Élections cantonales vaudoises de 1962

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Élections cantonales vaudoises de 1962
197 sièges du Grand Conseil
(majorité absolue : 99 sièges)
7 sièges du Conseil d'État
et
Type d’élection Élections cantonales
Parti radical
Voix 34 785
31,47 %
Sièges obtenus 76 en diminution 16
Parti socialiste
Voix 29 061
26,29 %
Sièges obtenus 46 en augmentation 2
Parti libéral
Voix 23 189
20,98 %
Sièges obtenus 41 en augmentation 7
Parti des paysans, artisans et indépendants
Voix 9 611
8,70 %
Sièges obtenus 15 en diminution 3

Les élections cantonales vaudoises ont lieu les et afin de renouveler les 197 membres du Grand Conseil et les 7 membres du Conseil d'État du canton de Vaud.

Système électoral[modifier | modifier le code]

Au Conseil d'État[modifier | modifier le code]

Les sept sièges du Conseil d'État sont pourvus pour quatre ans au scrutin plurinominal majoritaire à deux tours dans une circonscription électorale unique cantonale. Les électeurs votent pour autant de candidats qu'il y a de sièges à pourvoir, à raison d'une voix pour un candidat. Les candidats ayant obtenu la majorité absolue du nombre de bulletins valables sont déclarés élus. S'il reste des sièges à pourvoir, un second tour est organisé entre les candidats restants, et ceux arrivés en tête sont déclarés élus à raison du nombre de sièges restants à pourvoir.

Les listes sont ouvertes, ce qui signifie que les électeurs ont la possibilité de les modifier en rayant ou ajoutant des noms, d'effectuer un panachage à partir de candidats de listes différentes ou même de composer eux-mêmes leurs listes sur un bulletin vierge.

Au Grand Conseil[modifier | modifier le code]

En 1960, et en prévision des élections cantonales de 1962, la loi vaudoise sur l'exercice des droits politiques de 1948 est révisée[1]. Dès lors, le Grand Conseil est élu pour quatre ans au système proportionnel. 197 sièges sont pourvus dans 30 arrondissements électoraux, taillés à l'intérieur des 19 districts en vigueur de 1803 à 2007.

Le canton de Vaud et ses anciens districts.

Les sièges sont répartis par rapport à la population des différentes circonscriptions, avec un minimum de trois sièges par arrondissement :

Arrondissement Sièges Arrondissement Sièges
Aigle 6 Montreux 8
Aubonne 4 Morges 6
Avenches 3 Moudon 5
Begnins 4 Nyon 6
Belmont 4 Orbe 5
Bex 6 Oron 3
Cossonay 3 Payerne 6
Échallens 4 Pays-d'Enhaut 3
Écublens 6 Pully 7
Grandson 3 Rolle 4
La Sarraz 3 Romanel 11
La Tour-de-Peilz 7 Sainte-Croix 4
Lausanne 50 Vallorbe 3
La Vallée 4 Vevey 7
Lavaux 6 Yverdon 7
Total 197

Résultats[modifier | modifier le code]

Au Conseil d'État[modifier | modifier le code]

Résultats[2],[3]
Candidats Partis Premier tour Second tour
Voix % Voix %
Pierre Schumacher[a] RAD 47 788 43,23 Élection tacite
Pierre Oguey[a] RAD 46 751 42,30
Édouard Debétaz RAD 45 577 41,23
Marc-Henri Ravussin PAI 43 612 39,46
Pierre Graber SOC 36 645 33,15
Charles Sollberger[a] SOC 35 864 32,47 Retrait
Louis Guisan[a] LIB 34 140 30,89 Élection tacite
René Villard[a] SOC 33 132 29,97
Claude Pahud LIB 30 362 27,47 Retrait
Armand Forel POP 10 614 9,60
Voix éparses 484 0,44
Total 110 533 43,00

Au Grand Conseil[modifier | modifier le code]

