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Le vendredi 20 novembre [[2015]], soit, quatre ans avant le début de la pandémie du Covid-19 paraît un article dans la revue ''[[revue Nature|Nature]]'' impliquant une équipe internationale de virologues parmi lesquels [[Shi Zhengli]], spécialiste des [[Coronavirus]] qui a activement lutté contre l'[[Épidémie de SRAS de 2002-2004|épidémie du SRAS en 2002-2004]].
Le vendredi 20 novembre [[2015]], soit, quatre ans avant le début de la pandémie du Covid-19 paraît un article dans la revue ''[[revue Nature|Nature]]'' impliquant une équipe internationale de virologues parmi lesquels [[Shi Zhengli]], spécialiste des [[Coronavirus]] qui a activement lutté contre l'[[Épidémie de SRAS de 2002-2004|épidémie du SRAS en 2002-2004]].


En utilisant le système de génétique inverse SARS-CoV2, l'équipe annonce avoir généré un [[virus chimérique]] (virus hybride conçu artificiellement) en utilisant un coronavirus de chauve-souris SHC014 et un SARS-CoV. Ce virus chimérique aurait été expérimenté sur une souris. Les résultats indiquent que ce type de virus peut se répliquer efficacement dans les cellules des voies respiratoires humaines primaires. Des expériences ''in vivo'' démontrent la réplication de ce virus dans le poumon de souris avec une [[pathogenèse]] notable<ref>[https://www.nature.com/articles/nm.3985 A SARS-like cluster of circulating bat coronaviruses shows potential for human emergence (Vineet D Menachery, Boyd L Yount Jr, Kari Debbink, Sudhakar Agnihothram, Lisa E Gralinski, Jessica A Plante, Rachel L Graham, Trevor Scobey, Xing-Yi Ge, Eric F Donaldson, Scott H Randell, Antonio Lanzavecchia, Wayne A Marasco, Zhengli-Li Shi & Ralph S Baric)]</ref>. C'est dans un laboratoire de [[Université de Caroline du Nord à Chapel Hill|l'Université de Caroline du Nord]], aux [[Etats-Unis]] que cette équipe a opéré. Et nullement à [[Wuhan]] même si Shi Zhengli (considérée comme une héroïne du SRAS-2002 <ref>[https://www.lindependant.fr/2020/04/24/coronavirus-diplomee-a-montpellier-une-chercheuse-chinoise-nouvelle-cible-des-complotistes,8860787.php L'indépendant 25/04/2020]</ref>) exerce aujourd'hui son activité de [[virologue]] dans la capitale du [[Hubei]].
En utilisant le système de génétique inverse SARS-CoV2, l'équipe annonce avoir généré un [[virus chimérique]] (virus hybride conçu artificiellement) en utilisant un coronavirus de chauve-souris SHC014 et un SARS-CoV. Ce virus chimérique aurait été expérimenté sur une souris. Les résultats indiquent que ce type de virus peut se répliquer efficacement dans les cellules des voies respiratoires humaines primaires. Des expériences ''in vivo'' démontrent la réplication de ce virus dans le poumon de souris avec une [[pathogenèse]] notable<ref>{{Article |langue=en |auteur1= |prénom1=Vineet D. |nom1=Menachery |prénom2=Boyd L. |nom2=Yount |prénom3=Kari |nom3=Debbink |prénom4=Sudhakar |nom4=Agnihothram |et al.=oui |titre=A SARS-like cluster of circulating bat coronaviruses shows potential for human emergence |périodique=Nature Medicine |volume=21 |numéro=12 |date=2015-12 |issn=1546-170X |doi=10.1038/nm.3985 |lire en ligne=https://www.nature.com/articles/nm.3985 |consulté le=2020-05-02 |pages=1508–1513 }}</ref>. C'est dans un laboratoire de l'[[Université de Caroline du Nord]] aux [[États-Unis]] que cette équipe a opéré, et nullement à [[Wuhan]] même si Shi Zhengli (considérée comme une héroïne du SRAS-2002<ref>{{Lien web|langue=fr|auteur1=|titre=Diplômée à Montpellier, la directrice d'un laboratoire P4 de Wuhan accusée par les complotistes d'avoir propagé le coronavirus au marché aux poissons|url=https://www.lindependant.fr/2020/04/24/coronavirus-diplomee-a-montpellier-une-chercheuse-chinoise-nouvelle-cible-des-complotistes,8860787.php|site=lindependant.fr|périodique=|date=24/04/2020|consulté le=2020-05-02}}</ref>) exerce aujourd'hui son activité de [[virologue]] dans la capitale du [[Hubei]].


