Choc anaphylactique

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Choc anaphylactique
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Éruption (rash) de type allergique accompagnant souvent la 1re ou 2de phase d'un choc anaphylactique

Traitement
Médicament AdrénalineVoir et modifier les données sur Wikidata
Spécialité Médecine d'urgence et immunologieVoir et modifier les données sur Wikidata
Classification et ressources externes
CIM-10 T78.2
CIM-9 995.0Voir et modifier les données sur Wikidata
DiseasesDB 29153
MedlinePlus 000844
eMedicine 135065
MeSH D000707

Wikipédia ne donne pas de conseils médicaux Mise en garde médicale

Le choc anaphylactique est une réaction allergique exacerbée, entraînant dans la plupart des cas de graves conséquences et pouvant engager le pronostic vital.

Il s'agit d'une manifestation d'hypersensibilité immédiate due à la libération de médiateurs vasoactifs chez un sujet au préalable sensibilisé.

Étymologie

Le néologisme créé par Paul Portier en 1902 vient du grec ana (ανα) « en sens contraire », et phulaxis (φύλαξις) « protection »[1].

Histoire

En 1901, le prince Albert Ier de Monaco invite les professeurs Paul Portier et Charles Richet à une expédition océanographique au Cap-Vert et aux Açores pour étudier la nature du poison contenu dans les physalies, redoutées des pêcheurs. Au cours de campagnes précédentes, le prince avait noté les lésions sur les mains des pêcheurs de plus en plus douloureuses à mesure que se développaient les opérations de tri de pêche dans lesquelles figuraient ces Cnidaires. De retour au laboratoire de physiologie de la Faculté de médecine de Paris, les deux professeurs établissent en 1902 le phénomène sur le plan expérimental en injectant des doses de toxique de physalie sur des chiens. Cette découverte vaut à Richet seul (à cause de la modestie de Portier) le prix Nobel de physiologie ou médecine en 1913[2],[3].

Signes cliniques

urticaire
Urticaire géant, en plaques plus ou moins grandes et divisées, pouvant prendre l'apparence de cloques épaisses pleines de lymphe dans les cas graves

Le choc anaphylactique se signale par les signes suivants (classés en 4 stades de gravité[4]) :

  • Grade I : troubles cutanéomuqueux plus ou moins généralisés ; érythème, urticaire, urticaire géant avec ou sans œdème angioneurotique), sans autres symptômes ;
  • Grade II : atteinte multiviscérale modérée avec signes cutanéomuqueux, chute de la pression artérielle, tachycardie inhabituelles, hyperréactivité bronchique (toux, difficulté ventilatoire et à déglutir, en raison d'un œdème de la gorge). Des troubles digestifs (nausées, vomissements, diarrhées) sont également possibles ;
  • Grade III : atteinte multiviscérale sévère. Elle menace la vie du patient et impose un traitement immédiat et spécifique. Les signes en sont le collapsus, la tachycardie ou bradycardie, des troubles du rythme cardiaque, le bronchospasme.
    Les signes cutanés peuvent être absents ou n’apparaître qu’après la remontée de la tension ;
  • Grade IV : arrêt circulatoire et/ou respiratoire ; la mort peut survenir par arrêt circulatoire qui désamorce la pompe cardiaque, ou par un spasme majeur au niveau des bronches, entraînant un état d'asphyxie, ou encore par œdème pulmonaire.

Physiopathologie

Lors d'un premier contact avec une substance étrangère à l'organisme (appelé allergène), les anticorps IgE sécrétés par les plasmocytes vont se fixer sur les mastocytes ou les polynucléaires basophiles (globules blancs de la catégorie des granulocytes).
Ce premier contact n'entraîne pas de signes cliniques. On parle alors de sensibilisation.

