Charlotte de Prusse

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Charlotte de Prusse
Illustration.
Portrait de l'impératrice Alexandra Fedorovna, par Christina Robertson, musée de l'Ermitage.
Titre
Impératrice de Russie
Reine de Pologne

(29 ans, 3 mois et 1 jour)
Prédécesseur Élisabeth Alexeïevna
Successeur Marie de Hesse-Darmstadt
Biographie
Dynastie Maison de Hohenzollern
Nom de naissance Frédérique-Louise-Charlotte-Wilhelmine de Hohenzollern
Date de naissance
Lieu de naissance Berlin, Drapeau de la Prusse Royaume de Prusse
Date de décès (à 62 ans)
Lieu de décès Tsarskoïe Selo, Drapeau de l'Empire russe Empire russe
Père Frédéric-Guillaume III de Prusse
Mère Louise de Mecklembourg-Strelitz
Conjoint Nicolas Ier de Russie
Enfants Voir section
Religion Luthéranisme puis Église orthodoxe russe

Charlotte de Prusse

Frédérique-Louise-Charlotte-Wilhelmine de Hohenzollern (Frederica Louise Charlotte Wilhelmina von Hohenzollern), en allemand : Friederike Luise Charlotte Wilhelmine von Preußen, née le au château de Charlottenburg et morte le à Tsarskoïe Selo), est un membre de la maison royale de Prusse devenue, sous le nom d'Alexandra Féodorovna (ou Fiodorovna, en russe Александра Фёдоровна), grande-duchesse de Russie à la suite de son mariage avec le grand-duc Nicolas en 1817, puis impératrice de Russie en 1825.

Famille[modifier | modifier le code]

Fille aînée et troisième enfant du roi Frédéric-Guillaume III de Prusse et de l'héroïque et populaire reine Louise, née princesse Louise de Mecklembourg-Strelitz, elle est notamment la sœur du roi Frédéric-Guillaume IV de Prusse et de Guillaume Ier, empereur allemand dont elle fut la confidente.

Mariage et descendance[modifier | modifier le code]

L'impératrice Alexandra Fiodorovna avec ses enfants, en 1820.

Le , au Palais d'Hiver à Saint-Pétersbourg, Charlotte de Prusse épouse le grand-duc Nicolas Pavlovitch, futur Nicolas Ier.

Charlotte et Nicolas eurent dix enfants :

Ascendance[modifier | modifier le code]

Biographie[modifier | modifier le code]

Enfance et jeunesse[modifier | modifier le code]

L'enfance de Charlotte de Prusse, orpheline de mère à l'âge de 12 ans, fut marquée par les Guerres napoléoniennes. Après la défaite des armées prussiennes, la famille royale prussienne, placée sous la protection d'Alexandre Ier de Russie, s'installa en Prusse-Orientale.

À l'automne 1814, la princesse Charlotte rencontra les grand-ducs Nicolas Pavlovitch et Michel Pavlovitch de Russie, fils cadets de feu le tsar Paul Ier. Dans le cadre de la Sainte Alliance voulue par le tsar Alexandre, leur frère aîné, une union fut arrangée entre les deux familles entre le grand-duc Nicolas et elle ; par bonheur, ce choix correspondait aux vœux des deux jeunes gens[1], dont les fiançailles durèrent deux ans.

En juin 1817, accompagnée de son frère Guillaume, la princesse Charlotte se rendit en Russie. Elle dut se convertir à l'orthodoxie et prendre le nom d'Alexandra Fiodorovna ; la cérémonie eut lieu à la chapelle du palais d'Hiver de Saint-Pétersbourg. Nicolas et elle se marièrent Le , jour anniversaire de la fiancée.

À ce moment, Alexandre n'ayant pas d'enfant (aucun de ceux qu'il avait eus de son épouse Elisabeth n'ayant survécu), c'est le grand-duc Constantin (né en 1778), commandant en chef de l'armée du royaume de Pologne (sous tutelle russe), qui était l'héritier du trône. Mais il n'avait pas d'enfants non plus, et compte tenu de son âge, Nicolas, arrivant au second rang de la succession, pouvait envisager de monter sur le trône, quoique dans un avenir assez lointain.

Grande-duchesse de Russie[modifier | modifier le code]

Alexandra Fiodorovna, grande-duchesse de Russie, en 1820.

