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Dans certains cas le ramassage du [[bois-mort]] y est toléré, mais pas la coupe d'arbres vivants.
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Au {{XX|s}} et au {{XXI|s}} la disparition des bois sacrés semble être un phénomène massif et généralisé à l'échelle planétaire, depuis au moins 1985. Les causes de cette disparition peuvent être variées, en Inde, par exemple, la conversion à l'hindouisme a conduit à l'abandon de bois sacrés de divinité locales, certains bois ont été convertis en cultures, de café ou gingembre notamment, dans d'autres encore, les arbres locaux ont été exploités et remplacés par des essences exotiques. Au Ghana, les bosquets sacrés sont menacés par les feux de broussailles<ref>{{Chapitre|langue=en |auteur1=N. Parthasarathy |auteur2=Kanda Naveen Babu |titre chapitre=Sacred Groves: Potential for Biodiversity and Bioresource Management |auteurs ouvrage=W. Leal Filho et al. |titre ouvrage=Life on Land, Encyclopedia of the UN Sustainable Development Goals |date=septembre 2019 |doi=10.1007/978-3-319-71065-5_10-1 |lire en ligne=https://www.researchgate.net/publication/335677858}}</ref>.
Partout, les bois sacrés tendent à disparaître sous la pression de la [[déforestation]] ou de l'industrie de la sylviculture, et par suite du recul des [[Animisme|traditions animistes]]{{refsou}}.


La petite taille de ces îlots et leur [[Insularisation écologique|isolement écologique]] ne permet cependant pas la conservation des espèces qui nécessitent des habitats de grande taille ou qui sont insérés dans un [[réseau écologique]], ni d'une [[diversité génétique]] importante. Comme beaucoup de petites [[réserves naturelles]], ils contribuent cependant à protéger une partie du [[patrimoine naturel]], en particulier les plantes et notamment les arbres, et probablement les microorganismes du [[Sol (pédologie)|sol]] ([[microfaune]], microbes et [[microfonge]], dont la [[biodiversité du sol|biodiversité]] fait l'objet d'un intérêt croissant de la part des scientifiques et des industriels du secteur des [[biotechnologie]]s).
La petite taille de ces îlots et leur [[Insularisation écologique|isolement écologique]] ne permet cependant pas la conservation des espèces qui nécessitent des habitats de grande taille ou qui sont insérés dans un [[réseau écologique]], ni d'une [[diversité génétique]] importante. Comme beaucoup de petites [[réserves naturelles]], ils contribuent cependant à protéger une partie du [[patrimoine naturel]], en particulier les plantes et notamment les arbres, et probablement les microorganismes du [[Sol (pédologie)|sol]] ([[microfaune]], microbes et [[microfonge]], dont la [[biodiversité du sol|biodiversité]] fait l'objet d'un intérêt croissant de la part des scientifiques et des industriels du secteur des [[biotechnologie]]s).

Version du 28 février 2023 à 22:51

Un bois sacré ou bosquet sacré est un bosquet d'arbres de grande importance religieuse pour une population particulière, liée à une culture ou tradition particulière.

Bois sacré de cèdres du Liban, épargné par la déforestation (nord du Liban).

De nombreuses cultures et civilisations ont conservé des bosquets, bois ou certaines parcelles de forêt interdits à la chasse, l'habitation, la coupe du bois ou l'agriculture, pour des raisons culturelles ou religieuses.

Histoire

Petit temple hindou et "Bois sacré" près de Chandod (en) sur les rives du Nerboudda
Minuscule bosquet sacré, entouré d'un enclos, protégeant l'esprit du bananier (Kreung, Cambodge)

Les « bosquets sacrés » sont cités dans l'Antiquité, notamment dans les textes de l'ancien Proche-Orient.

Il est possible et probable qu'ils existaient déjà bien antérieurement, notamment dans les sociétés animistes d'Afrique, par exemple chez les Sénoufos, mais aussi en Asie et en Europe préhistoriques. On en retrouve des exemples ou des traces presque partout dans le monde, plus particulièrement où les pratiques religieuses traditionnelles sont encore très vivantes (en Afrique, en Inde ou au Japon par exemple).

