Ayant succédé en 1973 au championnat international des marques (en vigueur de 1970 à 1972), le championnat du monde des rallyes s'appuie sur les plus célèbres épreuves routières internationales, telles le Rallye Monte-Carlo, le Safari ou le RAC Rally. Parallèlement au championnat des constructeurs, la Commission Sportive Internationale (CSI) a cette année introduit un championnat des pilotes qui remplace la controversée Coupe des conducteurs qui incluait des épreuves de second plan. Le calendrier 1979 comprend douze manches (dont huit européennes), réservées aux voitures des catégories suivantes :
Face à une opposition réduite cette année, Ford est déjà assuré de remporter le championnat du monde, la place de dauphin se disputant entre Datsun et Fiat, le géant italien ayant nettement réduit son programme rallyes après les titres acquis en 1977 et 1978. La lutte reste cependant ouverte pour le championnat des pilotes entre les deux coéquipiers Björn Waldegård et Hannu Mikkola, qui comptent chacun deux victoires cette saison sur leurs Ford Escort groupe 4.
Disputé sur parcours secret (l'itinéraire n'étant communiqué aux équipages qu'au moment du départ), le RAC Rally est l’une des épreuves les plus sélectives du championnat du monde. Créé dans les années 1930 sous la forme d'épreuve d'orientation et de maniabilité, il fut rapidement converti en épreuve de vitesse et adopta dès 1960 un classement basé sur des épreuves chronométrées[2]. Disputé en grande majorité sur terre, il valorise les qualités d'improvisation des pilotes. Depuis 1960, la plupart des éditions ont été remportées par des pilotes nordiques, seul le Britannique Roger Clark étant parvenu à les devancer en 1972 et 1976. La première victoire de Clark fut aussi le premier succès de la Ford Escort RS dans cette épreuve, ce modèle, redoutable d'efficacité dans les chemins forestiers, étant depuis invaincu au RAC.
226 demandes d'engagement ont été effectuées auprès des organisateurs, qui en ont retenu 175, correspondant au nombre maximal de partants prévu par le règlement de l'épreuve[3].
Ford
Comme l'année précédente, et bien qu'assurée du titre mondial, la branche britannique du constructeur américain a engagé six Escort RS1800 groupe 4 pour son épreuve nationale. Ces voitures restent à ce jour invaincues sur leurs terres. Pesant 980 kg, elles sont équipées d'un moteur deux litres alimenté par carburateurs dont la puissance s'élève à 260 chevaux à 8500 tr/min[4]. Les six Escort officielles sont confiées à Björn Waldegård, Hannu Mikkola, Ari Vatanen, Roger Clark, Russell Brookes et Greg Carr. De nombreux préparateurs locaux alignent des voitures identiques, pilotées notamment par Bror Danielsson, John Taylor, Henri Toivonen, Malcolm Wilson, qui peuvent également briguer une place d'honneur. Les pilotes Ford utilisent des pneus Dunlop.
Fiat
Le constructeur turinois n'est pas présent officiellement, mais sa filiale anglaise a engagé une 131 Abarth groupe 4 pour Walter Röhrl. Configurée en version terre, cette voiture d'environ une tonne dispose d'un moteur deux litres seize soupapes à injection Kugelfischer développant 235 chevaux à 7200 tr/min[5]. Le pilote italien 'Lucky' dispose d'un modèle identique, engagé par l'équipe Quatro Rombi[6]. La marque utilise des pneus Pirelli.
Lancia
C'est également la filiale anglaise du groupe Fiat qui a engagé la Stratos HF groupe 4 confiée à Markku Alén. Les normes de bruit sévissant au Royaume-Uni ont nécessité une adaptation du moteur V6 ayant fait chuter sa puissance de 283 à 270 chevaux[6]. Cette voiture de 970 kg reste cependant redoutable sur les pistes britanniques, la Stratos s'avérant la principale adversaire des Ford. Alén utilise des gommes Pirelli.
