Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité

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Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité
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Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité
Adoption
Lieu d'adoption New York
Entrée en vigueur

La Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité (en anglais : Convention on the non-applicability of statutory limitations to war crimes and crimes against humanity) est un traité international qui émane de l'Organisation des Nations unies par lequel les pays signataires s'engagent à rendre imprescriptibles les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité tels que définis dans la charte de Nuremberg du [Notes 1].

Principe[modifier | modifier le code]

Les États signataires s'engagent en outre à adopter toute mesure juridique requise pour permettre, selon les règles du droit international, l'extradition des personnes relevant de son Article II, qui énonce :

« Si l'un quelconque des crimes mentionnés à l'article premier est commis, les dispositions de la présente Convention s'appliqueront aux représentants de l'autorité de l’État et aux particuliers qui y participeraient en tant qu'auteurs ou en tant que complices, ou qui se rendraient coupables d'incitation directe à la perpétration de l'un quelconque de ces crimes, ou qui participeraient à une entente en vue de le commettre, quel que soit son degré d'exécution, ainsi qu'aux représentants de l'autorité de l’État qui toléreraient sa perpétration[1]. »

L'application du concept d'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité s'articule ainsi selon Vladimir Jankélévitch : « Lorsqu’un acte nie l’essence de l’homme en tant qu’homme, la prescription qui tendrait à l’absoudre au nom de la morale contredit elle-même la morale. N’est-il pas contradictoire d’invoquer le pardon ? Oublier ce crime gigantesque contre l’humanité serait un nouveau crime contre le genre humain »[2]. Pierre Mertens ajoute la dimension droit international de cette imprescriptibilité : « On ne conçoit pas d’application de la ’loi de l’oubli’ pour des crimes qui ont été perpétrés contre la communauté des nations et l’humanité en tant que telles. Ces crimes sont imprescriptibles par nature. Si, pour des raisons techniques, ces crimes ne peuvent, dans l’état actuel de l’évolution du droit positif, n’être réprimés que sur le plan interne, ce doit être en conformité avec le droit international et en reconnaissant à celui-ci la primauté qui lui est due »[3].

Entrée en vigueur[modifier | modifier le code]

La convention, datée du [Notes 2], est soumise à la signature du au . Conformément à son article VIII, la convention est entrée en vigueur 90 jours après le dépôt du dixième instrument de ratification ou d'adhésion, soit le [Notes 3],[1].

Pays signataires[modifier | modifier le code]

56 pays ont ratifié la convention. De nombreux États signalent en remarque qu'il est regrettable que la convention n'ait pas une portée plus universelle, les articles V et VII empêchant certains États de signer la Convention ou d'y adhérer et s'opposent ainsi au principe de l'égalité souveraine des États[1].

Cour pénale internationale[modifier | modifier le code]

Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, entré en vigueur après la signature du soixantième État, le , comporte également en son article 29 une clause d'imprescriptibilité : « Les crimes relevant de la compétence de la Cour ne se prescrivent pas[4] ».

Autres dispositions légales[modifier | modifier le code]

  • En France, depuis la Loi n° 64-1326 du , les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité sont imprescriptibles[5]. Le pôle crimes contre l’humanité, crimes et délits de guerre (ouvert en 2012) traque les personnes soupçonnées de ces crimes. Plus proactive que d'autres pays, la France enquête et juge les criminels présents sur son territoire, même si les faits imprescriptibles se sont déroulés dans un autre pays[6].
  • En Belgique, Le Titre Ibis du code pénal belge, « Des violations graves du droit international », entré en vigueur le , rend imprescriptibles les crimes relevant du droit international[7].
  • En Espagne, code pénal espagnol, art. 131 § 4, imprescriptibilité des actes de génocide[3].
  • La « Convention européenne sur l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre » est régie par le traité n° 082 du [8].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. « [D]ans aucun procès ou aucune poursuite pour des crimes précités, l’accusé n’aura le droit d’invoquer le bénéfice d’une prescription accomplie durant la période du 30 janvier 1933 au 1er juillet 1945. De même, il ne sera pas admis que fasse obstacle, tant au procès qu’à la peine, une immunité, grâce ou amnistie accordée sous le régime nazi. » (l’imprescriptibilité se limitait aux crimes commis par les Nazis pendant la Seconde Guerre mondiale)
  2. Résolution 2391 [XXIII] du 26 novembre 1968 (lire en ligne).
  3. Enregistrement no  10823.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b et c Nations Unies, Recueil des Traités , « Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité », New York, , vol. 754, p. 73 (lire en ligne un exemplaire certifié conforme en français)
  2. Florent Bussy, « Le crime contre l’humanité, une étude critique », Témoigner. Entre histoire et mémoire. Revue pluridisciplinaire de la Fondation Auschwitz, no 115,‎ , p. 135–148 (ISSN 2031-4183, DOI 10.4000/temoigner.528, lire en ligne, consulté le )
  3. a et b Anne-Marie La Rosa, « Imprescriptible », dans Dictionnaire de droit international pénal : Termes choisis, Graduate Institute Publications, coll. « International », (ISBN 978-2-940549-30-6, lire en ligne), p. 50–52
  4. "Nations Unies, Recueil des Traités, chap. XVIII, 10, Statut de Rome de la Cour pénale internationale, , Chap. III, principes généraux du droit pénal, art. 29, (lire en ligne)
  5. Légifrance, Loi n° 64-1326 du 26 décembre 1964 tendant à constater l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité, (lire en ligne)
  6. « « La France pourrait-elle devenir un refuge d’impunité pour les criminels contre l’humanité ? » », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  7. Code pénal belge, Titre Ibis, Art. 136bis, 136ter, 136quater, 136quinquies, 136sexies, 136septies, 136octies, 7 août 2003, (lire en ligne)
  8. Conseil de l'Europe, « Convention européenne sur l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre », STE no 082, Strasbourg, , (lire en ligne), (signataires)