Appellation communale (Bourgogne)
Une appellation communale de Bourgogne, appelé aussi une appellation village, désigne dans le vignoble de Bourgogne un vin d'appellation d'origine contrôlée (AOC) portant le plus souvent le nom d'une commune. Il peut être produit sur une partie de la Basse-Bourgogne, de la côte de Nuits, de la côte de Beaune, de la côte chalonnaise ou du Mâconnais. Cette catégorie d'appellations est classée en troisième position de la hiérarchie des vins bourguignons suivante :
- les appellations grands crus ;
- les dénominations premiers crus ;
- les appellations communales (ou appellations villages) ;
- et les appellations régionales.
Hiérarchie des AOC en Bourgogne
[modifier | modifier le code]Les vins de Bourgogne se regroupent en quatre grandes catégories[1] :
- les appellations régionales, soit plus de la moitié de la production[2], provenant de l'ensemble du vignoble de Bourgogne ou d'une de ses sous-régions ; il y a six AOC régionales (bourgogne[n 1], bourgogne-passe-tout-grains, etc.) et deux sous-régionales (côte-de-beaune-villages et mâcon), auxquels on peut ajouter les quatorze dénominations géographiques de l'appellation bourgogne (bourgogne hautes-côtes-de-nuits, bourgogne tonnerre, etc.) et les 27 de l'appellation mâcon (mâcon Igé, mâcon Azé, etc.) ;
- les appellations communales, soit un tiers de la production environ ; il y a 45 AOC communales, également appelées « appellations villages » (chablis, pommard, nuits-saint-georges, givry, etc.), en y comptant les deux AOC sous-régionales (côte-de-beaune-villages et mâcon) ;
- les dénominations premiers crus, soit 10 % de la production ; il s'agit de dénominations géographiques complémentaires (DGC) au sein des appellations communales ; le nom de cette AOC doit être suivie du nom d'un climat classé en premier cru ; il y a 562 climats en premier cru (saint-aubin premier cru « Murger des dents de chien », santenay premier cru « la Comme », chablis premier cru « Fourchaume », etc.) ;
- les appellations grands crus, soit 1,5 à 2 % de la production ; il y a 33 AOC grands crus, dont trente-deux en Côte-d'Or (bienvenues-bâtard-montrachet, corton-charlemagne, bonnes-mares, romanée-conti, etc.) et une dans l'Yonne (les sept climats de chablis grand cru).
Si ces appellations et dénominations sont définies dans les différents cahiers des charges de l'INAO publiés par le ministère de l'Agriculture et homologués par des décrets ou arrêtés, les notions d'« appellation régionale », « sous-régionale » et « communale » (ou « villages »), ainsi que la liste des vins entrant dans ces catégories ne sont pas officielles. Elles sont plutôt affaires de tradition éditoriale parmi les guides des vins, repris ensuite sur les sites spécialisés.
Définition
[modifier | modifier le code]Les 45 appellations « communales », ou « villages », du vignoble de Bourgogne (le vignoble du Beaujolais et ses dix crus exclus)[n 2] concernent environ 34 % de la production du vignoble bourguignon ; il s'agit de terroirs sur une seule ou sur plusieurs communes favorables à une production de qualité, notamment les extrémités hautes et basses des versants des différentes côtes (le milieu de pente étant occupé par les premiers crus et les grands crus).
Les deux appellations côte-de-beaune-villages et mâcon ont la particularité d'avoir une aire de production recouvrant celle de plusieurs appellations communales, se trouvant donc dans la hiérarchie entre les appellations régionales et celles communales, d'où leur qualification dans des guides[4] et sites[5] d'« appellation sous-régionales », critiqué par d'autres auteurs[6].
