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Quentovic

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Quentovic est un ancien port de commerce du VIIe au IXe siècle. C'était un des ports de mer principaux des Carolingiens. Comme Dorestad, Quentovic fut une possession personnelle de Charlemagne.

Son nom serait formé de Quentia, nom latin de la Canche, et de vicus ou wicus ; vicus désignant une petite agglomération[1], alors que wicus pourrait signifier « baie, port » selon Léon Levillain qui traduit Quentovic par « Port-sur-Canche »[2].

Cet ancien port a donné son nom à une avenue, l'avenue de Quentovic et à un quartier de la ville du Touquet et (le ) à une brasserie[3].

Emplacement

Les historiens admettent aujourd'hui que Quentovic était situé à l'embouchure de la Canche, entre la Morinie et le Ponthieu, probablement à l'emplacement du village de La Calotterie, mais du XVIIe siècle au début du XXe siècle, la question de cet emplacement a été âprement discutée par les historiens régionaux, notamment au sein de la société savante des antiquaires de la Morinie[4] ,[5] ,[6].

M. Fengler imagine qu'il pourrait s'agir du Portus Itius[7].

Étaples a aussi été envisagée notamment en raison de l'abondance de témoignages archéologiques et parce que selon Pierre Héliot (1937) « le monastère de Stenetland possédait à Quentovic des biens mentionnés dans une charte de 857 ; or ces biens, transmis ensuite à l'Abbaye de Saint-Bertin, semblent ne pas différer de ceux qu'ont repris des chartes de 1026 et 1040 et qu'on nous dit situés à Étaples (Les chartes de St-Bertin, éd. Haigneré et Bled, t. I, pp. 13, 22 et 23) »[7].

C'est selon Jean Dhondtle le hameau de Vis-et-Maretz, sur la rive gauche du fleuve Canche, entre Etaples et Montreuil, qui est le lieu où était situé Quentovic[8]. Plus tard, Pierre Léman plaide également pour des fouilles approfondies dans ce secteur, car des découvertes archéologiques nouvelles y sont faites[9].

En 2004, des vestiges sont localisés à La Calotterie, entre Montreuil et Étaples, au mont de Beck, dans le hameau de Vis-et-Maretz.

De l'essor à la disparition

On émet l'hypothèse d'un port de la tribu gauloise des Morins à l'origine du site, attesté par la proximité d'un four gallo-romain. Des objets de parure des Ve et VIe siècles d'origine anglo-saxonne et certains types de céramiques en provenance du Jutland, des embouchures de l'Elbe, de la Weser, ont été découverts sur le site.

La ville est citée pour la première fois par Étienne de Ripon dans sa Vita sancti Wilfrithi, puis par Bède le Vénérable dans son Histoire ecclésiastique au début du VIIe siècle. Celui-ci note que Théodore de Tarse, évêque désigné de Canterbury, passe en 669 par Quentovic. Elle a reçu une partie de la flotte romaine, la Classis Sambrica, entre la fin du IIIe et le début du IVe siècle[réf. nécessaire].

Quentovic est également un atelier monétaire : il figure dans l'édit de Pîtres, datant de 864 en tant que lieu autorisé à battre monnaie[10].

À partir du VIIIe siècle, Alcuin, abbé de Ferrières-en-Gâtinais et familier de Charlemagne, gère la fondation. C'est à cette époque que le port aurait atteint le summum de son développement, mais sa prospérité en fait une cible de choix pour les invasions normandes répétées qui ravagèrent le pays à partir de 842 où les Normands y débarquent pour la première fois. On a aussi la preuve de la présence à Quentovic dans les toutes dernières années du IXe siècle et les premières du Xe siècle, des rois vikings, d'origine danoise de l'est de l'Angleterre (Northumbrie), Knut (ou Cnut)[9]) et Siefred qui occupèrent bien le grand port vers 898, époque où se situe précisément le siège de Montreuil (Pas-de-Calais) par les mêmes rois précités.[réf. nécessaire]. Le nom de Quentovic est cité une dernière fois par les textes en 864 puis semble disparaître[7].