Résultats[2],[4]
Parti Sigle Voix % +/- Sièges +/-
Parti radical RAD 34 785 31,47 76 en diminution 16
Parti socialiste SOC 29 061 26,29 46 en augmentation 2
Parti libéral LIB 23 189 20,98 41 en augmentation 7
Parti des paysans, artisans et indépendants PAI 9 611 8,70 15 en diminution 3
Parti ouvrier et populaire POP 7 444 6,74 10 en stagnation
Parti chrétien-social PCS 4 301 3,89 6 en augmentation 1
Parti jeune-radical PJR 1 745 1,58 1 en diminution 5
Indépendants 397 0,36 2 en stagnation
Total 110 533 42,00 197 en diminution 14

Analyse des résultats[modifier | modifier le code]

Première élection ouverte aux femmes[modifier | modifier le code]

Ces élections sont les premières ouvertes aux femmes sur le plan cantonal à la suite des votations du 1er février 1959[5]. Sur 197 membres, 13 femmes sont élues au Grand Conseil. La ville de Lausanne, à elle seule, en désigne 8. Parmi elles, il y a 5 libérales, 3 radicales, 3 socialistes, 1 popiste, 1 jeune radicale[6],[7]. Lors de ces élections, 598 candidats s'étaient présentés, dont 60 femmes ont été portées sur les différentes listes des partis. Le journal de Femmes suisses et le Mouvement féministe : organe officiel des informations de l'Alliance de Sociétés Féminines Suisses, a donné les noms des candidates dans son bulletin de février 1962, no 16[8].

Sur les 19 districts du canton de Vaud à cette époque, seuls trois districts avaient des arrondissements représentés par des femmes après les élections : district de Lausanne, district de Nyon, district de Vevey, et 5 districts étaient habités par des femmes élues : district de Lausanne, district de Nyon, district de Vevey, district de Morges, district de Lavaux, dans huit communes sur 375, toutes à proximité du lac Léman.

Liste des femmes élues au Grand Conseil[9]
Nom et prénom Profession Domicile Arrondissement Année de naissance Groupe politique
Biaudet-Hedinger Elisabeth Médecin Chexbres Lausanne 1910 Libérale
Cardis Olga Médecin Lausanne Lausanne 1908 Radicale
Carrard-Godall Erica Professeur Cully Lausanne 1912 Libérale
Damond Gabrielle Secrétaire Nyon Nyon 1921 Socialiste
Demierre Lise Assistante sociale Pully Lausanne 1928 Libérale
Fonjallaz-Meylan Madeleine Maîtresse maison Prilly Romanel 1925 Libérale
Merz-Bichsel Blanche Journaliste Vevey Vevey 1919 Radicale
Miéville-Cordone Marceline Médecin-dentiste Lausanne Lausanne 1921 POP
Pérusset Suzanne Reporter Morges Lausanne 1918 Socialiste
Rosselet-Huguenin Gabrielle Médecin Pully Pully 1924 Libérale
Trépey-Lavanchy Marie-Louise Journaliste Pully Pully 1913 Radicale
Viret Lili Assistante sociale Lausanne Lausanne 1905 Radicale
Zum Brunn Emilie Professeur Lausanne Lausanne 1922 Socialiste

En cours de législature, deux femmes succèdent à deux députés. Le bureau électoral de l'arrondissement de Lausanne, réuni le 10 mars 1964, proclamait élu député du Grand Conseil en remplacement de M. Jaccottet, le premier des viennent ensuite de la liste libérale : Mme Simone Chavan-Bahon, originaire de Lutry, domiciliée à Lausanne. Pour succéder à M. Rouille, le bureau électoral de l'arrondissement d'Avenches, en sa séance du 3 avril 1964, proclamait élu député le premier suppléant de la liste radicale : Mme Juliette Hédiguer-Piquilloud, originaire de Montherod, domiciliée à Avenches[10].

Gabrielle Ethenoz-Damond a été interviewé pour Plans-Fixes en octobre 2000, où elle revient notamment sur son élection. Elle avait déjà été la première femme élue en 1960 dans le conseil communal de Nyon où son père ne voulait plus se représenter. Elle y siège ensuite pendant 56 ans sans interruption. Elle déclare à ce sujet : « À cette première élection j'étais bien sortie, et les collègues du parti ont dit, si elle est bien sortie elle va nous tirer un petit peu notre liste au Grand Conseil. Seulement c'est moi qui suis sortie. Ce qui n'était pas prévu au programme ». Elle précise qu'il y en a qui n'étaient pas contents du tout, mais que cela ne l'a pas gênée. Elle était élue et elle ne voyait pas pourquoi elle laisserait sa place à quelqu'un d'autre. Elle reste ensuite 17 ans au Grand Conseil, où elle déclare être la première femme à la commission des routes, et la première femme au bureau du Grand Conseil. Elle décède le 23 décembre 2017[11],[12].

