Bataille de Roncevaux (778)

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Bataille de Roncevaux
Description de cette image, également commentée ci-après
La mort de Roland au col de Roncevaux
Informations générales
Date
Lieu Col de Roncevaux, Pyrénées (supposé)
Issue Victoire des Vascons
Belligérants
Francs Vascons
Commandants
Charlemagne
Roland
Loup II de Vasconie (supposé)
Pertes
Massacre de l'arrière-garde

Reconquista

Batailles

Modèle:Invasions musulmanes en Europe

Coordonnées 42° 59′ 22″ nord, 1° 20′ 02″ ouest
Géolocalisation sur la carte : Espagne
(Voir situation sur carte : Espagne)
Bataille de Roncevaux
Géolocalisation sur la carte : Navarre
(Voir situation sur carte : Navarre)
Bataille de Roncevaux

La bataille de Roncevaux est une bataille qui eut lieu le [1] quand l'arrière-garde commandée par Roland, neveu de Charlemagne, fut attaquée par les Vascons (Basques). Cette bataille de l'histoire de France a été rendue célèbre par la Chanson de Roland, œuvre médiévale écrite trois siècles plus tard et qui fut enseignée dans les manuels scolaires français d'histoire. La réalité historique est bien différente.

Le contexte historique

Lors d'une assemblée tenue à Paderborn, le roi franc Charlemagne reçoit l'ambassadeur du gouverneur de Barcelone, Sulayman ben Yaqzan ibn al-Arabi (orthographié aussi Suleiman ou Soliman) qui, en révolte contre Abd al-Rahman Ier, l'émir de Cordoue, demande l'aide des Francs[2] pour tenir la ville de Saragosse afin qu'il puisse aller conquérir d'autres territoires, voulant ainsi en devenir le roi et allié de Charlemagne. Cela aurait ainsi permis de créer un État tampon, une marche entre le royaume et l'empire sarrasin d'al-Andalus afin de protéger le royaume franc des razzias[3].

Charlemagne a longuement hésité avant de se décider à envoyer une armée car les walis de Saragosse ont eu pendant un siècle une attitude ambiguë, tantôt alliés aux chrétiens, tantôt soumis à l'émir de Cordoue[4]. Cette hésitation, ainsi que le temps d'envoyer une armée sont en grande partie responsables de la suite de toute l'histoire.

La campagne et la bataille

Le [5], les Vascons attendirent les pillards sur un chemin escarpé où l'armée, en file indienne, ne pouvait se mettre en ordre de bataille. Cette bataille d’arrière-garde est signalée dans les Annales royales, chronique du règne de Charlemagne où l'on évoque juste la mort de quelques nobles. Les Vascons, beaucoup plus légers et profitant de la topographie, précipitèrent leurs ennemis dans le ravin et récupérèrent tout ce qu'ils purent. Il y eut sans doute peu de survivants parmi l'arrière-garde de l'armée de Charlemagne. Pierre Narbaitz estime que ce sont entre 10 000 et 15 000 personnes qui ont péri. Cependant, Charlemagne et le reste de l'armée franque franchirent le col sans être inquiétés.

Localisations proposées pour la bataille

Comme aucune trace archéologique n'a jamais été trouvée, le lieu de la bataille reste inconnu. Diverses hypothèses ont été émises et le combat n'a pas seulement été situé à proximité du col de Roncevaux mais tout au long de la chaîne pyrénéenne, depuis le Pays basque jusqu'à la Catalogne. Pour la plupart des historiens, le chemin utilisé aurait suivi le tracé d'anciennes voies romaines. C'est la voie et le lieu où elle traverse les Pyrénées qui diffère selon les auteurs.

Pour la plupart des auteurs, l'action a eu lieu sur la route ab Asturica Burdigalam (depuis Astorga dans le Léon par Pampelune jusqu'à Bordeaux) qui traverse les Pyrénées à Roncevaux. On reconnaît alors dans l'expression porz de Sizer de la Chanson de Roland les cols du pays de Cize. Contrairement à ce qu'affirment la tradition populaire et certains auteurs comme Ramon d'Abadal i de Vinyals[6], la voie ancienne ne traverse pas les Pyrénées au col de Roncevaux même (ou col d'Ibañeta[7]) : en effet la route actuelle n'a été ouverte qu'en 1881 ; quant au nom de Roncevaux (Orria ou Orreaga en basque), il apparaît au XIIe siècle seulement et n'existe dans aucun document d'époque.

