Notre-Dame de Pellevoisin

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Notre-Dame de Pellevoisin
Image illustrative de l’article Notre-Dame de Pellevoisin
Statue originale de Notre-Dame de Pellevoisin, placée dans la "chambre des apparitions" du sanctuaire en 1877.
Apparition mariale
Autres noms Notre-Dame de Miséricorde
Vénérée à sanctuaire de Pellevoisin et basilique Notre-Dame de Pontmain
Vénérée par l’Église catholique
Fête 9 septembre
Attributs le scapulaire du Sacré-Cœur sur la poitrine

Notre-Dame de Pellevoisin, communément appelée Notre-Dame de Miséricorde, est le vocable aujourd'hui utilisé couramment pour désigner la Vierge Marie telle qu'elle serait apparue à Estelle Faguette, jeune femme de 32 ans atteinte d’une maladie incurable, dans le village de Pellevoisin (Indre) à quinze reprises au cours de l'année 1876. À la troisième apparition, du 16 février, Marie s'était présentée à Estelle comme « toute Miséricordieuse » ; l’Église retiendra ultérieurement le vocable de "Notre Dame de Miséricorde" quand il s'agira de nommer "Notre Dame de Pellevoisin" : c'est celui retenu pour le scapulaire dont il sera question plus loin.

À partir de la neuvième apparition, celle du 9 septembre 1876, les apparitions porteront essentiellement sur la prière et la dévotion au scapulaire du Sacré-Cœur. Dès la fin des apparitions, après la quinzième le jour de la fête de l'Immaculée Conception, à la suite des demandes de la comtesse Arthur de La Rochefoucauld-Montbel (en) (née Marie-Luce de Montbel), Mgr de La Tour d’Auvergne, archevêque de Bourges autorise la transformation de la chambre où auraient eu lieu les apparitions en un petit oratoire privé et d'y placer une statue de la Vierge. Mais les apparitions en tant que telles n'ont cependant encore jamais été reconnues officiellement par l'Église catholique.

La dévotion du scapulaire du Sacré-Cœur, approuvée par le Vatican en 1900, la création en 1877 d'une « confrérie en l'honneur de N-D. de Pellevoisin, Mère toute Miséricordieuse », puis la mise au rang d'archiconfrérie de cette structure par le pape Léon XIII en 1894 ont rapidement étendu la dévotion à la Vierge sous cette appellation, malgré l'absence de reconnaissance canonique des apparitions.

Historique de la dévotion[modifier | modifier le code]

Apparitions mariales[modifier | modifier le code]

Ces apparitions mariales seraient survenues du au à Estelle Faguette, jeune femme de 33 ans, dans sa chambre, alors qu'elle était gravement malade. Après les cinq premières apparitions et sa guérison en février, elle dit continuer de voir la Vierge Marie à dix reprises. La Vierge lui aurait alors confié la mission de diffuser la dévotion du Sacré-Cœur, par le scapulaire du Sacré-Cœur[1],[2] qu'elle lui aurait révélé à la neuvième apparition, le 9 septembre.

Si l'évêque de son diocèse, et l’Église catholique accèdent à certaines de ses demandes (comme la dévotion au scapulaire du Sacré-Cœur autorisée par le Vatican), l’Église ne s'est jamais prononcée formellement et canoniquement sur l'authenticité de ces apparitions. La dévotion à « Notre-Dame de Miséricorde » est autorisée et encouragée par le diocèse, des pèlerinages sont régulièrement organisés avec la présence de religieux et d'évêques, mais canoniquement, cette apparition mariale fait partie des apparitions sur lesquelles l'Église ne s'est pas prononcée, ne donnant ni un avis positif, ni un avis négatif (de manière officielle). Le sanctuaire n'en reste pas moins un lieu spiritualité mariale important dans le diocèse et toute la région, avec un rayonnement national et même à l'étranger.

En 1983, Monseigneur Paul Vignancour, archevêque de Bourges fait reconnaître comme « miraculeuse » la guérison de la voyante Estelle Faguette, en 1876. Si aucun procès en béatification de la voyante n'a été ouvert à ce jour[3],[4], Mgr Jérôme Beau, actuel archevêque est attentif à ce que représente Pellevoisin, aujourd'hui et demain : à sa proposition, les évêques de France réunis en assemblée ces 8 et 9 juin 2020 se sont prononcés favorablement pour l’ouverture de la cause d'Estelle Faguette en vue d’une éventuelle béatification, avec deux autres Françaises, Anne Gabrielle Caron et Anne-Marie Antigo[5].