Longtemps, les historiens de Quentovic ont pensé que l'atelier monétaire avait disparu définitivement à la fin du Xe siècle[7], sans doute à la suite d'une destruction du port par les Vikings.

La découverte à Fécamp en 1963 d'un important trésor dont 8584 pièces ont pu être retrouvées, infirme de façon indiscutable cette hypothèse et montre que Quentovic, avec des fortunes diverses, continua d'exister dans les deux premiers tiers du Xe siècle et que son atelier monétaire fonctionna jusqu'à une date voisine de 980, date du rattachement de Montreuil au domaine d'Hugues Capet, alors simple duc de France et qui devait, en 987, être élu roi. Les villes de Montreuil et Quentovic ont cependant cohabité, comme l'atteste l'existence à Montreuil de fours à poterie et d'un atelier monétaire.

Cette ville champignon a disparu aussi rapidement qu'elle avait prospéré. Elle aurait vraisemblablement succombé aux nombreuses incursions pirates et normandes en 842, 840, (844?), 864, 881, 890, et 894. Boulogne-sur-Mer puis Montreuil ont récupéré ensuite cette fonction de centre commercial[réf. nécessaire]. La disparition de ce port vers l'an 1000[11] a probablement été provoquée conjointement par ces raids normands et par la fragilité des infrastructures en bois soumises aux aléas maritimes.

Le site et ses activités

Avers d'une monnaie portant l'inscription RXF, et revers avec l'inscription QUCCI VVIC ; chaque côté est entouré d'une ligne de billes.
Denier de Pépin le Bref fabriqué à Quentovic entre 754 et 768

L'aire occupée par Quentovic est supérieure à 35 ha et proche de celles de Dorestad et Southampton qui comptent 40 ha et 45 ha. C'est une ville portuaire au commerce prospère, célèbre sous Dagobert II (652-679), et qui dispose d'un hôtel de monnaie et de bureaux de péage[12]. Comme à Dorestad, les droits de péage sont considérables et le tonlieu, impôt sur les marchandises, s'élève à 10 % ad valorem. Aussi un haut fonctionnaire qualifié de procurator, comme saint Gervold, puis de prefectus réside-t-il dans le port[13] ; de là, il est chargé d'ambassades chez les rois anglo-saxons. La frappe des monnaies représente, elle aussi, une source d'importants bénéfices pour le pouvoir.

Quentovic devient le centre principal des échanges commerciaux entre les Îles britanniques et le monde carolingien[14] et sert de point de passage pour les insulaires se rendant en pèlerinage. Il fait partie des nouveaux établissements commerciaux qui apparaissent à cette époque dans la zone de la mer du Nord et de la Baltique, avec Ribe, Hedeby (actuelle Schleswig), Dorestad, Birka et Hamwic (actuelle Southampton). Le commerce de la laine anglaise, de l'ambre de la Baltique et de l'étain de l'île de Wight semble confirmé[Par qui ?]. À l'époque, cette partie de la vallée de la Canche était totalement immergée à marée haute.

La puissance du port vient aussi de la volonté politique des rois francs qui contrôlent la Neustrie : ils donnent le saltus, domaine public, aux établissements ecclésiastiques, comme l'abbaye de Ferrières-en-Gâtinais. Des contacts se nouent dès 550 entre le Kent, l'East Anglia et la Neustrie. Quentovic devient l'une des grandes douanes de ces rivages et l'un des principaux ateliers monétaires des premiers Carolingiens.

Quentovic est en relation foncière avec les abbayes de Saint-Wandrille, Saint-Germain des Prés, Abbaye de Saint-Riquier, Saint-Vaast à Arras, Saint Bertin de Saint-Omer, Villemeult[Où ?], Combs-la-Ville, Ferrières-en-Gâtinais.