Plusieurs auteurs (dont Ramón Menéndez Pidal et Pierre Narbaitz) pensent que le chemin utilisé passe quelques kilomètres plus à l'est. Les cols de Bentarte, de Lepoeder, proches de l'Astobizkar, seraient parmi les plus probables[8].

En 1933 Robert Fawtier, reprenant une hypothèse de Joseph Bédier, pensait que la voie romaine ab Asturica Burdigalam passait par le col de Belate, près de Pampelune[9],[10],[11]. Il y situe Roncevaux.

Une autre localisation, proposée par Antonio Ubieto Arteta et retenue par Robert Lafont, utilise cette fois-ci la voie romaine Cæsar Augusta reliant Saragosse au Béarn. Passant par la vallée du rio Gallego, la forêt de Oza (Valle de Hecho, province de Huesca), le col de Pau (puerto del Palo) proche du Somport pour redescendre par la vallée d'Aspe, elle était encore entretenue au IXe siècle. Dans cette optique, le burt Sizaru des géographes arabes et le porz de Sizer de la Chanson de Roland seraient Siresa, où un monastère est signalé dès le IXe siècle, et la « Tere Certeine » de la Chanson serait les monts Gibal-el-Sirtaniyyin mentionnés par un géographe arabe comme lieu de la source du rio Gallego[12].

D'autres hypothèses s'appuient sur l'absence d'un lieu appelé Roncevaux dans les documents d'époque, sur les mentions dans la Chanson de Roland d'un retour de Charlemagne par Narbonne et Carcassonne[13] et de la chevauchée des Sarrasins par la Cerdagne (la « Tere Certaine »[14]) pour soutenir un passage par la Catalogne : les possibilités comprennent la Cerdagne[15] (vallée de Llívia), le col du Perthus[16], voire les ports élevés de l'Andorre[17]. Ces hypothèses ne tiennent pas pour établi que Charlemagne ait emprunté une voie romaine, ni qu'il revenait de Pampelune, et elles considèrent parfois que son arrière-garde n'a pas été confrontée aux Vascons mais bien aux Sarrasins.

La légende et l'histoire

Les principales routes romaines de la péninsule Ibérique.
Monument commémoratif de la bataille à Roncevaux.

Le travail d'historien[3] le plus exhaustif a été réalisé par Pierre Narbaitz. Son livre Orria ou la bataille de Roncevaux (15 août 778) publié en 1978 est actuellement l'ouvrage le plus complet sur le sujet. Il se base sur les sources les plus anciennes. La cinquantaine de documents actuellement connus et se rapportant à cet épisode, dont un bon tiers d'origine sarrasine, y sont répertoriés et analysés. Dans un livre écrit trois ans plus tôt, Le Matin basque ou Histoire ancienne du peuple vascon, de nombreuses pages[A 1] sont consacrées à cet épisode et une bibliographie abondante y figure déjà[A 2].

Ce qu'écrit l'historienne Béatrice Leroy, professeur d’histoire médiévale, dans La Navarre au Moyen Âge est plus succinct mais est en parfait accord avec les travaux de Pierre Narbaitz.

Parmi les documents les plus anciens on trouve les Annales royales[18], ainsi que dans la biographie de Charlemagne : Vita Karoli Magni rédigée par Eginhard.

On ne sait pas exactement pourquoi l'armée mit Pampelune à sac. Problème de ravitaillement ? Parce que le chef saxon Widukind s'approchait du Rhin ? Ou les deux ?

Il semble aussi que les Vascons aient d'abord attaqué l'arrière-garde commandée par Roland, préfet de la marche de Bretagne ainsi qu'Anselme le preux, comte du palais.

