Parentalité

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« Parentalité » est un néologisme[1] datant de la fin du XXe siècle, issu de la sphère médico-psycho-sociale, pour définir la parenté, la fonction d’être parent dans ses aspects juridiques, politiques, socio-économiques, culturels et institutionnels.

La parentalité se complexifie dans le cadre des familles recomposées, des familles pluriparentales, des foyers monoparentaux ; la parenté traditionnelle se complète au travers de la beau-parentalité, de la parentalité adoptive, de l’homoparentalité, de la procréation médicalement assistée qui spécifie le statut de parent biologique et de parent social. Cela conduit à un certain vide juridique et donne lieu à de nombreuses interrogations d'ordre juridique, comme la question de l'autorité parentale.

Champs d'application[modifier | modifier le code]

Généralité[modifier | modifier le code]

La notion de parentalité, rattachée à celle de la famille, évolue dans le temps et diffère en fonction des sociétés.. Elle a été d'abord utilisée par certaines disciplines des sciences humaines, comme l'anthropologie (fonctions parentales), la psychanalyse (lien psychique) et la sociologie (formes familiales), avant de passer dans le langage courant à partir des années 1980. Plusieurs approches cliniques et sociologiques ont été développées à son égard, qu'il s'agisse du groupe Houzel, de Catherine Sellenet[2], de Claude Martin [3] ou de Gérard Neyrand[4]. Le sociologue Pascal Gaberel, à partir d’une analyse des indicateurs statistiques des risques et du bien-être de l’enfant en Amérique du Nord depuis les années 1990, a montré les états successifs de la controverse sur le bien-être de l’enfant, qui définit les normes de la bonne parentalité, et qui se poursuit encore aujourd’hui[5].

Dans l’ensemble de ce qui a été écrit sur la parentalité on peut souligner les travaux basés dans un premier temps sur des études de cas puis sur une première tentative de conceptualisation de la parentalité d’un groupe de recherche sous la direction du pédopsychiatre et psychanalyste Didier Houzel dont les conclusions ont été retranscrites dans « Les enjeux de la parentalité »[6], suivi vingt ans plus tard par le travail du groupe dirigé par le sociologue Claude Martin, publié sous le titre Accompagner les parents dans leur travail éducatif et de soins. Un état de la question[7].

La parentalité se définirait selon trois axes nommés l’axe de l’exercice, l’axe de l’expérience et l’axe de la pratique de la parentalité.

  • L’axe de l’exercice de la parentalité peut se définir comme se rapprochant du domaine juridique puisqu'il regroupe l’ensemble des droits et des devoirs qui se rattachent à la fonction parentale et à la filiation, à titre d’exemples on peut citer l’autorité parentale ou encore la transmission du nom.
  • L’axe de l’expérience de la parentalité pourrait être qualifié d’axe du ressenti de la parentalité, il est en effet intimement lié à l’affect. Il souligne l’importance du décalage entre l’enfant imaginaire et l’enfant réel et son incidence sur le fait de se sentir ou non parent d’un enfant.
  • L’axe de la pratique de la parentalité se définit par l’ensemble des actes de la vie quotidienne de l’enfant : alimentation, éducation, soins… Cet aspect de la parentalité peut être délégué à une tierce personne dans le cas de placement de l’enfant notamment.

De ce point de vue là ce concept en trois axes exposé précédemment pose les fondations de l’idée d’accompagnement à la parentalité pour les parents qui éprouveraient des difficultés dans l’exercice d’un des trois axes. Des parents pourraient en effet avoir totalement les moyens de subvenir aux besoins de leur enfant (axe de la pratique) mais être défaillants dans les échanges affectifs avec celui-ci (axe de l’expérience) et une aide plus personnalisée pourrait leur être proposée.

Partage de l’autorité et structure familiale[modifier | modifier le code]

Dans les lois, du législatif, la parentalité et la coparentalité, sont des termes utilisés dans le domaine du partage juridique de l’autorité parentale[incompréhensible]. La Commission nationale consultative des droits de l'homme définit la parentalité par ses aspects juridiques, avec les devoirs des parents et leurs droits relatifs à l'autorité parentale et à la filiation.

