Joachin (roi de Juda)
| Joachin | |
Joachin, d'après le Promptuarii Iconum Insigniorum (1553) | |
| Titre | |
|---|---|
| Roi de Juda | |
| – [Note 1] (1 an) |
|
| Prédécesseur | Joaqim, son père |
| Successeur | Sédécias, son oncle |
| Biographie | |
| Dynastie | Maison de David |
| Date de naissance | |
| Père | Joaqim |
| Mère | Nehoushta |
| Enfants | Salathiel (en) Melchiram Phadaïa Sermeser Jérémie Sama Nadabia |
| Entourage | Prophète Jérémie |
| Résidence | Palais royal de Jérusalem |
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Joachin (ou Jéchonias), en hébreu יהויכין (Yehôyakhîn), né vers 616 av. J.-C.[Note 2], est un roi de Juda de décembre 598 av. J.-C. au 597 av. J.-C.. Il est le fils du roi Joiaqim et de Nehoushta la fille d'Elnathan de Jérusalem[1], et un contemporain du prophète Jérémie. Au VIe siècle av. J.-C., après la défaite du royaume de Juda face à Nabuchodonosor II, il est exilé à Babylone et libéré par Amel-Marduk vers 562 av. J.-C. après trente-sept ans de captivité[2].
Vie et règne
[modifier | modifier le code]En décembre 598 av. J.-C., tandis que Nabuchodonosor II marche sur le royaume de Juda, Joiaqim meurt, peut-être assassiné et est remplacé par son jeune fils Joachin qui ne règne que trois mois et dix jours[3],[Note 3].
Tandis que les Édomites s'emparent du Néguev, Nabuchodonosor prend Jérusalem révoltée le 597 av. J.-C.. Le roi Joachin, sa mère Nehoushta, ses femmes, les fonctionnaires de sa cour et les principaux personnages du pays sont déportés à Babylone[4] ainsi que les hommes vaillants (7 000 personnes), les artisans et les bâtisseurs de remparts (1 000 personnes) et les hommes de guerre[5]. Au total 10 000 personnes sont déportées et il ne reste plus que les petites gens du peuple[6]. Nabuchodonosor pille les trésors du Temple de Salomon et du palais royal[7] et institue comme roi un oncle de Joachin, Mattaniah fils de Josias, qui prend le nom de Sédécias[8]. Ce dernier se révèle un roi faible, manipulé par les officiers qui l’entourent.
Plusieurs documents administratifs découverts près de la porte d'Ishtar à Babylone par l'archéologue allemand Robert Koldewey et traduits par l'assyriologue allemand Ernst Friedrich Weidner datent du règne de Nabuchodonosor II et mentionnent Joachin. Ces documents recensent des rations (en) de nourriture attribuées au roi et à cinq de ses fils et se trouvent au musée de Pergame sur l'île aux Musées à Berlin[9].
Selon le livre des Rois[10], Amel-Marduk, qui succède à Nabuchodonosor, libère Joachin après trente sept ans de captivité, en 562 av. J.-C..
Lors des fouilles de Tell Beit Mirsim dans la Shéphélah en 1928-1930, W. F. Albright a découvert deux fragments d'anses de jarres portant l'inscription hébraïque l˒lyqm n˓r ywkn qui signifie « à Eliakim serviteur de Yokin »[11]. Une inscription identique a été retrouvée à la même période à Bet Shemesh, puis une autre en 1961 à Ramat Rachel lors des fouilles de Yohanan Aharoni. Le nom Yokin a longtemps été interprété comme une forme courte du nom (Yeho)yakin, c'est-dire désignant le roi Joachin. Eliakim aurait donc été un fonctionnaire royal au service du royaume de Juda[12]. Cependant, on considère aujourd'hui que ces inscriptions sont très antérieures au règne de Joachin. Elles sont plutôt datées du VIIIe siècle av. J.-C. et ne se rapportent donc pas à lui[13].
Descendance
[modifier | modifier le code]Les fils de Joaquin sont Chealtiêl (en), Melchiram, Phadaïa, Sermeser, Jérémie, Sama et Nadabia[14],[Note 4]. La traduction Segond de la Bible donne comme fils Assir à la place de Chealtiêl car comme dans la Septante, elle traduit le verset 17 par fils de Jéconias : Assir, dont le fils fut Schealthiel[15], là où la Bible du Rabbinat ou la Traduction œcuménique de la Bible traduisent par fils de Yekhonia captif : Chealtiêl, son fils (en hébreu assir signifie « captif »).
L’aîné de ses fils, Chealtiel, est le père de Zorobabel qui deviendra gouverneur de la province perse de Judée.
Joseph époux de Marie est un descendant de Joachin[16].
Malédiction et interprétations
[modifier | modifier le code]Dans la Bible, Dieu maudit Joachin[17] : « Ainsi parle l'Eternel: Inscrivez cet homme comme privé d'enfants, Comme un homme dont les jours ne seront pas prospères; Car nul de ses descendants ne réussira A s'asseoir sur le trône de David Et à régner sur Juda. » Cette malédiction pose des difficultés concernant le fait que le Messie est ou non un descendant de ce roi. Dans le christianisme, Jésus est présenté comme un descendant, au moins légalement, du roi Joachin dans la généalogie donnée par l'évangéliste Matthieu[18]. De fait, il est prophétisé par le prophète Isaïe comme par l'évangéliste Luc que le Messie règnera sur le trône de David[19],[20].
Interprétation juive
[modifier | modifier le code]Des indices bibliques et des traditions rabbiniques indiquent que Jéchonias s'est repenti pendant son exil à Babylone, menant à une restauration divine et à la fin de la malédiction. Les Juifs n'excluent donc pas que le Messie soit un descendant de ce roi, la malédiction s'applique seulement pendant sa vie ou aux descendants immédiats, pas à toute la lignée.
