Charles Louis du Couëdic

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Charles Louis du Couëdic
Vicomte de Kerguélénen
Charles Louis du Couëdic

Surnom le brave du Couëdic
Naissance
Pouldergat en Bretagne
Décès (à 39 ans)
Brest
Origine Drapeau du royaume de France Royaume de France
Arme Pavillon de la marine royale française Marine royale française
Grade Capitaine de vaisseau
Années de service 1780
Conflits Guerre de Sept Ans
Guerre d'indépendance des États-Unis
Faits d'armes Combat entre La Surveillante et le HMS Quebec (1779)
Hommages Plusieurs rues et passages dont la rue Du Couédic
Cap de Couedic
Un tableau par Rossel de Cercy
Famille Famille du Couëdic

Emblème

Charles Louis du Couëdic de Kergoualer, né le au château de Kerguélénen, paroisse de Pouldergat près de Douarnenez en Bretagne et mort le à Brest des suites de ses blessures, est un officier de marine français du XVIIIe siècle. Engagé jeune dans la Marine royale au début de la guerre de Sept Ans, il participe à la défense de Louisbourg en Nouvelle-France, en 1757 et à la bataille des Cardinaux. En 1763, la paix revenue avec la signature du Traité de Paris, il s'engage comme volontaire dans une expédition à destination des Indes, puis en 1773 dans une seconde expédition, commandée par Yves de Kerguelen.

Il est célèbre pour le combat acharné qu'il livre, le , à bord de la frégate La Surveillante contre la frégate anglaise HMS Quebec pendant la guerre d'indépendance des États-Unis.

Biographie[modifier | modifier le code]

Origines et famille[modifier | modifier le code]

Charles Louis du Couëdic appartient à la famille du Couëdic, une famille de la noblesse bretonne d’ancienne extraction dont la filiation directe est établie jusqu’en 1370, la même famille qui a été fortement compromise dans l'Affaire Pontcallec. Les fiefs qu’elle possédait jusqu'à la Révolution relevaient directement de la Couronne de France et s’étendaient sur le Finistère et le Morbihan d’aujourd’hui. Elle est maintenue noble par un arrêt de 1669.

Son père est officier d’infanterie et termine sa carrière comme lieutenant du ban et arrière-ban du Parlement de Bretagne, et sa mère est Marguerite Ansker de Kerscao. Le couple se marie le , de cette union naissent six enfants, dont :

  • Thomas Louis du Couëdic de Kergoaler, son frère aîné, grand maître des Eaux et Forêts de Bretagne en 1750.

Carrière dans la marine royale[modifier | modifier le code]

Jeunesse et débuts pendant la guerre de Sept Ans[modifier | modifier le code]

Charles Louis du Couëdic étudie chez les Jésuites à Quimper où il a pour condisciple La Tour d’Auvergne. En 1756, la France entre en guerre contre l'Angleterre. C'est à cette date que Couëdic, alors âgé de 16 ans, entre dans la Marine royale. Il embarque sur Le Diadème, dans l’escadre commandée par Monsieur de Beauffremont sur Le Tonnant, avec qui il fait route vers Saint-Domingue. Il connait son baptême du feu le , lors de la capture du vaisseau de HMS Greenwich, de 50 canons.

Vue de Louisbourg. En 1757, Dubois de La Motte concentre une importante escadre à Louisbourg, ce qui sauve la ville d'un débarquement anglais.

Après cette victoire, l'escadre française fait voile vers la Nouvelle-France où le marquis de Montcalm a débarqué deux ans plus tôt, en 1756. La flotte se porte au secours de Louisbourg, établissement français de l’île Royale qui, en raison de sa position stratégique à l'entrée du Saint-Laurent, était convoité par les Anglais. Le , les vaisseaux de Bauffremont rejoignent une flotte plus importante placée sous le commandement de Dubois de La Motte. Les Français préparent les défenses de la ville et leur nombre suffit à dissuader la flotte anglaise, basée à Halifax, d'attaquer la citadelle française. Cependant, le , une épidémie de typhus contraint la flotte française à rentrer à Brest. Les vaisseaux touchent terre le 23 novembre et le débarquement des malades provoque une épidémie dans toute la région.

La Bataille de la baie de Quiberon, Nicholas Pocock, 1812. National Maritime Museum

En 1758, Du Couëdic embarque sur la frégate La Thétis, alors que la peste jaune ravage Lorient et Brest. L'année suivante il embarque sur le Robuste, commandé par Fragnier de Vienne, et participe à la bataille des Cardinaux le . Le combat se termine sans vainqueur et Le Robuste, chassé par plusieurs vaisseaux anglais, se réfugie dans l’embouchure de la Vilaine. Sous blocus anglais, le vaisseau reste bloqué dans la Vilaine jusqu'au , date à laquelle il réussit à s'échapper pendant un orage en compagnie de l'Éveillé.