Après sa conversion, la jeune grande-duchesse connut des problèmes d'adaptation à la Cour impériale. Elle se lia d'amitié avec sa belle-mère Marie Fiodorovna sœur du roi de Wurtemberg, mais n'avait pas de bons rapports avec sa belle-sœur, l'impératrice Elisabeth, princesse de Bade de vingt ans son aînée et épouse du tsar Alexandre.

Après une première grossesse difficile, Alexandra connut une phase de dépression.

Alexandra passa les premières années à apprendre la langue et les coutumes russes sous l'égide de l'écrivain Vassili Joukovski. Elle ne maîtrisa jamais vraiment le russe, d'autant que les membres de la famille impériale parlaient allemand et français et lui écrivaient des lettres en français.

La princesse et son époux vécurent huit années de grande tranquillité. En 1820, ils se rendirent à Berlin où ils devaient faire plusieurs séjours par la suite. En 1825, Alexandre Ier offrit Peterhof au grand-duc Nicolas mais exigea leur présence en Russie, mettant fin ainsi aux voyages en Allemagne.

Impératrice[modifier | modifier le code]

L'impératrice Alexandra Fiodorovna au couronnement de son mari, en 1826.

1825 fut aussi l'année de la mort d'Alexandre dont la succession donna lieu à un coup de théâtre : avec l'accord du tsar, le grand duc Constantin avait secrètement renoncé à ses droits pour pouvoir divorcer et épouser la femme de son choix (une aristocrate polonaise). Non sans scrupules et hésitation, Nicolas devint donc le tsar Nicolas Ier de Russie et Charlotte, la tsarine Alexandra Feodorovna. Le couronnement du nouveau tsar eut lieu au Kremlin de Moscou le . Il fut aussi couronné roi de Pologne en 1829 à Varsovie.

Les années passant, Nicolas Ier ne cessa d'aimer son épouse. Au cours de l'incendie du Palais d'Hiver en 1837, le tsar aurait déclaré à un aide de camp : « Tout le reste est brûlé, ne reste uniquement que les lettres de ma femme qui m'écrivait pendant nos fiançailles »[2]. Elle est grande, majestueuse[3], mais un tic, contracté après les terribles événements du [4] provoque un tremblement de la tête[5]. Après plusieurs alertes cardiaques, les médecins conseillèrent à Alexandra d'éviter le surmenage et les relations sexuelles avec son époux. Après vingt-cinq ans de mariage, Nicolas prit une maîtresse, dame de compagnie de l'impératrice, Varvara Nelidova. Tracassé par les soucis d'État, le tsar trouvait tout de même refuge auprès de son épouse : « Le bonheur, la joie et le repos - c'est ce que je cherche et que je trouve auprès de ma vieille Muffy » écrivit-il un jour[6]. En 1845, lorsque les médecins conseillèrent à l'impératrice de séjourner à Palerme pour sa santé, Nicolas pleura. S'adressant aux médecins, il leur dit : « Laissez-moi ma femme »[6]. Ce séjour étant impératif pour la santé de l'impératrice, le tsar commença à échafauder des plans pour la rejoindre, même pour un bref séjour. Varvara Nelidova accompagnant le tsar, la tsarine éprouva quelque sentiment de jalousie au début, mais elle ne tarda pas à accepter la relation extra-conjugale de son époux. Après le décès du tsar, elle resta d'ailleurs en bons termes avec sa maîtresse.

Palais Alexandre à Tsarskoïe Selo.

Alexandra Féodorovna fut toujours fragile et en mauvaise santé. À quarante ans, elle paraissait beaucoup plus vieille que son âge, maigrissant de plus en plus.

En 1837, elle choisit comme nouvelle résidence la Crimée, où Nicolas Ier lui fit construire le palais d'Oreanda. L'impératrice ne visita ce palais qu'une seule fois, car la Guerre de Crimée débuta en 1852. Vers la fin de l'année 1854, la tsarine tomba gravement malade et fut même proche de la mort[7], mais réussit à guérir. En 1855, Nicolas Ier contracta une grippe et mourut le .

Veuve, elle se retira au Palais Alexandre à Tsarskoïe Selo. Elle resta en bon termes avec la maîtresse de son époux, Varvara Nelidova, cette dernière devenant sa lectrice[8].

Alexandra Feodorovna impératrice de Russie par Franz Winterhalter, 1856, Saint-Pétersbourg, musée de l'Ermitage.

