Conrad Gessner

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Conrad Gessner
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Portrait de Conrad Gessner
Naissance
Zurich
Décès (à 49 ans)
Zurich
Nationalité Drapeau de la Suisse Suisse
Profession

Conrad Gessner (aussi connu sous le nom de Konrad von Gesner, Conradus Gesnerus), né le à Zurich et mort le à Zurich, est un naturaliste suisse.

L'esprit de la Renaissance...

Issu d'un milieu très modeste, son père est fourreur et tanneur. Gessner devient orphelin de bonne heure car son père est tué durant la bataille de Zoug (1531). La famille se disperse et Gessner part vivre avec un oncle qui lui donne l'amour de la littérature et de la botanique. Soutenu financièrement par son tuteur, Oswald Myconius (1488-1552), il mène une vie itinérante et étudie à Zurich et à Bâle mais aussi à Strasbourg, Paris et Montpellier (où il passe deux ans). En 1541, il obtient le grade de docteur en médecine ; sa thèse porte sur la détermination du siège des émotions et des sensations, à savoir le cœur ou le cerveau, Gessner optant pour le second.

Il est anobli par l'empereur Ferdinand Ier et, en 1557, est nommé professeur de philosophie naturelle à Zurich.

Il fait de nombreux voyages naturalistes et est l'un des premiers à s'intéresser à la flore et aux minéraux alpins. On le considère parfois comme l'un des initiateurs de l'alpinisme. En 1541, il écrit une lettre Admiration pour la montagne à son ami Jacques Vogel, dans laquelle il dit être décidé « chaque année à faire l'ascension de quelques montagnes » et qu'il tient parole. En août 1555, il réalise l'ascension du mont Pilate à l'origine de l'écriture du premier livre consacré à une montagne Descriptio Montis Fracti sive montis Pilati[1].

Ses œuvres montrent l'étendue de ses connaissances et de ses centres d'intérêts. Il écrit sur la linguistique, la philologie, la pharmacopée et la médecine, la bibliographie, la minéralogie, la zoologie (Ichtyologie en particulier) et la botanique.

En 1564, une épidémie, souvent décrite comme étant de peste, éclate dans sa ville. Conrad Gessner en est atteint après avoir soigné des malades. Il meurt l'année suivante.

L'œuvre de Gessner va inspirer de nombreux autres auteurs, avec lesquels il est en correspondance, notamment Ulisse Aldrovandi. Il marque l'une des plus importantes étapes de la naissance de la science européenne. Hermann Boerhaave le désigne comme un prodige d'érudition (monstrum eruditionis) et Joseph Pitton de Tournefort comme le père de toute l'histoire naturelle.

La fondation de la recherche bibliographique en Europe

Comme bien d'autres avant lui, il compile les auteurs qu'il connaît, tant de son époque que de l'antiquité mais aussi les auteurs arabes et hébreux. Mais il n'est pas qu'un simple compilateur. Il critique ces sources et ajoute de nombreux détails tirés de ses propres observations. Il publie en 1545, Bibliotheca universalis sive catalogus omnium scriptorum locupletissimus in tribus linguis Latina, Graeca et Hebraica, une vaste bibliographie de 1 264 pages où il présente 1 800 auteurs et leurs œuvres. Gessner peut être considéré comme le fondateur de la recherche bibliographique en Europe. Car déjà au Xe siècle, dans le monde arabe, on rédigeait des ouvrages bibliographiques inventoriant toutes les œuvres jusqu’alors connues depuis l’antiquité : Parmi ces ouvrages, nous avons le Fihrist d’Ibn al-Nadim (Xe siècle) qui est actuellement considéré comme une référence en la matière, et qui répertorie toutes les œuvres qu’il connaissait à son époque, dans toutes les spécialités, et ce depuis l’antiquité grecque. Ibn Abi Usaybi'a rédigera plus tard (XIIIe siècle) une œuvre similaire, mais consacrée aux œuvres médicales.

La philologie

Il fait paraître, en 1555, les 21 volumes de ses Mithridates. De differentiis linguarum tum ueterum, tum quae hodie apud diuersas nationes in toto orbe terrarum usu sunt, Conradi Gesneri Tigurini Obseruationes.. Cette œuvre est considérée comme l'un des ouvrages fondateurs de la linguistique comparative et de la philologie moderne. Gessner y présente, suivant un ordre alphabétique, toutes les langues vivantes ou mortes qu'il connaît.

La zoologie

Son ouvrage le plus célèbre est son Historia animalium, qu'il commence à publier en 1551. Le dernier volume, posthume, paraîtra 22 ans après sa mort. Il s'agit certainement du plus important ouvrage de zoologie qui fut jamais publié, c'est pour cette raison qu'il fut surnommé le « Pline suisse ». Même si son ouvrage suit encore l'ordre alphabétique, il propose une embryonnaire taxinomie et emploie une appellation latine de deux mots, le premier, le genre suivi d'un qualificatif, système qui sera plus tard suivi par d'autres naturalistes comme Rudolf Camerarius et surtout Carl von Linné. Pour Georges Cuvier, il est le premier zoologiste des temps modernes et sera souvent copié par ses successeurs.

Dans cette Histoire des animaux, œuvre immense de 3 500 pages, chaque espèce est décrite suivant huit chapitres. Gessner donne son nom dans différentes langues (vivantes ou mortes), son habitat et son origine ainsi que sa description anatomique, sa physiologie, les qualités de son âme, les divers usages que l'on peut en tirer, son intérêt alimentaire et médicale, ainsi que son utilisation par les poètes et les philosophes...

