Alfred Cadart

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Alfred Cadart
Alfred Cadart, eau-forte de Marcellin Desboutin
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François Chifflart (beau-frère)Voir et modifier les données sur Wikidata
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Auguste Delâtre, Jules Luquet (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Distinction

Alfred Cadart, né le 4 avril 1828 et mort le 27 avril 1875, est un auteur, éditeur, et imprimeur français, à l'origine du renouveau de l'eau-forte en France au XIXe siècle.

Biographie[modifier | modifier le code]

Originaire de Saint-Omer, fils d'aubergiste, Alfred Cadart commence à travailler pour la Compagnie des chemins de fer du Nord[1].

Il épouse en 1855 à Paris 5e, Célonie Sophie Chifflart[2], la sœur du peintre François Chifflart. Cette union l'incite à se lancer dans le commerce de l'estampe. Son premier album consiste en la publication d'un ensemble de reproductions photographiques et d'eaux-fortes tirées des œuvres de Chifflart[1].

Il ouvre une première boutique parisienne au 3 de la rue Saint-Fiacre avec comme raison sociale « gravures en taille-douce, eaux-fortes, héliographie, lithographie, photographie ». Par la suite, il déménage au 66 de la rue de Richelieu.

De à la fin de l'année 1860, il lance Paris qui s’en va et Paris qui vient une suite de vingt-six eaux-fortes de Léopold Flameng publiée en livraisons mensuelles, sous la forme d'une revue accompagnés de textes, entre autres signés Marc Trapadoux[3].

Dès lors, il se consacre à la défense de l'eau-forte. Il contacte des peintres de la nouvelle école émergente, à savoir les tenants du réalisme, tels Alphonse Legros et François Bonvin — plus tard, il éditera plusieurs planches de Gustave Courbet[1].

Siège de la Société des aquafortistes (eau-forte, 1865) par A.-P. Martial.
La Chambre des députés (eau-forte, 1865) : l'une des rares gravures exécutée par Cadart.

1862 est l'année de l'engagement, et constitue un véritable tournant dans l'histoire de la gravure en France[1]. Cadart publie en effet successivement un cahier de neuf eaux-fortes signées Édouard Manet, les Vues de Hollande de Jongkind, et la suite du Voyage en bateau de Daubigny, soit trois tenants de la future école des impressionnistes. Pour parvenir à ses fins, Cadart s'associe à un certain Félix Chevalier, photographe du Salon de Paris et exposant lui-même, et à l'imprimeur Auguste Delâtre, tandis que le graveur Félix Bracquemond se met au service de l'entreprise. En juin, il fonde la Société des aquafortistes dont l'ambition est de redonner sa place à l'eau-forte de peintres, éclipsée depuis la fin du XVIIIe siècle par le burin et la lithographie. Les artistes sociétaires sont invités à fournir cinq planches inédites. Ces planches, éditées entre 1863 et 1867, sont au nombre de 329 et représente 133 artistes sociétaires[4].

En , Cadart prend un nouvel associé, Jules Joseph Luquet (1824-?), propriétaire de l'hôtel de la Grande-Bretagne et peintre à ses heures[5]. Le siège de la société s'installe au 79 de la rue de Richelieu, à l'angle de la rue Ménars : la boutique est grande, elle propose en plus d'estampes, des peintures, des bronzes et autres objets d'art, ainsi que des outils pour fabriquer des gravures. Cette échoppe luxueuse arbore au dessus de son entrée les inscriptions « Aux arts modernes » et « Direction générale de la Société des aqua-fortistes » : employé très tôt par Cadart et Luquet, A.-P. Martial en donnera une représentation célèbre sous la forme d'une eau-forte (1865)[6].

Siège de L'Illustration nouvelle, société Cadart et Luce, rue Neuve-des-Mathurins : cette eau-forte (1868) d'Alfred Taiée montre qu'on y donnait aussi des cours de gravures.

Entre 1862 et 1867, Jules Luquet, au sein de la galerie, devient le principal marchand de Courbet, le promeut aux États-Unis ; il réussit à y vendre La Curée (1857, musée des beaux-arts de Boston)[7], réalise une tournée des œuvres du peintre dont Le Retour de la conférence (toile disparue). Cadart effectue également des voyages aux États-Unis pour promouvoir sa société ; à New York, il forma Rodolphe Piguet, qui deviendra un graveur réputé[8]. En 1865, sort le remarquable album Types parisiens signé Edme Penauille[9].

