André Hercule de Fleury

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André Hercule de Fleury
Image illustrative de l’article André Hercule de Fleury
Portrait par Hyacinthe Rigaud.
Biographie
Naissance
à Lodève
Drapeau du Royaume de France Royaume de France
Ordination sacerdotale
Décès (à 89 ans)
à Issy-les-Moulineaux
Drapeau du Royaume de France Royaume de France
Cardinal de l'Église catholique
Créé
cardinal

par le pape Benoît XIII
Évêque de l'Église catholique
Ordination épiscopale par
card. Louis-Antoine de Noailles
Principal ministre d'État (de facto)
Évêque de Fréjus

Blason
(en) Notice sur www.catholic-hierarchy.org

André Hercule de Fleury, né à Lodève le [1] et mort à Issy-les-Moulineaux le , est un ecclésiastique et homme d'État français, qui, de 1726 à 1743, a été de facto le principal ministre du jeune roi Louis XV.

Biographie

Un noble de province à la cour du roi

Hôtel de Fleury à Lodève, aujourd'hui musée.

Issu de la petite noblesse languedocienne, André de Fleury est le fils de Jean de Fleury, seigneur de Dio, receveur des tailles au diocèse de Lodève et de Diane de La Treilhe.

Destiné dès l'enfance à l'état ecclésiastique, il est envoyé dès l'âge de six ans à Paris y poursuivre ses études au Collège de Clermont puis au Collège d'Harcourt à l'instar des enfants nobles de l'époque.

Nommé chanoine à Montpellier en 1668, l'adolescent retourne à Paris terminer ses études et est ordonné prêtre en 1674. Il poursuit ses études de théologie, obtenant sa licence en 1676. Il devient par protection du cardinal de Bonzi, aumônier de la reine Marie-Thérèse en 1677 puis, après la mort de la souveraine, aumônier du roi (1683). Il a 30 ans.

Évêque de Fréjus, abbé de Tournus et précepteur

Il obtient ensuite, en 1699, le diocèse de Fréjus, petit diocèse frontalier avec le duché de Savoie, « par indignité divine » suivant ses propres termes.

Bien que déçu dans ses ambitions, il se rend dans son diocèse conformément aux décrets du concile de Trente et s'occupe avec soin de ses ouailles.

Lors de la guerre de succession d'Espagne, son diocèse est menacé par les troupes de Victor-Amédée II de Savoie ; il sait parlementer avec l'envahisseur et évite le passage des troupes dans son diocèse, allant jusqu'à recevoir en grande pompe le souverain ennemi en sa cathédrale et à y faire chanter un Te Deum en son honneur. Il sera soupçonné de trahison et ne devra qu'à son habileté politique et au soutien de ses amis à Versailles d'éviter la disgrâce.

Prétextant des ennuis de santé, il renonce à son évêché en 1715 et devient peu après, aux fêtes de la Pentecôte 1715, abbé commendataire de l'abbaye Saint-Philibert de Tournus, qu'il gouvernera jusqu'à sa mort[2].

Dans le même temps, sur proposition du duc du Maine, son fils légitimé, et grâce à l'insistance de l'épouse de ce dernier, le roi Louis XIV aux portes de la mort, ajoute un codicille à son testament, confiant à l'ancien évêque de Fréjus l'éducation de son arrière-petit-fils et successeur. La duchesse du Maine pensait s'attacher un exécutant docile puisque son mari, qu'elle dominait entièrement, était censé assumer la régence.

Il n'en fut rien et la régence revint au duc d'Orléans, petit-fils de France. Celui-ci, qui connaissait et appréciait Fleury, le maintint dans ses fonctions.

Précepteur du roi

Louis XV, roi orphelin de 5 ans : Fleury lui servit de père et de mère.

Le Philippe, duc d'Orléans et régent du royaume nomme Fleury précepteur du jeune Louis XV (qui a alors tout juste 6 ans), conformément au deuxième codicille du testament de Louis XIV.

En 1717, le régent lui accorde le privilège considérable de monter dans le carrosse du roi : en effet, « monter dans le carrosse du roi » impliquait de pouvoir dialoguer avec le roi (parler de l'état du royaume, obtenir des grâces, etc.) et d'être vu par tous dans une certaine intimité avec le monarque. Ce privilège revêtait une grande importance politique.

Il est élu le 22 avril de cette même année au fauteuil no 29 de l'Académie française, y remplaçant Callières. Il a en effet agrandi la bibliothèque du roi, envoyé des membres de l’Académie des Sciences dans le Nord et au Pérou pour mesurer le méridien et des savants en Égypte et en Grèce pour rechercher les manuscrits précieux. Là aussi il lutte très activement contre les candidatures des jansénistes et des premiers philosophes. Il procure à Louis Racine un emploi dans les finances en province pour éviter qu'il soit élu à l'Académie. Il interdit les réunions du Club de l'Entresol. Il est de ceux qui accusent l’abbé de Saint-Pierre. Il s'oppose à l’élection de Montesquieu, puis dit s’en désintéresser. Enfin, il y reçoit Massillon[3].

