Mouvement breton pendant la Seconde Guerre mondiale

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Situation à la veille de la Seconde Guerre mondiale

À la veille de l'Occupation, les nationalistes bretons sont partagés entre régionalisme, fédéralisme et séparatisme. Pour l'essentiel ces courants, même divisés, restent insensibles voire franchement hostiles aux valeurs démocratiques. Parmi ceux-ci, seul le courant ouvertement séparatiste du Parti national breton (PNB) demeure organisé ; dissous en 1939, il se reconstitue rapidement à l'automne 1940 et devient le parti politique le plus actif en Bretagne sous l'Occupation. Ayant rompu dès 1931 avec le régionalisme, ses fondateurs (Olier Mordrel/François Debeauvais) s'inspirent de la révolution irlandaise et jouent la carte nationaliste. Lorsque la guerre éclate, le PNB opte pour une ligne de ferme neutralité. Ce courant, dont l'idéologie anti-démocratique est très complaisante à l'égard de la xénophobie et de l'antisémitisme, influencé par les celtisants allemands, s'apparente à tous les fascismes européens. Pendant la guerre l'activisme du Parti national breton a complètement dominé les autres tendances du mouvement breton, qui dès lors s'en est trouvé discrédité.

Collaboration avec le régime de Vichy

Le 15 décembre 1940, on remet au maréchal Pétain un Placet signé par 46 personnalités bretonnes sollicitant une « autonomie administrative » dans le cadre de l'indivisibilité de la France. Le 22 janvier 1941, Hervé Budes de Guébriant est nommé par Vichy, président de la Commission nationale d’organisation de la coopération agricole. Le quotidien La Bretagne est crée par Yann Fouéré le 21 mars 1941). Il développe un point de vue régionaliste opposé à l’autonomisme du PNB. On retrouve aussi un certain nombre de nationalistes bretons dans le Comité consultatif de Bretagne, crée le 11 octobre 1942 par Jean Quénette, préfet de la région Bretagne. « Organisme d'étude et de travail », selon Yvonnig Gicquel, il ne dispose d'aucun des pouvoirs de décision et d'exécution (contrairement au vœu d'un parlement provincial tel que le concevaient les adeptes de la doctrine régionaliste bretonne). La volonté de ses membres (dont des membres du PNB prennent : Yann Fouéré, Joseph Martray, etc.) furent de transformer ce comité consultatif en véritable assemblée légiférante sur le plan des problèmes régionaux. On retrouve certains de ses membres lors de la création du CELIB. Yann Fouéré, membre du CCB, incarne la politique de collaboration, ne cessant de s'appuyer sur l'occupant nazi pour tenter d'obtenir du gouvernement de Vichy un statut particulier pour la Bretagne. Il faut cependant noter que ces mêmes efforts ont été faits auprès des mouvements gaullistes basés à Londres. C'est l'opportunisme qui prévaut chez Yann Fouéré et non l'adhésion aux valeurs de l'occupant.

Collaboration avec l'Allemagne

La politique allemande

Les travaux d'Henri Fréville et de Kristian Hamon ont défriché ce domaine. Trois périodes se succèdent.

Avant 1939, l'Allemagne tente d'empêcher la France et le Royaume-Uni d'entrer en guerre.

Durant la drôle de guerre, l'Allemagne prévoit de favoriser les mouvements régionaux (notamment flamand et breton) afin de saper la France (vengeance contre le traité de Versailles) afin que l'Allemagne reste la seule puissance continentale, sans aucune menace sur sa frontière occidentale. De même qu'en Irlande en 1916, quelques armes sont livrées mais ne sont pas utilisées.

Après la débâcle, l'État français et l'occupant s'entendent rapidement. Dès lors, les projets de découpage de la France sont abandonnés et le soutien aux nationalistes disparaît (il est notamment formellement interdit de proclamer un état breton ou de nuire à l'ordre public). D'ailleurs, l'annexion de l'Alsace-Lorraine ne sera jamais proclamé de jure. Après l'entrevue de Montoire, les mouvements nationalistes sont simplement tolérés (ausweiss de transport, autorisations d'achats de carburant qui deviennent rapidement théoriques), l'occupant se contentant d'empêcher le régime de Vichy de réprimer ces mouvements.

Raisons idéologiques

Ces deux peuples n'étaient pas considérés par les théoriciens racistes comme des « sous-hommes » (Untermenschen), contrairement aux Slaves par exemple. À l'est, les théories racistes privilégiaient les peuples du Caucase (Tatars, Tchétchènes).

