Al-Anfal (sourate)

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8e sourate du Coran
Le butin
Le Coran, livre sacré de l'islam.
Le Coran, livre sacré de l'islam.
Informations sur cette sourate
Titre original سُورَةُ ٱلْأَنْفَالِ, Al-Anfal
Titre français Le butin
Ordre traditionnel 8e sourate
Ordre chronologique 88e sourate
Période de proclamation Période médinoise
Nombre de versets (ayat) 75
Ordre traditionnel
Ordre chronologique

Al-Anfal (arabe : سُورَةُ الْأَنْفَالِ, français : Le butin) est le nom traditionnellement donné à la 8e sourate du Coran, le livre sacré de l'islam. Elle comporte 75 versets. Rédigée en arabe comme l'ensemble de l'œuvre religieuse, elle fut proclamée, selon la tradition musulmane, durant la période médinoise.

Origine du nom[modifier | modifier le code]

Bien que le titre ne fasse pas directement partie du texte coranique[1], la tradition musulmane a donné comme nom à cette sourate Le butin, en référence au sujet principal de cette sourate, à savoir la manière de gérer le butin de guerre en cas de victoire lors d'un conflit armé[2].

Historique[modifier | modifier le code]

Il n'existe à ce jour pas de sources ou documents historiques permettant de s'assurer de l'ordre chronologique des sourates du Coran. Néanmoins selon une chronologie musulmane attribuée à Ǧaʿfar al-Ṣādiq (VIIIe siècle) et largement diffusée en 1924 sous l’autorité d’al-Azhar[3],[4], cette sourate occupe la 88e place, se situant en mars 624 après la bataille de Badr[5],[2]. Elle aurait été proclamée pendant la période médinoise, c'est-à-dire schématiquement durant la seconde partie de la vie de Mahomet, après avoir quitté La Mecque[6]. Contestée dès le XIXe par des recherches universitaires[7], cette chronologie a été revue par Nöldeke[8],[9], pour qui cette sourate est la 95e.

Cette sourate contient des passages évoquant des règles en cas de conflits armés, mais aussi des thèmes théologiques. Un consensus existe sur le fait que cette sourate n’est pas conçue comme une séquence textuelle homogène[10]. De nombreux indices évoquent un « long processus de formation » qu'il est impossible de faire remonter entièrement à Mahomet[10].

Khoury, bien que considérant que les parties ne sont pas articulées de manière logique, évoque pourtant une unité textuelle liée au contexte des conflits armés de 622 à 625[Note 1]. Néanmoins, Pohlmann rappelle que « cette conception n’est soutenue que par et dans la tradition narrative musulmane, qui apparaît tardivement ». Aucun indice contenu dans cette sourate ne permet d’appuyer l’interprétation traditionnelle[10].

Rien n’empêche donc « de postuler une date de rédaction plus tardive ». Cette sourate s’inscrit dans un contexte où un projet d’expansion militaire est déjà « relativement structuré ». La formulation du v.1 suggère un stade déjà avancé d’expansion et des revenus afférant[10].

Pour Pohlmann, ce texte a été construit autour d’un noyau de base, composé des énoncés en lien avec la guerre, avant de connaître des développements ultérieurs[10].

Interprétations[modifier | modifier le code]

Verset 1-19[modifier | modifier le code]

Pour Grodzki, ce passage est peu clair. Il pourrait contenir des fragments divers rassemblés ensemble. Pour Pregill, ce passage est tellement associée à la lecture faite par la tradition - l'association à la bataille de Badr (624) - qu'il est difficile de s'en extraire[11]. Ainsi, pour Wansbrough (à l'inverse de Stefanidis), la lecture traditionnelle des versets 5 à 9 comme une allusion à cette bataille et à l'hégire est à rejeter[11].

Zellentin voit dans l'importance des injonctions divines à prononcer ses paroles un parallèle avec Moïse sur le mont Sinaï et la littérature chrétienne[11].

Pour Kropp, ce passage illustre le style coranique de passage d'un discours divin qui alterne entre le singulier et le pluriel, la première personne et la troisième. De la même manière, le discours change abruptement de destinataire[11]. Rejoignant M. Rodinson qui avait déjà appliqué ce constat à la naissance de l'islam, pour Kropp : « Bref, nous sommes devant des textes idéologiques hautement sophistiqués, parallèles à ce que les mouvements totalitaires des deux derniers siècles ont produit. »[11].

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • K.-F. Pohlmann, "Sourate 8", Le Coran des Historiens, t.2a, 2019, p. 335 et suiv.
  • R. Paret, Der Koran. Kommentar und konkordanz, 1980[Note 2].
  • Hoyland R.G., In God's Path. The arab Conquest and the Creation of an Islamic Empire, 2015.

Liens externes[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Les islamologues ont utilisé plusieurs approches pour tenter de dater les différentes sourates du Coran. Paret et Neuwirth appartiennent à l’« école allemande » qui, à la suite de Nöldeke, s’appuie sur la chronologie traditionnelle et sur un récit « laïcisé » des traditions musulmanes. Autrefois dominant dans les études islamologiques, ce paradigme nöldekien n'est plus qu'« en partie présent ». Les auteurs du Coran des historiens appartiennent davantage à l’autre courant (dit sceptique ») qui prend davantage en compte une critique des sources traditionnelles. Voir : Historiographie de l'islam et du Coran
  2. En 2019, seuls deux ouvrages peuvent être considérés comme des commentaires scientifiques et continus du texte coranique. Il s'agit du Commentary on the Qur'an de Richard Bell publié en 1991 (aujourd'hui daté) et du Coran des historiens publié en 2019. L'ouvrage de Paret s'inscrit, avec ceux de Blachère, Khoury et Reynolds, dans un ensemble de traduction avec apparat critique. Voir : Sourate

Références[modifier | modifier le code]

  1. A. Chouraqui, Le Coran, traduction et commentaires, 1990, p. 15.
  2. a et b A. Chouraqui, Le Coran : L'appel, France, Robert Laffont, , 625 p. (ISBN 2221069641)
  3. G.S. Reynolds, « Le problème de la chronologie du Coran », Arabica 58, 2011, p.477-502.
  4. R. Blachère, Introduction au Coran, p.244.
  5. Organisation chronologique des sourates
  6. R. Blachère, Le Coran, 1966, p. 103.
  7. M. Azaiez, « Chronologie de la Révélation »
  8. G. Dye « Le Coran et son contexte Remarques sur un ouvrage récent », Oriens Christianus no 95, 2011, p. 247-270.
  9. E. Stefanidis, « The Qur'an Made Linear: A Study of the Geschichte des Qorâns' Chronological Reordering », Journal of Qur'anic Studies, X, II, 2008, p.13.
  10. a b c d et e K.-F. Pohlmann, "Sourate 8", Le Coran des Historiens, t.2a, 2019, p. 335 et suiv.
  11. a b c d et e M. Azaiez (Ed.), G.S. Reynolds (Ed.), T. Tesei (Ed.), et al. (2016). The Qur'an Seminar Commentary / Le Qur'an Seminar. A Collaborative Study of 50 Qur'anic Passages / Commentaire collaboratif de 50 passages coraniques. Berlin, Boston: De Gruyter. partie QS 11 Q 8:1–19