Château de Kergournadech

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Château de Kergournadech
Image illustrative de l’article Château de Kergournadech
Château de Kergounadech
Nom local Château de Kergounadec'h, Kergournadeac'h
Début construction début XVIIe siècle
Protection Logo monument historique Inscrit MH (1926)
Coordonnées 48° 37′ 24″ nord, 4° 08′ 39″ ouest
Pays Drapeau de la France France
Région Bretagne
Département Finistère
Localité Cléder
Géolocalisation sur la carte : Finistère
(Voir situation sur carte : Finistère)
Château de Kergournadech

Le château de Kergournadech (ou Kergournadec'h, Kergournadeac'h, Kergounadeach) est un château du début du XVIIe siècle situé sur la commune de Cléder dans le Finistère, en France.

Il n'en reste que des ruines, et notamment les tours rondes et les mâchicoulis de style médiéval qui se mélangent aux cheminées de style renaissance.

Historique[modifier | modifier le code]

Légende des origines[modifier | modifier le code]

Selon Albert Le Grand[1] et Marc de Vulson de La Colombière[2], un jeune guerrier de Cléder, nommé Nuz, aurait aidé Paul Aurélien à délivrer l'Île-de-Batz du dragon qui dévastait cette île[3] ; en récompense, il aurait reçu du comte de Guyture qui administrait la contrée une terre appelée, en mémoire de son courage, Ker-gour-na-dec'h en breton (« la maison de l'homme qui ne fuit pas »), avec privilège pour les possesseurs successifs de cette terre de se présenter à l'offrande, armés de pied en cap, le jour de la dédicace en l'église de Léon, et d'occuper dans le chœur la stalle de l'évêque. Un tableau en bois représentant ce combat mémorable contre le dragon était, selon Félix Benoist, conservé au château de Kermenguy[4]. Pour cette raison, sous l'Ancien Régime, le seigneur de Kergournadech avait le privilège, le dimanche après les octaves de saint Pierre et de saint Pol, de se présenter à l'offrande, « l'épée au côté, en bottes et éperons dorés »[5]. Depuis ce jour, seuls les seigneurs de Kergournadech avaient le droit de pénétrer dans le chœur de la cathédrale du Léon. Cette tradition fut conservée jusqu'en 1644.

La famille de Kergournadech[modifier | modifier le code]

La famille de Kergournadech est une des plus importantes du Léon au Moyen-âge, après les vicomtes et avec les Du Chatel, Kermarvan, du Penhoët. Témoigne de cette ancienneté un proverbe disant qu'« avant qu'il y eût monsieur ou seigneur en aucune maison, il y avait un chevalier à Kergournadech ».

Le premier membre connu de cette famille est Nuz qui épousa Alix de Léon. Ils eurent deux fils, Salomon, qui décéda sans héritier, et Olivier, époux d'Eléonore de Dinan. Ils sont attestés à la fin du 13è siècle[6]. Leurs armes sont échiqueté d'or et de gueules.

Sur la base de l'ancienne maîtresse-vitre de l'église de Cléder, Marc Faujour a étudié la généalogie des Kergournadech et de leurs alliances[7].

Le fils d'Olivier, Guyomar participa à la guerre de Succession de Bretagne opposant Jean de Montfort à Charles de Blois, pendant laquelle il fut fait prisonnier ; il déclara alors « qu'il aimait mieux mourir que vendre un petit coin de sa terre pour payer sa rançon » tant il aimait son château[8].

Les propriétaires du château après les Kergournadech[modifier | modifier le code]

Vers 1504, le domaine tombe en quenouille en raison du mariage de Jeanne de Kergournadech avec Alain de Kerhoënt (Kerc'hoent). Leur fils Olivier de Kerhoënt[9], marié en 1559 avec Marie de Plœuc (décédée en 1573), est connu pour avoir possédé un livre rare "Coutumes de Bretagne", conservé à la British Library[10]. Leur fils François de Kerhoënt épousa Jeanne de Botigneau[11] dont il n'eut que deux filles et l'une d'elles, Renée de Kerhoënt[12], se maria le avec Sébastien II de Rosmadec, gouverneur de Quimper.

En raison du décès sans héritiers de Sébastien III de Rosmadec en 1700, le château de Kergournadech fut vendu en 1726 à Mathieu Pinsonneau[13], maréchal héréditaire du Laonnois. C'est à son épouse Pétronille Tribouleau de Bondi, et à sa fille, Pétronille-Françoise de Pinsonneau, qui épousa en 1714 Julien Louis Bidé de La Granville, intendant des Flandres, que l'on attribue la ruine du château[14].