Historique
[modifier | modifier le code]Dès le XVIIIe siècle, les villages de la côte d'Or sont connus pour leur production viticole et leur noms sont utilisés pour désigner leurs vins : on les retrouve dans l'ouvrage de Claude Arnoux en 1728 (Volnet, Pomard, Beaune, Alôsse, Pernand, Chassagne, Savigny et Auxey en rouge ; Puligny, Alosse et Chablis en blanc)[7], ainsi que dans l'ouvrage de Claude Courtépée en 1785 (Brochon, Chenôve, Couchey, Fixey, Fixin, Gevrey, Marsannay et Talant dans le tome II ; Alosse, Chassagne, Cheilly, Corpeau, Decise, Meursault, Montelie, Pernan, Pomard, Puligny, Saint-Aubin, Saint-Romain, Sampigni, Santenai, Savigny-les-Beaune, Serrigny, Vollenai, Nuys, Chambole, Comblanchien, Corgoloin, Morey, Premeaux, Prissey, Vosne, Vougeot et Couches dans le tome III)[8]. En 1816, l'ouvrage d'André Jullien est encore plus précis, classant les communes ainsi que plusieurs lieux-dits[9], tout comme Denis Morelot en 1831[10].
Une étape importante est la publication en 1855 de l'ouvrage dirigé par Jean Lavalle[11], accompagné d'une carte détaillée[12], fournissant pour chaque commune entre Dijon et Santenay un classement des différents climats selon une hiérarchie en quatre niveaux (tête de cuvée, première, deuxième et troisième cuvées). Ce classement par commune est assez largement repris en 1861 par le Comité d'agriculture de l'arrondissement de Beaune[13] qui comprend une carte semblable[14] ; Budker en 1879 fait de même pour les vignobles de la côte chalonnaise, du Mâconnais et du Beaujolais[15], tandis que Danguy & Aubertin en 1892 reprend la classification côte-d'orienne[16]. À partir du milieu du XIXe siècle, plusieurs communes de la Côte-d'Or obtiennent de pouvoir rajouter à leur nom celui de leur cru le plus prestigieux, pour que tous les vins de la commune profitent de cette notoriété : en 1847 Gevrey (devenant Gevrey-Chambertin), en 1862 Aloxe (Aloxe-Corton), en 1866 Vosne (Vosne-Romanée), en 1878 Puligny (Puligny-Montrachet), en 1879 Chassagne (Chassagne-Montrachet), en 1882 Chambolle (Chambolle-Musigny), en 1886 Flagey-les-Gilly (Flagey-Echézeaux), en 1891 Nuits-sous-Beaune (Nuits-Saint-Georges), en 1898 Cheilly et Dezize (Cheilly-lès-Maranges et Dezize-lès-Maranges), en 1899 Sampigny (Sampigny-lès-Maranges). En 1893, Pernand se voit refuser ce droit (à cause de sa voisine Savigny), finalement obtenu en 1936 (Pernand-Vergelesses) ; en 1924, Auxey (Auxey-Duresses) ; en 1927, Morey-en-Montagne (Morey-Saint-Denis) ; et en 1988, Serrigny (Ladoix-Serrigny).
En application de la loi du , il devient possible de faire délimiter une appellation d'origine (AO) au tribunal civil[17]. Sont ainsi progressivement délimitées les appellations pouilly-fuissé (le au tribunal de Mâcon, précisé le ), mercurey (le au tribunal de Chalon), chambolle-musigny (le au tribunal de Dijon, excluant Morey-Saint-Denis), gevrey-chambertin (le au tribunal de Dijon, excluant là aussi Morey-Saint-Denis, mais incluant une partie de Brochon), pouilly-vinzelles et pouilly-loché (le au tribunal de Mâcon), vins fins de la côtes de Nuits (le au tribunal de Dijon), aloxe-corton, nuits-saint-georges, volnay-santenot, bourgogne côte-chalonnaise, etc.
