Photographie interférentielle
La photographie interférentielle est un procédé de photographie enregistrant le spectre visible de l'image, reproduisant les couleurs sans recours à des colorants.
Description
Gabriel Lippmann a présenté le procédé en 1891 sous le nom de photochromie interférentielle, et a reçu pour celui-ci le prix Nobel de physique en 1908.
Ce procédé ne repose pas, comme les autres procédés de photographie en couleurs, sur la trichromie, mais sur les interférences créées par les ondes lumineuses incidentes et réfléchies. Nicéphore Niépce avait pressenti son principe dans une lettre à Louis Daguerre de 1829, comme John William Strutt Rayleigh en 1887[1]. En 1848 Edmond Becquerel obtient une photographie en couleurs du spectre solaire sur une lame d'argent couverte de sous-chlorure d'argent violet recuit. L'image est un positif direct mais doit être conservée dans l'obscurité. En 1868, par analogie avec les interférences des ondes dans l'eau, Wilhelm Zenker propose que des ondes lumineuses stationnaires sont capables de produire différentes couleurs[2].
Pour obtenir ce résultat, Lippmann place une couche de mercure directement en contact avec une émulsion photosensible au grain extrêmement fin. Pendant la prise de vue, la lumière entrant par l'objectif se reflète à la surface du mercure créant une onde stationnaire dans la couche photosensible, qui enregistre les minima et les maxima de cette onde stationnaire selon les différentes longueurs d'onde de la lumière provenant de l'objet. L'image reproduit l'ensemble du spectre lumineux. Le spectateur voit des couleurs sans la réduction du spectre en trois agrégats de longueurs d'onde visibles qu'opère la synthèse trichrome[3].
Carrière du procédé
Le procédé sortit du laboratoire et connut un début de commercialisation par Zeiss, avec une visionneuse spéciale mais fut abandonné pour trois raisons :
- Le grain doit être extrêmement fin. Cette spécificité implique nécessairement une émulsion très peu sensible.
- Les longueurs d'onde reproduites dépendent de la distance de l'émulsion au miroir dans la visionneuse, avec la même exigence de précision. L'humidité change l'épaisseur de la gélatine. Elle doit être la même à la prise de vue et à la reproduction.
- On ne voit la couleur qu'avec la visonneuse et sous un certain angle[4].
À la même époque, Lumière introduit le premier procédé utilisant la synthèse trichrome, l'autochrome, qui ne présente pas ces inconvénients.
En revanche, comme la photographie interférentielle n'utilise pas de colorants, sa conservation ne dépend pas de leur dégradation au cours du temps. Du fait même de son principe, on ne peut en tirer de copies[5].
D'autre part, l'utilisation de mercure, élément très toxique, devant être placé en contact direct de l'émulsion rendait le procédé dangereux à utiliser[réf. souhaitée].
Portée du procédé en physique théorique
Ce procédé est une vérification expérimentale de la théorie ondulatoire de la lumière puisqu'il met en jeu des ondes stationnaires. C'est cet aspect du procédé qui a valu à Lippmann son prix Nobel.
Annexes
Bibliographie
- Gabriel Lippmann, « Sur la théorie de la photographie des couleurs simples et composées par la méthode interférentielle », Journal de physique théorique et appliquée, (lire en ligne).
- (en) Hans I. Bjelkhagen, « Lippmann photography: its history and recent development », The PhotoHistorian, Journal of the Historical Group of the Royal Photographic Society, .
Articles connexes
Notes et références
- René Dennilauler, La photographie en couleurs, , p. 6.
- (en) Pierre Connes, « Silver salts and standing waves: the history of interference colour photography », Journal of Optics, , p. 147-166 (lire en ligne)
- Nathalie Boulouch, « Peindre avec le soleil ? Les enjeux du problème de la photographie des couleurs », Études photographiques, , p. 50-75 (lire en ligne)
- Dennilauler 1990.
- Bjelkhagen 2003.