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Pseudoéphédrine

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Pseudoéphédrine
Image illustrative de l’article Pseudoéphédrine
Structure de la pseudoéphédrine (S,S)
Identification
Nom UICPA (1S,2S)-2-(méthylamino)-1-phénylpropan-1-ol
No CAS 90-82-4 stéréoisomère (R,S)[1]
No ECHA 100.001.835
No CE 202-018-6
Code ATC R01BA02
SMILES
InChI
Apparence cristaux blancs ou incolores[réf. nécessaire]
Propriétés chimiques
Formule C10H15NO  [Isomères]
Masse molaire[2] 165,232 2 ± 0,009 6 g/mol
C 72,69 %, H 9,15 %, N 8,48 %, O 9,68 %,
Propriétés physiques
fusion 184 °C (chlorhydrate)[réf. nécessaire]
Solubilité eau : faible
éthanol : très bonne
dichlorométhane : faible
benzène: très bonne
[réf. nécessaire]
Données pharmacocinétiques
Métabolisme 10-30 % hépatique
Demi-vie d’élim. 9-16 heures
Excrétion

70-90 % rénale


Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire.

La pseudoéphédrine est une amine sympathomimétique fréquemment utilisée comme décongestionnant. Ses sels, chlorhydrate et sulfate sont utilisés dans nombre de médicaments sans ordonnance. Ils sont utilisés seuls ou en association avec un antihistaminique et un antipyrétique (paracétamol ou ibuprofène).

Pharmacologie[modifier | modifier le code]

La pseudoéphédrine est une substance agissant sur le système nerveux sympathique. Elle franchit facilement la barrière hématoencéphalique, et son pic plasmatique est atteint entre h et h 30 min.

Elle ne possède pas d'affinité pour les transporteurs de la dopamine, de la sérotonine ou de la noradrénaline. Cependant, elle se fixe sur les récepteurs α et β-adrénergiques. On décrit la pseudoéphédrine comme agent libérateur de noradrénaline. En effet en se fixant sur le récepteur α2-adrénergique, elle active indirectement le TAAR1 qui produit une inhibition du stockage vésiculaire de la noradrénaline. Elle est donc libérée abondamment. Il est important de noter que le récepteur α2 et le TAAR1 forment ensemble un oligomère responsable de l'activation de ce dernier.

Elle a été vendue aux doses usuelles de 60 mg afin de lutter contre les symptômes du rhume. À partir de 180 mg, on observe une augmentation du taux monoaminergique dans la zone synaptique.

Les effets de la pseudoéphédrine sont stimulants, incluant :

  • une euphorie légère ;
  • une augmentation des capacités de mémorisations et de concentration ;
  • l'augmentation des capacités respiratoire avec une dilatation des bronches ;
  • des envies de mouvements constant ;
  • un retard à l'éjaculation.

Effet secondaires :

  • augmentation de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle ;
  • mydriase, pouvant entraîner une mauvaise appréciation de la lumière ;
  • insomnie, diminution de l'envie de dormir, prolongé même après les effets recherchés ;
  • troubles de l'érection ;
  • hallucination à de fortes doses ;
  • risque d'AVC fulminant au début de la prise.

Ces effets ne durent généralement pas plus de h. Lorsqu'ils s’estompent, s'engage le syndrome de descente caractérisé par :

  • une fatigue et une somnolence ;
  • une apathie, perte de motivation et d'énergie ;
  • une difficulté à se concentrer, à réfléchir.

Ce syndrome est très léger et la plupart des utilisateurs ne le remarquent que très peu, induisant une modification du comportement quasi inexistante.

À long terme, elle n'induit pas ou peu de pathologies psychiatrique en dépit de pathologies cardiovasculaires potentiellement graves.

Du fait de sa proximité avec les amphétamines et les cathinones, la pseudoéphédrine induit des effets stimulants mais n'agit pas sur la dopamine ou la sérotonine.

Chimie[modifier | modifier le code]

La pseudoéphédrine est une molécule chirale et contient deux carbones chiraux. On appelle pseudoéphédrine les énantiomères (1R, 2R) et (1S,2S) de l'éphédrine. Elle est présente naturellement sous un mélange racémique et dans de nombreux médicaments, sous forme (1S,2S).