Le décret-loi du créé la notion d'appellation d'origine contrôlée, chacune devant être reconnue par décret, sur proposition du Comité national des appellations d'origine (CNAO)[18]. En conséquence, sont créées les AOC suivantes (auxquelles on pourrait rajouter les dix crus du Beaujolais)[n 2] :
- décrets du : beaune, chambolle-musigny, gevrey-chambertin, mercurey, montagny, nuits-saint-georges, pommard, pouilly-fuissé et vosne-romanée ;
- décrets du : fixin, morey-saint-denis, pernand-vergelesses, santenay, savigny-lès-beaune et vougeot ;
- décrets du : auxey-duresses, blagny, chassagne-montrachet, cheilly-lès-maranges, chorey-lès-beaune, côte-de-beaune, côte-de-beaune-villages, dezize-lès-maranges, ladoix, mâcon, meursault, monthélie, pinot-chardonnay-mâcon, puligny-montrachet, saint-aubin, sampigny-lès-maranges et vins fins de la côte de Nuits ;
- décret du : volnay ;
- décret du : chablis ;
- décret du : aloxe-corton[19].
- décret du : rully ;
- décret du : petit-chablis ;
- décret du : givry ;
- décret du : saint-romain ;
- décret du : l'AOC « vins fins de la côte de Nuits » devient le côte-de-nuits-villages ;
- décret du : saint-véran ;
- décret du : marsannay et marsannay rosé[n 3] ;
- décret du : regroupement des AOC cheilly-lès-maranges, dezize-lès-maranges et sampigny-lès-maranges sous le nom maranges ;
- décret du : bouzeron ;
- décrets du : irancy et viré-clessé ;
- décret du : saint-bris[n 4] ;
- arrêté[n 5] du : vézelay.
Liste des appellations communales
[modifier | modifier le code]Liste du nord au sud (reprenant celle du BIVB, excluant le mâcon et les dix crus du Beaujolais)[20] :
- vignoble de la Basse-Bourgogne :
- chablis ;
- petit-chablis ;
- irancy ;
- saint-bris ;
- vézelay ;
- vignoble de la côte de Nuits :
- vignoble de la côte de Beaune :
- ladoix ;
- aloxe-corton ;
- pernand-vergelesses ;
- chorey-lès-beaune ;
- savigny-lès-beaune ;
- beaune ;
- côte-de-beaune ;
- côte-de-beaune-villages (parfois qualifié d'AOC sous-régionale) ;
- pommard ;
- volnay ;
- monthélie ;
- auxey-duresses ;
- saint-romain ;
- meursault ;
- puligny-montrachet ;
- blagny ;
- saint-aubin ;
- chassagne-montrachet ;
- santenay ;
- maranges ;
- vignobles de la côte chalonnaise :
- vignoble du Mâconnais :
Notes et références
[modifier | modifier le code]Notes
[modifier | modifier le code]- ↑ Le nom d'un vin est un nom commun, il s'écrit donc sans majuscule initiale. Cf. références sur la façon d'orthographier les appellations d'origine.
- Si le vignoble du Beaujolais fait partie de la « Bourgogne viticole » depuis la décision de justice du [3], un usage habituel est de le mettre à part du reste du vignoble de Bourgogne.
- ↑ Le marsannay rosé est une appellation spécifique de sa reconnaissance en 1987 jusqu'au décret du (réunion des trois couleurs sous la même appellation).
- ↑ Le sauvignon de Saint-Bris était un VDQS depuis l'arrêté du , puis obtient l'AOC en 2003.
- ↑ En application de la loi d'orientation agricole du , les décrets sur les AOC sont désormais remplacés par des arrêtés.
Références
[modifier | modifier le code]- ↑ « Classification des appellations », sur vins-bourgogne.fr (consulté le ).
- ↑ Source pour les appellations et les % de production : « site du Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne », sur vins-bourgogne.fr.
- ↑ « Annales des falsifications et des fraudes » [PDF], , p. 572-573.
- ↑ Andrée Girard, Recueil des vins de France : guide des appellations, Dijon, Educagri, , 543 p. (ISBN 978-2-84444-065-5, BNF 37087573), p. 359.
- ↑ « Maconnais : Les appellations », sur www.vinsvignesvignerons.com.