Avec les années, la santé d'Alexandra Féodorovna se détériora. Elle fut dans l'impossibilité de supporter les durs hivers russes et fut contrainte de séjourner longtemps à l'étranger, en particulier sur la côte d'Azur. En 1860, les médecins lui conseillèrent de séjourner dans le midi sinon elle ne passerait pas l'hiver, mais elle préféra malgré tout rester à Saint-Pétersbourg : « Si la mort devait venir, que cela arrive sur le sol russe ». La nuit précédant sa mort, on l'entendit murmurer : « Niki, je viens à vous »[9].

L'impératrice Alexandra Feodorovna fut l'une des nombreuses têtes couronnées qui séjournèrent à Nice. Veuve, elle ne craignait pas d'y rendre visite à Joséphine Koberwein, fille naturelle de son défunt mari. Elle se lia avec Alexandre Pouchkine qui parla avec chaleur de l'impératrice dans son journal.

Vie quotidienne[modifier | modifier le code]

L'impératrice reste tout au long de sa vie une princesse prussienne, préférant s'exprimer en allemand, plutôt qu'en français ou en russe à la cour, ayant eu un mauvais souvenir des guerres napoléoniennes. Elle lit rarement des auteurs français[10] et souvent une lectrice lit à haute voix à la famille impériale une tragédie de Schiller ou de Goethe. Les repas intimes sont servis dans une salle à manger aux fresques pompéiennes, où ne sont invités que de rares intimes, le plus souvent Benckendorff, le prince Orlov, le général prince Volkonski, ministre de la cour, ou le baron von Meyendorff. Personne ne fume après le dîner, l'empereur détestant l'odeur du tabac. Pendant le grand carême, les repas sont frugaux et l'on ne sert que du poisson et des légumes.

Pendant la Saison qui a lieu en hiver, l'empereur et sa femme se rendent parfois à des bals de l'aristocratie pétersbourgoise, ou à des réceptions d'ambassades. Ils vont aussi à l'opéra italien ou au théâtre français. La Saison du printemps est réservée à des bals, et la cour reçoit tous les lundis au palais Anitchkov dans le salon blanc[11]. Plus tard, l'impératrice se rend de plus en plus en voyage pour soigner sa santé.

Mort et funérailles[modifier | modifier le code]

Au premier plan, à gauche se trouve le tombeau de Nicolas Ier de Russie et à droite le tombeau de son épouse Charlotte de Prusse (Alexandra Fiodorovna) (le tombeau sur lequel fut déposée une couronne de fleurs blanches).

Alexandra Féodorovna, maigre et tuberculeuse, décéda pendant son sommeil le au Palais Alexandre à Tsarskoïe Selo, âgée de 62 ans. Elle fut inhumée près de son époux dans la cathédrale Saints-Pierre-et-Paul de Saint-Pétersbourg.

Notes et références[modifier | modifier le code]

Alexandra et sa fille Marie (1829) par Piotr Sokolov.
  1. Troyat 2000, p. 22.
  2. Lincoln 1983, p. 417.
  3. Elle est plus impératrice que femme, elle m'a paru extrêmement fatiguée, sa maigreur est effrayante, in Marquis de Custine, La Russie de 1839
  4. La révolte des décabristes
  5. Troyat 2000, p. 125.
  6. a et b Lincoln 1983, p. 418.
  7. Lincoln 1983, p. 425.
  8. Grünwald 1946, p. 289.
  9. Grünwald 1946, p. 289, selon une lettre de Meyerdorff à son fils
  10. Troyat 2000, p. 127.
  11. Troyat 2000, p. 128.

Annexes[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (en) David Warnes, Chronicle of the Russian Tsars : the reign-by-reign record of the rulers of Imperial Russia [« La chronique des tsars russes »], Londres, Thames and Hudson, (ISBN 978-0-500-28828-3)
  • Constantin de Grünwald, La vie de Nicolas Ier, Paris,
  • Henri Troyat, Nicolas Ier, Paris, Librairie académique Perrin,
  • Charlotte Zeerpat, La fenêtre sur un monde perdu : album de la famille Romanov
  • (en) Bruce Lincoln, The Romanovs: Autocrats of All the Russians [« Les Romanov, autocrates de toutes les Russies »], Anchor, , 864 p.

Liens externes[modifier | modifier le code]