En 1761, il connaît sa première défaite. Il sert sur La Vestale depuis quelques mois lorsque, au cours d'un combat contre le vaisseau anglais HMS Unicorn son commandant, Monsieur de Boisberthelot est tué ; le commandement revient à ses officiers qui, malgré une défense obstinée, sont obligés d’amener le pavillon. La frégate prise par les Anglais, il passera quatre mois enchaîné sur un ponton. Il est libéré par échange de prisonniers à Saint-Malo la veille de ses 21 ans.

En 1763, la désastreuse paix de Paris met un terme à la Guerre de Sept Ans en privant la France de ses possessions sur le continent américain et laisse les officiers de La Royale sans emploi. Charles-Louis du Coëdic sert alors comme sous-brigadier sur Le Petit Mars qui croise dans les Antilles. Au retour de ces campagnes, le bâtiment est pris dans une violente tempête le , qui emporte Le Petit Mars sur les côtes des Asturies, en Espagne. Les trois quarts de l’équipage meurent noyés et, seul officier rescapé, du Couëdic échappe miraculeusement à la mort.

Il rentre en France où il apprend sa promotion au grade d'enseigne de vaisseau et se porte volontaire pour être envoyé aux Indes, où bon nombre d'officiers généraux de l'époque refusent de se rendre[Note 1].

Les expéditions d'exploration (1767 - 1773)[modifier | modifier le code]

Expédition aux Indes[modifier | modifier le code]

C'est lors de cette campagne que Charles-Louis du Couëdic va s'illustrer. Il connaît en moins de huit ans l’émerveillement de l’exploration, l’appréhension de la découverte, le fracas des combats et l’exemple dans le commandement. Il se comporte remarquablement en 1767 alors que les flottes anglaises et françaises, censées être en paix, doivent constamment défendre leurs navires marchands. La Compagnie des Indes est alors pour la France un enjeu de commerce et de domination déterminant. Le port de Lorient est une possession de la Compagnie et les navires de commerce y sont très nombreux à mouiller parmi les bâtiments militaires.

Il embarque sous les ordres du commandant Géron de Grenier à bord de la corvette L’Heure du Berger qui appareille de Brest et fait route vers le Cap de Bonne-Espérance. Sa mission est de gagner l’Isle de France (de nos jours l'île Maurice) et de servir d'escorte aux navires qui gagnent les établissements français de l'Inde. Grenier a d’autres ambitions et convainc le Roi qu’une nouvelle route pour les Indes est possible et qu’il faut l’essayer[Note 2].

Pendant ses campagnes, Géron de Grenier organise plusieurs expéditions pour explorer les îles Seychelles alors mal connues et Madagascar, convoitée alors par les Hollandais, les Anglais et la France. Les officiers de L’Heure du Berger débarquent à Madagascar le , du Couëdic participe aux prises de contact avec les habitants de l'île. Le 14 juin suivant, il débarque aux Seychelles.

À partir de ce moment, Géron de Grenier va céder son commandement à Couëdic, premier lieutenant, durant les quatorze mois qui restent de campagne puis les quatre mois nécessaires pour ramener la corvette à Brest. En tout, la campagne aura duré deux ans sous l’autorité de Grenier et dix-huit mois avec du Couëdic comme commandant.

Âgé de 31 ans, il accède alors, le , au prestigieux corps de la Compagnie des Gardes de la Marine.

L'expédition de Kerguelen[modifier | modifier le code]

Charles-Louis ne va pas tarder à reprendre la mer après avoir rencontré Yves de Kerguelen. L’explorateur prépare une deuxième expédition pour confirmer sa découverte des îles de la Désolation, qui porteront son nom. Il fait appel à du Couëdic en raison de sa réputation.

L’équipage embarque avec du matériel d’exploration, et notamment une montre de Berthoud qui permet de connaître précisément sa position par la longitude. Couëdic embarque le à bord du Roland pour un voyage d’exploration des terres australes.

Durant ce second voyage, Kerguelen ne sait mettre en place la cohésion de son équipage ni l’unité d’action avec l'Oiseau, la frégate qui l’accompagne. Pendant le voyage, Couëdic chute et se blesse pendant une tempête à False Bay, en passant le cap de Bonne-Espérance et doit soigner à ses frais ses blessures à l'Isle de France où il est débarqué le , et rate donc le débarquement aux Kerguelen.

Guerre d'indépendance des États-Unis[modifier | modifier le code]

Une fois rétabli, du Couëdic rentre en Bretagne. Il sert sur la corvette L'Écureuil dans l’escadre du comte du Chaffaut et est promu au grade de lieutenant de vaisseau.

Il est chargé de veiller à la construction de deux frégates, ce qui lui permet de rester à terre entre à . Le , du Couëdic est fait Chevalier de l'ordre royal et militaire de Saint-Louis. Chef de brigade des gardes de la Marine en 1778, il est prêt à commander un bâtiment, d'autant plus qu'il s'est assuré la sympathie du ministre de la Marine, de Sartine.

Le combat de la frégate la Surveillante contre le HMS Quebec, le 6 octobre 1779[modifier | modifier le code]

Le combat de la frégate La Surveillante contre le HMS Quebec, le 6 octobre 1779.