Effets indésirables[modifier | modifier le code]

En France, un rapport de la Commission nationale de pharmacovigilance, daté de [3], met en garde contre les nombreux effets indésirables de la pseudoéphédrine. Il s'agit notamment d'effets cardiovasculaires et neurologiques centraux qui, s'ils sont relativement rares, sont graves et nécessitent une hospitalisation.

Ces effets « sont peu acceptables », indique le rapport, « et à mettre en balance avec l'aspect bénin de la pathologie traitée (“rhume”). »

Dans un article publié en 2009[4], la revue Prescrire propose de « bannir ces médicaments des pharmacies et des conseils ».

En , dans un numéro consacré aux « médicaments inutiles ou dangereux »[5], Que Choisir Santé regrette que, trois ans après le rapport de la Commission nationale de pharmacovigilance, les produits contenant de la pseudoéphédrine soient toujours sur le marché. « Cela n'est pas acceptable », conclut la revue. En 2017, 60 millions de consommateurs affirme également que les médicaments contenant de la pseudoéphédrine par voie orale sont à proscrire et devraient être retirés du marché[6].

Utilisation non médicale[modifier | modifier le code]

À partir du , la pseudoéphédrine fait de nouveau partie de la liste des produits interdits établie par l'Agence mondiale antidopage[7]. Elle avait été autorisée en 2004. Le seuil de concentration maximal dans l’urine est fixé à 150 microgrammes par millilitre[8]. La pseudoéphédrine peut être utilisée pour fabriquer de la méthamphétamine.

Usage récréatif[modifier | modifier le code]

La pseudoéphédrine, tout comme l'éphédrine, a des effets psychotropes similaires aux amphétamines mais ceux-ci sont moins importants à dose égale[9].

La pseudoéphédrine est notamment un précurseur direct de la méthamphétamine (aussi appelé « crystal meth », « tina » ou « ice »).

La pseudoéphédrine provoque, comme les amphétamines, une certaine euphorie, un effet stimulant et un effet coupe-faim. À dose forte, la pseudoéphédrine peut provoquer des hallucinations.

La pseudoéphédrine ne provoque pas de période d'arrêt psychoactive brusque. Son syndrome de sevrage est inexistant et ne provoque que de très léger effet de sevrage (uniquement dû à la baisse du taux synaptique de Noradrénaline). Son accoutumance apparaît en 10 jours et n'occasionne aucune manifestation somatique à l'arrêt de la consommation.

L'association de la pseudoéphédrine à du paracétamol (toxique pour le foie à dose suprathérapeutique) ou à de l'ibuprofène (AINS toxique pour l'estomac à dose suprathérapeutique) dans les spécialités (médicaments) qui la contiennent ainsi que les risques cardiovasculaires limitent néanmoins son mésusage.

Utilisation illicite pour produire de la métamphétamine[modifier | modifier le code]

La pseudoéphédrine est le principal ingrédient utilisé pour fabriquer de la méthamphétamine (D-meth), une drogue stimulante hautement addictive. La pseudoéphédrine intégrée comme décongestionnant nasal dans différents médicaments en vente libre (OTC, over-the-counter, devant le comptoir des pharmacies) , en fait un précurseur chimique facile d'accès pour les personnes qui opèrent illégalement dans des laboratoires de méthamphétamine. Pour résoudre ce problème, des lois et des ordonnances ont été utilisées dans les année 2000, dans différents pays comme les États-Unis comme outil pour limiter l'accès à la pseudoéphédrine[10].

La pseudoéphédrine dans les médicaments contre le rhume et l'asthme est employée seule ou associée à d'autres composants. Aucun produit commercial à base de pseudoéphédrine existant ne constitue cependant un obstacle significatif pour ralentir ou limiter l’extraction et la conversion de pseudoéphédrine dans les laboratoires clandestins de méthamphétamine[11]. Une étude de 2018 à montré aussi que l'inviolabilité supposée de certaines formulations de la pseudoéphédrine n'était pas un obstacle à leur conversion en meth par des chimistes clandestins (en)[12].

La méthamphétamine possède un centre chiral, et existe sous forme d'énantiomères dextrogyre (d) et l pour lévogyre (l). Longtemps désignée comme substance contrôlée sans discrimination de ses énantiomères, l'énantiomère « d » exerce de puissants effets physiologiques et psychostimulants et présente un risque élevé d'abus, tandis que l'énantiomère « l » n'exerce que le dixième de ces effets, et est utilisé comme décongestionnant nasal, la lévométhamphétamine. La transformation de la pseudoéphédrine et de l'éphédrine ne produit que l'énantiomères « d »[13].