Fin 1867, la Société est dissoute pour raisons financières : en réalité, Luquet n'a pas rencontré le succès escompté au cours de son voyage américain, il décide donc de retourner à son métier d'hôtelier ; il vend sa collection aux enchères en chez Paul Durand-Ruel[10]. Entre-temps, Charles Baudelaire, Théophile Gautier, Jules Janin, parmi d'autres critiques en vue, avaient soutenu l'entreprise par voie de presse ou en offrant de signer des préfaces aux albums de la Société[1].

L'impact est non négligeable, puisqu'à Bruxelles, Félicien Rops, ancien sociétaire de l'entreprise de Cadart, fonde en la Société internationale des Aquafortistes.

Surtout, Cadart poursuit son activité d'éditeur : en , installé au 58 rue Neuve-des-Mathurins, il lance les albums annuels de L'Illustration nouvelle, associé à un certain Léandre Luce, une publication périodique reprenant le même principe que les cahiers de la Société des aquafortistes, et qui perdure jusqu'en 1881, totalisant 584 planches : dans le dernier fascicule, parut un portrait gravé de Cadart par Marcellin Desboutin (cf. ci-contre)[11],[12].

L'adresse du siège des éditions passe au 56 boulevard Haussmann.

En 1873, s'inspirant de Cadart et imprimant chez Delâtre, l'écrivain-éditeur Richard Lesclide et l'artiste Félix Régamey lancent le périodique Paris à l'eau-forte[13].

Deux ans avant sa mort, Cadart édite le Nouveau traité de la gravure à l’eau-forte pour les peintres et les dessinateurs signé A.-P. Martial[14].

Puis en 1874, Cadart lance un nouveau périodique annuel, L'Eau-forte en..., dont trois numéros seront coordonnés par Philippe Burty[15], qui propose par livraison pas moins de 30 gravures originales.

Sa veuve reprend l'activité de la maison d'édition, poursuit la publication de L'Eau-forte en..., totalisant ainsi 250 gravures, ainsi que celle de L'Illustration nouvelle, jusqu'en 1881, date de la faillite[1].

Henri Beraldi, dans ses digressions habituelles, parle à propos des productions Cadart d'une forme d'inflation éditoriale dont souffrit le marché[16] : plus nuancés et avec du recul, Janine Bailly-Herzberg, Michael Pakenham et Michel Melot soulignent la remarquable qualité de cette production, tant au niveau technique que des choix artistiques, somme totalisant plus d'un millier d'estampes originales, redécouverte seulement à partir des années 1980.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a b c d e et f Valérie Sueur, « L’éditeur Alfred Cadart (1828-1875) et le renouveau de l’eau-forte originale », in Europeana Newspapers, avril 2013.
  2. Etat civil reconstitué de Paris
  3. Paris qui s’en va et Paris qui vient, sur Gallica.
  4. Notices du catalogue général sur le site de la Bibliothèque nationale de France.
  5. Il existe un portrait gravé de Jules Luquet par Charles-Émile Jacque publié en 1867 dans le dernier album de la Société des aquafortistes. En revanche, son portrait par Gustave Courbet (New York, MET) n'est encore, à ce jour, que supposé.
  6. Janine Bailly-Herzberg, Dictionnaire de l'estampe en France (1830-1950), Paris, p. 215-216.
  7. Laurence des Cars, in Gustave Courbet, catalogue d'exposition, Paris, RMN, 2008, pp. 392-393.
  8. Margaux Honegger, « Un Genevois maître de la pointe sèche. Découverte du fonds Rodolphe Piguet », Le Blog du plus grand musée encyclopédique suisse, Genève, MAH, 22 juin 2021.
  9. J. Bailly-Herzberg, Dictionnaire de l'estampe en France 1830-1950, AMG - Flammarion, 1985, p. 249.
  10. Collection A. Cadart & Luquet, notices sur marquesdecollections.fr.
  11. Notice du catalogue général sur le site de la Bibliothèque nationale de France.
  12. Desboutin grava en 1875 un premier portrait de Cadart, différent — cf. Art Institute of Chicago, notice en ligne.
  13. Michael Pakenham, « Paris à l'eau-forte de Richard Lesclide » in Pierre Laforgue (éd.), Pratiques d'écritures. Mélanges de poétique et d'histoire littéraire offerts à Jean Gaudon, coll. « Bibliothèque du XXe siècle », Paris, Klincksieck, 1996, p. 65-79.
  14. Lire en ligne sur Gallica.
  15. L'Eau forte en..., notice du Catalogue général de la BnF, en ligne.
  16. Cf. les notes (souvent très longues) au volume final des Graveurs du XIXe siècle, XII, Paris, L. Conquet, 1892.

Annexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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