Léopold Justinard

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Léopold Justinard
Biographie
Naissance
Décès
Nom de naissance
Léopold Victor Justinard
Autres noms
Capitaine Chleuh
Nationalité
Formation
Activité
Enfant
Autres informations
Membre de
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Grade
Distinctions

Léopold Victor Justinard, né à Nogent-sur-Seine le 14 mai 1878 et mort à Paris le 8 février 1959, est un militaire et berbérisant français, grand-croix de la Légion d'honneur.

Biographie[modifier | modifier le code]

Famille[modifier | modifier le code]

Il est le fils ainé de Léopold Jérémie Justinard, petit notable de Nogent-sur-Seine et de Marie Eugénie Yver, de Pont-sur-Seine.

De son mariage avec Marie-Charlotte Donau (1922), il eut un fils, Pierre Justinard (1923-2011), diplomate[1].

Carrière militaire[modifier | modifier le code]

Après l’École spéciale militaire de Saint-Cyr (1897-1899, promotion Bourbaki) d’où il sort avec le grade de sous-lieutenant, il passe deux ans au 148e régiment d'infanterie à Givet avant de partir pour l’Algérie où il intègre le 3e régiment de tirailleurs algériens. Il y apprend l’arabe parlé avec les troupes qui sont sous son commandement puis l’arabe littéraire avec l'imam kabyle d’une mosquée de Béjaïa (anciennement Bougie).

En 1911, sur sa demande, il est accepté au sein de la Mission militaire française au Maroc, sous le commandement du colonel Mangin, chargé d’instruire l’armée du sultan du moment (Moulay Hafid).

Durant cette période, il s'installe, à Fès, dans le quartier du Keddan. Il a alors pour voisins des compatriotes et amis tels que Samuel Biarnay ou encore Maurice Tranchant de Lunel[2].

Il réchappe aux journées sanglantes de Fès (17 au 19 avril 1912) grâce à ses troupes qui lui sont restées fidèles. C’est avec ces derniers, en grande partie originaire de la région de Marrakech, qu’il apprend l'une des langues berbères (chleuh, variante du Sous) usitée au Maroc et dont il rédigera le premier ouvrage d’apprentissage[3]. C'est à cette époque qu'il reçoit le surnom de « capitaine chleuh ».

Le déclenchement de la Première Guerre mondiale (1914-1918) le surprend alors qu’il est en congé au Proche-Orient[4]. Il rejoint rapidement la France où il combat et est plusieurs fois blessé. Au début de l'année 1915, il rejoint les régiments de tirailleurs marocains qui ont été envoyés pour combattre en France. Au lendemain d'une période de convalescence à la suite d'une énième blessure, le capitaine Justinard se voit persuader par le maréchal Lyautey de retourner au Maroc. Justinard accepte à la condition d'être employé dans la région de Marrakech, au service des renseignements.

Après quelques mois passés à Marrakech, chargé d'une mission par le colonel Maurice de Lamothe, il est envoyé à Tiznit pour contrer une mission allemande menée par Edgar Proebster (orthographié « Pröbster » en allemand), chargée d'appuyer les populations du Sud marocain qui suivent le sultan de Kerdous (Anti-Atlas), Moulay Ahmed el Hiba. Le capitaine Justinard tiendra ce poste pendant près de cinq ans (1916-1921). En 1917, sa mission sera renforcée par la présence du caïd Taïeb el Goundafi et de ses troupes[5].

C'est du capitaine Justinard et de cette période à Tiznit que le romancier Claude Farrère s'est inspiré pour le personnage du capitaine Louis de Chassagnes dans le roman Les Hommes nouveaux (1922).

En 1921, le caïd Goundafi, tombé en disgrâce, est rappelé à Marrakech[6], le commandant Justinard, par solidarité, demande à mettre un terme à sa mission à Tiznit. Il est alors lui aussi rappelé à Marrakech pour endosser un rôle d'éducateur de prince de 1921 à 1924. C'est le maréchal Lyautey qui lui a confié cette mission d'encadrer le prince héritier présomptif du moment: Moulay Driss ben Youssef. En 1925, les succès d'Abdelkrim dans le Rif éveillent les plus grandes craintes. C'est le 2 juin 1926, quelques jours à peine après la reddition d'Abdelkrim à Targuist que le commandant Justinard, à la suite d'une mission de renseignement dans le fief du chef rifain, subit un accident d'avion. Il en réchappe mais en gardera le visage mutilé et la vue passablement affaiblie, ce qui l'empêche désormais d'exercer pleinement son rôle d'officier militaire de terrain.