Il répartit les animaux en plusieurs groupes : les animaux quadrupèdes vivipares et ovipares (sauvages ou non), les oiseaux, les poissons de mer, les poissons d'eaux douces et tous les animaux qui ne sont pas cités par ailleurs (et parmi lesquels on trouve des poissons, les crustacés, les testacés, les insectes, les amphibiens, ainsi que l'hippopotame, la loutre, le castor).
La partie sur les poissons est tirée des travaux de deux de ses contemporains : Guillaume Rondelet (dont il a suivi les cours à Montpellier) et Pierre Belon.

Sa classification ne repose pas sur une base très solide et reprend, pour l'essentiel les catégories populaires. Gessner, probablement conscient de son impossibilité à établir une classification cohérente opte pour un ordre alphabétique.

Ses descriptions zoologiques (ou botaniques) sont complétées aussi souvent que possible par des illustrations. Celles-ci constituent peut-être l'aspect le plus original de son œuvre. Elles jouent un rôle fondamental dans la reconnaissance des espèces citées. Il rassemble 1 500 gravures, la plupart originales et signées par Lukas Schan, les autres proviennent surtout de l'œuvre de Leonhart Fuchs. Mais la mort soudaine de Gessner l'empêche de publier son Historia. Il confie à son ami Kaspar Wolf le soin de la faire paraître. Wolf peut publier certaines illustrations mais finit par vendre le tout à Joachim Camerarius le Jeune qui utilise ses gravures dans ses propres travaux. Bon nombre d'entre elles sont perdues, d'autres ont été retrouvées dans la bibliothèque de l'université d'Erlangen.

Il mentionne aussi des animaux fabuleux comme la licorne, le phénix, l'hydre à sept têtes et des monstres marins comme le trolual. Ceux-ci étant signalés par les auteurs anciens, Gessner ne les remet pas entièrement en doute. Ce n'est que peu à peu, que les naturalistes vont mettre en doute l'existence de ces créatures mythiques.

  • 1551: Historiae animalium : Liber I de quadrupedibus uiuiparis. apud Christoph. Froschoverum.
  • 1554: Historiae animalium : Liber II de quadrupedibus oviparis. excudebat C. Froschoverus.
  • 1555: Historiae animalium : Liber III qui est de avium natura. apud Christoph. Froschoverum.
  • 1558: Historiae animalium : liber IIII. qui est de Piscium & aquatilium animantium natura, Tigurii, apud Christoph. Froschoverum

L'ornithologie

Chouette, illustration tirée d’Histoiriae animalium (1555).

Le troisième volume, de 779 pages, d'Historiae animalium est consacré aux Oiseaux. Il paraît d'abord en latin en 1555 et est traduit en allemand en 1557. Gessner avait le projet d'en réaliser une version française mais sa mort prématurée ne lui en laisse pas le temps.

Contrairement à l'ouvrage de Pierre Belon, Gessner classe les espèces qu'il décrit de façon alphabétique. Même s'il cite abondamment les auteurs classiques, il montre, par ses références personnelles, qu'il a observé lui-même ses animaux dans la nature. À l'occasion, il rectifie même des erreurs passées. Ainsi il corrige Aristote lorsque celui affirme que le rouge-gorge et le rossignol ne sont que deux formes saisonnières (l'une hivernale, l'autre estivale) du même oiseau. Son livre, cependant, contient encore de nombreux faits erronés (le rossignol se tiendrait ainsi caché tout l'hiver). Il présente aussi quelques espèces relevant de légendes.

Il distingue ainsi fort bien les différentes espèces de merles : le merle noir (Turdus merula), le merle à plastron (Turdus torquatus), la grive litorne (Turdus pilaris)... Mais il bute sur la reconnaissance de nombreuses autres.

Gessner distingue 217 espèces d'oiseaux, chacune illustrée par une gravure sur bois. Il décrit l'apparence externe, l'anatomie, la distribution, le comportement, son usage dans la littérature ou sa place dans la mythologie. C’est notable qu’il est le premier à décrire et illustrer scientifiquement l’ibis chauve[2].

La botanique

L'intérêt de Gessner pour la botanique est véritablement scientifique. L'étude de sa correspondance montre qu'il décrit, pour la première fois, des espèces de plantes qui ont été attribuées depuis à Charles de l'Écluse, Gaspard Bauhin ou bien d'autres. Même si sa taxinomie n'est pas très rigoureuse, Gessner tente de rassembler les plantes en fonction de leur ressemblance aussi souvent que possible, même s'il doit aller à l'encontre des usages de son époque. Mais comme pour les animaux, sa classification manque de rigueur faute de déterminer avec précision les notions d'espèce et de genre.

Son œuvre est réédité très souvent après sa mort et connaîtra une foule de versions et d'adaptations. Pendant deux cents ans, elle constituera la base de toute bibliothèque d'histoire naturelle.

L'étude des fossiles

Conrad Gessner publie en 1565, l'année même de sa mort, De rerum fossilium, un livre novateur qui marque la naissance de la paléontologie. Il est en effet le premier savant à présenter des illustrations de fossiles. À l'époque de Gessner et de ses contemporains, le terme « fossile » désigne tout objet naturel recouvert par une couche de terre, qu'il s'agisse d'un minéral ou des restes de quelque organisme.

Bibliographie

  • Conrad Gessner, 1516 - 1565 : Universalgelehrter, Naturforscher, Arzt / Mit Beitr. von Hans Fischer [et al.], Zürich: Orell Füssli, 1967. 234 pages, illustré.
  • Pyle, C. M. "Conrad Gessner on the Spelling of his Name," Archives of Natural History, 27, (2000), 175-186.

Références

  1. Sylvain Jouty, Hubert Odier, Dictionnaire de la montagne, Place Des Editeurs, , p. 337
  2. Premières descriptions de l'ibis chauve

Liens externes

Gesner est l’abréviation botanique standard de Conrad Gessner.

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