« Supernova thermonucléaire » : différence entre les versions

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La masse des naines blanches constituées de [[carbone]] et d'[[oxygène]] ayant une faible vitesse de rotation est physiquement limitée à {{unité|1.44|[[Masse solaire|masses solaires]]}}<ref name="10.1051/0004-6361:20035822">
La masse des naines blanches constituées de [[carbone]] et d'[[oxygène]] ayant une faible vitesse de rotation est physiquement limitée à {{unité|1.44|[[Masse solaire|masses solaires]]}}<ref name="10.1051/0004-6361:20035822">
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== Modèle consensus ==
== Modèle consensus ==


[[Fichier:Type Ia supernova simulation - Argonne National Laboratory highres.jpg|vignette|Simulation numérique d'une déflagration-détonation de naine blanche donnant une supernova de type {{I}}a déclenchée en {{unité|63|points}} dans une sphère de {{unité|128|km}}.]]
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Une supernova de type Ia est une sous-catégorie dans la classification de Minkowski-Zwicky, due aux astronomes [[Rudolph Minkowski]] et [[Fritz Zwicky]]<ref name="10.1007/BF00626878">
Une supernova de type Ia est une sous-catégorie dans la classification de Minkowski-Zwicky, due aux astronomes [[Rudolph Minkowski]] et [[Fritz Zwicky]]<ref name="10.1007/BF00626878">
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== Mécanisme d'amorce ==
== Formation ==
Ce type de supernova n'a cours que dans un [[Étoile multiple|système multiple]], il ne peut se déclencher pour un astre précurseur seul. Il implique essentiellement un couple d'[[étoiles]] dont l'une est un cadavre [[Matière dégénérée|dégénéré]], une [[naine blanche]], et l'autre une étoile suffisamment proche pour déverser du gaz sur son compagnon dégénéré.


=== Progéniteur dégénéré simple ===
L'étoile qui fournit le gaz est souvent une géante ayant quitté la [[séquence principale]] et dont l'expansion des couches externes a fait dépasser le lobe de Roche du couple. La naine blanche est elle-même le résidu de l'ancienne étoile principale du couple, qui a pu d'ailleurs déverser du gaz sur son compagnon, accroissant sa masse et tendant à accélérer les étapes de sa séquence.


[[Fichier:Making a Nova.jpg|vignette|Vue d'artiste d'un système à progéniteur dégénéré simple pouvant donner lieu à une supernova de type {{I}}a.]]
Le cadavre dégénéré devient une gigantesque [[Bombe H|bombe thermonucléaire]] « amorcée » par l'[[effondrement gravitationnel]]. Les réactions nucléaires démarrent et s'emballent en quelques instants car l'[[énergie thermique]] dégagée se rajoute à celle issue de l'effondrement et ne modifie pas sensiblement la pression dans les zones dégénérées. Les réactions se poursuivent très rapidement, jusqu'à la transformation d'environ la moitié de la masse de l'étoile en {{lnobr|nickel 56}}.


L'un des modèles décrivant la formation de ce type de [[supernova]] est un [[Système binaire (astronomie)|système binaire]] compact. Le système est formé de deux [[étoile]]s de la [[séquence principale]] dont l'une est plus massive que l'autre. L'étoile la plus massive des deux évolue plus rapidement vers la [[branche asymptotique des géantes]], phase au cours de laquelle son enveloppe se dilate considérablement. Si les deux étoiles partagent une enveloppe commune, le système peut perdre beaucoup de masse et réduire significativement son [[moment cinétique]], son [[rayon orbital]] et sa [[période de révolution]]. Après que la première étoile a atteint le stade de [[naine blanche]], la seconde, initialement moins massive, évolue à son tour pour atteindre le stade de [[géante rouge]]. La naine blanche peut alors accréter une partie de la masse de la géante tandis que les deux étoiles spiralent l'une autour de l'autres en perdant du moment cinétique au point d'atteindre des orbites dont la période de révolution peut n'être que de quelques heures<ref name="1976IAUS...73...75P">
== L'explosion « totale » ==
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Sous la pression thermique produite par la zone dégénérée, les couches supérieures sont soufflées, ce qui enlève l'état de dégénérescence des couches inférieures qui sont progressivement « épluchées ». Le cœur lui-même atteint aussi probablement très rapidement un point où l'état de dégénérescence disparaît. La pression redevient une fonction directe de la température et l'effondrement est inversé.
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Une naine blanche peut également accréter de la matière à partir d'autres types de compagnons, comme un [[Étoile sous-géante|sous-géante]] ou même une étoile de la séquence principale. Le processus évolutif exact pendant cette phase d'accrétion demeure incertain car il dépend à la fois de la vitesse d'[[accrétion]] et du transfert de moment cinétique vers la naine blanche<ref name="2002ASPC..261..252L">
L'étoile est complètement désintégrée dans l'explosion. Il n'en reste aucun résidu, contrairement aux [[supernova à effondrement de cœur|supernovas à effondrement de cœur]].
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=== Progéniteur dégénéré double ===