Lors d'un deuxième contact avec l'allergène, son contact avec les anticorps IgE fixés sur la membrane des mastocytes et des polynucléaires basophiles va induire la dégranulation de ces derniers, entraînant la libération de médiateurs vasoactifs (tels que l'histamine, la sérotonine, des prostaglandines, des leucotriènes, des bradykinines…).
Cette deuxième rencontre de l'agent allergène n'entraîne pas nécessairement la réaction anaphylactique. Le choc anaphylactique n'étant que le dernier stade (et le plus grave) de la réaction allergique.

La réintroduction d'un allergène chez un sujet déjà sensibilisé, c'est-à-dire la libération de ces substances vasodilatatrices va induire une chute des résistances vasculaires périphériques (responsable d'une hypovolémie relative), une augmentation de la perméabilité des capillaires (responsable d'une hypovolémie absolue et d'œdèmes). Ces mécanismes pathologiques vont être dans un premier temps compensés par l'augmentation du rythme cardiaque, empêchant dans un premier temps la chute de la pression artérielle. Puis, les pressions de remplissage et le débit cardiaque vont chuter, entraînant le collapsus.

Il existe un deuxième type de choc dit « anaphylactoïde ». Dans ce cas, la libération des substances vasodilatatrices se fait sous l'action directe d'un toxique et non pas après contact allergène-anticorps[5].

Clinique

Les symptômes les plus fréquemment retrouvés (isolés ou associés) sont :

Il existe des signes de collapsus cardiovasculaire, une hypotension.

Causes

Parmi les allergènes les plus fréquents, on peut mentionner :

Anaphylaxies idiopathiques

L'anaphylaxie est sans causes connues (ou sans causes retrouvées) dans 32 à 50% des cas ; elles est alors dites "Anaphylaxie idiopathique" (AI)[6]. Cette maladie, potentiellement mortelle, peut subitement se déclarer chez les deux sexes et à tout âge. Sa maitrise est un enjeu de santé publique car elle est souvent mal diagnostiquée. Et avant qu'un diagnostic soit finalement posé, les soins (et tests) mobilisés pour ces patients peuvent être exorbitants en termes de temps, de coût, de nombre de prises en charge par les urgences, de tests de laboratoire, etc. Au début du XXIème siècle, des allergologues plaident pour une meilleure information de la communauté médicale à ce sujet[7].

La compréhension de la physiopathologie initiale de l'AI est encore limitée, mais quelques points sont consensuels :

  • la maladie est sensible aux stéroïdes ;
  • la maladie a un bon pronostic de rémission (supérieur à 80%) si le traitement est approprié ;
  • six vaccins (MMR, varicelle, grippe, hépatite B, tétanos, méningocoque) sont reconnus comme pouvant induire une anaphylaxie, et le HPV peut aussi l'induire[8] ;
  • l'exercice physique est aussi une cause, rare, d'anaphylaxie[9] (ou un co-facteur, car dans environ un tiers des cas, on trouve une autre cause associée, comme la prise de NSAID ou le fait d'avoir mangé une nourriture spécifique avant l'exercice)[10] ;
  • de nombreux cas d'allergie à la viande (allergie liée à des morsures de tiques, qui semblent en augmentation dans une grande partie du monde depuis les années 1970) ont été (ou sont encore) au mieux tardivement diagnostiqués, ou trop souvent classés comme atopiques ou idiopathiques[11]..

Traitement

Le choc anaphylactique est une urgence vitale.

Le seul traitement du choc anaphylactique reste l'utilisation de l'adrénaline (épinéphrine) par voie sous-cutanée, intramusculaire, ou intraveineuse, à petites doses (0,15 à 0,30 mg par voie intramusculaire étant les doses les plus souvent recommandées[12]). L'administration intramusculaire est à préférer à l'administration sous-cutanée en raison d'une meilleure résorption en cas d'hypotension. Une injection intraveineuse ne peut être effectuée qu'en présence d'un collapsus cardiovasculaire, de préférence par une équipe spécialisée; la solution d'adrénaline doit d'abord être diluée (1/10 000) et l'injection doit se faire lentement, de préférence sous surveillance cardiaque.
Il existe aussi un auto-injecteur à base d'adrénaline pour administration intramusculaire, ce qui peut être utile par exemple pour les personnes qui savent qu'elles sont allergiques aux piqûres d'abeilles ou de guêpes. Des instructions doivent toutefois leur être données en ce qui concerne la dose à utiliser, la manière de procéder, ainsi que sur les possibilités de désensibilisation.