Raisons stratégiques

La puissance occupante qu'était l'Allemagne avait tout intérêt à briser l'unité nationale française : son appui aux régionalismes entrait dans le cadre de cette politique plus vaste, qui comprenait d'autres aspects, par exemple la division entre zone libre (Paris) et zone occupée (Vichy). Mais très rapidement, les nationalistes bretons se rendent compte que l'Allemagne cherche en fait à ménager les intérêts de ses alliés de Vichy et pour cela refusent d'accorder la moindre importance aux revendications nationalistes bretonnes.

Organisations bretonnes

Parti national breton

Des membres du Parti national breton comme Olier Mordrel ou Alan Heusaff basculent dans une collaboration plus ou moins durable et importante avec les nazis. L'exemple de l'Irlande - voire l'idéal d'une Bretagne indépendante - continuait d'être la référence. De récentes études ont montré les liens étroits entretenus bien avant la guerre, depuis la fin des années vingt, par des dirigeants autonomistes bretons (tel Célestin Lainé, Alan Louarn) avec l'Abwehr (services de renseignement militaire de la république de Weimar, opposés aux nazi jusqu'en 1935). Après la défaite de 1940, écartant la question de l'autonomie de la Bretagne, les Allemands ont utilisé ces agents autonomistes dans des opérations militaires ou des actions de répression contre les résistants. Une faction déviationniste éphémère du PNB, crée en 1941, le Mouvement ouvrier social-national breton est dirigée par Théophile Jeusset.

Strolladoù Stourm

Les Strolladoù Stourm ou Bagadoù stourm, service d’ordre de Yann Goulet et de Alan Louarn sont le service d'ordre du Parti national breton. Une poignée de leurs membres se trouve pris à partis dans un affrontement contre la population de Landivisiau, le 7 août 1943. Yann Goulet, leur chef, interdit toute participation au Bezen Perrot.

Brezona

Job Loyant développe fin 1940 avec Kalondan, André Lajat et Yves Favreul-Ronarc'h, un ancien dirigeant du Parti national breton en Loire-Atlantique, la doctrine du mouvement Brezona : suprématie de la race bretonne, formation d'une communauté populaire nationale et un gouvernement par des élites. Ce mouvement aura une existence éphémère. Pour parer à une intoxication éventuelle du PNB par ce groupuscule, Yann Goulet s'était rendu à Nantes afin de prononcer l'excommunication des « déviationnistes ». le revolver placé bien en évidence à la hanche de son uniforme noir de chef des Organisations de Jeunesse, il ne laissa aucun doute sur ses intentions et la réunion de la section nantaise du P.N.B. que les contestataires espéraient mettre à profit pour prendre les commandes se déroula sans aucun incident.

Bezen Perrot

Un certain nombre de nationalistes bretons feront un choix dramatique : l'enrôlement dans un service d'ordre allemand, l'organisation Bezen Perrot, de Célestin Lainé et d'Alan Heusaff (qui verra passer jusqu'à 70 à 80 personnes dans ses rangs pour un effectif variant de 30 à 66 en fonction des engagements et des défections). Le Bezen Perrot est créé sous l'influence de Lainé qui n'entrevoit d'indépendance que par le fait militaire: son rêve demeure de constituer une armée bretonne régulière, si besoin est avec le support logistique allemand. Cette section est équipée avec des armes de récupération et ne peut en aucun cas être considérée comme une unité militaire de qualité. L'uniforme est celui de la SS. Mis en perspective avec les 17 000 volontaires flamands issus du mouvement national (pour une population égale), ces 60 personnes, dont une dizaine d'administratifs, constitue un effectif dérisoire. En outre les interventions ne se font jamais de manière groupée, mais par paquet de 5 ou 6 hommes aux cotés d'unités allemandes, elles rompues au combat. La formation du Bezen est aussi une réponse à l'exécution de plusieurs personnalités du mouvement culturel tel l'abbé Perrot. Devant se dénommer à l'origine Bezen Kadoudal, l'exécution sur ordre de Londres en 1943 du prêtre, décida Lainé à nommer son organisation de son nom en mars 1944.

Kommando de Landerneau

À partir d'avril 1943, la Gestapo avait créé des unités spécialement destinées à lutter contre la résistance. Constituée fin avril 1944 à Landerneau, Le Kommando de Landerneau faisait partie de ces unités. Il est composé de 18 hommes de troupe allemands et une dizaine d'agents de renseignement français (dont quelques autonomistes bretons) ainsi que des résistants retournés. Elle fut engagée contre les maquis de Trégarantec, Rosnoen, Ploumordien... Plusieurs résistants seront torturés. Le Kommando procédera également à des exécutions sommaires.