Avant que les trafiquants ne se reportent vers des substances toujours plus éloignées du résultat final, un des moyens employés par l'OICS pour pister les labos de meth jusqu'en 2009, consistait à recenser les transactions les plus insolites de remèdes contre le rhume. Chaque année des millions de tonnes de ces précurseurs (en) circulent à travers le monde, et il était facile d'en détourner quelques centaines[14].

Aux États-Unis[modifier | modifier le code]

Des suite d'une épidémie de méthamphétamine (en), une Loi de 2005 relative à la lutte contre l'épidémie de méthamphétamine a été notamment été intégrée au Patriot Act le 9 mars 2006 ; cette loi impose la vente des médicaments contenant de la pseudoéphédrine dans des armoires verrouillées ou derrière le comptoir ; en outre elle limite la quantité mensuelle que tout individu peut acheter ; elle oblige aussi les détaillants à conserver les informations personnelles des clients, qui doivent présenter une pièce d'identité, pendant au moins deux ans après l'achat de ces médicaments[15]. Le Mississipi et l'Oregon ont même finit par imposer que la pseudoéphédrine soit obtenue par prescription médicale, ce qui était une première pour un médicament recommandé pour la vente libre par la Food and Drug Administration (FDA)[16].

La Consumer Healthcare Products Association (CHPA), qui représente le lobby des produits pharmaceutiques en vente libre, a engagé des campagnes de lobbying intense pour soutenir la préservation de l’accès à la pseudoéphédrine en vente libre[17],[18]. L'introduction de la technologie National Precursor Log Exchange, un système d'enregistrement et de conformité électronique en temps quasi réel qui suit les ventes de médicaments en vente libre contre le rhume et les allergies contenant de la pseudoéphédrine, adoptée par la plupart des États des États-Unis pour empêcher l’accès criminel à la pseudoéphédrine, a permis en 2021 d'abroger les loi qui empêchaient la vente libre de la pseudoéphédrine[19]. La CHPA a pu déclarer cette année là que « désormais, d'un océan à l'autre », il était de nouveau légal d'acheter en vente libre (OTC) des médicaments contre le rhume et les allergies contenant de la pseudoéphédrine[16].

À causes de ces différents mesures sécuritaires, la pseudoéphédrine a été souvent remplacée par la phényléphrine, un composant qui avait été approuvé par la FDA en 1976 mais dont l'inefficacité complète a finalement été établie de manière définitive en septembre 2023[20]. C'est le Sudafed PE de Pfizer qui est venu s'ajouter au Sudafed. Celui-ci permettait tout au moins de vendre les produits devant le comptoir. New Scientist évoque une déchétisation des médicaments contre le rhume, liée au trafic de Crystal meth[21].

La pseudoéphédrine, c'est la « pseudo » de Breaking bad, que Walter « Walt » White et son disciple Jesse Pinkman, cuisinent pour obtenir la « crystal meth » ; c'est typiquement le Sudafed, récolté laborieusement par des schtroumpf, petites mains adepte du smurfing dans laquelle plusieurs individus achètent en pharmacie une quantité légale de pseudoéphédrine et mettent les précurseurs en commun ; une échéance de production impossible à tenir oblige Walt à reformuler le produit, remplaçant la pseudoéphédrine par de la méthylamine (Saison 1 de Breaking Bad, épisode 7)[22].

Mexique[modifier | modifier le code]

Des mesures semblables à celles des États-Unis ont été observées au Mexique en 2007, mais qui du fait de la faiblesse des son système judiciaire a fini par accueillir le plus gros de la production de méthamphétamine à destination des États-Unis, puis ensuite capté le plus gros du commerce illégal de précurseurs pour les transformer aux États-Unis[23],[24].