Pierre Narbaitz estime d'après plusieurs recoupements (comme le nombre de généraux) que l'armée devait compter entre 10 000 et 15 000 personnes, ce qui était considérable pour l'époque et explique le choc émotionnel qui resta dans les mémoires. Trois siècles plus tard, des troubadours donnèrent une dimension épique à cette bataille avec la Chanson de Roland. Cette version très édulcorée de l'histoire était aussi la plus politiquement acceptable pour le royaume de France.[réf. souhaitée]

Notes et références

  1. Philippe Sénac, Les Carolingiens et al-Andalus (VIIIe-IXe siècles), Maisonneuve et Larose (ISBN 2-706-816-597), (lire en ligne), p. 55, note 14 de bas de page.
  2. Jean-Pierre Barraqué, Bulletin du musée basque no 165, 1er semestre 2005, p. 3 à 20
  3. a et b Pierre Narbaitz, Orria ou la bataille de Roncevaux (15 août 778), éditeur Zabal, 1978 (ISBN 8440049269), 239 pages
  4. Béatrice Leroy, La Navarre au Moyen Âge, Albin Michel, 1984 (ISBN 2-226-01883-2) p. 24
  5. On connaît la date exacte de la bataillle grâce à l'épitaphe du sénéchal de Charlemagne Eggihard (Eginhard) qui est mort ce même jour. Philippe Sénac, op. cit., p. 55.
  6. Ramon de Abadal i Vinyals, « La expedición de Carlomagno a Zaragoza, el hecho histórico » in Coloquios de Roncesvalles, août 1955. Zaragoza, 1956, p.15.
  7. Ibañeta se réfère au nom de la montagne proche
  8. Parmi ces auteurs, on peut citer : Ramón Menéndez Pidal, "La Chanson de Roland et la tradition épique des Francs", A. et J. Picard, Paris, 1960, p.217-230 ; José María Lakarra, « A propos de la route de Roncevaux et du lieu de la bataille », Annales du Midi, tome 78, n°76, p.377-389, 1966 ; Pierre Narbaitz, Orria, ou la bataille de Roncevaux (15 août 778), éditions Zabal, 1978, p.92-105 ; Béatrice Leroy, La Navarre au Moyen Âge, éditions Albin Michel, 1984 ; Jean Dufournet, La chanson de Roland, Paris Flammarion, 1993 ; José María Jimeno Jurío, ¿Dónde fue la batalla de «Roncesvalles»?, Pampelune, Pamiela, 2004.
  9. L'itinéraire envisagé depuis Pampelune passerait par le col de Velate, la vallée de Baztan, le rio Maya, le col d'Otxondo, et suivrait la vallée de la Nive jusqu'à Bayonne (Robert-Henri Bautier, Recherches sur l’histoire de la France médiévale : des Mérovingiens aux premiers Capétiens, Variorum, 1991, p.ii.)
  10. « Bédier se demandait si la défaite de Charles eut lieu dans le défilé de Roncevaux ou dans celui de Velate. » (Ramón Menéndez Pidal, La Chanson de Roland et la tradition épique des Francs, A. et J. Picard, Paris, 1960, p.217-230).
  11. Robert Fawtier, La Chanson de Roland, Étude historique. Paris, 1933, pp.145-150.
  12. Antonio Ubieto Arteta, La chanson de Roland y algunas problemas historicos, 1985, Zaragoza, Anubar ; Robert Lafont, La geste de Roland, L'Harmattan, 1991, p.130-132.
  13. Chanson de Roland, vers 3683.
  14. Chanson de Roland, vers 856.
  15. Cette version est présentée dès 1865 par Adolphe d'Avril (La Chanson de Roland, traduction nouvelle, avec une Introduction et des Notes, Paris, 1865, note 2, page 186)
  16. Comme dans l'Antiquité, le « Pyrenei saltus » mentionné par Eginhard (« Pyrenei saltum ingressus est ») désigne les Pyrénées Orientales, pour Rita Lejeune Charlemagne serait rentré par le col du Perthus (Rita Lejeune, « Localisation de la défaite de Charlemagne en 778, d'après les chroniqueurs carolingiens », Coloquios de Roncevalles, Zaragoza, 1956, pp.73-103, cité par Robert-Henri Bautier, Recherches sur l’histoire de la France médiévale : des Mérovingiens aux premiers Capétiens, Variorum, 1991, p.ii).
  17. Marcel Baïche (« Roncesvalles-Recesvals II », Les Langues Néo-Latines 74. 12-24 (1980, n° 235), cité par Jean Favier, Charlemagne, Fayard, 1999, p.235) remarque que la toponymie de la Chanson n'est pas basque mais catalane : le porz de Sizer serait alors le port de Siguer.
  18. (la) Annales Regni Francorum voir l'année [778]
  1. p. 283 à 326
  2. p. 323 à 326

Voir aussi

Sources et bibliographie

Articles connexes

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