Wilfrid Kilian
| Professeur Université de Grenoble (d) | |
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| à partir de | |
| Chargé de cours (en) Université de Grenoble (d) | |
| - | |
| Chargé de cours (en) Université de Clermont-Ferrand | |
| jusqu'en |
| Naissance | |
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| Décès | |
| Sépulture | |
| Nom de naissance |
Charles Constant Wilfrid Kilian |
| Nationalité | |
| Formation |
École alsacienne (à partir de ) Sorbonne (doctorat) () |
| Activités | |
| Famille |
Marié, quatre enfants |
| Conjoint |
Ammie-Anna Boissy d'Anglas |
| Enfant |
| Membre de | |
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| Maîtres | |
| Directeur de thèse | |
| Personne liée | |
| Distinctions |
Wilfrid Kilian, né le à Schiltigheim et mort le à Grenoble, est un géologue français, spécialiste de la géologie des Alpes.
Biographie
[modifier | modifier le code]Il commence sa scolarité au Gymnase protestant de Strasbourg, puis à partir de 1871, réfugié à Paris après l'annexion de l'Alsace, il est admis à l'École alsacienne[1]. En 1894, il se marie à Antoinette Boissy d'Anglas (1869-1930) petite fille du député Jean-Gabriel de Boissy d'Anglas. Le couple aura deux fils, Robert et Conrad (géologue lui aussi)[2] et deux filles, Mathilde et Magali. Il est élu correspondant de l'académie des sciences le , dans la section de minéralogie, puis membre non résidant le [3].
Il est élu le à l'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Savoie, avec pour titre académique Agrégé[4].
Thèse sur la montagne de Lure
[modifier | modifier le code]Il s'inscrivit à la Sorbonne pour passer une licence de géologie[5]. Remarqué par Edmond Hébert, il termina ses études dans son laboratoire où il fut préparateur, puis chef de travaux pratiques[6]. Il suit Marcel Bertrand dans le Jura, puis en Andalousie en 1884[5].
- Cartes géologiques de la montagne de Lure par Wilfrid Kilian, 1887
C'est sous la direction d'Edmond Hébert qu'il présente sa thèse de doctorat sur la montagne de Lure, en 1888[6]. D'emblée, sa thèse, où il s'affirmait comme stratigraphe et paléontologue, fut considérée comme magistrale puisqu'il y établissait « une échelle biostratigraphique précise pour le Jurassique terminal et le Crétacé inférieur subalpin, susceptible d'être étendue à l'ensemble des chaînes subalpines méridionales »[6].
De plus, l'ajout de photographies au texte de la thèse constitue une nouveauté[7]. L'intérêt d'une telle démarche, fut souligné par Émile Haug, l'un de ses collègues géologues (et alsacien comme lui), dans un rapport de thèse en 1906. Il souligne : « d'excellentes vues photographiques reproduites par phototypie présentent d'ailleurs au lecteur le contrôle direct de la plupart des conclusions ». Ce qui, pour lui, met fin au dilemme des dessins géologiques qui laissent à désirer et ne permettent pas de suffisamment distinguer entre la part d'observation et la part de l'hypothèse[7].

Fort de ce succès, il est invité par Marcel Bertrand à collaborer à l'exécution de la carte géologique de la France[5].
Professeur à Grenoble
[modifier | modifier le code]En 1892, il devint le successeur désigné de Charles Lory pour occuper sa chaire à l'université de Grenoble et pouvoir étudier les Alpes sur place[5]. Sa venue à Grenoble va marquer « une nouvelle période de l'histoire de la géologie alpine, qui est d'abord celle de la stratigraphie triomphante, une nécessité absolue en vue de l'exploration systématique de la chaîne et de sa cartographie »[6].

En se basant sur les travaux de Charles Lory, il entreprend l'étude des chaînes subalpines dauphinoises, entre Moûtiers et la haute Ubaye, alors qu'Émile Haug se charge des montagnes entre Gap et Digne[5].
Après l'étude des terrains de la chaîne subalpine, prolongement du Jura au sud du Rhône, et des hautes chaînes calcaires de la Savoie, Kilian parcourt le Queyras, l'Embrunais, le Briançonnais, la Chartreuse, le Vercors, le Diois, le Valentinois, la Bochaine et les Baronnies, massifs qui n'étaient connus qu'imparfaitement. Ses courses le conduisent aussi vers la Provence et les Alpes-Maritimes, puis il se rend entre le col de la Seigne et le col de la Madeleine, repart vers les massifs du Mont-Blanc, des Grandes Rousses, du Pelvoux et du Mercantour-Argentera[5].