Leurs fonctions diffèrent selon les lieux et elles ont pu évoluer avec le temps et selon les cultures.

En Europe, le bois sacré semble avoir été un élément important du paysage mythologique de la Grèce antique et de la Rome antique, et de la pratique des cultes celtiques, germaniques, nordiques et slaves. Dans la Pharsale, le poète romain Lucain donne la description d'un bois sacré qui était situé près de Marseille et que Jules César fera abattre[1] en -49. Le bois était peut-être situé au vallon des Aygalades[2].

Les bois sacrés, souvent associés à des cultures polythéistes, auraient régressé ou disparu avec la progression du christianisme et de l'islam.

Les forêts sacrées et bois sacrés continuent à jouer un rôle très important en Afrique même si les ces sanctuaires boisés et les pratiques religieuses qui leur sont associées subissent la concurrence de l'islam et du christianisme[3].

En Afrique de l'Ouest, dans des régions parfois densément ou depuis longtemps aménagées et exploitées par l'Homme, ils ont contribué à conserver des échantillons de biodiversité forestière particulièrement intéressante en tant qu'« îlots forestiers » relativement épargnés par la surexploitation voire de toute exploitation (hormis parfois du bois-mort, avec alors une raréfaction des espèces saproxylophages)[4]en tant que lieux de mémoire et de protection de plantes liturgiques, plantes indicatrices de lieux de culte ou plantes abritant des divinités, ce sont des lieux où les arbres de la forêt primaire ou descendant de la forêt primaire, et leur biodiversité associée (lianes, strate herbacée, faune, fonge, etc.) est souvent restée protégée par des tabous culturels et religieux communautaires[5].

Des arbres ou lieux boisés sacrés existaient aussi, dont dans les temples ou cimetières dans certaines cultures.
L'écologue japonais Akira Miyawaki les a considérés comme des refuges pour les gènes ou variétés anciennes d'arbres et plantes devenus rares. C'est un pool génétique ancien qu'il a pu utiliser pour régénérer avec succès un grand nombre de bois et forêts de protection au Japon.

En Afrique du Nord, les cimetières, parce qu'ils ont été protégés du bétail et des chèvres en particulier, sont souvent des lieux plus verts et boisés que leur environnement. Ils servent de refuge à une biodiversité, fait reconnu par la conférence mondiale sur la biodiversité de Nagoya (octobre 2010, Japon).

Statut actuel, devenir

Dans certains cas le ramassage du bois-mort y est toléré, mais pas la coupe d'arbres vivants.

Au XX et au XXI la disparition des bois sacrés semble être un phénomène massif et généralisé à l'échelle planétaire, depuis au moins 1985. Les causes de cette disparition peuvent être variées, en Inde, par exemple, la conversion à l'hindouisme a conduit à l'abandon de bois sacrés de divinité locales, certains bois ont été convertis en cultures, de café ou gingembre notamment, dans d'autres encore, les arbres locaux ont été exploités et remplacés par des essences exotiques. Au Ghana, les bosquets sacrés sont menacés par les feux de broussailles[6].

La petite taille de ces îlots et leur isolement écologique ne permet cependant pas la conservation des espèces qui nécessitent des habitats de grande taille ou qui sont insérés dans un réseau écologique, ni d'une diversité génétique importante. Comme beaucoup de petites réserves naturelles, ils contribuent cependant à protéger une partie du patrimoine naturel, en particulier les plantes et notamment les arbres, et probablement les microorganismes du sol (microfaune, microbes et microfonge, dont la biodiversité fait l'objet d'un intérêt croissant de la part des scientifiques et des industriels du secteur des biotechnologies).