Point de vue des nationalistes bretons

Selon les nationalistes bretons, une approche manichéenne n'est pas de mise. Jeter le discrédit sur des personnes pour la simple raison qu'elles ont tenté de profiter de circonstances troublées et ont placé leur idéal d'indépendance avant tout, n'est pas justifiable. Il convient de ne pas minimiser non plus la répression de Vichy, et les attaques des communistes. Les militants culturels (rarement politiques) ont ainsi payé un lourd tribu pour leur amour de la langue et de la culture bretonne.

Plusieurs résistants communistes regretteront après la guerre ces exactions et le feront savoir publiquement. En 1944, à l'arrivée des troupes américaines, les maquisards communistes commencent la répression. Mme du Guerny, l'historienne bretonne sous le nom de Danio fut également martyrisée à coups de barres de fer comme son beau frère le commandant Le Minthier, les frères Tastevint furent émasculés, les sœurs Maubré et leur frère furent sauvagement assassinés dans le Morbihan. Cette épuration culturelle a été fermement condamnée par le parlement britannique par l'intermédiaire de députés gallois s'inquiétant de l'amalgame volontaire fait entre collaboration avec l'Allemagne et défense de la culture bretonne.

Le PNB, dissous comme le Parti communiste français en 1939, ne peut plus avoir d'existence légale. Ses militants sont traqués et confondus à dessein avec les miliciens qui arboraient en Bretagne une hermine sur leurs bérets. Plusieurs d'entre eux sont déportés en camp de concentration, près de Rennes notamment lors du tristement célèbre évènement du camp Marguerite de Rennes (300 femmes et enfants alsaciens furent affamés jusqu'à ce que mort s'ensuive pour sympathie « nationale socialiste »). Les nationalistes bretons défendent le fait que l'image souvent diffusée d'un mouvement ouvertement fasciste voire nazi ne reflète en rien l'engagement de nombreux militants souvent issus de formations politiques aussi variées que l'Action française (royalistes), la SFIO (socialistes), le PAB (parti autonomiste) ou le Parti Communiste français. Yann Goulet obtint d'ailleurs l'appui et le soutien de plusieurs militants communistes à la libération. D'autres militants, accusés de collaboration, présentèrent devant les tribunaux des familles juives cachés par leur soin (Alan Eon-Yann Goulet).

Actions de la Résistance

Plusieurs nationalistes bretons furent abattus par la résistance en 1943, le plus connu est l'abbé Perrot abattu le 12 décembre 1943 par Jean Thépaut, membre de l'Organisation spéciale du PCF. Auparavant, le 3 septembre 1943, Yann Bricler est abattu dans son bureau par 3 FTPs, de même pour Yves Kerhoas abattu par la résistance à la sortie d'une fête dans le village de Plouvenez.

Point de vue des historiens

Aux lendemains de l'Occupation, les pouvoirs publics et la population bretonne ont d'abord cédé à une « mémoire-panique », surestimant les dangers (insurrections) du PNB. Toutefois, c'est avant tout comme collaborateurs que ces membres ont été réprimés ; du reste tous n'ont pas été inquiétés, environ 15 à 16 % des membres du PNB ont été traduits devant les tribunaux, rares sont les sympathisants à avoir été jugés. Mais d'un autre côté, il n'y eut pas, comme l'affirma une propagande autonomiste d'après-guerre une oppression massive et aveugle. Cependant, à la Libération, condamnés à l’indignité nationale et interdits de séjour en Bretagne, de nombreux militants nationalistes bretons se retrouvèrent en banlieue parisienne, ou en exil.

L'engagement dans la Résistance

Plusieurs militants régionalistes ou fédéralistes ou nationalistes s'engagèrent dans la Résistance. Les motivations de ces militants bretons entrés en résistance relèvent de facteurs multiples :

Sao Breiz

Voir article principal : Sao Breiz.

  • Participation dès 1940, pour certains, aux "Sao Breiz", les bretons de la France libre. Dans ses rangs, on compte plusieurs membres de l'Union Régionaliste Bretonne et de l'association Ar brezoneg er skol, fondé avant-guerre par Yann Fouéré. Ainsi M.de Cadenet, membre du dernier groupement, élabora avec quelques camarades, un projet de statut accordant un certain nombre de libertés politiques à la Bretagne au moment de la signature de la paix, qui fut présenté au général de Gaulle. Selon Yann Fouéré, ce plan aurait été assez proche, en esprit, de celui que le Comité consultatif de Bretagne se proposait de soumettre en 1943 au maréchal Pétain. Ces deux plans furent sans suite.

Groupe Liberté

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  • pour d'autres, tel le groupe Liberté de Saint-Nazaire, formé de jeunes militants issus des Bagadoù stourm, l'anglophilie a été déterminante. Le groupe Liberté a participé, sous le nom de « Bataillon de la Poche », à la libération de la poche de Saint-Nazaire en mai 1945

Des liens nationalistes / Résistance à Londres ?

Engagement

Voir aussi