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« Paléovirologie » : différence entre les versions

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La paléovirologie est l'étude des virus qui existaient dans le passé et qu'on ne retrouve plus aujourd'hui. En général, les virus ne peuvent pas fossiliser[1]. Par conséquent, des méthodes indirectes sont utilisées pour leur reconstitution. Par exemple, les virus peuvent provoquer l'évolution de leurs hôtes et les signatures de cette évolution peuvent être retrouvées et interprétées[2].

Premiers résultats

Si des virus sont aujourd'hui disparus, leur ADN peut persister dans le génome des eucaryotes[2]. On parle alors de "virus fossile" pour désigner ces régions d'un génome qui proviennent de l'intégration de matériel génétique viral. Ce matériel génétique viral est issu de rétrovirus, des virus dont le matériel génétique est constitué non pas d'ADN mais d'ARN. Grâce à une enzyme, la transcriptase inverse, l'ARN de ces virus à ARN sera transcrit en ADN pour être ensuite intégré dans le génome de la cellule hôte infectée. Or, dans certains cas, cet ADN d'origine virale reste en dormance sans être retranscrit en ARN et se transmet de génération en génération sans nuire à l'organisme ni à ses descendants, on parle alors de rétrovirus endogène[3],[4]. Au fil de millions d'années, cet ADN viral aura accumulé de nombreuses mutations. (Certaines de ces mutations sont toutefois susceptibles de transformer ces rétrovirus endogènes en virus oncogènes transformant la cellule en cellule cancéreuse.) Pour les paléovirologues, elles rendent plus difficiles l'identification de l'ADN viral au sein d'un génome. Il est cependant possible de procéder à cette identification en repérant les séquences terminales longues répétées (en anglais long terminal repeat sequence ou LTR), une séquence de nucléotides dans l'ADN caractéristique des extrémités des rétrovirus. Une fois l'ADN viral repéré, il reste aux chercheurs à identifier les mutations que cet ADN a subi tout au long des millions d'années. Il est possible d'y parvenir par la comparaison de l'ADN de ce même virus logé dans le génome d'autres cellules. Cet ADN ayant subi des mutations distinctes, elles diffèrent d'un ADN à l'autre pour un même ADN viral. Par le jeu des comparaisons, comme pour un texte réécrit plusieurs fois dont chaque copie comporte des erreurs à différents endroits, il est possible de remonter au texte original. Une fois la séquence originale retrouvée, il est possible aux chercheurs de réactiver le virus qu'elle code. C'est ce que vient de réussir Thierry Heidmann et son équipe de l'Institut Gustave Roussy, à Villejuif, près de Paris. Nommé "Phoenix". le virus en question avait conservé la possibilité d'infecter différents types de cellules humaines bien que son pouvoir infectieux reste très faible[5], environ 1000 fois moins que le VIH selon Heidmann. Ce virus aurait infecté les cellules humaines il y a moins de 5 millions d'années en ayant produit quelques 30 copies de lui-même dans le génome humain. Au delà de cette prouesse, cette étude pourrait aider à comprendre le rôle des rétrovirus dans la formation des cancers[6].

Structure cristalline de la protéine d'enveloppe du rétrovirus endogène humain HERV-FRD (syncytine-2)

Une autre découverte apportée par la paléovirologie ces dernières années fut la mise en évidence de l'intégration d'ADN d'origine virale autre que celui provenant de virus à ARN. On découvrit que des virus à ADN pouvaient en faire autant. Cela s'est avéré être le cas pour l'hépadnavirus, un virus du groupe qui comprend le virus de l'hépatite B[7].

À l'opposé des rétrovirus endogènes ayant un lien possible dans l'oncogenèse, l'ADN de certains rétrovirus intégré au génome des vertébrés jouerait un rôle essentiel. Ce serait le cas pour les mammifères placentaires avec la syncytine, une famille de protéines d’origine virale dont le rôle serait essentiel lors de la formation du placenta durant la grossesse. Chez l'espèce humaine, elles auraient donné naissance à la syncytine 1 et la syncytine 2. Dans ce cas, le virus initial (HERV-W) n'est plus reconstitué alors que l'une de ses protéines modifiée se trouve exprimée. Près de 8 pour cent du génome humain se composerait d'ADN rétroviral[8].

Références

  1. Laidler J.R., Stedman K.M. "Virus Silicification under Simulated Hot Spring Conditions" "Astrobiology", August 2010, 10(6):569-576.' DOI 10.1089/ast.2010.0463
  2. a et b Emerman M., Malik H.S. "Paleovirology — Modern Consequences of Ancient Viruses". PLoS Biology, 8(2)2010 DOI 10.1371/journal.pbio.1000301
  3. Aris Katzourakis et Gifford, Robert J., « Endogenous Viral Elements in Animal Genomes », PLoS Genetics, vol. 6, no 11,‎ , e1001191 (PMID 21124940, PMCID 2987831, DOI 10.1371/journal.pgen.1001191)
  4. RA Weiss, « The discovery of endogenous retroviruses. », Retrovirology, vol. 3,‎ , p. 67 (PMID 17018135, PMCID 1617120, DOI 10.1186/1742-4690-3-67)
  5. « Un chercheur réveille un virus fossile », Jean-Luc Goudet, futura-sciences.com, 6 novembre 2006, (consulté le 29 juin 2017)
  6. « Ancient human virus resurrected », Helen Pearson, Nature, news, 31 octobre 2006, (consulté le 29 juin 2017)
  7. "Ancient "Fossil" Virus Shows Infection to Be Millions of Years Old", by Katherine Harmon, Scientific American, September 29, 2010
  8. Syncytin-A knockout mice demonstrate the critical role in placentation of a fusogenic, endogenous retrovirus-derived, envelope gene A. Dupressoir, C. Vernochet, O. Bawa, F. Harper, G. Pierron, P. Opolon & T. Heidmann T Proc. Natl. Acad. Sci. USA, published online before print June 29, 2009 doi:10.1073/pnas.0902925106

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