La Congrégation pour la Doctrine de la Foi ayant proposé récemment à Mgr Jérôme Beau de réactiver le "dossier" de la reconnaissance des apparitions, c'est actuellement cette question qui occupe le groupe de travail qui s'est constitué à la demande de l'archevêque de Bourges. Un livre biographique consacré à Estelle Faguette, aux apparitions et à leurs suites, est paru en mai 2021[6]. Son auteure, Sylvie Bernay, est coordonnatrice dudit groupe.

Mise en place de la dévotion[modifier | modifier le code]

Avant même la fin des apparitions, quelques personnes viennent se joindre à la voyante, après sa guérison, à ses temps de prière. Le , Mgr de La Tour d’Auvergne, archevêque de Bourges autorise de placer une statue et de transformer la chambre d’Estelle en chapelle. Il autorise également à faire installer un ex-voto dans l'église du village, ainsi que de faire inscrire, au-dessus de la statue de Notre-Dame du Sacré-Cœur (déjà présente dans l'église de Pellevoisin), les paroles « Je suis toute miséricordieuse », transformant de facto la Vierge du Sacré-Cœur, en Vierge des apparitions[1]. L'installation d'un couvent de dominicaines dans la « maison de l'apparition », l'accueil de pèlerins et l'organisation de pèlerinages[7] contribuent à développer une dévotion à un niveau local. Le sanctuaire de Pellevoisin annonce que dès la première année des apparitions, un grand pèlerinage diocésain et même régional s'est rassemblé, presque chaque année, dans le sanctuaire[8].

La création en 1877 d'une « confrérie en l'honneur de N-D. de Pellevoisin, Mère toute Miséricordieuse », puis la mise au rang d'archiconfrérie de cette structure par le pape Léon XIII en 1894[7],[2], ainsi que l'autorisation, par le Vatican du scapulaire scapulaire du Sacré-Cœur en 1900 vont étendre cette dévotion au pays et au reste du monde[3],[2].

Description de la représentation[modifier | modifier le code]

Statue de la Vierge de Pellevoisin, portant le scapulaire.

La représentation de la Vierge de Pellevoisin est proche de celle de la médaille miraculeuse, déjà connue depuis 30 ans à l'époque de l'apparition, et largement diffusée[9],[10].

La voyante la décrit vêtu de blanc, les bras tendus (le long du corps vers le bas et légèrement écartés). Des mains tombent « comme une pluie »[N 1]. La Vierge est entourée d'une mandorle faite d'une guirlande de roses[N 2]. Elle porte le scapulaire du Sacré-Cœur sur la poitrine[11]. C'est cette représentation qui est reprise dans l'imagerie traditionnelle, avec autour de la tête de la Vierge, les mots « Mère toute miséricordieuse », ou parfois, comme sur le scapulaire « Mère de miséricorde »[12].

Notoriété et influence religieuse[modifier | modifier le code]

La statue de Notre-Dame de Pellevoisin présente dans le sanctuaire de Pellevoisin a été couronnée par l'évêque Mgr Jérôme Beau le à la suite de l'arrivée du « grand pèlerinage sur le M de Marie »[13].

Le sanctuaire de Pellevoisin[modifier | modifier le code]

Le sanctuaire de Pellevoisin est aménagé sur le site des apparitions dans la commune de Pellevoisin. Ce sanctuaire a été mis en place et s'est développé après les 15 apparitions mariales dont aurait été gratifiée Estelle Faguette en 1876. Dès cette année, après la « guérison miraculeuse de la voyante », Monseigneur Charles-Amable de La Tour d'Auvergne-Lauraguais, archevêque de Bourges, autorise l'installation d'un oratoire dans la chambre dite des apparitions, pour une dévotion privée[1]. La maison, située dans le village, appartient en effet au comte Arthur de La Rochefoucauld-Montbel, branche de la prestigieuse Maison de La Rochefoucauld. Madame la comtesse s'investira sans compter dans la création du sanctuaire et du développement des premiers pèlerinages ; on lui doit l'installation du couvent des sœurs contemplatives dominicaines dès 1893, qui resteront à Pellevoisin jusqu'à l’installation de sœurs de la Communauté Saint-Jean en juin 1998 par Mgr Pierre Plateau, archevêque de Bourges.