Un autre mécanisme possible pour déclencher une supernova de type {{I}}a est la fusion de deux [[Naine blanche|naines blanches]] dont la masse résultante est supérieure à la [[masse de Chandrasekhar]]<ref name="Swinburne">
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Les collisions d'étoiles solitaires dans la [[Voie lactée]] se produisent tous les {{unité|e7}} à {{unité|e13|ans}}, bien moins fréquemment que les [[nova]]e<ref name="10.1073/pnas.25.3.118">
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Le scénario à progéniteur double est l'une des explications proposées pour rendre compte de la masse de {{unité|2|[[Masse solaire|M{{ind|☉}}]]}} du progéniteur de la supernova {{Lien|langue=en|trad=SN 2003fg|fr=SN 2003fg}}<ref name="Berkeley Lab">
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== « Chandelles standards » ==
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== Notes et références ==
== Notes et références ==
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== Voir aussi ==
== Voir aussi ==

Version du 16 juillet 2021 à 07:30

Supernova SN 1994D de type Ia (en bas à gauche) dans la galaxie NGC 4526[1].

Une supernova de type Ia (lire « type 1-a »), ou supernova thermonucléaire, est un type de supernova survenant dans les systèmes binaires contenant au moins une naine blanche, l'autre étoile pouvant être de n'importe quel type, d'une géante à une naine blanche plus petite[2].

Rémanent G299 d'une supernova de type Ia[3].

La masse des naines blanches constituées de carbone et d'oxygène ayant une faible vitesse de rotation est physiquement limitée à 1,44 masses solaires[4],[5]. Au-delà de cette masse critique, généralement confondue avec la masse de Chandrasekhar, des réactions de fusion nucléaire se déclenchent et s'emballent au point de conduire à une supernova. Cela survient typiquement lorsqu'une naine blanche accrète progressivement de la matière à partir d'un compagnon ou fusionne avec une autre naine blanche, lui faisant atteindre la masse critique, raison pour laquelle ce type de supernova ne s'observe que dans les systèmes binaires. L'hypothèse généralement retenue est que le cœur de la naine blanche atteint les conditions de fusion du carbone et, en quelques secondes, une fraction significative de sa masse subit une fusion nucléaire qui libère suffisamment d'énergie (1–2 × 1044 J[6]) pour la désintégrer complètement en une explosion thermonucléaire[7].

Du fait de la valeur constante de la masse critique déclenchant ces explosions, les supernovae de type Ia présentent une courbe de luminosité relativement constante, ce qui permet de les utiliser comme chandelles standard pour mesurer la distance de leur galaxie hôte à partir de leur magnitude apparente mesurée depuis la Terre. L'observation de telles supernovae au tout début de leur explosion est particulièrement rare, mais permet d'ajuster les modèles et de calibrer les chandelles standard afin, notamment, de mieux évaluer l'expansion de l'Univers et les effets de l'énergie noire[8].

Modèle consensus

Simulation numérique d'une déflagration-détonation de naine blanche donnant une supernova de type Ia déclenchée en 63 points dans une sphère de 128 km.