Études berbères[modifier | modifier le code]

À la suite de ce grave accident, pendant près de deux ans, le commandant Justinard passe son temps en hospitalisations (Taza, Casablanca puis Paris) pour subir de nombreuses opérations chirurgicales suivies de longues périodes de convalescence. Il fait son retour au Maroc en 1928 avec sa désignation à la Section sociologique de la Direction des affaires indigènes à Rabat. Il a comme directeur Édouard Michaux-Bellaire. En 1930, à la mort de ce dernier, il lui succède à la tête de la Section. Désormais, et jusqu'à ce qu'il soit « rayé des contrôles » en 1941, le colonel Léopold Justinard coordonne et rédige de nombreuses publications en rapport avec les Berbères du Maroc. Il n'interrompt qu'une fois son travail d'érudit, en 1934, pour une participation, toute pacifique, à la réduction du dernier îlot de résistance du Sud marocain[7].

De 1937 à 1956 (date de son retour en France pour cause de maladie), il vit dans la médina de Salé, près de Bab Jdid.

Décorations[modifier | modifier le code]

Principales décorations françaises[modifier | modifier le code]

Décorations étrangères[modifier | modifier le code]

  • Officier du Nicham Hafidien
  • Officier du Ouissam Alaouite
  • Commandeur du Ouissam Alaouite (14 juillet 1922)
  • Médaille du mérite militaire Chérifien (10 juin 1937)

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. « Biographie Pierre Justinard » (consulté le )
  2. Roger le Tourneau, Fès avant le Protectorat, Rabat, La Porte, , p. 174.
  3. Léopold Justinard, Manuel de berbère marocain, dialecte chleuh, Paris, Guilmoto, , 164 p.
  4. Léopold Justinard, « Souvenirs d'un officier de la Mission militaire française au Maroc (1911-1912) », Cahiers Charles de Foucauld,‎ , no 14 : 60-90, no 15 : 115-26, no 16 : 117-28
  5. Rachid Agrour, Léopold Justinard, missionnaire de la tachelhit (1914-1954), Saint-Denis, Éditions Bouchène, , 325 p. (ISBN 978-2-912946-98-0), p. 13
  6. Léopold Justinard, Un grand chef berbère, le caïd Goundafi, Casablanca, Atlantides, , 267 p., p. 193
  7. Maurice Bernard, La pacification du Maroc (1907-1934), Paris, Comité de l'Afrique française, , p. 46.

Publications[modifier | modifier le code]

  • Manuel de berbère marocain, dialecte chleuh, Guilmot, .
  • Manuel de berbère marocain, dialecte rifain, Geuthner, .
  • Les Aït Ba Amran, Champion, .
  • Notes sur l’histoire du Sous au XVIe siècle, Champion, .
  • La Rihla du marabout de Tassaft, journal de route du marabout de Tasaft, Geuthner, .
  • Un grand chef berbère, le caïd Goundafi, Atlantides, .
  • Fawaïd, Durand, .
  • Un petit royaume berbère, le Tazeroualt. Un saint berbère, Sidi Ahmed ou Moussa, Maisonneuve, .

Sources biographiques[modifier | modifier le code]

  • Rachid Agrour, Léopold Justinard, missionnaire de la tachelhit (1914-1954), Saint-Denis, Editions Bouchène, 2007, 325 p. (ISBN 978-2-912946-98-0).
  • Michel Wattel et Béatrice Wattel (préf. André Damien), Les Grand’Croix de la Légion d’honneur : De 1805 à nos jours, titulaires français et étrangers, Paris, Archives et Culture, , 701 p. (ISBN 978-2-35077-135-9), p. 228-229.
  • Maurice Bernard, La pacification du Maroc (1907-1934), Paris, Comité de l'Afrique française, 1936.

Liens externes[modifier | modifier le code]