Comme il l'avait démontré dans sa thèse sur la montagne de Lure, Wilfrid Kilian savait que « le problème stratigraphique majeur était celui des datations et du passage latéral entre les faciès à céphalopodes de la mer alpine et les plates-formes bordières, qu'elles soient à sédimentation carbonatée et épaisse comme celle de l'Urgonien, ou à sédimentation condensée comme celle de l'Albien »[6].
Avec l'aide de ses élèves et de collaborateurs passionnés, il atteignit son but en deux décennies. Il résolut d'abord le problème de l'intervalle Berriasien-Aptien inférieur, puis celui de la « fosse vocontienne », notion qu'il avait créée en étudiant les associations d'ammonites. Son collègue Charles Jacob se pencha ensuite sur l'Albien, Kilian se réservant l'Aptien inférieur. Il décrivit cet étage dans une étude menée conjointement avec Joseph Révil (1849-1931), elle est restée d'un étonnant modernisme[6].
Pionnier de la géologie alpine
[modifier | modifier le code]Déjà de son vivant, ces confrères s'étaient plu à souligner le rôle majeur joué par Wilfrid Kilian pour une meilleure connaissance de la chaîne alpine dans sa partie française en précisant la stratigraphie des terrains secondaires dans une vaste partie de celle-ci. Il fut aussi reconnu pour ses découvertes et descriptions de nombreux sites fossilifères. De plus, entre 1890 et 1913, il se consacra à l'étude des terrains quaternaires. On lui doit, entre autres, la reconstitution de l'histoire des vallées alpines pendant le Pléistocène, la distinction des glaciations successives et l'étude des périodes fluviatiles interglaciaires. Ce travail fut effectué dans les vallées savoyardes, puis dans celle de l'Isère et enfin en haute Durance. Il est l'initiateur, à ce titre, de l'étude systématique des glaciers et de leurs oscillations[5].
Lors de l'hommage qu'il lui rendit après sa mort, Pierre Termier rappela que « Sa compétence paléontologique était universellement réputée » pour tout ce qui avait trait aux terrains secondaires, et surtout pour le Jurassique supérieur et le Crétacé inférieur[5]. Il fit une synthèse sur ses connaissances du Crétacé inférieur en publiant, dès 1907, sa célèbre Lethaea Geognostica. Cette somme, fondée sur une observation minutieuse des coupes et un raisonnement rigoureux, est toujours actuelle. « Par sa diffusion en français et en allemand, qui étaient alors les deux langues dominantes de l'Europe continentale, Wilfrid Kilian étendit jusqu'en Russie et en Géorgie la renommée de l'école grenobloise »[6].
Première révolution des sciences de la Terre
[modifier | modifier le code]Mais cette époque ne fut pas seulement marquée par la mise au point de la stratigraphie alpine par Wilfrid Kilian. Elle est également celle des théories ou découvertes nouvelles sur le comportement de l'écorce terrestre. Dès leur apparition, elles dynamisèrent la recherche géologique. Si les Alpes n'ont généralement pas été leur point de départ, c'est essentiellement sur ce massif que ces hypothèses ont été testées et vérifiées[6].
Trois se succédèrent en deux décennies : la découverte des nappes de charriage, la notion de géosynclinal et la révélation du mobilisme continental. Avec la mise au point de la stratigraphie, elles apportèrent un tel renouveau qu'on les rassemble sous le nom de « première révolution des sciences de la Terre », la seconde étant celle de la tectonique des plaques, qui fut développée cinquante ans plus tard[6].
Wilfrid Kilian mourut en 1925 à Grenoble, des suites d'une maladie infectieuse[5].
Œuvres
[modifier | modifier le code]- Description géologique de la montagne de Lure, (1888)[8].
- Sur quelques fossiles du Crétacé inférieur de la Provence, (1888)[9]
- Neige et glaciers, (1891)[10].
- Sur la structure du massif de la Varbuche (1891)[11].
- Description géologique de la vallée de Valloire, Savoie, et de quelques massifs adjacents, en collaboration avec Joseph Revil, (1899)[12].
- Contributions à la connaissance de la zone du Briançonnais, le Jurassique supérieur (1903)[13]
- Essai d'une monographie hydrologique des environs de Garéoult (1906)[14].
- Lethaea Geognostica, (1907)[15].
- Les formations fluvio-glaciaires du bas-Dauphiné (1911)[16].
- Ce que la géologie et la paléontologie nous apprennent sur l'origine de la vie (1912)[17].
- Ministère des Travaux Publics : Mémoires pour servir à l'explication de la carte géologique détaillée (1918)[18].