Il était lieutenant de vaisseau et commandait avec trois de ses neveux la frégate La Surveillante, lorsque, le , il rencontre à la hauteur d'Ouessant le HMS Quebec, une frégate britannique, commandée par le capitaine George Farmer qui avait parié qu'aucune frégate française ne pourrait lui résister. La Surveillante est armée de 32 canons et Le Québec est de même force. Le combat est extraordinairement vif et sanglant entre ces deux marins, également jaloux de défendre l'honneur de leur pavillon. Tous deux déploient un courage indomptable. Le combat dure trois heures et demie. Agathon Marie René de la Bintinaye, son lieutenant, tente vainement l'abordage. Le Quebec saute avec son capitaine, qui ne voulut pas quitter le bâtiment que lui avait confié son souverain. La Surveillante, totalement désemparée, rasée comme un ponton est remorquée par son aviso, L'Expédition, qui avait également pris part au combat sous le commandement du jeune chevalier Alexandre-Amable de Roquefeuil qui réussit avec difficultés à lui faire rejoindre Brest avec 43 prisonniers anglais. La frégate rapportait son commandant grièvement blessé (deux balles dans la tête, une dans le ventre et un bras fracassé: du Couëdic avait refusé de quitter sa passerelle en disant : « Laissez donc, il y a deux heures que je suis mort ! »). Louis XVI, en considération des blessures que du Couëdic avait reçues, et de la conduite pleine de valeur et d'intrépidité qu'il avait tenue dans cette affaire, l'élève le 20 octobre au grade de capitaine de vaisseau. Mais ce marin ne jouit pas longtemps de sa gloire et des récompenses de son souverain : il meurt de ses blessures peu de jours après. Le roi accorde à sa veuve une pension de 2 000 livres, réversible par égales portions à ses trois enfants, et à chacun de ceux-ci une pension de 500 livres pour en jouir dès le moment. En 1784, l'intendant de Bretagne est autorisé à faire exécuter et poser un écusson aux armes de du Couëdic sur le monument élevé à Brest sur son tombeau, aux frais du roi.

Honneurs et postérité[modifier | modifier le code]

Du Couedic, statue par l'atelier de l'arsenal de Brest

Ce tombeau lui fut élevé dans l'église Saint-Louis de Brest (l'élévation géométrale date de 1780 et est due à Jean-Nicolas Trouille). On y voyait les armes de la famille surmontées d'une couronne de comte à neuf perles, la palme du courage offerte par la ville de Saint-Malo, et la croix de l'Ordre de Saint-Louis. Le monument de forme pyramidale était surmonté d'une cassolette et soutenu par un socle en forme de tête de mort entourée de feuilles et de feuillages. On pouvait lire cette phrase extraordinaire : « Jeunes élèves de la Marine admirez et imitez l'exemple du Brave du Couëdic, lieutenant en Premier des Gardes de la Marine. »

Son nom fut donné à un bâtiment et à des rues comme à Nantes et à Brest, ou à Rennes le passage du Couëdic.

Son nom a été donné par l'explorateur français Nicolas Baudin à un cap de l'île Kangourou : le cap de Couedic. En 1864, la rue Du Couédic[1] prend son nom à Paris. Une rue Du Couëdic existe également à Brest.

Un tableau de cinq pieds de longueur et trois et demi de hauteur, appartenant au roi et faisant partie de la collection des dix-huit combats de mer, a été peint par le chevalier (futur marquis) Rossel de Cercy, ancien capitaine de vaisseau, Chevalier de Saint-Louis.

Mariage et descendance[modifier | modifier le code]

Le , il épouse sa cousine lointaine Marie-Anne du Couëdic de Kerbleizec. La Compagnie des Indes créa leur service à déjeuner armorié à leurs armes. Une assiette fait partie de la collection du Musée de la Compagnie des Indes de Lorient (Morbihan, Bretagne)[2].

  • Marie-Louise, née 1772
  • Marie-Jeanne, née en 1775.
  • Charles-Louis, né en , il se distinguera comme capitaine de Dragons dans la Grande Armée.

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Étienne Taillemite l’exprime dans son ouvrage L’Histoire ignorée de la Marine française : « Il semble qu’à quelques exceptions près – La Pérouse, du Couëdic, Grenier, Kerguelen - les bureaux de Versailles n’y envoyaient pas la fine fleur du grand corps. »
  2. La route connue passe par l’Île de France et utilise une progression au sud. Les navires y livrent leur cargaison et se ravitaillent en eau avant de poursuivre sur les Indes. Géron de Grenier repart de Port-Louis avec la conviction qu’une progression par le nord fait gagner un temps précieux. En utilisant les alizés (les vents de mousson), la petite corvette gagne une semaine et ouvre une nouvelle route maritime plus courte de 800 miles. Une semaine gagnée, c’est stratégique : l’eau approvisionnée à l’Île de France croupit moins, les vivres de l’équipage sont plus sains et plus variés et le risque de maladies diminue.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Sous cette orthographe voir Rue Du Couédic sur le site de la voirie de la ville de Paris.
  2. Louis Mézin, Cargaisons de Chine, page 177, jatte du Couëdic no 148

Sources[modifier | modifier le code]

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Articles connexes[modifier | modifier le code]

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