Marie Rose Moro

Marie Rose Moro née à Ciudad Rodrigo, Espagne, en 1961, est une psychanalyste, ethnopsychiatre et psychiatre française. C'est la chef de file actuelle de la psychiatrie transculturelle en France. Élève de Serge Lebovici, elle a travaillé quelques années avec Tobie Nathan. Développant la consultation transculturelle pour les enfants de migrants et leurs familles et tous les enfants qui ont plusieurs langues ou plusieurs affiliations, elle a dirigé jusqu'en 2013 le service de psychopathologie de l'enfant et de l'adolescent de l'hôpital Avicenne à Bobigny, et depuis 2008 la Maison de Solenn, maison des adolescents de l'hôpital Cochin à Paris. Elle est aussi écrivaine et ses ouvrages, tissés d'histoires issues de ses consultations cliniques, ont développé et prolongé les principes de l'ethnopsychanalyse. Elle a aussi publié des essais et un livre de correspondance.

Biographie

Née le 22 septembre 1961 à Ciudad Rodrigo (Salamanca, Espagne), elle arrive en France en 1962, dans les Ardennes, à l’âge de 9 mois^[1]. Son père avait trouvé un emploi comme bûcheron aux Mazures. La famille s'installe quelques années plus tard à quelques kilomètres, à Pouru-aux-Bois, commune de 150 habitants. Elle a 5 ans. Elle y passe son enfance et son adolescence avec ses quatre frères et sœurs^[2].

Elle est mariée avec un médecin, énarque. Ensemble, ils ont eu deux enfants^[2].

Formation

Elle fait ses premiers pas à l'école de Pouru-aux-Bois qui ne comporte que deux classes, CP et CE1 d'un côté, CE2, CM1 et CM2 de l'autre. L’école primaire accueille, outre les enfants d'origine ardennaise, une petite communauté espagnole, mais aussi des Polonais et quelques enfants de familles maghrébines. L'instituteur lui propose, pour faciliter son intégration, de s’appeler à l’école Marie-Rose, et non plus Maria del Rosario (son prénom d'origine). Elle continue son parcours scolaire au collège de Douzy, puis au lycée Pierre Bayle de Sedan^[3]^,^[4]^,^[5]^,^[2]. Elle poursuit ensuite des études, choisissant la médecine et la philosophie à Nancy, puis, un double cursus de psychiatrie et anthropologie. Intéressée par la pédopsychiatrie elle vient à Paris suivre l’enseignement de Serge Lebovici, à l’hôpital Avicenne de Bobigny. Elle travaille avec Tobie Nathan, s'initiant grâce à lui aux principes de l'ethnopsychiatrie. En travaillant à Bobigny, elle découvre aussi la vie des immigrants en Île-de-France, différente de ce qu'elle a connu en pays sedanais et dans un milieu rural^[3].

Psychanalyse

Depuis 2007, elle est psychanalyste à la Société psychanalytique de Paris.

Elle a fondé^[6] et dirige l'Association internationale d'ethnopsychanalyse (AIEP).

Parcours médical

Depuis 1989, elle est psychiatre de bébés, d'enfants et d'adolescents^[1]. Elle a été chef de service de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'hôpital Avicenne (Bobigny) de 2001 à 2013. Elle y crée, en 2004, une maison des adolescents, Casita, s'engage sur l'accompagnement des adolescents en difficulté, tout en constatant les évolutions dans la façon dont ces adolescents expriment leur malaise^[7] : anorexie des prépubères, phobie scolaire, etc. En 2008, elle devient chef de service de la Maison de Solenn, maison des adolescents de l'hôpital Cochin (AP-HP) à Paris. Elle y prend le relais de Marcel Rufo^[8]. Elle a été une pionnière sur la consultation transculturelle pour les enfants de migrants et leurs familles^[9]^,^[10].

Enseignante et chercheuse

De 2000 à 2008, elle est professeure de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'Université Paris 13, puis à partir de 2008, professeure de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'université Paris Descartes (Sorbonne Paris Cité). Elle dirige le diplôme universitaire (DU) de psychiatrie transculturelle (Faculté de médecine de Paris Descartes). Elle a créé en 2012 un diplôme universitaire sur les médiations interculturelles et la traduction à l'université Paris Descartes. Elle collabore au diplôme universitaire de psychopathologie du bébé (Paris 13) et au diplôme inter-universitaire de médecine de l'adolescent. Elle anime une équipe de recherches transculturelles et une équipe de recherches sur l'adolescence^[1].

Elle est fondatrice et directrice scientifique de la revue L'autre, Cliniques, Cultures et Sociétés et dirige une collection, La bibliothèque de l'autre, aux éditions La Pensée sauvage^[11]^,^[12].

Elle est Chevalier de la Légion d'Honneur depuis 2007. Nommée Chevalier de L'Ordre du Mérite en 2004, elle a été promue officier en 2014.