En 1878, le château alors ruiné est possédé par la famille Budes de Guébriant et servit de carrière, une partie des pierres fut utilisée pour la construction des églises de Plounévez-Lochrist et Plouider.

Le château[modifier | modifier le code]

Le site du château de Kergournadec'h a été occupé à une période ancienne, puisqu'un tertre funéraire y a été découvert en 1638[15],[16].

Construit vers 1630 par Sébastien II de Rosmadec, l'actuel château de Kergournadech le fut sur le plan des anciens châteaux forts, mais sans remparts ni douves (on y entrait par une simple poterne) : un bâtiment carré flanqué aux angles de quatre grosses tours rondes, avec galerie de mâchicoulis. La base de la tour de droite, celle du sud, est armée d'un éperon massif. C'était une résidence splendide dont les tours étaient terminées en coupoles surmontées d'une lanterne à colonnes ; les girouettes figuraient des chevaliers, la lance au poing. Dans l'enceinte du château se trouvait un vaste corps de logis avec ses portes et ses fenêtres gothiques. Le style Renaissance n'est rappelé que par l'ornementation des cheminées. D'après Masseron [17], Marc de Vulson de La Colombière, qui y séjourna, écrivit que c'est « l'une des plus belles et régulières maisons qui se puisse voir en France en raison de son architecture ». Mais Masseron ajoute qu' « il fallait être un gentilhomme breton perdu dans ses landes pour avoir l'idée de se construire ainsi une demeure fortifiée aux dernières années du règne de Louis XIII »[17].

Marc de Vulson de La Colombière publie deux gravures de Jean Picart, dont l'une datée de 1632, et un plan du château[2].


Plus tard (1825), Miorcec de Kerdanet décrira ainsi ces gravures : « On y voit que le château en 1644, était construit en belles pierres de taille, flanqué de quatre grosses tours , avec mâchicoulis , guérites et meurtrières. Dans l'enceinte du château , régnait un vaste corps-de-logis avec ses portes et ses fenêtres gothiques. Derrière le château, on remarquait un bel étang entouré de quelques bois, et plus loin, une chapelle groupée sur une petite éminence[18]. »

Cependant, ce « goût archaïsant pour les tours »[19] ne doit pas cacher que Kergournadech est une "étonnante réalisation" marquant une « recherche architecturale » qui est d'ordre renaissant : "La ruine de Kergournadech -depuis sa destruction volontaire au XVIIIe siècle- a beaucoup trompé ceux qui l'ont décrite. Ils étaient frappés de l'apparence archaïque des grosses tours et de leurs "mâchicoulis", mais le plan que montre bien l'intérieur de la ruine est un plan de la Renaissance basé sur deux escaliers d'apparat qui occupent le milieu de l'espace intérieur: disposition très proche du château de Challuau en Seine-et-Marne, connu par le second livre (1579) des Plus excellents bâtiments de France[20] de Jacques Ier Androuet du Cerceau"[19]. Le château de Chambord, dans son premier état, est lui aussi basé sur un plan carré flanqué de quatre tours et articulé autour d'un escalier central.

En raison du décès sans héritiers de Sébastien III de Rosmadec en 1700, le château de Kergournadech fut vendu en 1720 à Mathieu Pinsonneau[13], maréchal héréditaire du Laonnois, pour la somme de 502 000 livres. Les archives du château de Kérouzéré conservent une copie de l'acte de vente avec une description de la seigneurie et du château, publiée par Marc Faujour[21].

C'est à l'épouse de Mathieu Pinsonneau, Pétronille Tribouleau de Bondi, et à sa fille, Pétronille-Françoise de Pinsonneau, qui épousa en 1714 Julien-Louis Bidé de la Grandville, intendant des Flandres, que l'on attribue la ruine du château. Les pierres sont vendues (le château devint une carrière à ciel ouvert). Un grand pavillon datant du XVIIIe siècle est construit à proximité des ruines[22].

En 1878, le château alors ruiné est possédé par la famille Budes de Guébriant et continua à servir de carrière, une partie des pierres fut utilisée pour la construction des églises de Plounévez-Lochrist et Plouider.