En 1721, il est nommé abbé commendataire de Saint-Étienne de Caen tandis que le duc du Maine, oncle très aimé du jeune roi, victime des cabales de son épouse, est incarcéré à la forteresse de Doullens (Somme) avant de revenir en grâce.

Le 25 octobre 1722, Louis XV est sacré roi à Reims. Fleury tient le rôle d'un pair ecclésiastique.

L'accession au pouvoir

Louis XV est déclaré majeur en février 1723 à l'entrée de sa quatorzième année. Sur les conseils de son oncle, l'ex-régent, il nomme principal ministre le conseiller de celui-ci, l'irréligieux cardinal Dubois. Le prélat meurt dès le mois d'août et l'ex-régent réclame la place vacante qu'aussitôt son neveu lui accorde.

Le duc d'Orléans meurt en décembre suivant et le petit roi, déjà marqué par la perte de ses parents et de son arrière-grand-père, se tourne encore vers sa famille et nomme premier ministre un autre de ses grands-oncles, le duc de Bourbon.

Ce prince, qui dirige les affaires de l'État pendant trois ans, est totalement dominé par deux femmes ambitieuses, sa mère, fille légitimée du feu Louis XIV et sa maîtresse, la marquise de Prie. Pour conserver le pouvoir, il a entre autres mis à mal l'alliance avec l'Espagne en faisant rompre les fiançailles du jeune roi de 15 ans avec l'infante Marie-Anne-Victoire d'Espagne pour lui faire épouser une princesse en exil qu'il espérait manipuler à sa guise, Marie Leszczyńska, fille du roi détrôné de Pologne Stanislas Leszczyński, sans pouvoir ni richesse mais qui, de sept ans l'aînée de son futur mari, est en âge d'avoir des enfants.

Sa politique rend rapidement le duc très impopulaire. Sa volonté d'amener le roi à disgracier Fleury dont il jalouse l'influence entame sa chute. Fleury, sans en avertir le roi, se réfugie au séminaire d'Issy-les-Moulineaux. Louis XV, inquiet d'être encore séparé d'un être qui lui est cher, le fait rappeler prestement et malgré l'appui de la reine, le duc de Bourbon est frappé de disgrâce et exilé le 11 juin sur ses terres de Chantilly. À peine un an après son mariage, victime de sa reconnaissance, de son inexpérience et de sa naïveté, la reine a perdu pour toujours l'influence qu'elle aurait pu exercer sur son mari. Le roi de 16 ans déclare assumer seul le pouvoir et se passer de premier ministre. Cependant, il confie l'essentiel du pouvoir à son précepteur. À l'âge de 73 ans, « M. de Fréjus », comme on l'appelle d'après le nom de son évêché, est « appelé aux affaires » . En septembre de la même année, sur la demande du roi, il est créé cardinal.

Ministre d'État

Louis XV à l'âge de 17 ans, un élève affectueux et reconnaissant.
Conseil sous la régence du Duc d'Orléans, Fleury est présent à droite au second plan.

Le 11 juin 1726, à la suite de la disgrâce du Duc de Bourbon, Fleury devient Ministre d'État. Ce dernier est « premier ministre » de fait, malgré son grand âge et sa faible constitution physique. Edmond Jean François Barbier note dans son journal : « L’évêque de Fréjus n'a pas le titre de premier ministre, mais il en aura presque le crédit, puisqu'il assistera à toutes les conférences que chaque ministre aura avec le Roi, et qu'il lui fera prendre le parti qu'il jugera à propos[4],[5]. »

Contrairement à nombre de ses prédécesseurs, le cardinal est réputé ne pas avoir profité de son élévation au ministère pour s'enrichir ni favoriser ses proches. Voltaire dit de lui qu'il « fut simple et économe en tout, sans jamais se démentir[6]. » Une exception peut-être, reste l'accession de son neveu et filleul du roi Jean-Hercule de Rosset de Rocozels au titre de duc de Fleury.

Politique du cardinal

Le vieux cardinal de Fleury donne des nouvelles de Versailles à la reine Marie Leszczynska qui se tient éloignée de la Cour. Celle-ci lui répond dans la marge, 30 avril 1736. Archives nationales.

Il se distingue par la modération de son train de vie ; à contrepied de ses prédécesseurs cardinaux Richelieu et Mazarin, il n'a pas de fortune. Il dépense ses revenus commendataires en aumônes et se contente de ses appointements de ministre (20 000 livres).