Axes de recherche

Ses travaux scientifiques concernent les adolescents, les forces et vulnérabilités des enfants de migrants, les dispositifs thérapeutiques, les métissages, le bilinguisme, le traumatisme psychique, etc. Ses recherches l'ont menée à théoriser la vulnérabilité et les besoins spécifiques de l'enfant de migrant mais aussi leur créativité. Cela est passé par la création d'une unité de soin transculturelle destinée aux familles migrantes en 1987, le premier dispositif de la sorte^[10]. Dans ces dispositifs, la culture des patients, celle des thérapeutes et la différence culturelle sont utilisées pour soigner, comme levier thérapeutique^[13].

Elle s'intéresse au rôle de l'école, à la réussite scolaire des enfants de migrants. Elle prône la valorisation de la langue maternelle « qui permet à l'élève d'être plus à l'aise dans sa langue seconde ». Elle s'indigne de ce que « la diversité et le métissage soient encore essentiellement vus comme des obstacles », et met en exergue les atouts que peuvent constituer des différences culturelles^[7]. Elle fait des recherches sur les bébés, les enfants et les adolescents: enfants de migrants, enfants de couples mixtes, enfants bilingues, enfants adoptés, enfants expatriés...

Elle a publié des articles et de mémoires scientifiques, mais aussi des ouvrages de vulgarisation, des ouvrages « qui se lisent comme des romans. Des récits de patients qu’elle transforme en biographies ». Elle y met en exergue « ce qui fait aller de l’avant »^[2] et la créativité des métissages, des enfants et de leurs parents.

Engagement humanitaire

Elle s'engage au sein de l'ONG Médecins sans frontières (MSF), à l'occasion du séisme de 1988 en Arménie^[1]^,^[8]. Elle y dirige aujourd'hui les recherches de psychiatrie en situation humanitaire^[1]. Plusieurs de ses livres traitent de ces questions.

Publications

De formation philosophique, ses ouvrages développent les principes de l'ethnopsychanalyse^[13] et permettent de comprendre les questions transculturelles de nos sociétés. Elle écrit aussi des essais.

Feldman M, Asensi H, Moro MR Eds Devenir des traumas d'enfance. Grenoble: Pensée sauvage Ed; 2014.
Moro MR (Ed) Devenir adulte. Chances et difficultés. Paris : Armand Colin ; 2014.
Moro MR (Ed) Troubles à l’adolescence dans un monde en changement. Comprendre et soigner. Paris : Armand Colin ; 2013.
Moro MR, Mestre C. Je t'écris de (correspondance). Grenoble: Pensée sauvage editeur; 2013.
Moro MR. Les enfants de l'immigration. Une chance pour l'école. Entretien avec D. et J. Peiron. Bayard; 2012.
Moro MR. Les ados expliqués à leurs parents. Paris : Bayard ; 2010.
Moro MR. Nos enfants demain. Pour une société multiculturelle. Paris : Odile Jacob ; 2010 (traduit en italien).
Moro MR. Aimer ses enfants ici et ailleurs. Histoires transculturelles. Paris : Odile Jacob ; 2007 (traduit en italien).
Moro MR. Enfants d'ici venus d'ailleurs. Naître et grandir en France. Paris : La Découverte ; 2002. 2nd édition en 2004 en poche chez Hachette Littératures dans la coll. « Pluriel » (traduit en italien et en grec).
Moro MR. Psychothérapie transculturelle des enfants de migrants. Paris : Dunod ; 1998 (coll. Thérapies). 2ème et 3ème éditions sous le titre Psychothérapie transculturelle des enfants et des adolescents (2000, 2004) (traduit en italien).
Moro MR. Parents en exil. Psychopathologie et migrations. Paris : P.U.F. ; 1994. 2ème et 3ème édition en 2002 (traduit en italien).
Mouchenik Y, Baubet T, Moro MR. Manuel des psychotraumatismes. Cliniques et recherches contemporaines. Grenoble : La Pensée sauvage ; 2012.
Mestre C, Moro MR. Partir. Migrer. L'éloge du détour. Grenoble : La Pensée sauvage ; 2011.
Mestre C, Asensi H, Moro MR. Vivre c'est résister. Textes pour Germaine Tillion et Aimé Césaire. Grenoble : La Pensée sauvage ; 2010.
Moro MR, Riand R, Plard V. Manuel de psychopathologie du bébé et de sa famille. Grenoble : La Pensée sauvage ; 2010.
Baubet T, Lachal C, Ouss L, Moro MR. (Eds), Bébés et traumas. Grenoble : La Pensée sauvage ; 2006.
Moro MR, De La Noë Q, Mouchenik Y. Manuel de psychiatrie transculturelle. Travail clinique, travail social. Grenoble : La Pensée sauvage ; 2004. 2nd édition revue et augmentée en 2006.
Moro MR, Lachal C. Les psychothérapies. Modèles, méthodes et indications. Paris: Armand Colin ; 2006 (traduit en anglais et en portugais). 2^e édition revue et augmentée publiée en 2012 avec T Baubet, B Dutray et A Perrier.
Moro MR, Moro I. et al. Avicenne l'andalouse. Devenir psychothérapeute en situation transculturelle. Grenoble : La Pensée sauvage ; 2004.
Baubet T, Moro MR. Psychopathologie transculturelle. Paris: Masson ; 2009 (traduit en italien). 2^e édition revue et augmentée en 2013.
Baubet T, Moro MR. (Eds), Psychiatrie et migrations. Paris : Masson ; 2003.
Baubet T, Leroch K, Bitar D, Moro MR. (Eds), Soigner malgré tout. vol. 1 : Traumas, culture et soins. Grenoble : La Pensée sauvage ; 2003.
Baubet T, Leroch K, Bitar D, Moro MR. (Eds), Soigner malgré tout. vol. 2 : Bébés, enfants et adolescents dans la violence. Grenoble : La Pensée sauvage ; 2003.