Canada[modifier | modifier le code]

Au Canada pour les même raisons un arrêté d'urgence du 17 mai 2024 interdit la vente de médicaments dont l'éphédrine et la pseudoéphédrine sont l'ingrédient unique[25].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. NIST
  2. Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
  3. Commission nationale de pharmacovigilance, France, compte rendu de la réunion du mardi 25 mars 2008, pages 10 à 14.
  4. Prescrire, 15 octobre 2009, « “Décongestionnants” ORL : trop risqués en France aussi ».
  5. Que Choisir Santé d'avril 2011, page 7.
  6. https://www.ouest-france.fr/sante/medicaments/sante-automedication-une-liste-noire-des-medicaments-eviter-5377151
  7. Dopage: la pseudoéphédrine de nouveau dans la liste des produits interdits, Le Matin, 20 septembre 2009
  8. Le Comité exécutif de l’AMA approuve la Liste 2010 des interdictions AMA-WADA 19/09/2009
  9. « RENSEIGNEMENT THERAPEUTIQUE ELTOR », (consulté le )
  10. (en-US) Centers for Disease Control and Prevention (CDC), « [https://www.cdc.gov/phlp/docs/pseudo-brief112013.pdf Public Health law : Pseudoephedrine: Legal Efforts To Make It a Prescription-Only Drug] » [PDF], sur cdc.gov, (consulté le )
  11. Albert W. Brzeczko, Ronald Leech et Jeffrey G. Stark, « The advent of a new pseudoephedrine product to combat methamphetamine abuse », The American Journal of Drug and Alcohol Abuse, vol. 39, no 5,‎ , p. 284–290 (ISSN 0095-2990, PMID 23968171, PMCID 3793278, DOI 10.3109/00952990.2013.821476, lire en ligne, consulté le )
  12. (en) Brandon Presley, Bob Bianchi, John Coleman et Fran Diamond, « Efficiency of extraction and conversion of pseudoephedrine to methamphetamine from tamper-resistant and non-tamper-resistant formulations », Journal of Pharmaceutical and Biomedical Analysis, vol. 156,‎ , p. 16–22 (DOI 10.1016/j.jpba.2018.04.016, lire en ligne, consulté le )
  13. Tetsuya Nishimura, Kazue Takahata, Yuri Kosugi et Takaaki Tanabe, « Psychomotor effect differences between l-methamphetamine and d-methamphetamine are independent of murine plasma and brain pharmacokinetics profiles », Journal of Neural Transmission, vol. 124, no 5,‎ , p. 519–523 (ISSN 0300-9564, PMID 28213761, PMCID 5399046, DOI 10.1007/s00702-017-1694-y, lire en ligne, consulté le )
  14. « Drogue : les nouvelles routes de la méthamphétamine », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  15. (en) Center for Drug Evaluation and Research, « Legal Requirements for the Sale and Purchase of Drug Products Containing Pseudoephedrine, Ephedrine, and Phenylpropanolamine », FDA,‎ (lire en ligne, consulté le )
  16. a et b (en) « Oregon Repeal of Unnecessary OTC Restrictions is a Dose of Good Policy for Consumers and Healthcare | Consumer Healthcare Products Association », sur www.chpa.org, (consulté le )
  17. (en-US) « Philip Morris’s parent company and drug makers spent the most on lobbying the state legislature last year – Kentucky Health News », (consulté le )
  18. (en) « Preventing Illegal Meth Production | Consumer Healthcare Products Association », sur www.chpa.org (consulté le )
  19. (en-US) « NPLEx | TotalVerify », sur totalverify.equifax.com (consulté le )
  20. (en) Center for Drug Evaluation and Research, « FDA clarifies results of recent advisory committee meeting on oral phenylephrine », FDA,‎ (lire en ligne, consulté le )
  21. (en-US) Simon Oxenham, « Breaking bad sniffles: Crystal meth made cold medicine rubbish », sur New Scientist (consulté le )
  22. (en-US) « Here’s what ‘Breaking Bad’ gets right, and wrong, about the meth business », Washington Post,‎ (ISSN 0190-8286, lire en ligne, consulté le )
  23. (en) « Mexico limits some cold remedies in narcotics war », Reuters,‎ (lire en ligne, consulté le )
  24. (en-US) « Here’s what ‘Breaking Bad’ gets right, and wrong, about the meth business », Washington Post,‎ (ISSN 0190-8286, lire en ligne, consulté le )
  25. Santé Canada, « Note explicative de l'arrêté d’urgence concernant la vente de certains produits de santé naturels contenant de l’éphédrine ou de la pseudoéphédrine », sur www.canada.ca, (consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]