Plusieurs enquêtes canoniques sont lancées, mais les processus ne seront jamais menés à terme, ni conclus. Les apparitions ne sont donc pas reconnues officiellement (canoniquement) par l’Église catholique. Néanmoins, le lieu de culte se développe, avec l'autorisation et le soutien de divers évêques et grâce la communauté religieuse installée sur le lieu afin d'assurer l'accompagnement des pèlerins qui se rendent sur place. Des pèlerinages sont régulièrement organisés depuis les premières années suivant les apparitions, et encore aujourd'hui, avec un soutien du diocèse, et malgré une absence de reconnaissance « officielle des apparitions »[4],[14].

Un colloque s'est tenu à Pellevoisin en 2016, à l'occasion du 140e anniversaire des "apparitions". Présidé par Jean-Louis Bruguès, dominicain, bibliothécaire et archiviste de la Bibliothèque apostolique vaticane, les actes en ont été publiés en 2017, qui permettent de remettre en perspective historique les "événements" de Pellevoisin et de les relire au regard du contexte social, politique et religieux, très tendu en cette fin du XIXe siècle entre l'Église catholique et la Troisième République ; tensions qui aboutiront à la Loi de séparation des Églises et de l'État de 1905 [15]. Entre 1876 et aujourd'hui, la position des archevêques de Bourges, successivement approbative, expectative, opposée ou prudente explique la non-reconnaissance autant que la non-clôture du dossier, dans un sens comme dans l'autre. Il se pourrait qu'une nouvelle phase s'ouvre prochainement pour le sanctuaire, Estelle Faguette et les apparitions...

Scapulaire du Sacré-Cœur[modifier | modifier le code]

Détail du scapulaire du Sacré-Cœur.

Le scapulaire du Sacré-Cœur de Pellevoisin est celui à avoir été officiellement reconnu par Rome, et, qui plus est, rapidement : Estelle Faguette sera reçue deux fois en audience privée par Léon XIII, les 30 janvier et 17 février 1900[16] et le pape se montrera favorable : le scapulaire sera alors approuvé. Sa diffusion sera autorisé à Rome, à la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre et à Paray-le-Monial et, enfin, au sanctuaire de Pellevoisin, après de nombreuses péripéties.

Toutefois, là encore, le contexte politique et religieux de la France entre 1870 et 1914 ne se révélera pas favorable à Pellevoisin, "tenu" par une famille aristocratique catholique et monarchiste. La basilique du Sacré-Cœur de Montmartre, édifiée à la suite du "vœu national" par les partis conservateurs au lendemain de la guerre franco-allemande de 1870 entraînera à l'intérieur même de l’Église tensions et rivalités, tant politiques que religieuses autour de l'autorisation d'apposition du scapulaire.

Sa diffusion échappera ainsi à Pellevoisin, au grand désespoir d'Estelle, son apposition ne pouvant être faite qu'en trois endroits : Rome, la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre et la basilique du Sacré-Cœur de Paray-le-Monial, forte de l'antériorité de son histoire autour de la dévotion du Sacré-Cœur initiée par sainte Marguerite-Marie Alacoque au XVIIe siècle.

Estelle Faguette devra attendre d'être à nouveau reçue en audience privée par Pie X en mars 1912[17] pour voir, enfin, Pellevoisin être autorisé à apposer le scapulaire de Notre Dame de Pellevoisin le 22 novembre 1912 ; sans pour autant que les apparitions soient reconnues.

Si la dévotion au Sacré-Cœur remonte à Marguerite-Marie Alacoque, qui l'avait déjà promue au XVIIe siècle, la création du scapulaire, à la suite des apparitions de Pellevoisin, comme celle d'une confrérie a été vue comme étant « conforme à la tradition de l’Église » et a pu être autorisée par l’Église catholique avant toute décision sur l'authenticité ou non des apparitions mariales. La mise en place de ce scapulaire « donna un nouvel élan à la dévotion du Sacré-Cœur »[18],[2] mais pas à Pellevoisin. Le scapulaire, approuvé officiellement par la Congrégation des Rites le , subit deux légères modifications demandées par la congrégation vaticane[12] :

  • sur le dessin de la Vierge, qui elle-même portait ce scapulaire, le scapulaire lui est retiré - le rappel historique sommaire permet d'en comprendre les raisons.
  • le texte « Mère toute miséricordieuse » placé sur le scapulaire est remplacé par « Mère de Miséricorde »

Églises consacrées à Notre-Dame de Pellevoisin[modifier | modifier le code]

Plusieurs églises en France et dans le monde sont consacrées à Notre-Dame de Pellevoisin :