Une supernova de type Ia est une sous-catégorie dans la classification de Minkowski-Zwicky, due aux astronomes Rudolph Minkowski et Fritz Zwicky[9]. De telles supernovae peuvent se former de différentes manières mais partagent un mécanisme commun. Le fait qu'elles dérivent de naines blanches a été confirmé par l'observation de l'une d'elles en 2014 dans la galaxie Messier 82[10]. Une naine blanche à faible vitesse de rotation peut accréter de la matière à partir d'un compagnon et dépasser la limite de Chandrasekhar d'environ 1,44 M (masse solaire), de sorte qu'elle ne peut plus soutenir son poids par la pression de dégénérescence électronique (en)[11]. En l'absence de processus susceptible d'équilibrer l'effondrement gravitationnel, la naine blanche formerait une étoile à neutrons[12], comme dans le cas de naines blanches composées essentiellement d'oxygène, néon et magnésium.

L'opinion partagée par les astronomes qui modélisent les explosions des supernovae de type Ia est cependant que cette limite n'est jamais véritablement atteinte et que l'effondrement n'est jamais déclenché. On assisterait plutôt à l'augmentation de la température du cœur stellaire sous l'effet de l'augmentation de la pression et de la masse volumique de la matière qui s'y trouve[5], déclenchant un processus convectif lorsqu'on approche la masse de Chandrasekhar à environ 99 %[13], processus qui durent de l'ordre du millier d'années[14]. La fusion du carbone se déclenche lors de cette phase selon des processus qui ne sont pas encore connus avec précision[15]. La fusion de l'oxygène est déclenchée peu après, mais l'oxygène n'est pas consommé aussi complètement que le carbone[16].

Une fois que la fusion commence, la température de la naine blanche augmente. Une étoile de la séquence principale du diagramme de Hertzsprung-Russell peut se dilater et donc se refroidir pour équilibrer sa température, cependant, dans les naines blanches, la pression de dégénérescence est indépendante de la température, qui augmente très rapidement en provoquant un emballement thermonucléaire. Le flash accélère ainsi considérablement, en raison notamment de l'instabilité de Rayleigh-Taylor et d'interactions avec la turbulence. Savoir si ce flash se transforme en détonation supersonique à partir d'une déflagration subsonique fait l'objet de débats[14],[17].

Indépendamment des considérations sur l'amorçage de l'explosion de la supernova, il est généralement accepté qu'une fraction substantielle du carbone et de l'oxygène de la naine blanche fusionne en des éléments chimiques plus lourds en seulement quelques secondes[16], ce qui conduit à une élévation de la température interne jusqu'à atteindre plusieurs milliards de degrés. L'énergie libérée (1–2 × 1044 J[6]) est plus que suffisante pour désintégrer l'étoile, c'est-à-dire pour céder aux particules constitutives de l'étoile une énergie cinétique suffisante pour qu'elles se dispersent dans l'espace. La supernova expulse sa matière en générant une onde de choc à des vitesses typiques de l'ordre de 5 000 à 20 000 km/s, soit près de 6 % de la vitesse de la lumière. L'énergie libérée au cours de l'explosion est à l'origine de l'extrême luminosité de l'étoile. Une supernova de type Ia atteint typiquement une magnitude absolue de –19,3 — environ cinq milliards de fois celle du Soleil — avec peu de variations[14].

Les supernovae de type Ia diffèrent fondamentalement des supernovae de type II, dans lesquelles les couches superficielles de l'étoile subissent une explosion cataclysmique alimentée par l'énergie potentielle gravitationnelle libérée par l'effondrement du cœur de l'étoile à travers l'émission massive de neutrinos[18].

Formation

Progéniteur dégénéré simple

Vue d'artiste d'un système à progéniteur dégénéré simple pouvant donner lieu à une supernova de type Ia.

L'un des modèles décrivant la formation de ce type de supernova est un système binaire compact. Le système est formé de deux étoiles de la séquence principale dont l'une est plus massive que l'autre. L'étoile la plus massive des deux évolue plus rapidement vers la branche asymptotique des géantes, phase au cours de laquelle son enveloppe se dilate considérablement. Si les deux étoiles partagent une enveloppe commune, le système peut perdre beaucoup de masse et réduire significativement son moment cinétique, son rayon orbital et sa période de révolution. Après que la première étoile a atteint le stade de naine blanche, la seconde, initialement moins massive, évolue à son tour pour atteindre le stade de géante rouge. La naine blanche peut alors accréter une partie de la masse de la géante tandis que les deux étoiles spiralent l'une autour de l'autres en perdant du moment cinétique au point d'atteindre des orbites dont la période de révolution peut n'être que de quelques heures[19],[20]. Si l'accrétion se poursuit suffisamment longtemps, la naine blanche peut finir par approcher de la masse de Chandrasekhar.