Le Château de Kergounadech est inscrit aux monuments historiques par arrêté du [23].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Albert Le Grand, Les vies des saints de la Bretagne Armorique, (lire en ligne)
  2. a et b Marc Vulson de la Colombière, La Science héroïque, traitant de la noblesse et de l'origine des armes, (lire en ligne)
  3. Nul Nuz ou autre chevalier n'est mentionné dans la vie de Paul Aurélien, voir Paul Aurélien, vie et culte, Minihi Levenez, 1991.
  4. Félix Benoist, "La Bretagne contemporaine", tome "Finistère", Henri Charpentier imprimeur-éditeur, Nantes, 1865
  5. A. Marteville et P. Varin, Dictionnaire historique et géographique de la province de Bretagne, t. 1, (lire en ligne).
  6. Père du Paz, La généalogie de la maison de Kergournadech, (lire en ligne)
  7. Marc Faujour, L'héraldique des seigneurs de Kergournadech et des familles alliées dans le haut Léon, 1275-1721, éd. M. Faujour, Nantes, 2016
  8. Miorcec de Kerdanet, Le château de Kergourdanech : Le lycée armoricain : revue de l'ouest, vol. 6, Nantes, (lire en ligne).
  9. Olivier de Kerhoënt mourut en 1594, et « fut inhumé en l'église de Cléder, au chœur d'icelle, sous un tombeau long et élevé », voir Comtesse du Laz, "Généalogie de la maison Jegou du Laz, avec des pièces justificatives et complémentaires", 1897, consultable https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5612573z/f180.image.r=Cl%C3%A9der?rk=4721053;2
  10. « blog.pecia.fr/post/2010/07/28/… »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?).
  11. Le château de Botigneau ou Bodigneau se trouve à Clohars-Fouesnant
  12. Sa sœur cadette Claude de Kerhoënt épousa François de Kergoadès
  13. a et b Mathieu Pinsonneau (1656-1747), secrétaire de Louvois, surintendant des Finances du régent duc d'Orléans, secrétaire du conseil de Guerre en 1715, voir Alexandre Dupilet, La Régence absolue: Philippe d'Orléans et la polysynodie (1715-1718), Editions Champ Vallon, 448 p. (ISBN 9782876737334, présentation en ligne).
  14. Louis Le Guennec, Le Finistère monumental : Morlaix et sa région, vol. 1, Les Amis de Louis Le Guennec,
  15. P. du Chatelier, « Fouille d'un tumulus à Kergournadech en 1638 », Bulletin de la Société Archéologique du Finistère, vol. 25,‎ (lire en ligne)
  16. Yohan Sparfel et Yvan Pailler, « Inventaire des monuments du Néolithique et de l'Age du bronze dans le Finistère », SRA Bretagne,‎ (lire en ligne)
  17. a et b Alexandre Masseron, Kergournadech, Journal des débats politiques et littéraires, (lire en ligne)
  18. Miorcec de Kerdanet, « Châteaux de Bretagne », dans Le Lycée armoricain. Vol. 6, (lire en ligne)
  19. a et b André Mussat, Arts et cultures de Bretagne: un millénaire, Berger-Leuvrault, 1979
  20. « Le Premier [-Second] volume des plus excellents bastiments de France ... par Jacques Androuet Du Cerceau... », sur Gallica, (consulté le ).
  21. Marc Faujour, L'héraldique des seigneurs de Kergournadec'h et des familles alliées dans le Haut-Léon, 1275-1721, Nantes, 2016.
  22. « Cléder : Histoire, Patrimoine, Noblesse (commune du canton de Plouzévédé) », sur infobretagne.com (consulté le ).
  23. Notice no PA00089873, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • P. du Chatelier, « Fouille d'un tumulus à Kergournadech en 1638 », Bulletin de la Société Archéologique du Finistère, vol. 25,‎ (lire en ligne).
  • Marc Faujour, L'héraldique des seigneurs de Kergournadech et des familles alliées dans le haut Léon, 1275-1721, .
  • Alexandre Masseron, « Kergournadech », Journal des débats politiques et littéraires,‎ (lire en ligne).
  • Miorcec de Kerdanet, « Châteaux de Bretagne », dans Le Lycée armoricain. Vol. 6, (lire en ligne).
  • André Mussat, Arts et cultures de Bretagne: un millénaire, .
  • Père du Paz, La généalogie de la maison de Kergournadech, (lire en ligne)
  • Marc Vulson de la Colombière, La Science héroïque, traitant de la noblesse et de l'origine des armes, (lire en ligne).

Article connexe[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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