Hommage
[modifier | modifier le code]Au fort de la Bastille à Grenoble, la terrasse accueillant les visiteurs du téléphérique porte le nom de terrasse des géologues, en hommage aux trois géologues Wilfrid Kilian, Charles Lory et Pierre Termier[19]. Il existe une rue Wilfrid et Conrad Kilian à Grenoble[20] et un amphithéâtre Wilfrid-Kilian au domaine universitaire de Grenoble, au sein d'un bâtiment d'architecture[21], construit et inauguré en 2017[22] pour l'Institut des sciences de la Terre.
L'aven Kilian ou Pierascas no 2 est situé sur la commune de Lioux. Il a été dénommé en l'honneur du géologue, le jour de sa découverte, le . Son puits d'entrée (6 × 10 m) se situe à côté d'anciennes charbonnières, il a une dizaine de mètres de profondeur et aboutit sur un éboulis dont la base est de 4 mètres sur 6 mètres[23].
Le Kilian est un volcan trachytique au pied sud-ouest du Puy-de-Dôme. Autrefois nommée Cros Manal ou Cros Manau, c’est-à-dire le creux Manau, cette dépression a été renommée en 1913 : le « Cratère Kilian » par le volcanologue Philippe Glangeaud, élève de Wilfrid Kilian[24].
Notes et références
[modifier | modifier le code]- ↑ « Wilfrid KILIAN », sur www.annales.org (consulté le )
- ↑ « KILIAN Charles Constant Wilfried », sur Fédération des Sociétés d'Histoire et d'Archéologie d'Alsace (consulté le )
- ↑ Académie des sciences.
- ↑ « État des Membres de l'Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Savoie depuis sa fondation (1820) jusqu'à 1909 », sur le site de l'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Savoie et « Académie des sciences, belles-lettres et arts de Savoie », sur le site du Comité des travaux historiques et scientifiques - cths.fr.
- Pierre Termier, « Wilfrid Kilian », Annales de géographie, vol. 35, no 193, , p. 87–89 (lire en ligne, consulté le )
- Wilfrid Kilian et la première révolution des sciences de la Terre
- Caroline Fieschi, « L’illustration photographique des thèses de science en France (1880-1909) », Bibliothèque de l'École des chartes, vol. 158, no 1, , p. 223–245 (DOI 10.3406/bec.2000.451023, lire en ligne, consulté le )
- ↑ Wilfrid Kilian, Description géologique de la montagne de Lure
- ↑ [1]
- ↑ Wilfrid Kilian, Neige et glaciers
- ↑ Wilfrid Kilian, Sur la structure du massif de la Varbuche
- ↑ Wilfrid Kilian, Description géologique de la vallée de Valloire, Savoie, et de quelques massifs adjacents
- ↑ Wilfrid Kilian, Contributions à la connaissance de la zone du Briançonnais, le jurassique supérieur
- ↑ Wilfrid Kilian, Essai d'une monographie hydrologique des environs de Garéoult
- ↑ Wilfrid Kilian, Lethaea Geognostica
- ↑ Wilfrid Kilian, Les formations fluvio-glaciaires du bas-Dauphiné
- ↑ Wilfrid Kilian, Ce que la géologie et la paléontologie nous apprennent sur l'origine de la vie
- ↑ Wilfrid Kilian, Ministère des Travaux Publics : Mémoires pour servir à l'explication de la carte géologique détaillée
- ↑ La terrasse des géologues à Grenoble
- ↑ Rue Wilfrid Kilian à Grenoble
- ↑ [2]
- ↑ [3]
- ↑ Aven de Pierascas no 2 ou Kilian
- ↑ (en) Didier Miallier, Pierre Boivin, N. Cluzel et E. Auzanneau, « Rapport de sondages et d'analyses, Le Kilian et les carrières anciennes de trachyte dans la Chaîne des Puys (Puy-de-Dôme) », hal.science, (lire en ligne, consulté le )
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Jean Vogt, « Charles Constant Wilfrid Kilian », in Nouveau dictionnaire de biographie alsacienne, vol. 21, p. 1961
Articles connexes
[modifier | modifier le code]Liens externes
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- Ressources relatives à la recherche :
- Ressource relative à la vie publique :
- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :
- Biographie de Wilfrid Kilian, par Charles Jacob, dans la Revue de géologie alpine
- Nécrologie de Wilfrid Kilian sur le site www.persee.fr
- Géologue français du XIXe siècle
- Géologue français du XXe siècle
- Membre de l'Académie des sciences (France)
- Membre de l'Académie delphinale
- Membre agrégé de l'Académie de Savoie
- Officier de la Légion d'honneur promu en 1923
- Élève de l'École alsacienne
- Élève du gymnase Jean-Sturm
- Naissance en juin 1862
- Naissance à Schiltigheim
- Naissance dans le Bas-Rhin de 1790 à 1871
- Décès en septembre 1925
- Décès à Grenoble
- Décès à 63 ans
- Personnalité inhumée à Grenoble