Vers une reconnaissance par l'ONU et la communauté internationale

En 2003, à l'occasion du 5e congrès mondial des parcs nationaux, à Durban, les sites naturels protégés de fait par les populations locales comme bois sacrés ou autre communs sont reconnus internationalement et désignés sous l'appellation d'aires du patrimoine autochtone et communautaire (APAC)[7], suivent ensuite plusieurs décisions du même congrès qui précisent la notion d'APAC. En 2017, 64 pays avait reconnus les APAC.

Les États-partis à la Convention sur la diversité biologique, réunis à Nagoya en 2010, sont invités à tenir compte des droits des peuples autochtones dans leurs aires protégées.[8].

Dénominations

Les bois ou bosquets sacrés ont par exemple été nommés :

Durant la christianisation de l'Estonie par les envahisseurs allemands au début du XIIIe siècle, il était courant de construire des églises sur les sites des bosquets sacrés.

Les bois ou forêts sacrés étaient généralement le lieu de cérémonies et rites religieux ou d'initiations. Ils sont considérés par les populations qui les protègent comme le lieu ou refuge d'esprits ou de dieux. On pouvait parfois y enterrer les dignitaires, héros et personnalité religieuses.

Arbres sacrés

Ces bois sacrés peuvent aussi contenir un ou plusieurs arbres sacrés, Arbre à prières ou particulièrement vénérés pour des raisons culturelles, esthétiques et/ou religieuses, plus ou moins anciennes voire immémoriales.


Exemples de bois ou forêts sacrés


Notes et références

  1. Lucain, La Pharsale, Livre III : « Description de la forêt sacrée de Marseille que César fait abattre », sur remacle.org
  2. « Le bois sacré des Massaliotes », sur persée.fr
  3. Sheridan & Nyamweru, 2008; Juhé-Beaulaton (Dir.), 2010
  4. Chevalier, A. (1948). Biogéographie et Écologie de la forêt dense ombrophile de la Côte d'Ivoire ; Revue internationale de botanique appliquée et d'agriculture tropicale, 28(305-306), 101-115.
  5. Juhé-Beaulaton, D. (1999). http://hal.archives-ouvertes.fr/docs/00/08/93/23/PDF/Juhe-Hist.Veg.pdf Arbres et bois sacrés: lieux de mémoire de l'ancienne Côte des Esclaves] ; Histoire d'Afrique. Enjeux de mémoire.
  6. (en) N. Parthasarathy et Kanda Naveen Babu, « Sacred Groves: Potential for Biodiversity and Bioresource Management », dans W. Leal Filho et al., Life on Land, Encyclopedia of the UN Sustainable Development Goals, (DOI 10.1007/978-3-319-71065-5_10-1, lire en ligne)
  7. Hasrat Arjjumend et al., « International Overview of Sacred Natural Sites and Indigenous and Community Conserved Areas (ICCAs) and the Need for Their Recognition », global environment studies, no 13,‎ (lire en ligne)
  8. Modèle:Https://www.cbd.int/doc/decisions/cop-10/full/cop-10-dec-fr.pdf décisions de la conférence des parties, Nagoya, 2010, p266, point (i)

Voir aussi

Bibliographie

  • Mircea Eliade, Traité d’histoire des religions, Payot, 1970.
  • James George Frazer, Le Rameau d'or, Laffont / Bouquins, 1981. Tome I (ch. Le Roi magicien dans la société primitive). (ISBN 978-2-2210-8846-3)
  • C. Garcia, J.-P. Pascal, C. G. Kushalappa, 2006, « Les forêts sacrées du Kodagu en Inde : écologie et religion », dans Bois et forêts des tropiques, 2006, no 288, p. 5-13.
  • Jacques Brosse, Mythologie des arbres, Payot, 2001. Ch. 6, Le bois sacré et les âmes des arbres (ISBN 978-2-228-88711-3)
  • D. Juhé-Beaulaton (dir.), Forêts sacrées et sanctuaires boisés. Des créations culturelles et biologiques, Paris, Karthala, 2010, 280 p.
  • M. J. Sheridan & C. Nyamweru, African Sacred Groves, ecological Dynamics and social Change, Ohio, Unisa, James Currey Press, 2008.

Articles connexes

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