L'hypovolémie est compensée par un remplissage vasculaire, sont également utilisés des bronchodilatateurs (bêta 2-mimétiques en aérosols) pour lutter contre la bronchoconstriction.
En cas de réactions œdémateuses associées, on utilise les corticoïdes.

Plusieurs pays ont publié des recommandations, quant à la prise en charge, dont les États-Unis[13] et la Grande-Bretagne[12].

Prévention

On retiendra surtout qu'en prévention d'une rechute, mieux vaut éviter tout contact avec l'agent allergène responsable (s'il a pu être identifié).

On peut également utiliser les antihistaminiques ou la désensibilisation.

Le sujet devra toujours porter sur lui une seringue d'adrénaline auto-injectable, dont l'apprentissage d'utilisation peut se faire auprès d'un allergologue ou d'un pharmacien.

Notes et références

  1. Claude Molina, L'allergie à l'aube du troisième millénaire, John Libbey Eurotext, , p. 12
  2. Jacqueline Goy, Anne Toulemont, Méduses, Musée océanographique, , p. 112
  3. H. Schadewaldt, « La croisière du Prince Albert 1er de Monaco en 1901 et la découverte de l'anaphylaxie », In: Colloque International sur l'Histoire de la Biologie Marine, Paris: Masson & Cie, 1965, p. 305-313.
  4. (en) Ring J. et K. Messmer « Incidence and severity of anaphylactoid reactions to colloid volume substitutes » Lancet 1977;1(8009):466-9. PMID 65572
  5. Dans le cas, par exemple, des produits de contraste iodés
  6. editor, Mariana C. Castells (2010) Anaphylaxis and hypersensitivity reactions. New York: Humana Press. p. 223. (ISBN 978-1-60327-950-5). Archivé à partir de l'original : 2016-12-23.
  7. Grammer III, L.C & Harris K.E (2002) Idiopathic anaphylaxis. Allergy and Clinical Immunology International, 14(6), 246-252.
  8. U.S. Institute of Medicine (2011) Adverse Effects of Vaccines : Evidence and Causality (PDF) (ISBN 9780309214353). Archived from the original on 2017-09-08.
  9. Feldweg AM (015) "Exercise-Induced Anaphylaxis". Immunology and Allergy Clinics of North America (Review). mai, 35 (2): 261–75. doi:10.1016/j.iac.2015.01.005. PMC 4542991. PMID 25841550.
  10. Pravettoni V & Incorvaia C (2016) "Diagnosis of exercise-induced anaphylaxis: current insights". Journal of Asthma and Allergy. 9: 191–198. doi:10.2147/JAA.S109105. PMC 5089823. PMID 27822074.
  11. Levin Michael & al. (2019) Galactose α-1,3-galactose phenotypes: Lessons from various patient populations (Review) ; Annals of Allergy, Asthma & Immunology ; Volume 122, Issue 6, June 2019, Pages 598-602 ; https://doi.org/10.1016/j.anai.2019.03.021 | résumé
  12. a et b (en)[PDF]Working Group of the Resuscitation Council (UK), [www.resus.org.uk/pages/reaction.pdf Emergency treatment of anaphylactic reactions, Guidelines for healthcare providers], 2008.
  13. (en)Lieberman P, Kemp SF, Oppenheimer J et al. (editors). « The diagnosis and management of anaphylaxis: an updated practice parameter » J Allergy Clin Immunol. 2005;115:S483–S523

Voir aussi

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Articles connexes

Bibliographie

  • Moneret-Vautrin, D. A., Morisset, M., Kanny, G., Beaudouin, E., & Parisot, L. (2002). Premier rapport du réseau français d'allergovigilance concernant l'anaphylaxie alimentaire grave. La Revue de médecine interne, 23, 648s.

Lien externe