Caractère (typographie)

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Caractère mobile en plomb typographique de la fonte de caractères Garamond corps 12 points formant la ligature du s (s long) et du i.
Caractères mobile en plomb typographique dans une casse avec le composteur posé dessus.
Police de caractères Didot.

Le caractère en typographie, ou caractère mobile, est la petite pièce fondue, généralement en plomb typographique (alliage de plomb, d'étain et d'antimoine), dont la surface supérieure formant le signe dun système d'écriture (alphabet, syllabaire, etc.) reçoit l'encre avant d'être pressée sur un support, généralement papier, pour y laisser son empreinte. Les très gros caractères mobiles peuvent être en bois. Un caractère alphabétique peut s'appeler simplement « lettre[1] ». On dit que le compositeur typographe « lève la lettre ».

Un ensemble de caractères typographiques d'une même famille porte le nom de police de caractères. Une police peut se décliner en plusieurs fontes de caractères selon le corps (9 pt, 11 pt, etc.), la graisse (léger, gras, etc.) et le style (romain, italique, etc.).

Histoire des caractères mobiles

Caractères mobiles en terre cuite

La typographie avec ses caractères mobiles débute au XIe siècle en Chine avec l'invention de Bi Sheng qui employa, dès 1040, des caractères mobiles en terre cuite[2], plus de 500 ans après les premières traces d'imprimeries, au Nord-Ouest de la Chine, dans l'actuelle province du Gansu.

Caractères mobiles en métal

Les caractères mobiles en métal auraient vu le jour en Corée vers 1234, inventés par Choe Yun-ui[3]. Le plus ancien exemplaire encore existant de livre imprimé à partir de caractères métalliques date de 1377. Il s'agit du Jikji Simkyong conservé à la Bibliothèque nationale de France[4]. Deux siècles après les coréens, l'imprimerie à caractères mobiles arrive en Europe. Johannes Gutenberg crée vers 1450 un ensemble de techniques conjointes : les caractères mobiles en plomb typographique (un alliage composé d'environ 70 % de plomb, 25 % d'antimoine et 5 % d'étain) et leur technique de fabrication (un moule à fondre les caractères), de l'encre grasse adéquate et la presse typographique (une presse à vis). Ces techniques continuerons à évoluer dans l'industrie jusqu'a l’avènement de la photocomposition dans les années 1970[5]. Certaines presses, généralement à vocation artistique continuent d'utiliser des caractères métalliques.

Utilisation des caractères mobiles

Les différents signes et lettres d'un caractère étaient rangés, dans un ordre immuable, dans un casier en bois appelé casse divisé en un certain nombre de cassetins. Le quart supérieur gauche de la casse recevait les lettres capitales. Le quart supérieur droit recevait les lettres les moins utilisées, comme les lettres accentuées, les lettres doubles (Æ, Œ) ou le W. La moitié inférieure de la casse, dite bas-de-casse, recevait les minuscules, toujours appelées bas-de-casse en imprimerie, les chiffres et les espaces.

Le typographe composait ligne par ligne, en disposant les lettres, de gauche à droite mais tête en bas, dans un composteur permettant de respecter la justification (la largeur définie pour la page). Pour atteindre cette justification, il devait répartir judicieusement les espaces (fines lamelles de plomb) entre les mots. Ces espaces ont conservé jusqu'à aujourd'hui le genre féminin en typographie (on dit une espace). Quand une, deux ou trois lignes, en fonction du corps du caractère, avaient été composées dans le composteur, elles étaient déposées dans la galée, une simple planche ou plaque de métal munie d'un léger rebord sur deux ou trois côtés.

Une fois la galée remplie de toutes les lignes de la page à composer, l'ensemble de ces dernières, appelé alors un paquet, était entouré de trois tours de ficelle et transporté sur le marbre afin d'y recevoir, par le metteur en page, leurs derniers éléments (foliotage [numérotation], notes ou illustrations éventuelles) et d'être serrés dans un châssis. Ce châssis recevait en fait plusieurs pages en fonction de l'imposition prévue, chaque page étant séparée des autres par une garniture faite de morceaux de bois ou de plomb.