Dans le champ sociologique il décrit plutôt les nouvelles formes de conjugalités et de vies familiales. C’est donc plutôt au sens de structures familiales qu’il faut alors l’entendre. On parle désormais de famille monoparentale[8], de famille homoparentale et même de famille pluriparentale dans le cas des familles recomposées. Il peut aussi désigner un mode de filiation (parentalité adoptive…) ou la situation des parents à l'arrivée d'un enfant (parentalité tardive).

Action et travail social[modifier | modifier le code]

Dans le champ de l’action politique et sociale vers les familles (« aides matérielles et financières à la parentalité »), la parentalité est un équivalent du mot « famille », ou, plus précisément, il vient quelque peu supplanter celui-ci dans la visée politique de gestion de la famille dans la constitution de ce que Gérard Neyrand désigne comme un dispositif de parentalilté[9].

Dans le domaine éducatif, le terme de parentalité englobe les pratiques éducatives destinées aux enfants, avec un souci de prévention de la maltraitance et de promotion d'une bien-traitance. Le paradoxe est que ces différents volets s'imposent à tout adulte chargé d'enfant sans qu'aucun lien de famille ne soit nécessaire pour les rendre souhaitables envers l'enfant. L'éducation parentale permet d'améliorer ces compétences.

Le concept de parentalité en travail social (Didier Houzel) :

Du point de vue des travailleurs sociaux, les travaux pour définir précisément le terme de parentalité sont nombreux et ce particulièrement depuis le début des années 1990. On peut en effet remarquer que l’utilisation de plus en plus fréquente de ce terme par les différents professionnels du travail social a suscité de multiples interrogations quant à la définition véritable de la parentalité dans ce domaine.

Dans un rapport de la conférence des ministres européens chargés des affaires familiales de , « La parentalité positive dans l'Europe contemporaine », il est précisé : « Concernant la terminologie, le rapport désigne par le terme de « parentalité » non seulement les activités des parents biologiques, mais aussi celles des personnes qui ne sont pas les parents de l’enfant mais participent à sa prise en charge et à son éducation. En un sens, les mots « parentalité » et « parents » sont utilisés ici comme une sorte de raccourci englobant toutes les activités et les personnes liées au fait d’élever un enfant. »

Enjeux cliniques[modifier | modifier le code]

Dans les champs psychiatrique et psychologique, le terme est utilisé pour désigner le processus qui permet à une femme ou à un homme de devenir parent, c'est-à-dire de se reconnaître soi-même dans son rôle et sa place de parent, de manière à pouvoir reconnaître son enfant dans son altérité. M. Lamour, psychiatre clinicien, a beaucoup travaillé sur cette notion et sur ces enjeux, la définissant comme un « processus maturatif garant de la santé mentale des générations futures ».

Quelques définitions[modifier | modifier le code]

Selon une définition donnée en 2004 par le Centre Local de Promotion de la Santé (CLPS) de Huy-Waremme, la parentalité est « l’ensemble des savoir-être et savoir-faire qui se déclinent au fil des situations quotidiennes en paroles, actes, partages, émotions et plaisirs, en reconnaissance de l’enfant, mais également, en autorité, exigence, cohérence et continuité ». Cette définition décrit l’ampleur de la tâche et les difficultés auxquelles les parents et futurs parents devront faire face[10]. L'éducation parentale vise à renforcer et améliorer ces compétences.

L'article 18 de la Convention internationale des droits de l'enfant conforte le principe selon lequel les deux parents ont la responsabilité commune d'assurer l'éducation et le développement de l'enfant. Le père et la mère d’un enfant seraient ceux qui s’engagent à assumer prioritairement et principalement ces responsabilités, celles attachées à la parenté et dans le lien de filiation. Le droit ne permet pas de passer de la parenté à la parentalité, mais le concept de parentalité est étendu à toute personne ayant charge d'enfant, y compris les structures de prévention et de promotion de la santé afin d’améliorer l’environnement des familles et les actions de la parenté au bénéfice de l’enfant.