La plupart de ces livres ont été traduits en italien, certains en anglais, portugais ou grec...

Notes et références

↑ ^{a b c d et e} Rédaction du journal La Croix 2011.
↑ ^{a b c et d} Gros 2010.
↑ ^{a et b} Conférence du 5 février 2013 à la Maison de Solenn
↑ Gairin 2012.
↑ Auffret-Pericone 2011.
↑ Egli, Saller et Signer 2002, p. 9.
↑ ^{a et b} Kerviel 2012.
↑ ^{a et b} Depleschin 2012.
↑ Rédaction Libé 2002.
↑ ^{a et b} Courtois 2013.
↑ Site de l'AIEP
↑ Site de la revue L'autre, Cliniques, Cultures et Sociétés
↑ ^{a et b} Delaisi de Parseval 2010.

Voir aussi

Bibliographie

Classement par date de parution décroissante.

Claudia Courtois, « Claire Mestre, le goût des autres », Le Monde,‎ 15 juillet 2013 (lire en ligne).
Rédaction de Slate, « Qui sont les 100 Françaises les plus influentes? Découvrez le classement établi par la rédaction de Slate, sur une idée du site AdopteUnMec. », Slate (magazine),‎ 21 mai 2013 (lire en ligne). Marie Rose Moro figure au 35^e rang de ce classement.
Sylvie Kerviel, « Rencontre avec... Marie Rose Moro », Le Monde,‎ 24 juillet 2012 (lire en ligne).
Victoria Gairin, « Le réenchantement du monde ne réussira que par l'école », Le Point,‎ 12 juillet 2012 (lire en ligne).
Marie Depleschin, « La révoltée Marie Rose Moro », L'Express,‎ 7 mars 2012 (lire en ligne).
Catherine Vincent, « La maison de Solenn, un centre de soins atypique », Le Monde,‎ 12 août 2011 (lire en ligne).
Marie Auffret-Pericone, « Marie Rose Moro, au chevet des adolescents », La Croix,‎ 4 février 2011 (lire en ligne).
Rédaction du journal La Croix, « Marie Rose Moro en quelques dates », La Croix,‎ 4 février 2011 (lire en ligne).
Marie-Joëlle Gros, « En terre de déracinés. Marie-Rose Moro. Originaire de Castille, cette pédopsychiatre spécialiste des souffrances liées à l’exil dirige la Maison de Solenn », Libération,‎ 10 mars 2010 (lire en ligne).
Geneviève Delaisi de Parseval, « Des enfants sur la bonne voix. L’ethnopsychiatre Marie Rose Moro se penche sur les parcours langagiers chez les migrants. », Libération,‎ 25 février 2010 (lire en ligne).
Dalila Kerchouche, « Marie Rose Moro et Lilian Thuram : conversation sur la diversité », Le Figaro Madame,‎ 6 février 2010 (lire en ligne).
Catherine Vincent, « Quand l'enfance est maltraitée », Le Monde,‎ 30 mai 2007 (lire en ligne).
Rédaction du Figaro, « Marie-Rose Moro à la tête de la Maison de Solenn », Le Figaro,‎ 3 août 2008 (lire en ligne).
Jonathan Chauveau, « Marie Rose Moro. Enfants d'ici venus d'ailleurs. », Libération,‎ 23 janvier 2004 (lire en ligne).
Rédaction Libé, « Pionnière », Libération,‎ 1^er juin 2002 (lire en ligne).
Marie Huret, « Les nouveaux Dolto », L'Express,‎ 17 janvier 2002 (lire en ligne).
Marie Huret, « Marie Rose Moro », L'Express,‎ 17 janvier 2002 (lire en ligne).
(de) Werner Egli, Vera Saller et David Signer, Neuere Entwicklungen der Ethnopsychoanalyse: Beiträge zu einer Tagung im Dezember 2001 in Zürich, LIT Verlag Münster, 2002, 197 p. (lire en ligne).
Yakoub Saâdia, « Notes de lecture. Ouvrage : Michel Soulé (sous la dir.) et Maria Bet, Colette Chiland, Paul Denis, Gilbert Diatkine, Graziella Fava Vizziello, Bernard Golse, Marie-Rose Moro, Janine Noël, Françoise Peille, Rémy Puyuelo, Marcel Rufo, Les questions incontournables des enfants et les réponses évasives des adultes. Bréviaire à l'usage des parents, des éducateurs et des DDASS, Paris, ESF Ed., coll. « La Vie de l'enfant » », L'Enfance, vol. 48, n^o 3,‎ 1995, p. 373 (lire en ligne).