Bernard Lalande (prêtre)

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Bernard Lalande
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Père Bernard Lalande
Biographie
Nom de naissance Bernard Libéral Joseph Lalande
Naissance
Lille
Ordination sacerdotale
Décès (à 87 ans)
14e arrondissement de Paris

Bernard Lalande, né à Lille le et décédé le à Paris[1], est un prêtre catholique français de l'archidiocèse de Paris. Il a joué un rôle important dans la vie du Mouvement catholique international Pax Christi et également auprès du Cardinal Emmanuel Suhard dont il fut le secrétaire.

Biographie[modifier | modifier le code]

Né en 1910, Bernard Lalande est ordonné prêtre diocésain en 1934 en l'église Saint-Sulpice pour le diocèse de Paris et nommé préfet des études et aumônier au collège Stanislas.

Famille[modifier | modifier le code]

La famille Lalande, de tradition catholique et proche du mouvement Sillon de Marc Sangnier, est composée de trois frères : Jacques (1905-1990), moine bénédictin, Bernard (1910-1998), prêtre séculier, et le général André Lalande (1913-1995), qui fut notamment chef d'état-major particulier de Charles de Gaulle, Président de la République française (1967-1969) et Compagnon de la Libération et de cinq sœurs dont plusieurs se sont engagées dans le secteur social, en particulier Geneviève de la Simmone (au sein de l'association des veuves civiles) et Françoise Legendre (Fondatrice de SOS urgences Maman).

Seconde Guerre Mondiale[modifier | modifier le code]

Mobilisé en 1939 comme simple soldat, ayant auparavant refusé de devenir officier lors de son service militaire à Strasbourg en 1931 et 1932 il est fait prisonnier en 1940 et reste en Allemagne jusqu'en mars 1945[2].

Renouveau théologique et missionnaire[modifier | modifier le code]

À son retour en France à la fin de la guerre, il est choisi par le cardinal Emmanuel Suhard, archevêque de Paris, comme secrétaire particulier. Il participe alors activement au renouveau théologique et missionnaire suscité par le cardinal et prépare pour lui trois « Lettres pastorales » qui auront un profond retentissement: Le sens de Dieu (1948), Le prêtre dans la cité (1949)[3] et surtout celle de 1947, Essor ou déclin de l’Église, traduite en vingt-cinq langues[4].

Pax Christi[modifier | modifier le code]

En novembre 1949, le cardinal Maurice Feltin, qui succède à Emmanuel Suhard à Paris, garde Bernard Lalande comme secrétaire tout en lui confiant la responsabilité d’un nouveau mouvement d’Église : Pax Christi, dont le cardinal devient lui-même président international. Bernard Lalande est nommé délégué international donnant tous ses soins à la Section française du mouvement, ainsi qu’à son rayonnement international. Il en fera un Mouvement catholique international pour la paix, implanté aujourd'hui dans plus de 60 pays.

De 1962 à 1965, tout en continuant d'assumer ses responsabilités nationales et internationales à Pax Christi, Bernard Lalande est nommé expert au Concile œcuménique du Vatican II travaillant notamment à la rédaction des paragraphes sur la guerre et la paix et sur le développement, dans la constitution Gaudium et Spes sur « L’Église dans le monde de ce temps ».

De 1971 à 1980, Bernard Lalande participe aux travaux de la commission pontificale Justice et Paix instituée par Paul VI à la demande des évêques-présidents de Pax Christi. Il en est le secrétaire pour la paix. Il cesse ses fonctions à Pax Christi et réside à Rome à partir de 1976. En 1981, il prend sa retraite à Paris et meurt à la Maison de retraite diocésaine le 3 avril 1998.

Prise de position[modifier | modifier le code]

Le Père Lalande a participé à plusieurs évolutions qui ont marqué l’Église de 1945 à 1980 : le renouveau missionnaire de l’après-guerre [5], la confrontation au communisme, l’ouverture au monde du Concile Vatican II, la place des laïcs dans l’Église. Il publie un commentaire remarqué (traduit en italien, espagnol, portugais…) de l’encyclique Pacem in terris (La paix sur la terre), du pape Jean XXIII, publiée en 1963. Il participe à la création de la Commission pontificale Justice et Paix qui devient le Conseil pontifical le 10 décembre 1976. De 1971 à 1980, il participe aux initiatives des papes successifs en faveur de l’œcuménisme et du dialogue interreligieux. Selon le Cardinal Roger Etchegaray, « son génie a été de faire entrer la paix au cœur de la vie quotidienne »[6].

Mûries au cours de sa captivité, ses grandes intuitions sur la paix font de lui un pionnier dans ce domaine. Il y a éprouvé le « scandale de la catholicité divisée »[7]. Dès les années cinquante, il développe la notion de « catholicité horizontale ». Selon Bernard Lalande, les chrétiens, conscients de la relation « verticale » qui les unit à Dieu, doivent également découvrir la dimension horizontale, fraternelle et communautaire de leur communion au Christ, qui les rend frères au-delà des frontières. Bernard Lalande insiste sur la nécessité toujours actuelle de sortir du «national-catholicisme ».

Théologie de la paix[modifier | modifier le code]

Bernard Lalande, réagissant à une spiritualisation excessive de la paix, a mis en valeur trois grands paradoxes : la paix est inséparablement don de Dieu et œuvre des hommes ; impossible à vue humaine et néanmoins le fruit d’une vie inspirée par l’Évangile ; et la paix est à la fois mission de l’Église et compétence de la cité. Cette théologie de la paix conduit à la fois à une spiritualité incarnée et à une spiritualité de la vie quotidienne, de l’engagement civique, social et politique[8].

Le 29 octobre 1960, à Genève, le cardinal Feltin s’exprime devant un congrès international de Pax Christi sous la plume du Père Lalande : « La paix, aujourd’hui, dépend du sous-développement qui est une menace de guerre, et du développement qui, pris dans sa dimension véritable, est le nouveau nom de la paix »[9]. Cette formule sera ensuite reprise par le pape Paul VI dans son encyclique sur le Développement des peuples, Populorum progressio, (1967) insistant aussi sur l’importance de « ne pas se contenter de dire la paix, mais de faire la paix ». Ces paroles se réfèrent à « un potentiel énergétique de paix qui est à libérer » dans l’humanité et reflètent la puissance du message évangélique[10].

Distinctions[modifier | modifier le code]

Écrits[modifier | modifier le code]