Pour approfondir[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Martin C., Rapport pour le Haut Conseil de la population et de la famille, La parentalité en questions, Perspectives sociologiques, , 54 pages.
  • Titran M., Nous tentons d’aider les parents à faire émerger leurs talents, La Santé de l’Homme, no 367, septembre-, p. 26–27.
  • Vérité E., La parentalité commence avant la naissance, 2003, La Santé de l’Homme, no 367, septembre-, p. 30–32.
  • Didier Houzel, Les enjeux de la parentalité, Ramonville-Saint-Agne, Érès, coll. « Questions d'enfances », , 200 p. (ISBN 2-86586-693-9)
  • Didier Houzel, « IV – Les enjeux de la parentalité », dans La parentalité, Presses universitaires de France, (ISBN 9782130530534, lire en ligne), p. 61
  • Lecluse F., Wacquet G., Rapport, Petite enfance et parentalité dans le Nord-Pas de Calais: tout mettre en œuvre pour mieux préparer l’avenir, , 113 pages.
  • Le Gall D., Filiations volontaires et biologiques, la pluriparentalité dans les sociétés contemporaines, Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence, 2003, 51, p. 118–123.
  • Maigne E. Approche thématique: rubrique parentalité, 2003.
  • La Santé de l’Homme, no 367, septembre-, p. 10–12.
  • Quentel J.-C., Le parent. Responsabilité et culpabilité en question, Bruxelles, De Boeck, 2e édition 2008.
  • Johanna Luyssen, Si je veux : Mère célibataire par choix, Paris, Éditions Grasset, coll. « Essais et Documents », , 180 p. (ISBN 2-24682-321-8)[11],[12],[13],[14],[15],[16],[17].

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Il ne bénéficie à ce jour d’aucune définition reconnue dans les dictionnaires courants.
  2. Sellenet, Catherine., La parentalité décryptée pertinence et dérives d'un concept, Harmattan, (OCLC 813778452)
  3. Claude Martin, "Être un bon parent" : une injonction contemporaine, Rennes, Presses de l'EHESP, (ISBN 978-2-8109-0260-6, lire en ligne)
  4. Neyrand, Gérard., Soutenir et contrôler les parents : le dispositif de parentalité, Érès, 2019 (2011) (ISBN 978-2-7492-1463-4 et 2-7492-1463-7, OCLC 878833309)
  5. Gaberel, P.-E. (2014). Instaurer des normes de bonne parentalité. In C. Martin (Dir.), Être un bon parent (pp. 53-71). Rennes : Presses de l'EHESP.
  6. Didier Houzel, Les enjeux de la parentalité, Éditions Érès 1999.
  7. Claude Martin (directeur) et Abdelhafid Hammouche, Marianne Modak, Gérard Neyrand, Catherine Sellenet, Michel Vandenbroeck, Chantal Zaouche Gaudron, Sandrine Dauphin, Jeanne Moeneclaey., Accompagner les parents dans leur travail éducatif et de soins. Un état de la question, Paris, La Documentation française., , 143 p. (ISBN 2111454907)
  8. « Migros - Migros-Magazin & Migros Magazine », sur migros.ch (consulté le ).
  9. Gérard Neyrand, « La construction historique de la question du soutien des parents en France », Revue des politiques sociales et familiales, no 126,‎ , p. 91-98 (lire en ligne [PDF])
  10. « UCL-RESO », sur uclouvain.be
  11. Mère célibataire par choix, la journaliste Johanna Luyssen brise le tabou dans un livre, lesinrocks.com cheek, 3 février 2022, par Julia Tissier
  12. Faire un enfant seule, la fin d’un tabou ?, La Grande Table, franceculture.fr, 31 janvier 2022, par Olivia Gesbert
  13. Johanna Luyssen : « Avoir un enfant seule a été la décision la plus rationnelle de ma vie », nouvelobs.com/rue89, 4 février 2022, par Louise Auvitu
  14. « Famille : « Etre maman célibataire, cela ne signifie pas être seule », témoigne Johanna Luyssen », 20minutes.fr, 11 février 2022, propos recueillis par Delphine Bancaud.
  15. [radio] « Unique en son genre », franceinter.fr, 4 mars 2022, présenté par Giulia Foïs, avec Johanna Luyssen.
  16. A Angoulême, Johanna Luyssen raconte son choix d’avoir fait un bébé toute seule, charentelibre.fr, 22 février 2023, par Julie PASQUIER
  17. Elles ont choisi de devenir mères seules : "Je préfère un enfant avec un seul parent qui l'aime, plutôt qu'un enfant avec deux parents qui n'a été ni voulu, ni aimé", fr.news.yahoo.com, 13 avril 2023propos recueillis par Maïlis Rey-Bethbeder