Deux poèmes chinois, op. 35 (Roussel)

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Deux poèmes chinois
op. 35 (L 43)
Image illustrative de l’article Deux poèmes chinois, op. 35 (Roussel)
Première page du manuscrit autographe de Des fleurs font une broderie… (op. 35 no 1).

Genre Mélodies
Musique Albert Roussel
Texte Henri-Pierre Roché (traduction)
Langue originale français
Effectif chant et piano
Durée approximative min 30 s (no 1),
min (no 2)
Dates de composition mai 1927
Dédicataire Pierre Bernac (no 1)
Marcelle Gerar (no 2)
Création (no 1)
(no 2)
Fontainebleau, Conservatoire américain (no 1)
Paris, salle des Agriculteurs (no 2)
Interprètes Pierre Bernac (no 1)
Marcelle Gerar et Maurice Ravel (piano) (no 2)

Deux poèmes chinois, op. 35, est un ensemble de mélodies pour chant et piano d'Albert Roussel composé en 1927.

Présentation[modifier | modifier le code]

Textes[modifier | modifier le code]

Les textes des mélodies sont dus à Henri-Pierre Roché, d'après une traduction anglaise d'Herbert Allen Giles de poésies chinoises parues dans Chinese Poetry in English Verse (Londres, Quaritch, 1898, réédité en 1902)[1]. Le premier poème est de Li-Ho, le second de Chang-Chi[2].

Les adaptations en français sont parues de 1905 à 1907 dans la revue Vers et prose dirigée par Paul Fort et André Salmon[3].

Mélodies[modifier | modifier le code]

Albert Roussel compose ses Deux poèmes chinois en mai et juin 1927[4],[2] :

  1. « Des fleurs font une broderie… » — Allegro (noire = 132) de 90 mesures à
     — dédié à Pierre Bernac ;
  2. « Réponse d'une épouse sage » — Andantino (noire = 92) de 62 mesures à
     — dédié à Marcelle Gerar.

La partition est publiée par Durand en 1927[5].

La durée moyenne d'exécution de l'ensemble est de quatre minutes trente environ[6].

Orchestrations[modifier | modifier le code]

Albert Roussel orchestre la Réponse d'une épouse sage, qui est créée dans cette version par Claire Croiza et l'Orchestre symphonique de Paris le [4].

Des fleurs font une broderie… est orchestré par Henri Dutilleux en 1942[7].

Création[modifier | modifier le code]

Les Deux poèmes chinois ont connu deux créations séparées, par leurs dédicataires[4] :

Analyse[modifier | modifier le code]

Les Deux poèmes chinois, op. 35 empruntent au même fonds, et sont « ciselés avec autant d'art » que les Deux poèmes chinois, op. 12[8].

Des fleurs font une broderie[modifier | modifier le code]

Le premier poème, Des fleurs font une broderie…, évoque un jeune homme qui, « dans la vigueur de ses vingt ans, [...] contemple une nature que n'éclaire pas encore l'amour de celle qu'il attend[9] ». La déclamation est simplifiée, « jusqu'à l'interrogation finale — « Va-t-elle me donner l'épingle de ses cheveux ? » —, plus chromatique », et l'accompagnement du piano est « impétueux » avant de « se [faire] plus fluide pour conclure, décomposé »[9].

Pour Gilles Cantagrel, « sans orientalisme facile, la modalité confère un caractère étrange à cette saynète venue d'un lointain ailleurs[9] ».

Réponse d'une épouse sage[modifier | modifier le code]

Dans le deuxième poème, Réponse d'une épouse sage, une « jeune femme vertueuse se doit d'éconduire le mandarin qui cherche à la séduire et qu'elle aurait pu aimer[9] ».