Le paysage maritime ressemble à celui de la Frise ou de la Saxe. Ces peuples germaniques ont diffusé un type de navire à faible tirant d'eau, doté d'une quille rudimentaire mais à fond plat et arrondi de type houque, qui figurent sur les deniers frappés par Charlemagne et Louis le Pieux à Quentovic comme à Dorestad.

Le rôle spirituel de Quentovic s'appuie sur une fondation monastique, placée en aval sur la même rive à une lieue du port en mémoire de saint Josse, le moine breton fondateur.

Notes et références

  1. Georges Duby (dir.), Paul Albert Février, Michel Fixot, Christian Goudineau et Venceslas Kruta, Histoire de la France urbaine I : La Ville antique, Paris, Seuil, , 600 p. (ISBN 2-02-005590-2), p. 535
  2. Léon Levillain, Études sur l'abbaye de Saint-Denis à l'époque mérovingienne, t. XCI, Bibliothèque de l'École des chartes, , chap. 3, p. 25
  3. Écuires : la brasserie Quentovic part s’installer à Beaurainville ,28/03/2016
  4. L. Cousin (1854) Emplacement de Quentowic, dans Mém. de la Soc. des Antiquaires de la Morinie, t. IX, 2e partie, p. 255-339
  5. L. Cousin (1862-1864) Nouveaux éclaircissements sur l'emplacement de Quentowic, dans Mém. de la Soc. dunkerquoise pour l'encouragement des sciences, t. IX , p. 430-509
  6. L. Cousin (1868-1869) Derniers éclaircissements sur l'emplacement de Quentowic, ibid., t. XIV , p. 97-116
  7. a b c et d voir note 2 page 261 "in" Pierre Héliot, « La question de Quentovic d'après des travaux récents », Revue du Nord, Éditions du Conseil scientifique de l'université Lille 3,‎ , p. 260-265
  8. Jean Dhondt "Les problèmes de Quentovic" din Studi in onore di Am intore Fanfani 1, t.I (p. 183-257)
  9. a et b Leman Pierre (1981 ) Contribution à la localisation de Quentovic ou la relance d'un vieux débat ; Revue du Nord ; Volume 63 Numéro 251 p. 935-945
  10. Mémoire de la Société dunkerquoise pour l'encouragement des sciences, des lettres et des arts, 1862-1864, neuvième volume, p. 436, lire en ligne.
  11. Jacques Le Goff (dir.), Histoire de la France urbaine II : La Ville médiévale, Seuil, , p. 57
  12. Qentovic - Monnayage immobilisé au nom de Charles le Chauve (Xe siècle)
  13. Georges Duby (dir.), op. cit., p. 537.
  14. Stéphane Lebecq, Bruno Béthouart et Laurent Verslype, Quentovic : Environnement, Archéologie, Histoire, Villeneuve d'Ascq, Éditions du Conseil scientifique de l'université Lille 3, , 528 p. (ISBN 978-2-84467-123-3)

Voir aussi

Bibliographie

  • Pierre Héliot, « La question de Quentovic d'après des travaux récents », Revue du Nord, Éditions du Conseil scientifique de l'université Lille 3, t. 23, no 92,‎ , p. 260-265
  • Stéphane Lebecq, Bruno Béthouart et Laurent Verslype, Quentovic : Environnement, Archéologie, Histoire, Villeneuve d'Ascq, Éditions du Conseil scientifique de l'université Lille 3, , 528 p. (ISBN 978-2-84467-123-3)
  • Georges Duby (dir.), Paul Albert Février, Michel Fixot, Christian Goudineau et Venceslas Kruta, Histoire de la France urbaine I : La Ville antique, Paris, Seuil, , 600 p. (ISBN 2-02-005590-2)
  • Jacques Le Goff (dir.), Histoire de la France urbaine II : La Ville médiévale, Seuil,

Liens externes