Hypocauste


L'hypocauste[2] (hypocaustum) est le nom donné au système de chauffage par le sol utilisé à l'époque romaine, dans l'ensemble de l'Empire, et notamment par les Gallo-romains dans les thermes romains et les bains.
Histoire
[modifier | modifier le code]Ce principe de construction était déjà connu de la civilisation de la vallée de l'Indus (ville de Mohenjo-daro, abandonnée au XVIIIe siècle av. J.-C.) et des Grecs dès le IVe siècle av. J.-C. à Athènes par exemple. On en a également retrouvé des vestiges à Olympie datant du Ier siècle av. J.-C.[3]
Par leur utilisation intensive de ce système, ce sont les Romains qui le perfectionnèrent au Ier siècle av. J.-C.[4], notamment pour le caldarium des thermes. Ils en attribuaient l'invention à Caius Sergius Orata vers 80 av. J.C.[5][6]. Ses premières utilisations comme chauffage domestique datent de vers 150 de notre ère, mais l'utilisation de ces systèmes dans le cadre restaient limités, car une large diffusion aurait provoqué un anéantissement des ressources de combustibles à l'échelle de l'Europe[6].
Le site gallo-romain de Champlieu comporte les vestiges d'un hypocauste datant du IIe siècle, dont la structure et le fonctionnement sont décrits par Achille Peigné-Delacourt[7].
Ce système de chauffage fut ensuite réutilisé par les premiers chrétiens qui bâtissaient leurs églises sur d'anciennes demeures romaines munies d'hypocaustes comme le baptistère Saint-Jean à Poitiers dont le bassin était chauffé.
Description
[modifier | modifier le code]Un grand foyer, le praefurnium, situé à l'extérieur de la pièce, avait la forme d'une petite chambre circulaire ou rectangulaire voûtée, avec une ouverture pour l'allumage, et communiquait par une seconde ouverture avec l'hypocauste. Ce foyer était toujours aménagé dans une pièce de service ventilée et conçue pour recevoir une réserve de combustible. Le type de combustible, bois ou charbon de bois, reste débattu, même si le consensus scientifique tendrait à favoriser le bois[8]. Dans les grands thermes romains, ces pièces de service sont installées sur une façade latérale du bâtiment et desservies par une galerie ouvrant sur l'extérieur pour faciliter l'approvisionnement[9]. Généralement, le dosage de la chaleur se faisait par la proximité ou le nombre de foyers communiquant avec les hypocaustes. Dans le schéma le plus simple, le foyer s'ouvrait sous ou à côté de la pièce à chauffer. On estime que la température obtenue dans les pièces ne pouvait pas dépasser 30 degrés.
L'hypocauste n'était pas voûté à la manière d'un four mais était un espace couvert d'un sol « suspendu » appelé la suspensura, formée d'une épaisse couche de mortier de tuileau, souvent doublé d'un lit de briques. Ce sol épais, s'il était long à chauffer, en revanche, conservait mieux la chaleur et les baigneurs devaient chausser des sandales à semelles de bois pour se déplacer. La suspensura reposait sur un grand nombre de pilettes (piliers de petites briques) disposées à intervalles réguliers, sur un radier de briques. Ces pilettes étaient formées de briques superposées de forme majoritairement carrée dont la hauteur variait selon la température qu'on souhaitait obtenir. Afin que l'air chaud circule mieux dans les salles, les murs étaient doublés intérieurement par un réseau de tubulures (tubuli en latin), canalisations de terre cuite de section rectangulaire mis bout à bout. L'évacuation des gaz chauds se faisait le plus souvent par des cheminées.
Notes et références
[modifier | modifier le code]- ↑ Dans une chambre de chauffe disposant d'une aire de travail, d'un ou plusieurs foyers (les praefurnium) et d'une réserve de combustible (branches, bûches, charbon de bois, charbon de terre), des esclaves (les fornicatores ou furnacatores) alimentent le feu jour et nuit, d'où la présence dans les thermes d'annexes destinées à ces employés. L'air chaud et les gaz dégagés lors de la combustion du bois circulent dans un espace de 60 cm de hauteur, entre des pilettes sous le sol suspendu (suspensura) des pièces chauffées, puis sont évacués par des cheminées ou par des canaux de briques creuses (tubuli) qui doublent les parois.
- ↑ Informations lexicographiques et étymologiques de « hypocauste » dans le Trésor de la langue française informatisé, sur le site du Centre national de ressources textuelles et lexicales.
- ↑ Tony Rook, « The development and operation of Roman hypocausted baths », Journal of Archaeological Science, vol. 5, no 3, , p. 269–282 (ISSN 0305-4403, DOI 10.1016/0305-4403(78)90044-4, lire en ligne, consulté le )
- ↑ Janet DeLaine, « hypocaust », dans Oxford Research Encyclopedia of Classics, Oxford University Press, (ISBN 978-0-19-938113-5, DOI 10.1093/acrefore/9780199381135.013.3202, lire en ligne)
- ↑ Garrett G. Fagan, « Sergius Orata: Inventor of the Hypocaust? », Phoenix, vol. 50, no 1, , p. 56–66 (ISSN 0031-8299, DOI 10.2307/1192681, lire en ligne, consulté le )
- Emmanuelle Gallo, « Modernité technique et valeur d’usage : le chauffage des bâtiments d’habitation en France bâtiment », hal.science, Université de Paris 1 - Panthéon La Sorbonne, (lire en ligne
, consulté le )
- ↑ « Hypocauste de Champlieu » [PDF], sur bibnum.enc.sorbonne.fr (consulté le ).
- ↑ (en) Laura C. McParland, Zoë Hazell, Gill Campbell et Margaret E. Collinson, « How the Romans got themselves into hot water: temperatures and fuel types used in firing a hypocaust », Environmental Archaeology, vol. 14, no 2, , p. 176–183 (ISSN 1461-4103 et 1749-6314, DOI 10.1179/146141009X12481709928445, lire en ligne, consulté le )
- ↑ Exemple : les pièces de service des thermes de Caracalla à Rome.
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Jean-Pierre Adam, La Construction romaine. Matériaux et techniques, Paris, Picard, coll. « Grands manuels Picard », .
- Jean-Marie Degbomont (330 figures), Le Chauffage par hypocauste dans l'habitat privé. De la place Saint-Lambert à Liège à l'Aula Palatina de Trèves, Études et recherches archéologiques de l'Université de Liège, , 2e éd., 240 p.
- Noël Duval (dir.), Les Premiers Monuments chrétiens de la France, Paris, Picard, .
- René Ginouvès, Dictionnaire méthodique de l'architecture grecque et romaine, t. III, Espaces architecturaux, bâtiments et ensembles, Rome, École française de Rome, , 492 p.
- Pierre Gros, L’Architecture romaine, vol. I : Les Monuments publics, Paris, Picard, , 2e éd. (1re éd. 1996)
- Yvon Thébert, Les Thermes romains d'Afrique du Nord et leur contexte méditerranéen. Études d'histoire et d'archéologie, Rome, Befar, , 733 p. (ISBN 978-2728303984).
Articles connexes
[modifier | modifier le code]- Le système traditionnel coréen de chauffage par le sol, dit ondol.
- Hammam
- Thermes romains
Liens externes
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- Ressource relative aux beaux-arts :
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :