François Plantier (1766-1838)

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François Plantier
Portrait de François Plantier, c. 1815, anonyme.
Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 71 ans)
NantesVoir et modifier les données sur Wikidata
Sépulture
Nationalité
Formation
Collège de Machecoul (d)
École des Ponts ParisTechVoir et modifier les données sur Wikidata
Activité
Enfant
François Plantier (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
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François Plantier, né le à Machecoul et mort le à Nantes, est un ingénieur des ponts et chaussées français. Il s’est principalement investi dans les travaux du domaine maritime du département de la Loire-Atlantique.

Biographie[modifier | modifier le code]

Origines et débuts[modifier | modifier le code]

Portrait de l'avocat en parlement Mathieu Alexandre Plantier de la Cernetière.

François Plantier naît durant le règne de Louis XV, le , dans une famille de la haute bourgeoisie[1]. Côté paternel, sa famille est originaire de la Drôme. Les Plantier, s'étant succédé de père en fils dans la carrière juridique, s'installent à Machecoul en 1675[2]. Environ à cette date, son grand-père, Mathieu Alexandre Plantier de la Cernetière est le premier Plantier à naître en Loire-Atlantique. Avocat au parlement de Bretagne et receveur général des ducs de Retz, il s'allie ainsi avec la famille Le Retz en épousant Anne, fille d'Etienne Le Retz du Goullet, lui aussi receveur général du duché de Retz et plus particulièrement de la duchesse de Lesdiguières[3],[4],[5].

Le père de François Plantier, s'appelant aussi Mathieu Alexandre, devient quant à lui docteur en médecine. Il se rapproche des milieux noirmoutrins et épouse Anne Perrine Nau le . Le mariage se déroule non pas sur l'île mais à Saint-Étienne-du-Bois avec l'accord du curé noirmoutrin. Ce dernier évoque la crainte des époux d'une invasion anglaise de l'île, dans le contexte de la guerre de Sept Ans[6]. Peu après, le couple décide de se maintenir à Machecoul. François Plantier passe donc son enfance dans cette ville avec ses cinq frères et sœurs (Alexandre (né en 1761), Jeanne (née en 1764), Anne (née en 1767), Céleste (née en 1768) et Étienne (né en 1773)).

Vers 1783, il entre au collège d'humanités de Machecoul. Puis, à partir du , il est formé à l'école royale des ponts et chaussées et en ressort ingénieur agréé alors que la France connaît sa première révolution[2]. En 1790, Benjamin Alexandre Latour, premier enfant de sa sœur Jeanne, naît à Machecoul. Il est le fils de Pierre Alexandre, avocat au parlement de Paris et professeur de langues anciennes au lycée royal de Nantes[2],[7]. Ce neveu de François Plantier sera un chef de bataillon du génie servant sous l'empereur Napoléon Ier puis durant la Restauration et la monarchie de Juillet[8],[9].

Carrière[modifier | modifier le code]

François Plantier est muté en Charente par le ministre de l'Intérieur Bon-Claude Cahier de Gerville le , et commence ses premiers travaux à Confolens dès le 15 juillet. Rapidement, il agrandit le réseau routier en reliant la ville à Poitiers, ainsi qu'au tronçon reliant Angoulême à Limoges[2]. Voulant, après deux ans sur place, se rapprocher de sa famille restée à Machecoul, le , il écrit une lettre au ministère de l'Intérieur, géré depuis le mois d'avril par la commission révolutionnaire des administrations civiles, police et tribunaux. Par celle-ci, il se plaint de son trop faible salaire s'élevant à 5 000 francs et de son éloignement de Noirmoutier, rendant difficile la fructification de ses propriétés là-bas[2]. L'enjeu économique mis en avant à ce point s'explique par le fait qu'à l'époque, les ingénieurs, pour leurs travaux, doivent s'appuyer notamment sur leurs deniers personnels.

De plus, cette volonté de retourner sur sa terre natale s'explique aussi par le fait que sa famille eut fortement à souffrir des évènements de la Révolution. Son père fut emprisonné quelque temps au château des ducs de Bretagne, reconverti en prison, et mourut l'année suivante. Pierre Alexandre Latour, précédemment cité, fut, lui aussi, emprisonné un an à partir de 1793. Pire encore, ses deux oncles Alexandre et Étienne Plantier furent victimes des noyades de Nantes le 14 décembre de la même année[10]. Sa tante Céleste manqua de se faire arrêter elle aussi, toutefois sauvée de la mort par l'intervention officieuse du capitaine révolutionnaire Dominique Aubertin qui lui ordonna de se réfugier aux Sables-d'Olonne[11]. Enfin, les métairies que François Plantier avait perçu en héritage furent brûlées lors des batailles qui se déroulèrent à Noirmoutier[2]. Cependant, sa demande resta sans suite et il dut attendre le pour pouvoir être nommé à Noirmoutier. Il avait ainsi porté tout du long de cette période le sujet de la protection nécessaire de l'île par rapport aux vagues et aux inondations. C'est ainsi grâce à l'appui du conseiller d'État Bernard qu'il put obtenir sa mutation auprès du ministre Pierre Bénézech[2].

En 1797, François Plantier commence son chantier concernant les digues de l'Est de l'île, dont celle de la pointe de Devin, avec un budget de 50 000 francs (le budget originel devait s'élever à 100 000 francs) pour les réparations urgentes. Il écrit d'ailleurs à propos, dans un mémoire[2],[12] :

« En effet, quel projet plus téméraire que celui d'arracher à l'océan une partie de son domaine ! Que de courage, que de travaux, que d'efforts pour la conquérir ! Que de peines, que d'activité, que de constance pour la conserver ! […] Quels hommes méritent plus la protection de leur gouvernement, que cette poignée d'insulaires, qui après avoir opposé vingt-cinq kilomètres de digues aux fureurs de l'océan, sont sans cesse occupés du soin de les maintenir contre un ennemi fougueux, dont le courroux s'accroît par la résistance ! »

Il faut cependant attendre le pour avoir le premier devis qui lance véritablement les travaux. Le temps qu'il passe ainsi sur l'île permet à François Plantier de s'intégrer pleinement à la bourgeoisie noirmoutrine. Il se rapproche de la famille Adrien, dont les membres sont des capitaines au long cours participant à la traite négrière dans l'Atlantique, entre Saint-Domingue et l'Ouest africain. Louis Adrien, le grand-père de sa cousine germaine, qu'il épouse le [13], possédait d'ailleurs un esclave d'origine africaine qu'il a récupéré âgé de 13 ans[14].

Le Phare du Croisic dans sa première forme, photographie du début du XXe siècle.

Avec sa femme, il a trois enfants. Le premier, François Plantier, né en 1798, deviendra maire de Noirmoutier et juge de paix. Le deuxième, Louis-Joseph Plantier, né en 1800, sera polytechnicien et succèdera à son père en tant qu'ingénieur des ponts et chaussées. Il sera aussi l'auteur de la Tour Plantier. Enfin, le troisième, Célestin Plantier, né en 1804[15], sera médecin et maire de Noirmoutier[16]. Durant deux ans, François Plantier renforce donc les fortifications maritimes du Devin mais ne les termine pas puisque, le , François Plantier est appelé à Nantes par le directeur des ponts et chaussées, M. Cretet. Le maire de Noirmoutier, François Piet, le félicite avant son départ[2] :

« Permettez que je sois l'organe de ces mêmes habitants [de Noirmoutier] pour vous témoigner leurs regrets de votre départ d'un pays que vous avez toujours soutenu de tout votre pouvoir […] Dans mon cas particulier, je vois avec le plus grand plaisir votre avancement parce que je sais, qu'étant bon père de famille, vous brûlez du désir de rendre vos efforts heureux. »

Après sa promotion en tant qu'ingénieur ordinaire de deuxième classe, le , il est chargé de 300 kilomètres de route dans le département de la Loire-Inférieure, et des fleuves et rivières de la Loire, de l'Erdre et de la Sèvre Nantaise. L'année suivante, le , il est nommé ingénieur de première classe[2],[17].

Les quais de Nantes vus depuis l'île Feydeau, par Turner circa 1830.

Le , il est compté parmi les membres nantais de la Société académique de la Loire-Inférieure, il habite alors place Delorme[18],[19]. Il se lie d'amitié à cette époque, avec Joseph Marie Rapatel, l'ingénieur en chef avec qui il participe aux réunions de la société. Ce dernier, quittant Nantes à partir de 1810, laisse d'ailleurs à François Plantier quelques libertés concernant ses anciens services. L'ingénieur reprend ainsi pour son compte l'asséchement d'un marais de Donges et la construction d'une écluse[2]. François Plantier est impliqué, à partir du , dans un conflit qui oppose le comte Auguste de Juigné aux riverains du lac de Grand-Lieu. Il s'allie avec le premier dans son projet d'assèchement et lui propose de vider le lac par le port de Pornic. Ce projet ne verra finalement jamais le jour[20]. Du même temps, il relie Châteaubriant à Pouancé et organise les réparations aux premiers ponts de Pirmil et de la Madeleine, à Nantes[2].

François Plantier soulève une question épineuse en 1810 lorsqu'il note la dangerosité de l'entrée de la Loire. Par les nombreux naufrages recensés au niveau du plateau du Four, il a alors l'idée d'y faire élever un phare. En 1815, la chambre de commerce de Nantes réclame, elle, l'édification d'une tourelle. Pourtant, le projet ne débute pas immédiatement, car la France est plongée dans la période des Cent-Jours, voyant le retour de Napoléon et des attaques anglaises. Deux naufrages qui suivent, l'un en 1816 concernant une goélette des États-Unis, et l'autre, en 1817, d'un brick français, vont remettre sur la table ce problème. François Plantier et son supérieur et ami Joseph Marie Rapatel sont désignés pour élever le phare. Le chantier débute véritablement en et est ainsi le second phare français de l'Histoire à être bâti en mer, devenant par la même un symbole national d'ingéniosité et de compétence, renforçant l'image de puissance maritime française. Mais ce projet de grande ampleur amène forcément des complications et, alors que la structure est globalement finie, des premières fuites d'eau sont relevées en par le premier gardien Gaspard Demay. La même année, l'assistant du gardien Jean-Baptiste Bataille meurt et son corps en décomposition rapide manque de peu de rendre complètement insalubre le phare, emportant toutefois par la maladie le gardien Jean Régnault, atteint de paralysie générale. Enfin, le phare est mis en service de manière complète en avec l'allumage du feu à base d'huile végétale. Le chantier aura coûté au total 98 293 francs[21].

En parallèle, François Plantier planifie, entre 1813 et 1820, le terrassement le long des canaux de la Loire pour faciliter la navigation à vue[22]. Aussi, en juin 1824, il est nommé avec Joseph Marie Rapatel comme ingénieur chargé du contrôle de la machinerie des bateaux à vapeur[23], alors que ceux-ci sont à une phase récente de leur développement[24].

À partir de 1825, il succède à Joseph Marie Rapatel lorsque celui-ci décède, au poste d'ingénieur en chef de Nantes[25],[26]. Il fait ainsi ériger cette année-là une première tour d'environ 25 mètres sur le banc du Turc, à La Baule-Escoublac, qui devient plus tard le phare de la Banche. Peu avant 1829, il surélève la tour du Commerce et la première tour du futur phare d'Aiguillon[27],[28].

Début , le conseiller départemental Mispreuve reproche à François Plantier d'avoir négligé son chantier concernant le tronçon de route reliant Nantes à Legé. La nouvelle route n'était alors pas bien dégagée pour les notables venus assister à l'inauguration de la statue du général Charette le 4 du mois[29]. Marcel Filuzeau voit dans cette attaque une rivalité politique, M. Mispreuve reprochant subtilement à François Plantier de ne plus faire honneur à ses parents qui furent du côté de l'insurrection royaliste vendéenne.

Décès[modifier | modifier le code]

L'ingénieur, désormais âgé de 61 ans, prend sa retraite en 1827. Sa femme, Jeanne Adrien, décède le [30]. François Plantier lui survit quatre ans de plus, s'éteignant à son tour le . Il habitait depuis 1813 au 17 allée Duguay-Trouin, dans la Maison Charron[31],[32], qui sera repris en héritage par son fils Célestin[33].

Après avoir passé sa retraite proche de l'endroit où Jules Verne passa les douze premières années de sa vie (4 cours Olivier de Clisson, puis 2 Allée Jean Bart), mais aussi proche de là où le général Cambronne finit sa vie (3 rue Jean-Jacques Rousseau), François Plantier se fit enterrer dans son caveau familial, au cimetière La Bouteillerie.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Paroisse La Trinité de Machecoul., « Registre paroissial. (1766) »
  2. a b c d e f g h i j k et l M. Filuzeau François et Louis-Joseph Plantier, « Les Premiers grands défenseurs de l'île de Noirmoutier contre les périls de la mer (1952-1953) », Revue du Bas-Poitou.
  3. BOSSARD, M., « (Familles Pineau-Plantier de Noirmoutier, 1597-1948). Les Archives de la Vendée », Papiers Marcel Filuzeau, , p. 107 J.
  4. V. Cristofoli, Le Portrait de Mathieu Alexandre Plantier, Lettre aux Amis de l’Île de Noirmoutier, , chap. 164, p. 20‑22.
  5. Paroisse La Trinité de Machecoul, « Registre paroissial », .
  6. « Registre paroissial. (04/1756-08/1762). Paroisse de Noirmoutier. »
  7. Bajamin Alexandre, « Notice complète de Latour », Bibliothèque Centrale de l'École Polytechnique, .
  8. A. Fourcy, Histoire de l’École polytechnique, (lire en ligne)
  9. C. P. Marielle, Répertoire de l’École impériale polytechnique, Mallet-Bachelier, (lire en ligne).
  10. G. Lenotre, Les Noyades de Nantes, Perrin, , p. 129.
  11. D. Aubertin, Mémoires sur la guerre de la Vendée en 1793 et 1794, .
  12. F. Piet, Recherches topographiques, statistiques et historiques sur l'Ile de Noirmoutier, Imprimerie Mellinet, (lire en ligne).
  13. « Registre des mariages ». (1793-an V). Noirmoutier-en-l'Île.
  14. « Registre paroissial ». (04/1756-08/1762). Noirmoutier-en-l'Île.
  15. « Registre des naissances (1803-1804) Nantes ».
  16. « Délibérations municipales (1864-18/01/1875) Noirmoutier ».
  17. « Étrennes nantaises. (1809). Corps impérial des ponts et chaussées. Archives départementales de Loire-Atlantique ».
  18. « Société académique de Nantes et du département de la Loire-Inférieure. (1871). Annales ».
  19. « Étrennes nantaises. (1807). Corps impérial des ponts et chaussées. Archives départementales de Loire-Atlantique ».
  20. D. Pierrelée, Grand Lieu lac et marais, mémoire des paysages entre Loire et baie, Siloë, .
  21. « S. Bregeon (2022). Lumières sur l’océan - Le phare du Four du Croisic. Sillages - Maison de la Mer, n° 43, p. 6‑11. » [PDF]
  22. René de Brosses. (25/05/1819). Avis administratifs - Département de la Loire-Inférieure - Travaux publics. Affiches, annonces judiciaires et avis divers. Feuille commerciale et maritime de Nantes. [lire en ligne]
  23. Anne-Félix Brochet de Vérigny. (01/06/1824). Extrait des Registres de la préfecture du département. Recueil des actes administratifs de la Préfecture de la Loire-Inférieure. [lire en ligne]
  24. M. Mollat, Les Origines de la navigation à vapeur, Presses universitaires de France, .
  25. « Registre des décès. (1825). Nantes. »
  26. « Alban de Villeneuve-Bargemont. (23/06/1825). Département de la Loire-Inférieure - Balisage. Feuille commerciale, d'affiches, annonces judiciaires et avis divers ».
  27. Anonyme, « À l'éditeur de la Feuille commerciale », Feuille commerciale et maritime d'affiches, annonces judiciaires et avis divers, .
  28. « Séance du 18 mai 1827. Fonds de la commission des phares : registres de procès-verbaux. Archives nationales ».
  29. À nos Grands Hommes - Musée d’Orsay. Monument au général Charette.
  30. « Registre des décès. (1834). Nantes ».
  31. « Registre des décès. (1838). Nantes ».
  32. « Étrennes nantaises. (1814). Corps impérial des ponts et chaussées. Archives départementales de Loire-Atlantique ».
  33. « Étrennes nantaises. (1840). Médecins et chirurgiens à Nantes. Archives départementales de Loire-Atlantique ».

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Xavier de Montclos, L'Ancienne bourgeoisie en France du XVIe au XXe siècle, Christian, .
  • Jean Petit, Histoire de l'administration des ponts et chaussées, 1599-1815, Librairie Marcel Rivière, .
  • Jean-Clément Martin, Révolution et Contre-Révolution en France de 1789 à 1989, Presses universitaires de Rennes, .
  • Anne Vauthier-Vézier, L'Estuaire et le port : L'identité maritime de Nantes au XIXe siècle, Presses universitaires de Rennes, .
  • (en) Frédéric Graber, Obvious Decisions : Decision making among Ponts-et-Chaussées engineers around 1800, Social Studies of Science, (lire en ligne).

Liens externes[modifier | modifier le code]