  • 1951-1975. Nombreux éditoriaux et articles dans Le Journal de la Paix, publication de Pax Christi. Série d’articles sur le concile Vatican II et la paix.
  • De septembre 1957 à novembre 1985, 67 éditoriaux : décembre 1967, La force océanique des masses ; janvier 1973, Pax Christi et la politique ; mars 1973, Violence des médias.
  • 81 articles de fond sur l’actualité : janvier 1962, La paix et le pain vont ensemble ; octobre 1973, La paix dépend aussi de toi ; septembre 1963, La paix est une société réussie.
  • Avec C. Santamaria Pax Christi et l’engagement temporel pour la Paix, éd. Pax Christi 1955.
  • Collectif présenté par le P. Lalande, L’atome pour ou contre l’homme, Préface de Louis Leprince - Ringuet, R.P Dubarle, François Russo, Jean Bussac, José de Broucker, R. P.de Soras, 350 p. éd. Pax Christi, 1958.
  • Commentaires de l’encyclique Pacem in terris, préface du cardinal Feltin, index des thèmes. Fleurus, septembre. 1963. Traductions en italien, espagnol et portugais.
  • Collectif, Chrétiens dans l’univers, le problème de l’universalisme, Préface du cardinal Feltin, Le point de vue de l’apôtre par Le P. Lalande, Éditions Casterman, 245 p.1964
  • Bernard Lalande, La paix est ressuscitée d’entre les morts, Citations recueillies par Jean-Pierre Guérend et présentées par M. Rougé, Le Livre ouvert, 2008, 64 p.
  • Guerre révolutionnaire et conscience chrétienne, Collectif présenté par Bernard Lalande, préface de Mgr Pierre-Marie Théas, René Coste, René Rémond, Robert Darsac, Jean Yves Calvez, Maurice Percheron, Jacques Duquesne, François Roussel, Henri Peninou, Éditions Pax Christi, 1963.
  • Pax Christi et les problèmes temporels de la paix du monde, revue de Polémologie, P.U.F, 1967/3. Article Paix, Dictionnaire des religions, P.U.F, 1983.
  • Réflexions à l’occasion du 10e anniversaire de Pacem in terris. Lettre à Paul VI signée par le cardinal Roy et rédigée par le P. Lalande, 1973. Le rédacteur est Bernard Lalande, secrétaire de la commission pontificale Justice et Paix, Vatican, 1973.
  • Dictionnaire des religions, article Paix, P.U.F, 1983.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Marc Stenger, président de Pax Christi-France[12].
  • Michel Rougé et Jean-Pierre Guérend, Pionnier de la paix. Le combat du père Bernard Lalande (1910-1998), préface du cardinal Roger Etchegaray, Éditions Nouvelle Cité
  • Paul M.G. Lévy, Une paix pour notre temps, colloque sur la Lettre du cardinal Roy à Paul VI, rédigée par Mgr Bernard Lalande, éd. Duculot, 1975.
  • Cardinal Gouyon, Mgr Lalande, Journal de la paix, 1976.
  • François Mabille, Un homme de paix, Journal de la paix, décembre 1991
  • François Mabille, Approches de l’internationalisme catholique, éd. L’Harmattan. 2002.
  • Jean-Pierre Guérend, Actualité d’une encyclique, Pacem in terris, éd. Pax Christi- L’Harmattan, novembre 2002.
  • François Mabille, Les catholiques et la paix au temps de la guerre froide, L’Harmattan, 2004.
  • Jean-Pierre Guérend, Le Moine, le Prêtre et le Général : Les frères Lalande ou le dépassement de soi, préface de Matthieu Rougé, Éditions du Cerf, coll. « L’Histoire à vif », 2008, 170 p.
  • Jean-Pierre Guérend et Michel Rougé. Père Lalande. La paix est entre nos mains, préface de Mgr Marc Stenger, Le Livre ouvert, 2003, 64 p.
  • Michel Rougé et Jean-Pierre Guérend, Gagner la guerre ou réussir la paix?, préface de Mgr Marc Stenger, président de Pax Christi France, Parole et Silence, 2004, 120 p.
  • Jean-Pierre Guérend, Le Cardinal Emmanuel Suhard, archevêque de Paris (1940-1945), Temps de paix, temps de guerre, passion pour la mission, préface d’Émile Poulat, Cerf. 2011, 380 p.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Relevé des fichiers de l'Insee
  2. Réponse de B. Lalande à l’allocution de l’ambassadeur de France près le Saint-Siège qui lui remettait la Croix de la Légion d’honneur. Cf. Pionnier de la paix, le combat du Père Lalande, préface du cardinal Etchegaray, Nouvelle Cité, p. 18-19 et p. 207, note 1et 2.
  3. Olivier de La Brosse, in Le cardinal Suhard, une Église en état de mission, Cerf 1964, p. 186.
  4. Jean Vinatier, Le Cardinal Suhard, l’évêque du renouveau missionnaire, 1874-1949, Éditions du Centurion, 1983, p. 358 : l’auteur précise le rôle de Bernard Lalande dans la rédaction des Lettres pastorales du cardinal Suhard. Cf. Olivier de La Brosse, in Le Cardinal Suhard, une Église en état de mission, Éditions du Cerf, 1964, p. 186. Cf. Pionnier de la paix, p. 18-19.
  5. Robert Dumont (Ed). La France, pays de mission ? Textes et interrogations pour aujourd’hui, Préface de Jean Pierre Guérend. Karthala, 2014. Emile Poulat, Les Prêtres ouvriers, naissances et fin, Le Cerf, 1999
  6. Préface à Pionnier de la paix, le combat du Père Bernard Lalande, Nouvelle Cité.2001
  7. La catholicité horizontale et le scandale de la chrétienté divisée ; Cf. Pionnier de la paix, le combat du Père Bernard Lalande, Chapitre 2, p. 25-33, Nouvelle Cité.2001
  8. Conférence du Cardinal Feltin, président de Pax Christi, le 15 décembre 1951, dans le cadre des Conférences des Ambassadeurs, préparée par le P. Lalande
  9. Conférence du Cardinal Feltin sur « Pax Christi et le développement des peuples », le 29 octobre 1960 à Genève devant les représentants des institutions internationales et des organismes œcuméniques à l’occasion d’un congrès international de Pax Christ. Cf. Pionnier de la paix, p. 89-102
  10. Populorum progressio, Lettre encyclique du pape Paul VI
  11. Réponse de Mgr Lalande à l’allocution de M. Georges Galichon, ambassadeur de France près le Saint-Siège qui lui remettait la croix de la Légion d’honneur.15 juin 1977. Cf. Pionnier de la paix, p. 18-19.
  12. Portrait du P. Bernard Lalande, Revue de la conférence des évêques de France

Liens externes[modifier | modifier le code]