Miéville-Cordone Marceline siège au Grand Conseil de 1962 à 1969. Elle fut la première femme en Suisse à se présenter au Conseil des États lors des élections fédérales suisses de 1959. Sa candidature suscita un intérêt médiatique dans toute la Suisse et jusqu’à l’étranger. Créditée de 15% des voix (17 643 suffrages), elle fit un score honorable, réunissant quelques milliers de voix au-delà des forces électorales de son parti. Relevant du droit cantonal, l’élection au Conseil des États était en effet ouverte aux Vaudoises depuis l’introduction dans la constitution cantonale de 1959 du droit de vote et d’éligibilité des femmes (article 23). Les femmes durent par contre attendre 1971 pour pouvoir participer aux élections au Conseil national[13].

Demierre Lise, née en 1928 et réélue en 1966, meurt le 12 avril 1967 des suites d'une maladie. Elle n'a pu prêter serment le 14 avril 1966, mais prête serment le 13 février 1967. Le bureau du Grand Conseil lui avait proposé de se déplacer dans son lieu d'hospitalisation en 1966 mais elle avait refusé. Au sein du Grand Conseil elle a fait partie de nombreuses commissions, notamment de celles qui ont examiné la loi traitant de l'assistance judiciaire, la loi sur la police des établissements publics et la vente des boissons alcooliques, la loi sur le Tribunal des assurances, la loi sur l'organisation judiciaire et de celle qui concerne la juridiction pénale des mineurs. En dehors du Grand Conseil elle est nommée directrice de la Société vaudoise de patronage des détenus libérés depuis le 1er janvier 1965, succédant à Henri Anselmier appelé au poste de directeur des établissements de la plaine de l'Orbe[14],[15]. Lors de sa prise de fonction de cette charge de directrice, elle explique dans les journaux du 5 janvier 1965, le travail qu'elle effectue dans cette société depuis quatre ans, après avoir fait l'école sociale de Genève et travaillé à la Fraternité de Saint-Martin[16],[17]. Durant l'année 1965, la Société vaudoise de patronage s'est occupée de 1 582 cas[18]

Merz-Bichsel Blanche après être réélue en 1966, démissionne en avril 1969. Elle meurt le 1er janvier 2002. Merz-Bichsel Blanche s'est investie pour la régularisation des naissances en Suisse et à l'étranger, et avait notamment contribué à la création du premier Centre de planning familial vaudois[19],[20]. L’ouverture du premier centre de planning familial vaudois, appelé Centre Médico-Social de Pro Familia (CMSPF), ligue vaudoise pour la protection de la famille, a eu lieu en 1967 à Lausanne. Elle fait suite au rapport sur la motion Merz[21], adopté à l’unanimité en février 1965 par le Grand Conseil[22]. Le 1er mars 1966 elle intervient dans le journal Nouvelle revue de Lausanne à ce sujet et indique qu'environ 60 000 avortements sont estimés en Suisse[23]. L'avortement en Suisse n'est licite que depuis juin 2002. Merz-Bichsel Blanche est également le sujet d'un film Plans-Fixes en août 2000[24].

Pérusset Suzanne dépose en novembre 1962 une motion pour recruter des aides familiales[25]. Lors des élections de 1966 elle décide de ne pas se représenter, principalement par manque d'assimilation des problèmes financiers[26]. Suzanne Pérusset, originaire de Baulmes et d'Aubonne, après des études de musique au Conservatoire de Lausanne, effectue la plus grande partie de sa carrière à la Radio suisse romande dès le milieu des années 40 dans le domaine culturel, après un passage à la BBC et à la RTF. Elle meurt le 28 avril 1982 à Morges[27],[28].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. a b c d et e Conseil d'État sortant.