Talbot
Talbot UK a engagé une seule Sunbeam Lotus groupe 4 pour Tony Pond, Jean-Pierre Nicolas ayant quitté l'équipe après le Tour de Corse, mettant son activité de pilote en sommeil pour se consacrer à l'ouverture d'un garage Renault à Marseille[7]. Le moteur quatre cylindres seize soupapes de 2217 cm3, alimenté par deux carburateurs double-corps, développe désormais 240 chevaux et devrait permettre à cette voiture de 1050 kg, équipée de pneus Dunlop, de concurrencer efficacement les Ford dans ce type d'épreuve[6].
Toyota
Le premier constructeur japonais aligne ici la nouvelle version groupe 4 de son coupé Celica. Équipées d'un moteur quatre cylindres deux litres à seize soupapes, ces voitures d'une tonne disposent désormais de 220 chevaux[8]. Trois exemplaires ont été engagés, pour Jean-Luc Thérier, Leif Asterhag et Tapio Rainio, tous trois utilisant des pneumatiques Pirelli.
Triumph
La branche sportive du groupe British Leyland a engagé officiellement quatre Triumph TR7 V8 groupe 4, deux confiés à ses pilotes habituels Per Eklund et Simo Lampinen, épaulés pour la circonstance par les Britanniques Terry Kaby et Graham Elsmore. Avec leur moteur V8 de 3500 cm3 alimenté par deux carburateurs double corps, ces voitures pesant 1150 kg disposent de 285 chevaux à 7500 tr/min. Elles sont équipées de pneus Dunlop[5]. Engagé à titre privé, John Buffum dispose d'un modèle identique.
Principal adversaire de Ford cette saison, le constructeur japonais a préparé deux berlines 160J PA10 groupe 2 pour Timo Salonen et Andy Dawson, ce dernier étant également directeur sportif de la marque. Équipées de pneus Dunlop, ces voitures de 965 kg à moteur deux litres disposent d'une puissance de 198 chevaux à 7800 tr/min[5].
Opel
Le constructeur allemand a pris du retard dans l'homologation en groupe 4 de sa nouvelle Ascona 400 et n'engage officiellement quúne seule voiture, une Ascona groupe 2 (980 kg, 180 chevaux) confiée à Brian Culcheth. Parmi les nombreux pilotes privés représntant la marque, on retient la présence du Suédois Björn 'Nalle' Johansson sur une Kadett GT/E groupe 2 de 190 chevaux[6].
Saab
La marque suédoise a préparé deux coachs 99 turbo groupe 2 (1060 kg, pneus Dunlop, moteur deux litres suralimenté par un turbocompresseurGarrett) pour Stig Blomqvist et Ola Strömberg. Blomqvist dispose de la dernière évolution moteur, poussée à 265 chevaux, contre 240 chevaux pour la seconde voiture[6].
Audi
Audi Motorsport a engagé trois 80 GLE groupe 4 (l'homologation groupe 2 étant prévue début 1980), confiées à Harald Demuth, Walter Smolej et James Rae. Ces voitures pèsent 940 kg en configuration 'terre' et sont équipées d'un quatre cylindres de 1600 cm3 avec injection mécanique Bosch développant 160 chevaux à 7600 tr/min[5]. Elles utilisent des pneus Pirelli.
Les concurrents partent de Chester le dimanche matin à partir de neuf heures, en direction de Liverpool[7]. La première épreuve spéciale se déroule dans le Safari Park de Knowsley ; Jean-Luc Thérier s'y montre le plus rapide au volant de sa Toyota et prend la tête de la course devant la Lancia Stratos de Markku Alén. Celui-ci a tôt fait de combler ses cinq secondes de retard et, dès le secteur suivant, s'empare de la première place avec une seconde d'avance sur la Ford Escort d'Hannu Mikkola. L'après-midi, les deux champions finlandais vont dominer leurs adversaires, emmenés par la Talbot de Tony Pond et la Saab de Stig Blomqvist, qui se retrouvent relégués à plus d'une minute à l'issue des dix premiers secteurs chronométrés. Malgré une attaque incessante, Alén ne compte alors que sept secondes d'avance sur son compatriote. Parmi les favoris, Björn Waldegård a été retardé par une sortie de route en tout début d'épreuve et a dû faire remplacer le pont arrière de son Escort. Le pilote suédois a effectué une belle remontée et occupe la sixième place derrière son coéquipier Ari Vatanen.
Au début de la nuit, dans la forêt de Dalby, Mikkola prend un léger avantage sur Alén, légèrement retardé par un problème de distribution sur le moteur de sa Stratos. Le pilote Lancia connaît une alerte beaucoup plus sérieuse dans le secteur suivant : soudainement privé de freins arrière à cause d'une rupture du circuit hydraulique, il ne peut éviter la sortie de route et perd plusieurs minutes. Auteur d'un temps époustouflant, Waldegård s'empare alors de la seconde place, juste devant Pond, à près de deux minutes de Mikkola. Blomqvist a également perdu beaucoup de temps à cause d'une sortie de route et c'est désormais Vatanen qui occupe la quatrième place, devant son coéquipier Russell Brookes, tandis que Thérier a rétrogradé en septième position. Mikkola se montre inaccessible dans les secteurs suivants, disputés de nuit, et aux abords de la forêt de Kielder il a porté son avance sur Pond à deux minutes et demie, alors que Waldegård a perdu plus de six minutes à cause d'une crevaison et plongé à la dix-neuvième place, le cric ayant glissé sous la voiture lors du remplacement de la roue ! Pond va alors connaître des problèmes d'embrayage sur sa Talbot, perdant deux places au profit de Vatanen et Brookes. Au sortir de la forêt de Kielder, Mikkola a porté son avance sur Vatanen, désormais second à plus de trois minutes et demie, alors que Brookes, toujours troisième, a été retardé par des crevaisons et accuse sept minutes de retard. Après une petite incursion en Ecosse, où les Ford continuent leur démonstration, les concurrents rallient Carlisle en début de matinée, pour une courte pause avant le retour sur Chester. Les Ford Escort ont balayé toute opposition et occupent les trois premières places ; ayant évité toutes les embûches, Mikkola compte plus de quatre minutes d'avance sur Vatanen et près de huit sur Brookes. Pond, toujours quatrième, est à près de neuf minutes de l'équipage de tête, juste devant la Ford Escort de Malcolm Wilson, les autres concurrents comptant déjà plus de dix minutes de retard. Huitième sur sa Datsun, Timo Salonen a pris la tête du groupe 2 après l'abandon de Blomqvist. Accablés par les ennuis durant la nuit, Waldegård et Alén comptent de l'ordre d'un quart d'heure de retard et ont perdu toute chance de victoire.
La deuxième partie d'étape se déroule de jour dans le Lake District. Malgré son avance confortable, Mikkola continue à attaquer et va se montrer le plus rapide dans sept des neuf secteurs chronométrés. Une nouvelle fois épargné par les crevaisons, contrairement à ses coéquipiers, il conforte son avance, ralliant Chester le lundi soir avec un avantage de plus de cinq minutes sur Vatanen et de neuf sur Brookes. Depuis la sortie de route d'Alén le premier jour, Pond est le seul à pouvoir contrer les Ford mais le pilote Talbot compte désormais près de dix minutes de retard sur Mikkola. L'espoir britannique Malcolm Wilson pointe désormais en cinquième position au volant de son Escort, ayant dépassé son coéquipier John Taylor qui continue courageusement malgré de fortes douleurs aux jambes, séquelles d'une ancienne chute de cheval de ce champion de steeple-chase. Septième, Salonen domine toujours le groupe 2, il devance les Ford de Clark et Waldegård au classement général. Chez Lancia, la voiture d'Alén fonctionne de nouveau correctement et le pilote finlandais est remonté en dixième position. Les autres adversaires de Ford ont également connu leur lot de problèmes au cours de cette première étape : si les deux Toyota de Thérier et Asterhag ont abandonné avant Carlisle, la Fiat de Walter Röhrl (retardée par des problèmes de freins et de pont autobloquant), la Vauxhall de Pentti Airikkala (problèmes de carburation) et la Triumph de Per Eklund (ennuis de freins) ne pointent respectivement qu'aux onzième, douzième et treizième places, accusant déjà une vingtaine de minutes de retard. Sur les 175 équipages au départ, seuls 93 sont encore en course.
Les concurrents repartent le mardi matin vers le Pays de Galles où va se dérouler la majeure partie de cette deuxième étape. Malgré le brouillard, Mikkola continue sur un rythme très élevé et préserve sa marge de cinq minutes sur Vatanen. Pond et Alén attaquent également très fort, le premier parvenant à déposséder Brookes de sa troisième place dans le secteur de Brycheiniog. Le dernier adversaire des Ford va cependant être victime de sa fougue aussitôt après, se faisant surprendre par une plaque de verglas au passage d'un pont ; partie en tonneau, la Talbot n'est pas en état de continuer. Dès lors, plus rien ne semble pouvoir s'opposer à un triplé des Ford, les positions étant acquises pour Mikkola, Vatanen et Brookes. Une erreur de pointage de David Richards, le copilote de Vatanen, va cependant remettre en cause ce classement : au contrôle de Machynlleth, l'Escort no 6 se présente en avance sur son horaire et se voit infliger dix minutes de pénalisation (contrairement aux autres épreuves du championnat britannique, le règlement du Rallye RAC sanctionne tout pointage anticipé). L'équipage chute de la seconde à la cinquième place, derrière Salonen et Alén, tous deux auteurs d'une belle remontée. Attaquant à outrance, Vatanen va cependant grignoter son retard sur Alén, lui reprenant la quatrième place dans l'avant-dernier tronçon chronométré. Fort d'une dizaine de minutes d’avance sur Brookes après la pause de Machynlleth, Mikkola a pu adopter un rythme un peu moins soutenu jusqu'à l'arrivée et remporte l'épreuve pour la deuxième fois consécutive, devant son coéquipier Brookes. Auteur de performances impressionnantes avec sa Datsun groupe 2, Salonen obtient une brillante troisième place. Malgré ses souffrances, Taylor est allé au terme de la course, qu’il achève à la sixième place derrière Vatanen et Alén. Très malchanceux durant ces quatre journées, Waldegård obtient une modeste neuvième place derrière Airikkala et Röhrl. Le champion suédois conserve la tête du championnat, mais Mikkola reste dans la course au titre qui se jouera dans la dernière manche en Côte d'Ivoire.
attribution des points : 10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1 respectivement aux dix premières marques de chaque épreuve, additionnés de 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1 respectivement aux huit premières de chaque groupe (seule la voiture la mieux classée de chaque constructeur marque des points). Les points de groupe ne sont attribués qu'aux concurrents ayant terminé dans les dix premiers au classement général.
seuls les sept meilleurs résultats (sur douze épreuves) sont retenus pour le décompte final des points. Ford doit donc décompter les seize points acquis en Finlande et les douze acquis au Sanremo. De même, Datsun doit décompter les six points acquis en Nouvelle-Zélande.
attribution des points : 20, 15, 12, 10, 8, 6, 4, 3, 2, 1 respectivement aux dix premiers de chaque épreuve.
seuls les sept meilleurs résultats (sur douze épreuves) sont retenus pour le décompte final des points. Björn Waldegård doit donc décompter les deux points acquis en Grande-Bretagne.