Une naine blanche peut également accréter de la matière à partir d'autres types de compagnons, comme un sous-géante ou même une étoile de la séquence principale. Le processus évolutif exact pendant cette phase d'accrétion demeure incertain car il dépend à la fois de la vitesse d'accrétion et du transfert de moment cinétique vers la naine blanche[21]. On estime que plus de 20 % des supernovae de type Ia sont issues de progéniteurs dégénérés simples[22].

Progéniteur dégénéré double

Un autre mécanisme possible pour déclencher une supernova de type Ia est la fusion de deux naines blanches dont la masse résultante est supérieure à la masse de Chandrasekhar[23],[24].

Les collisions d'étoiles solitaires dans la Voie lactée se produisent tous les 107 à 1013 ans, bien moins fréquemment que les novae[25]. Elles sont plus fréquentes au cœur des amas globulaires[26] (voir blue stragglers). Un scénario susceptible de se produire est la rencontre avec un système binaire ou entre deux systèmes binaires contenant des naines blanches. De telles rencontres peuvent former un système binaire compact de deux naines blanches partageant une enveloppe commune et susceptibles d'aboutir à la fusion des deux astres[27]. Une revue de 4 000 naines blanches par le Sloan Digital Sky Survey en a identifié 15 systèmes doubles, ce qui correspond statistiquement à une fusion de naines blanches tous les cent ans dans la Voie lactée, une fréquence comparable à celle des supernovae de type Ia identifiées dans le voisinage du Système solaire[28].

Le scénario à progéniteur double est l'une des explications proposées pour rendre compte de la masse de 2 M du progéniteur de la supernova SN 2003fg (en)[29],[30]. C'est la seule explication plausible pour SNR 0509-67.5, les scénarios à progéniteur simple ayant tous été invalidés[31]. C'est également un scénario très probable pour SN 1006 dans la mesure où aucun reste d'un éventuel compagnon n'a été retrouvé dans son rémanent[22].

« Chandelles standards »

Comme le processus d'amorce est assez précis, survenant dans des conditions bien particulières, la magnitude atteinte et la courbe de décroissance de sa luminosité (dominée par la décroissance radioactive du nickel 56) sont caractéristiques de ce type de supernova. C'est pourquoi ces supernovas sont utilisées comme « chandelles standards » pour déterminer les distances extragalactiques.

Notes et références

  1. (en) « Supernova 1994D », sur https://esahubble.org/, Space Telescope Science Institute, (consulté le ).
  2. (en) « Type Ia Supernovae », sur https://web.archive.org/, Space Telescope Science Institute, (consulté le ).
  3. (en) Jennifer Harbaugh, « Exploded Star Blooms Like a Cosmic Flower », sur NASA, (consulté le ).
  4. (en) S.-C. Yoon et N. Langer, « Presupernova evolution of accreting white dwarfs with rotation », Astronomy & Astrophysics, vol. 419, no 2,‎ , p. 623-644 (DOI 10.1051/0004-6361:20035822, Bibcode 2004A%26A...419..623Y, arXiv astro-ph/0402287, lire en ligne [PDF]).
  5. a et b (en) Paolo A. Mazzali, Friedrich K. Röpke, Stefano Benetti et Wolfgang Hillebrandt, « A Common Explosion Mechanism for Type Ia Supernovae », Science, vol. 315, no 5813,‎ , p. 825-828 (PMID 17289993, DOI 10.1126/science.1136259, Bibcode 2007Sci...315..825M, arXiv astro-ph/0702351, lire en ligne).
  6. a et b (en) A. Khokhlov, E. Müller et P. Höhflich, « Light curves of type IA supernova models with different explosion mechanisms », Astronomy & Astrophysics, Astrophysics Data System, vol. 270,‎ , p. 223-248 (Bibcode 1993A&A...270..223K, lire en ligne [PDF]).
  7. (en) « Introduction to Supernova Remnants », sur https://heasarc.gsfc.nasa.gov/, Goddard Space Flight Center, (consulté le ).
  8. (en) « NASA Spacecraft Capture Rare, Early Moments of Baby Supernovae », sur NASA, (consulté le ).
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Voir aussi

Articles connexes

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