Références[modifier | modifier le code]

  1. Florian Ruf, L'introduction de la représentation proportionnelle pour les élections au Grand Conseil vaudois (1945-1960), Lausanne, Université de Lausanne, , 89 p.
  2. a et b « Gazette de Lausanne - 06.03.1962 », sur Le Temps Archives (consulté le ).
  3. « Gazette de Lausanne - 10.03.1962 », sur Le Temps Archives (consulté le ).
  4. « Le Confédéré - 07.03.1962 », sur RERO DOC (consulté le ).
  5. Il y a 60 ans, Vaud devenait le premier canton à laisser voter les femmes, Radio télévision suisse, 1er février 2019
  6. Treize femmes élues au Grand Conseil, La Tribune de Lausanne, (page 3), 6 mars 1962
  7. Potos des treize femmes au Grand Conseil Vaudois, (Interview de Gabrielle Ethenoz-Damond, conseillère communale de Nyon depuis 56 ans), Politiciennes.ch, 4 février 2016
  8. Elections du Grand Conseil et du Conseil d'Etat du canton de Vaud, Femmes suisses et le Mouvement féministe : organe officiel des informations de l'Alliance de Sociétés Féminines Suisses, février 1962, no 16. E-Periodica
  9. Liste des députés, Bulletin des séances du Grand Conseil du canton de Vaud, (pages 3 à 17), Mars 1962 (38e législature)
  10. Vérification des titres d'éligibilité et prestation du serment par Mme Chavan, Mme Hédiguer et M. Favre, Bulletin des séances du Grand Conseil du canton de Vaud, (pages 11 et 12), Printemps 1964
  11. Gabrielle Ethenoz-Damond, Une vie d'engagements, (numéro de film 1184), Association Films Plans-Fixes, 6 octobre 2000
  12. Première femme à siéger au Conseil communal de Nyon, Gabrielle Ethenoz-Damond est décédée à 97 ans, La Côte (quotidien), 24 décembre 2017
  13. Miéville-Cordone Marceline, Dictionnaire historique de la Suisse
  14. Décès de Mlle Lise Demièrre, députée, Bulletin des séances du Grand Conseil du canton de Vaud, (pages 26 et 27), Printemps 1967. Canton de Vaud, Archive Bibliothèque cantonale et universitaire (Lausanne)
  15. Lise Demierre succède à Henri Anselmier, Nouvelle Revue de Lausanne, 4 janvier 1965 (page 8)
  16. Les détenus libérés ont besoin de travail et d'amitiéFeuille d'avis de Lausanne, (page 15), 5 janvier 1965
  17. Avec la patronne des détenus libérés, La Tribune de Lausanne, (page 7), 5 janvier 1965
  18. Le travail considérable de la société de patronage, Nouvelle Revue de Lausanne, (page 7), 27 juin 1966
  19. Trois départs du Grand Conseil, Nouvelle Revue de Lausanne, (page 3), 10 avril 1969
  20. Deuil, Vevey hebdo no 386, (page 3), 18 janvier 2002
  21. Motion Blanche Merz et consorts concernant la régulation des naissances, Bulletin des séances du Grand Conseil du canton de Vaud, (pages 104 à 123), Printemps 1965
  22. De la Planification familiale à la Santé Sexuelle et Reproductive : Une étude de cas, (page 29), Sarah Vilpert, Université de Genève, janvier 2008
  23. Nécessité d'une régularisation des naissances en Suisse, par Mme Blanche Merz-Bichsel, députée, Nouvelle revue de Lausanne, (page 10), 1er mars 1966
  24. Blanche Merz, Une pionnière, (numéro de film 1182), Association Films Plans-Fixes, 6 octobre 2000
  25. Rapport du Conseil d'État au Grand Conseil sur la motion Suzanne Pérusset et consorts concernant le recrutement d'aides familiales, Bulletin des séances du Grand Conseil du Canton de Vaud, Automne 1963 (pages 184 à 190)
  26. Les madames radio Suzanne Pérusset, L'Illustré, 16 février 1967
  27. Suzanne Pérusset, Radio TV Je vois tout, 6 mai 1982
  28. Suzanne Pérusset n'est plus, Le Matin (Suisse), 29 avril 1982