO », sur lacolombophilieho.be (consulté le ).
  18. Gilbert Dupont, « Le pigeon voyageur le plus cher de l'histoire est belge: New Kim vendu 1 600 000 euros ! », sur lalibre.be, (consulté le ).
  19. Cent ans de vie dans la région, tome 3 : 1939-1958, La Voix du Nord éditions, hors série du 17 juin 1999, p. 58.
  20. « Jeux - Ministère de la Culture », sur culture.gouv.fr (consulté le ).
  21. Thibeault, J. (2003), « Repenser l’identitaire : le processus de ré-identification » dans Le coulonneux de Simone Chaput, Francophonies d'Amérique, (15), 151-166.
  22. Site de la Fédération colombophile française (FCF), sur le site colombophiliefr.com (consulté le 12 février 2016).
  23. « Saker Falcon (Falco cherrug) - BirdLife species factsheet », sur datazone.birdlife.org (consulté le ).
  24. « Rapaces et Colombophilie – pigeon voyageur — Portail de la colombophilie », sur pigeon-voyageur.eu, (consulté le ).
  25. « Protection du faucon pèlerin et les dangers qui le menacent », (consulté le ).
  26. BirdLife Suisse, « Empoisonnements intentionnels de Faucons pèlerins et d'autres rapaces : reconnaître et signaler les cas suspects » [PDF], sur tierimrecht.org (consulté en ).
  27. « Suisse – Il tue un faucon avec un pigeon «kamikaze» », sur 24 heures, (consulté le ).
  28. « Prison avec sursis pour un éleveur de pigeons | BirdLife Schweiz/Suisse/Svizzera », sur birdlife.ch (consulté le ).
  29. www rtn ch, RTN, Radio Télévision Neuchâtel, « Plus de contrôles exigés par la PSA pour les courses de pigeons », sur rtn.ch, (consulté le ).
  30. (en) « Rapport PSA: Sport colombophile en Suisse by Schweizer Tierschutz STS - Issuu », sur issuu.com, (consulté le ).
  31. « Colombophilie: 20.000 pigeons disparaissent lors d’une course, la Fédération belge crie à «la catastrophe» », sur Le Soir, (consulté le ).
  32. Patrick Gaumer, « Vieux bleu, Le », dans Dictionnaire mondial de la BD, Paris, Éditions Larousse, (ISBN 9782035843319), p. 903.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]