Gilles Cantagrel souligne la « justesse absolue de l'expression » dans la mélodie, avec sa « ligne vocale d'une plasticité parfaite, allongée sur les mots-clés, retombant en une sensuelle vocalise, cédant par moments au parlando[9] ». Le musicologue met en exergue les moyens musicaux déployés par le compositeur, en particulier l'emprunt aux modes karnatiques de l'Inde et la touche de bimodalité de l'écriture. Aux dissonances provoquées, « le balancement rythmique régulier ajoute son délicat vertige », et à la fin de l’œuvre, « la phrase finale, « pour ne pas t'avoir connu plus tôt », ramène le motif initial pour clore ce paysage intime sur un désespoir inavoué »[10].

Damien Top note que l’œuvre « tire son étrangeté sonore du mode hindou Nettimatti (transposé sur mi, soit : mi, fa dièse, sol, la dièse, si, do double dièse, dièse) que Roussel avait déjà utilisé dans l'air du brahmane de son opéra-ballet Padmâvatî[11] ».

Mode hindou utilisé dans Réponse d'une épouse sage.

Postérité[modifier | modifier le code]

Les mélodies portent le numéro d'opus 35 et, dans le catalogue des œuvres du compositeur établi par la musicologue Nicole Labelle, le numéro L 43[2].

La réputation de la Réponse d'une épouse sage « ne s'est jamais démentie. Dans ces pages raréfiées, le musicien fait tenir un monde ; la réticence du texte, alliée à l'économie de la matière sonore, n'en a que plus de force » selon Guy Sacre[12].

Un avis partagé par Gilles Cantagrel, qui considère que Réponse d'une épouse sage « est sans doute le chef-d’œuvre mélodique de Roussel[9] ».

Discographie[modifier | modifier le code]

Chant et piano[modifier | modifier le code]

Chant et orchestre[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Ouvrages généraux[modifier | modifier le code]

Monographies[modifier | modifier le code]

  • Nicole Labelle, Catalogue raisonné de l'œuvre d'Albert Roussel, Louvain-la-Neuve, Département d'archéologie et d'histoire de l'art, Collège Érasme, coll. « Publications d'histoire de l'art et d'archéologie de l'Université catholique de Louvain » (no 78), , 159 p..
  • Raphaëlle Legrand, « Catalogue des œuvres », dans École normale de musique de Paris, Jean Austin (dir.), Albert Roussel, Paris, Actes Sud, , 125 p. (ISBN 2-86943-102-3), p. 46–95.
  • Damien Top, Albert Roussel : Un marin musicien, Biarritz, Séguier, coll. « Carré Musique », , 170 p. (ISBN 2-84049-194-X).
  • Damien Top, Albert Roussel, Paris, Bleu nuit éditeur, coll. « Horizons » (no 53), , 176 p. (ISBN 978-2-35884-062-0).

Notes discographiques[modifier | modifier le code]

  • (fr + en + de) Georges Boyer, « Albert Roussel, Bacchus et Ariane », p. 2-9, Paris, RCA 74321 606312, 1998.
  • (fr + en) Guy Sacre, « Le musicien des adieux », p. 4-13, Luxembourg, Timpani 2C2064, 2001.

Références[modifier | modifier le code]

  1. Labelle 1992, p. 21.
  2. a b et c Labelle 1992, p. 72.
  3. Top 2016, p. 43.
  4. a b et c Legrand 1987, p. 68.
  5. a et b Labelle 1992, p. 73.
  6. (en) Adrian Corleonis, « Poèmes chinois (2), for voice &… | Details », sur AllMusic (consulté le )
  7. Boyer 1998, p. 2.
  8. Sacre 2001, p. 10.
  9. a b c d e et f Cantagrel 1994, p. 575.
  10. Cantagrel 1994, p. 576.
  11. Top 2016, p. 130.
  12. Sacre 2001, p. 11.
  13. Pierre Jean Tribot, « Albert Roussel, le coffret aux trésors », sur Crescendo Magazine, (consulté le )

Liens externes[modifier | modifier le code]