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. La voyante disait qu'elle voyait écrits dans les gouttes d'eau des mots tels que « piété, salut, confiance, conversion, santé » ...
  2. Jusqu'ici, cette représentation se rapproche beaucoup de celle de Notre-Dame de la Médaille-miraculeuse.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b et c René Laurentin et Patrick Sbalchiero, Dictionnaire des "apparitions" de la Vierge Marie, Fayard, , 1426 p. (ISBN 978-2-213-67132-1), p. 713-714.
  2. a b c et d Yves Chiron, Enquête sur les apparitions de la Vierge, Perrin, , 427 p. (ISBN 978-2-262-02832-9), p. 223-233.
  3. a et b Dictionnaire des apparitions, p. 715.
  4. a et b Yves Chiron 2007, p. 233-236.
  5. « Un pas vers l’ouverture de la cause de béatification d’Anne-Gabrielle Caron », Aleteia,‎ (lire en ligne)
  6. Sylvie Bernay, Estelle Faguette : La voyante de Pellevoisin, Clamecy, Cerf (maison d'édition)/Cerf, , 439 p. (ISBN 978-2-204-13465-1, lire en ligne)
  7. a et b Joachim Bouflet et Philippe Boutry, Un signe dans le ciel : Les apparitions de la Vierge, Paris, Grasset, , 475 p. (ISBN 978-2-246-52051-1), p. 189.
  8. « Un sanctuaire diocésain », Sanctuaire de Pellevoisin (consulté le ).
  9. Yves Chiron 2007, p. 230.
  10. Yves Chiron 2007, p. 180-181.
  11. Yves Chiron 2007, p. 229-230.
  12. a et b Yves Chiron 2007, p. 234.
  13. « Les pèlerins en nombre pour Marie », La Nouvelle République,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  14. « Sanctuaire Notre-Dame de Miséricorde à Pellevoisin », Diocèse de Bourge (consulté le ).
  15. Jean-Baptiste Edart & Jean-Emmanuel de Gabory, [6].Pellevoisin - La miséricorde au féminin, Paris, CLD, , 293 p. (ISBN 978-2-85443-578-8)
  16. Jean-Baptiste Edart et Jean-Emmanuel de Gabory, Pellevoisin : La miséricorde au féminin, pages 197 & 198
  17. Jean-Baptiste Edart & Jean-Emmanuel Gabory, Pellevoisin : La miséricorde au féminin, page 201
  18. Yves Chiron 2007, p. 232.

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Récits et biographies
  • A. Salmon, Gloire à Marie toute miséricordieuse, Tripault, , 64 p. (lire en ligne)
  • Estelle Faguette, Notre-Dame de Pellevoisin, Outremont, Juvénat des Clercs de Saint-Viateur, , 90 p. (lire en ligne), p. 42 & 43
  • Frédéric Jansoone, Notre-Dame de Pellevoisin et le scapulaire du Sacré-Coeur, , 92 p. (lire en ligne)
  • Mgr Pierre Bauron, Notice sur Notre-Dame de Pellevoisin, Paris, Beauchesne, , 192 p.
  • Bernard Saint John, Notre-Dame de Pellevoisin, Paris, Beauchesne, , 99 p. (lire en ligne), p. 24 & 25
  • Gaëtan Bernoville, Pellevoisin : le village de la Vierge, Paris, de Gigord, , 246 p.
  • Dominicaines, Pellevoisin, un centenaire : Estelle nous parle, Buzançais, Monastère des Dominicaines, , 111 p.
  • Marie-Réginald Vernet, o.p, La Vierge à Pellevoisin, Dieu au cœur d'une mère, Montsûrs-Saint-Céneré, Téqui, , 431 p.
  • Marie-Réginald Vernet, o.p, La Vierge à Pellevoisin, mère de miséricorde et mère de l'Église, Montsûrs-Saint-Céneré, Téqui, , 252 p.
  • Marie-Réginald Vernet, o.p, Pellevoisin : le message profond et le miracle qui en est le signe, Montréal, Médiaspaul, , 61 p. (ISBN 2-7122-0304-6)
  • Anonyme, Pellevoisin apparitions de Notre-Dame en 1876, Callac, Icône de Marie, , 31 p. (ISBN 978-2-909341-13-2)
  • Marie-Réginald Vernet, o.p, La Vierge à Pellevoisin, mère de miséricorde et mère de l'Église (réédition), Montsûrs-Saint-Céneré, Téqui, , 252 p.
  • Jean-Baptiste Edart, Pellevoisin, la miséricorde au féminin, Montsûrs-Saint-Céneré, CLD, , 296 p. (ISBN 978-2-85443-578-8 et 2-85443-578-8)
Études

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]