- Le verset utilisé est Aggée 2:23, où Zorobabel, petit-fils de Jéchonias est décrit comme un « anneau sigillaire » choisi par Dieu, inversant l'image de Jéchonias comme un « anneau arraché[21] ». Cela suggère une levée de la malédiction, au moins partielle, car Zorobabel devint gouverneur de Juda[22],[23].
- Le Talmud de Babylone[24] et le Midrash[25],[26] affirment que Jéchonias s'est repenti, et que Dieu a pardonné, levant la malédiction.
- L'Encyclopédie juive[27] note : « Les tristes expériences de Jehoiachin ont entièrement changé sa nature, et comme il s'est repenti des péchés commis en tant que roi, il a été pardonné par Dieu, qui a révoqué le décret selon lequel aucun de ses descendants ne deviendrait roi. »
Interprétation chrétienne
[modifier | modifier le code]La malédiction est souvent interprétée comme limitée dans sa portée, non éternelle, et compatible avec la providence divine. Les Pères et Docteurs de l'Église ont abordé la malédiction de Jéchonias, principalement dans le cadre de l'harmonisation des généalogies de Jésus en Matthieu 1 (incluant Jéchonias) et Luc 3 (l'évitant via Nathan). Ils ne la voient pas comme un obstacle insurmontable à la messianité du Christ, mais comme réconciliable via des distinctions entre règne terrestre et spirituel, ou par des explications généalogiques (lignée légale versus biologique). Ainsi, par exemple :
- Jean de Damas, au VIIIe siècle, souligne dans De Fide Orthodoxa[28] que Luc trace la lignée de Marie via Nathan, évitant Jéchonias : "Luc trace la généalogie ascendante à travers Nathan, fils de David, pour montrer la lignée naturelle." Cela résout implicitement la malédiction en limitant son impact à la branche légale salomonienne donnée par Matthieu, tandis que la lignée biologique du Christ via Marie supposément donnée par Luc évite la branche maudite.
- Thomas d'Aquin discute explicitement de la malédiction dans la Somme théologique[29] Il s'appuie sur Ambroise de Milan pour réconcilier la malédiction avec la descendance davidique du Christ, en distinguant un règne "mondain" (terrestre, visé par la malédiction) d'un règne spirituel, celui du Christ[30]. Thomas ne la considère pas comme absolue ou éternelle, mais comme non applicable au Messie.
Notes et références
[modifier | modifier le code]Notes
[modifier | modifier le code]- ↑ Selon Thiele. Comme de nombreuses dates concernant les personnages bibliques de cette époque, celles-ci sont approximatives, et peuvent faire l'objet de débats entre exégètes. Cf. Rois de Juda
- ↑ Joachin avait 18 ans (2 Rois 24,8 et 2 Chroniques 36,9) quand il devint roi en 598 av. J.-C.
- ↑ Joachin ne règne que trois mois dans 2 Rois 24,8.
- ↑ Dans le Premier Livre des Chroniques (1Ch 3,17-18) il est mentionné sept fils de Joachin et dans les documents administratifs découverts à Babylone il n'est plus mentionné que cinq fils.
Références
[modifier | modifier le code]- ↑ 2 Rois 24,8
- ↑ 2 Rois 25,27.
- ↑ 2 Chroniques 36,9.
- ↑ 2 Rois 24,15.
- ↑ 2 Rois 24,16.
- ↑ 2 Rois 24,14.
- ↑ 2 Rois 24,13.
- ↑ 2 Rois 24,17.
- ↑ James B. Pritchard, Ancient Near Eastern texts relating to the Old Testament, Princeton, Princeton University Press, p. 308
- ↑ 2 Rois 25,27-30
- ↑ William Foxwell Albright, The Fourth Joint Campaign of Excavation at Tell Beit Mirsim, Bulletin of the American Schools of Oriental Research, numéro 47, pages 3 à 17, octobre 1932.
- ↑ G. Ernest Wright, « Some Personal Seals of Judean Royal Officials », The Biblical Archaeologist, American Schools of Oriental Research, vol. 1, no 2, (JSTOR 3209241)
- ↑ Yosef Garfinkel, « Commentary: The Eliakim Na˓ar Yokan Seal Impressions: Sixty Years of Confusion in Biblical Archaeological Research », The Biblical Archaeologist, American Schools of Oriental Research, vol. 53, no 2, (JSTOR 3210098)
- ↑ 1 Chroniques 3,17-18
- ↑ 1 Chroniques 3,17-18
- ↑ Matthieu 1,11.
- ↑ Jérémie, 22:30.
- ↑ Matthieu 1:11-12.
- ↑ Isaïe 9, 7.
- ↑ Luc 1, 32.
- ↑ Jérémie 22:24.
- ↑ Aggée 1:1.
- ↑ 1 Chroniques 3:17-19.
- ↑ Sanhedrin 37b-38a.
- ↑ Lévitique Rabbah 19:6.
- ↑ Peskita de-Rab Kahana 24:11
- ↑ Edition 1906, article "Jehoiachin".
- ↑ Livre 4, Chapitre 14
- ↑ Somme théologique, Troisième Partie, Question 31 ("De la matière dont le corps du Sauveur a été conçu"), Articles 2 et 3.
- ↑ Jean 18:36
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Articles connexes
[modifier | modifier le code]- Liste des rois de Juda
- Liste des rois d'Israël
- Monarchie unifiée d'Israël et Juda
- Royaume de Juda
- Royaume d'Israël
Liens externes
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- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :