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Sylvestre-François Lacroix

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Sylvestre-François Lacroix ou De la Croix[1], né le à Paris et mort le à Paris, est un mathématicien français dont le Traité du calcul différentiel et du calcul intégral eut une très grande influence au XIXe siècle.

Issu d'une modeste famille parisienne, Lacroix fut initié aux mathématiques par l'abbé Joseph-François Marie, professeur au collège des Quatre-Nations, et suivit durant les hivers 1780-1781 et 1781-1782 les cours d'« analyse appliqué à la géométrie » (géométrie analytique), que Gaspard Monge dispensait à la chaire d'hydrodynamique du Louvre comme assistant de Charles Bossut. Monge, qui était alors professeur à l’École royale du génie de Mézières, venait de rejoindre la capitale à la faveur de sa nomination comme adjoint à l'Académie royale des sciences. Il n'enseignait toutefois pas la géométrie descriptive, car les méthodes de cette discipline (double projection, relèvement, rabattement, plans tangents) étaient tenues comme un secret militaire. Lacroix soupçonna toutefois l'existence d'une discipline permettant la solution géométrique de problèmes de géométrie dans l'espace. Fin 1779 Pierre Charles Le Monnier, professeur de physique au Collège royal de France, propose à Lacroix, alors âgé de 14 ans, de travailler sur des observations lunaires, travaux de calcul difficiles qu'il mène durant deux ans.

École des gardes de la Marine de Rochefort

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Lacroix avait montré de telles dispositions pour les mathématiques que Monge le fit nommer, à l'âge de 17 ans, professeur de mathématiques à l'école des gardes de la Marine de Rochefort le . Monge obtient d'ailleurs la charge d'examinateur des élèves gardes du Pavillon et de la Marine en après la mort d'Étienne Bézout). Lacroix travaille alors sur la résolution d'équations différentielles partielles non linéaires grâce aux méthodes de Monge puis reprend des recherches en astronomie en lien avec les observations de Lemonnier et Lacaille. Ses Tables du Soleil sont présentés à l'Académie royale des sciences le par Lemonnier et ses travaux sur les dérivés partielles le de la même année par Condorcet.

Retour à Paris

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Fin 1785, Monge conseille à Condorcet de choisir Lacroix pour enseigner sous sa direction les mathématiques au Lycée, établissement d'enseignement supérieur privé créé à Paris sous le nom de Musée et qui était alors en pleine réorganisation. Lacroix commence ses cours en . Il est également chargé le , en remplacement de Prévost, de la suppléance de Joseph Lepaute Dagelet (parti avec La Pérouse) pour le cours de mathématiques de l’école des cadets-gentilshommes. Il continue alors ses travaux de recherches et réédite avec Condorcet les Lettres à une princesse d'Allemagne d'Euler. Il reçoit en 1787 une partie du prix (1800 livres) de l'Académie royale des sciences consacré à la navigation et au commerce dont le sujet du concours était la théorie des assurances maritimes et pour lequel il travaille sur le calcul des probabilités en collaboration avec Condorcet. C'est à cette époque que Lacroix se marie. Cependant, il perd ses deux places à la suite de la suppression de son cours de mathématiques au Lycée en [2], à cause de sa faible fréquentation, et la suppression de l'école des cadets-gentilshommes au début de 1788.

École royale d'artillerie de Besançon

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Lacroix est nommé le , en remplacement de Pruvost, professeur de mathématiques, physique et chimie à l'école royale d'artillerie de Besançon sur recommandation de Pierre-Simon de Laplace, examinateur des aspirants et élèves de l'Artillerie depuis la mort de Bézout en 1783. Il rejoint l'école en septembre et y restera cinq années. Lors de ce séjour à Besançon, il pénètre les principes de la géométrie descriptive de Monge grâce aux indications données par deux anciens élèves de l'École royale du génie de Mézières en garnison dans le Jura, Justin Girod-Chantrans et Charles d'Amondans de Tinseau[3]. Isolé des savants parisiens, il entretient une correspondance avec Monge, Cassini, Lalande, Legendre et Laplace. Il est élu correspondant de Condorcet par l'Académie royale des sciences le 29 aout 1789 et membre correspondant de la Société philomathique de Paris le .

Second retour à Paris

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En 1793, il quitte sa place de professeur à Besançon pour succéder à Laplace en tant qu'examinateur de l'Artillerie, il fut de plus choisi par Monge en 1794 comme adjoint pour le cours de géométrie descriptive donné à l’éphémère École normale de l'an III. Il devint également la même année chef de bureau à la commission de l'instruction publique (poste qu'il quitte en 1799) et professeur de mathématiques à l'école centrale des Quatre-Nations. Il devient en 1799 membre de l'Institut national des sciences et des arts. En 1805 il devint professeur de mathématiques transcendantes au lycée Bonaparte (jusqu'en 1815) ; il devint à ce titre le premier titulaire de la chaire de calcul différentiel et intégral de la faculté des sciences de Paris et également son premier doyen (jusqu'en 1821). Il fut suppléé à partir de 1825 par Étienne-Louis Lefébure de Fourcy.

À partir de 1799, sa nomination comme répétiteur puis comme instituteur d'analyse à l'École polytechnique le conduit à rédiger la plupart de ses cours, avec l'idée de les améliorer. Il est nommé par décret du examinateur permanent près l'École polytechnique en remplacement de l'abbé Bossut, admis à la retraite[4]. En 1812 il remplace Siméon Denis Poisson comme suppléant d'Antoine-René Mauduit au Collège impérial de France et devient titulaire à la mort de Mauduit en 1815. Lacroix quitta alors l'emploi d'examinateur permanent à l'École polytechnique à la fin de l'année 1815 et fut remplacé par Poisson. Il fut professeur au Collège royal de France jusqu'à son décès en 1843, mais y fut suppléé par Louis-Benjamin Francœur en 1828 et à partir de 1836 par Guillaume Libri.

Les ouvrages de Lacroix connurent une large diffusion au XIXe siècle, tant en Italie qu'en Angleterre : ils étaient encore utilisés plus de cinquante ans après leur rédaction.

Un cratère lunaire a été nommé Lacroix en son honneur, par l'Union astronomique internationale en 1935.

Traité élémentaire de trigonométrie rectiligne et sphérique, et d'application de l'algèbre à la géométrie, 1813
  • Éléments de géométrie descriptive : essai de géométrie sur les plans et les surfaces courbes (1795), impr. Fuchs, Paris
  • Éléments d'algèbre, a l'usage de l'École centrale des Quatre-Nations (1797), Chez Duprat, Paris.
  • Traité du calcul différentiel et du calcul intégral (3 vol., 1797-1798), impr. Duprat, Paris. Une seconde édition abrégée parut en 1802, puis en 1810-1819 à destination de l'enseignement élémentaire : cette version connut neuf éditions entre 1802 et 1881. Elle est téléchargeable depuis Gallica.
  • Traité élémentaire de trigonométrie rectiligne et sphérique et d'application de l'algèbre à la géométrie (1798), impr. Duprat, Paris.
  • Complément des Éléments d'algèbre, a l'usage de l'École centrale des Quatre-Nations (1800), Chez Duprat, Paris.
  • Traité élémentaire de calcul des probabilités, Paris, Mallet-Bachelier

Notes et références

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  1. Le nom Lacroix résulte d'une suppression de particule opérée en 1793; l'acte de naissance (paroisse Notre-Dame-de-Bonne-Nouvelle, Paris, 1765 confirme la forme De la Croix, cf Taton Rene. Condorcet et Sylvestre-François Lacroix . In: Revue d'histoire des sciences et de leurs applications. 1959, Tome 12 n°2. pp. 127-158.
  2. Les mathématiques furent ensuite enseignées dans le cadre du cours de physique par Antoine Deparcieux qui suppléait Monge
  3. Cf. B. Belhoste, L'École Normale de l'An III, Leçons de mathématiques (1992), éd. Dunod, p. 566.
  4. Il est remplacé par André-Marie Ampère en tant qu'instituteur d'analyse par décret du 28 décembre 1809.

Bibliographie

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  • Pierre Lamandé, « La conception des nombres en France vers 1800 : l'œuvre didactique de S. F. Lacroix », Revue d'histoire des mathématiques, vol. 10,‎ , p. 45-106.
  • (en) Joao Caramalho Domingues, Lacroix and the Calculus, Bâle, Boston, Berlin, Birkhäuser, , 468 p. (ISBN 978-3-7643-8637-5).
  • René Taton, « Laplace et Sylvestre-François Lacroix », Revue d'histoire des sciences et de leurs applications, vol. 6, no 4,‎ , p. 350-360.

Articles connexes

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Liens externes

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