- ↑ Jean-François Bazin (préf. Aubert de Villaine), Le vin de Bourgogne, Paris, Dunod, (1re éd. 1996), 263 p. (ISBN 978-2-10-058518-2, BNF 43672753), p. 42.
- ↑ Claude Arnoux, Dissertation sur la situation de Bourgogne et sur les vins quelle produit, Londres, P. du Noyer, , 64 p. (BNF 30031234), lire en ligne sur Gallica.
- ↑ Claude Courtépée et Edme Beguillet, Description historique et topographique du duché de Bourgogne : précédée de l'abrégé historique de cette province, Dijon, chez Causse, 1774-1785, 7 volumes (BNF 30281049), « lire en ligne sur Google books » (tome II) & lire en ligne sur Gallica (tome III).
- ↑ André Jullien, Topographie de tous les vignobles connus, suivie d'une classification générale des vins, Paris, Mme Huzard : L. Colas, , 566 p. (BNF 30667644), lire en ligne sur Gallica.
- ↑ Denis Morelot, Statistique de la vigne dans le département de la Côte-d'Or, Dijon, Victor Lagier, , 286 p. (BNF 30979367), lire en ligne sur Gallica
- ↑ Jules Lavalle, Émile Delarue et Joseph Garnier, Histoire et statistique de la vigne et des grands vins de la Côte-d'Or, Paris, Dusacq, , 244 p. (BNF 30753866, lire en ligne).
- ↑ Jean Jules Lavalle (cartographe) et Ch. Normand (lithographe), Plan topographique des grands vignobles de la Côte d'Or, Montrouge, Ch. Normand, , carte au 1/30 000 sur trois feuilles de 61 × 31 cm (BNF 40639037), lire en ligne sur Gallica.
- ↑ A. Casper et E. Marc (ill. M. L. Bonnamas), Plan statistique des vignobles produisant les grands vins de Bourgogne : classés séparément pour chaque commune de l'arrondissement de Beaune suivant le mérite des produits par les soins du comité d'agriculture de cet arrondissement, Beaune, E. Batault-Morot, , 50 p. (BNF 33540009), lire en ligne sur Gallica.
- ↑ Lucien Bonnamas, Plan des vignobles produisant les grands vins de Bourgogne classés pour chaque commune de l'Arrondissement de Beaune suivant le mérite des produits, Beaune, Ed. Batault-Morot, , carte au 1/20 000, lire en ligne sur Gallica.
- ↑ A. Budker, Carte des vignobles des Côtes Beaujolaise, Mâconnaise et Chalonnaise, Paris, Monrocq imp., 1875-1879 ou 1869, au 1/160 000 sur feuille de 80 × 49 cm, lire en ligne sur Gallica.
- ↑ R. Danguy et Charles Aubertin, Les Grands vins de Bourgogne (La Côte-d'Or) : étude et classement par ordre de mérite, nomenclature des clos et des propriétaires…, Dijon, H. Armand, , 662 p. (BNF 30298307), lire en ligne sur Gallica.
- ↑ « Loi du 6 mai 1919 relative à la protection des appellations d'origine », publiée au JORF du .
- ↑ « Décret-loi du 30 juillet 1935 relatif à la défense du marché des vins et régime économique de l'alcool », publié au JORF no 0178 du .
- ↑ Recueil des décrets d'appellations contrôlées promulgués du 8 décembre 1936 au 31 août 1938, Paris, CNAO, , 178 p., lire en ligne sur Gallica.
- ↑ « La Bourgogne, une localisation privilégiée – Recherche : Appellations Villages », sur vins-bourgogne.fr (consulté le ).
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Liens externes
[modifier | modifier le code]- « Classification des Vins de Bourgogne », sur citeclimatsvins-bourgogne.com.
- [vidéo] BIVB, « Comment sont classés les vins de Bourgogne ? », sur youtube.com, .
- BIVB, « Bourgogne maps : atlas interactif des vins de Bourgogne », sur bourgogne-maps.fr, .
- « Institut national des appellations d'origine », sur inao.gouv.fr.