On appelait fonte l'ensemble des lettres et des signes d'un caractère, livré en une seule fois à l'imprimeur par le fondeur, dans une même taille (corps) et un même style (romain ou italique, normal ou gras) et police la liste de toutes les lettres comprises dans une fonte. Par métonymie, ce dernier mot en est venu à désigner au cours du XIXe siècle l’ensemble des caractères d’une même famille, quels qu’en soient le corps ou le style : Garamond est une police, Garamond italique corps 12 est, aujourd'hui, une fonte. Les derniers fondeurs à avoir exercé en France sont Deberny & Peignot, FTF (Fonderie typographique de France) à Paris, et la fonderie Olive, à Marseille, sous la direction du célèbre créateur de caractères Roger Excoffon.

Anatomie de l'empreinte d'un caractère mobile

Les typographes utilisent un vocabulaire varié et précis pour désigner les différentes parties des caractères et leur dimension.

Figure résumant les principaux termes typographiques
Figure résumant les principaux termes typographiques

Anatomie d'un caractère mobile

Schéma du caractère mobile en plomb typographique de la lettre F en capitale.
  • 1 : Contreforme ou contrepoinçon (espace intérieur « vide » de certains signes) ;
  • 2 : œil (partie saillante du caractère qui reçoit l’encre et laisse son empreinte sur le support à imprimer) ;
  • 3 : approche (distance qui sépare l’œil et les bords latéraux du caractère ; c’est donc le blanc latéral fixe qui est ménagé de part et d’autre d’un signe, afin que son œil ne touche pas celui de ses voisins latéraux) ;
  • 4 : talus (flanc de l'œil ; il est oblique, plus épais à la base, pour donner aux parties fines le maximum de solidité ; on le définit aussi comme la distance qui sépare l’œil et les bords du caractère ; c’est donc le blanc fixe qui est ménagé de part et d’autre d’un signe, afin que son œil ne touche pas celui de ses voisins) ;
  • 5 : épaule (partie supérieure du moule sur laquelle repose l'œil) ;
  • 6 : corps ;
  • 7 : cran (permet au typographe, par simple toucher, de placer le caractère dans le bon sens dans son composteur, c'est-à-dire tête en bas ; dans certains pays le cran est du côté du pied du caractère — cf. l'illustration — donc « cran dessus » dans le composteur ; en France, le cran est du côté de la tête du caractère donc « cran dessous » dans le composteur) ;
  • 8 : gouttière ;
  • a : hauteur d’œil ;
  • b : hauteur de moule ;
  • a + b : hauteur en papier ou hauteur typographique (distance prise de la base du caractère en plomb jusqu’à la surface de l’œil ; hauteur anglaise : 23,31 mm ; hauteur française : 23,56 mm ; hauteur belge : 23,68 mm ; hauteur hollandaise : 24,85 mm) ;
  • c : chasse ;
  • d : corps.

Vocabulaire

Parties de la lettre

Forme de la lettre

Position de la lettre

Caractères numériques

Aujourd'hui, avec la disparition de la typographie au plomb et l'arrivée de la Publication assistée par ordinateur (PAO) et de ses fournisseurs anglo-saxons, le vocabulaire a changé. On tend à utiliser le mot fonte pour désigner une police. La PAO a en outre introduit, en la traduisant de l'anglais, la notion de glyphe, c'est-à-dire de chacun des signes contenus dans une fonte (ou police) entendue au sens contemporain.

C'est la PAO, et avant elle la photocomposition, qui a permis la multiplication des styles et des graisses pour un même caractère (dans une même police). Du temps du plomb, un même caractère ne comportait qu'un romain (lettre droite) et un italique (lettre penchée), plus rarement un gras, chacun rangé dans une casse différente.

Notes et références

Voir aussi

Bibliographie

  • La Science pratique de l'imprimerie, Marie-Dominique Fertel, Saint-Omer, 1723.
  • Manuel typographique, utile aux gens de lettres, & à ceux qui exercent les différentes parties de l'Art de l'Imprimerie, Fournier le jeune, Paris, 1764 [1].
  • Encyclopédie de Diderot et d'Alembert.
  • Traité de la typographie, Henri Fournier, Paris, 1825; Bruxelles, 1826 [2].
  • Guide pratique du compositeur d'imprimerie, Théotiste Lefèvre, Paris, Firmin-Didot, 1855.[3]
  • Les Caractères de l'Imprimerie nationale, Paris, IN, 1990.
  • Le Maître de Garamond, Anne Cuneo, 2002.

Articles connexes

Liens externes