Politique intérieure

Le cardinal de Fleury gouverne avec prudence et sagesse : à l'intérieur, il rétablit le budget de l'État, stabilise la monnaie, reprend la politique de Colbert, pacifie dans la mesure du possible le problème janséniste avec l'aide de l'archevêque d'Embrun, Pierre Guérin de Tencin (voir aussi "gallicanisme" et la déclaration des Quatre articles) qui convoque un concile provincial à Embrun pour juger un évêque favorable au jansénisme, Jean Soanen[7]. La répression est particulièrement dure à Paris, où la majorité des curés soutiennent le Jansénisme[8]. Il ne parvient cependant pas à entraver la montée de l'opposition parlementaire. Autour de l'année 1737, il mène une politique antimaçonnique et fait fermer plusieurs loges.

Sa politique économique reconstruit l'économie du pays, sinistrée à la suite des dérapages de la politique monétaire du régent et de son ministre-banquier atypique John Law, père du système de Law. Fleury restera comme le « premier ministre » – qu'il n'était pas en titre – ayant créé les conditions du développement économique, scientifique, industriel que la France va connaître durant les années 1728-30 à 1770. Avec les conseils avisés de Michel Robert Le Peletier des Forts, Fleury réforme le système monétaire, en rétablissant la livre, par réévaluations ; un louis d'or vaut alors 24 livres. La valeur de la monnaie restera à ce niveau jusqu'en 1785 et permet la stabilité monétaire dans le royaume.

Politique étrangère

Sa politique extérieure est marquée par une recherche de la paix et de la stabilité européenne. Entraîné par le roi dans la guerre de succession de Pologne, il la conclut rapidement par le traité de Vienne de 1738 qui apporte à terme le duché de Lorraine et le duché de Bar à la France. En revanche, il se laisse entraîner par la puissance de l'opinion dans la guerre de succession d'Autriche dont il ne verra pas la fin.

Distinctions

Il est élu membre de l'Académie française en 1717, de l'Académie des sciences en 1721 et de l'Académie des inscriptions et belles-lettres en 1725. Il reçoit le titre de proviseur de la Sorbonne et de supérieur du collège de Navarre.

Décès et postérité

Maquette du Mausolée du cardinal de Fleury, Paris, musée du Louvre

Son acharnement à éviter les ambitieux et les intrigants et, en apparence, à exercer seul le pouvoir jusqu'à sa mort le 29 janvier 1743, lui vaut le surnom de « Son Éternité ». Il se fait enterrer dans un tombeau somptueux dans l'église Saint-Louis-du-Louvre[9].

Anecdote

Le comte d'Argenson (1696–1764), ministre de la guerre sous Louis XV, dans ses Mémoires :

« Comme on plaisante ici sur les choses les plus sérieuses, il court un épigramme sur le Cardinal dont je n'ai retenu que le trait. La France est un malade que, depuis cent ans, trois médecins de rouge vêtus, ont successivement traité. Le premier (Richelieu) l'a saigné ; le second (Mazarin) l'a purgé ; et le troisième (Fleury) l'a mis à la diète. »

Généalogie

Notes et références

  1. Registre de la paroisse Saint Fulcran de Lodève, GG 2, f°45.
  2. Abbaye dont il devint le 60e abbé, sans obligation de résidence. Il ne fit toutefois son entrée solennelle à Tournus qu'un an plus tard, le 11 juin 1716. Source : Fabien Cler (président du pays d'art et d'histoire « Entre Cluny et Tournus », André-Hercule de Fleury (1653-1743), essai de portrait politique en creux d'un bâtisseur tournusien, bulletin de la Société des amis des arts et des sciences de Tournus, tome CXIV, Tournus, 2015, pp. 107-117. (ISSN 0153-9353).
  3. André Hercule de Fleury sur le site de l'Académie française.
  4. Bernard Barbiche, Etudes sur l'ancienne France offertes en hommage à Michel Antoine, École nationale des chartes, (ISBN 9782900791561, lire en ligne), p. 350.
  5. « Journal de Barbier, tome 1 (1718-1726) », sur archive.org (consulté le ).
  6. « Persée », sur www.persee.fr (consulté le ).
  7. Olivier Andurand, La Grande affaire, les évêques de France face à l'Unigenitus, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, , 398 p. (ISBN 978-2753553903)
  8. Gérard Noiriel, « Histoire populaire de la France », Le Monde diplomatique,‎ (lire en ligne, consulté le )
  9. Collectif Sarka-SPIP, « Eglise SAINT-THOMAS-DU-LOUVRE (disparue) - Cimetières de France et d'ailleurs », sur www.landrucimetieres.fr (consulté le )
  10. Généastar : Ascendants de Hercule Andre de FLEURY.

Voir aussi

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Sources et bibliographie

Articles connexes

Liens externes