Néanmoins, c'est sur la base de cet article qu'apparaissent des [[Théorie du complot|théories du complot]] dès le {{date-|26 janvier 2020}}. Rapidement, de telles théories commencent à circuler sur [[Facebook]] et [[Twitter]], selon lesquelles le [[coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère]] émanerait du laboratoire, voire y aurait été conçu pour nuire<ref name="OriginaireLabo">{{Lien web |auteur=Alexis Orsini |titre=Le coronavirus, originaire d’un laboratoire de Wuhan lié à la France ? Retour sur une rumeur virale |url=https://www.20minutes.fr/monde/2707987-20200131-coronavirus-originaire-laboratoire-wuhan-lie-france-retour-rumeur-virale |date=31 janvier 2020 |site=20minutes.fr |consulté le= 16 avril 2020}}.</ref>. Le journaliste Antoine Izambard souligne qu'{{cita|au vu des éléments dont on dispose, les théories qui circulent sur l’émergence du coronavirus dans le laboratoire P4 à Wuhan sont complotistes}}, en l'absence d’{{cita|éléments concrets à ce stade qui iraient en ce sens}}<ref name="OriginaireLabo"/>. La [[Direction générale de la Santé|Direction générale de la Santé française]] déclare qu'« aucun élément ne permet d’accréditer les allégations liant la crise sanitaire en cours à l’existence à Wuhan d’un laboratoire P4 »<ref name="OriginaireLabo"/>.
Néanmoins, c'est sur la base de cet article qu'apparaissent des [[Théorie du complot|théories du complot]] dès le {{date-|26 janvier 2020}}.
Rapidement, de telles théories commencent à circuler sur [[Facebook]] et [[Twitter]], selon lesquelles le [[coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère]] émanerait du laboratoire, voire y aurait été conçu pour nuire<ref name="OriginaireLabo">{{Lien web |auteur=Alexis Orsini |titre=Le coronavirus, originaire d’un laboratoire de Wuhan lié à la France ? Retour sur une rumeur virale |url=https://www.20minutes.fr/monde/2707987-20200131-coronavirus-originaire-laboratoire-wuhan-lie-france-retour-rumeur-virale |date=31 janvier 2020 |site=20minutes.fr |consulté le= 16 avril 2020}}.</ref>. Le journaliste Antoine Izambard souligne qu'{{cita|au vu des éléments dont on dispose, les théories qui circulent sur l’émergence du coronavirus dans le laboratoire P4 à Wuhan sont complotistes}}, en l'absence d’{{cita|éléments concrets à ce stade qui iraient en ce sens}}<ref name="OriginaireLabo"/>. La [[Direction générale de la Santé|Direction générale de la Santé française]] déclare qu'« aucun élément ne permet d’accréditer les allégations liant la crise sanitaire en cours à l’existence à Wuhan d’un laboratoire P4 »<ref name="OriginaireLabo"/>.


Une étude en pré-publication de chercheurs de l’{{lang|en|Indian Institute of Technology}} de [[New Delhi]] relève, le {{date-|31 janvier 2020}}, sur le site bioRxiv « une similarité étrange », « qui a peu de chances d’être fortuite », entre certaines séquences de l’ARN du SARS Covid-2 et celui du [[VIH]]<ref name="FabriquéSida">{{Article|titre=Le coronavirus, fabriqué à partir du virus du sida ? La thèse très contestée du professeur Montagnier |périodique=Le Monde.fr |date=2020-04-17 |lire en ligne=https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2020/04/17/le-coronavirus-fabrique-a-partir-du-virus-du-sida-la-these-tres-contestee-du-pr-luc-montagnier_6036972_4355770.html |consulté le=2020-04-27 }}.</ref>. Cette étude en pré-print, très contestée par les spécialistes notamment parce que nombreux virus partagent cette courte séquence, est par la suite retirée. Le professeur [[Luc Montagnier]] s'appuie toutefois sur elle pour arguer d'une possible manipulation humaine<ref name="FabriquéSida"/>.
Une étude en pré-publication de chercheurs de l’{{lang|en|Indian Institute of Technology}} de [[New Delhi]] relève, le {{date-|31 janvier 2020}}, sur le site [[bioRxiv]] « une similarité étrange », « qui a peu de chances d’être fortuite », entre certaines séquences de l’ARN du SARS Covid-2 et celui du [[VIH]]<ref name="FabriquéSida">{{Article|titre=Le coronavirus, fabriqué à partir du virus du sida ? La thèse très contestée du professeur Montagnier |périodique=Le Monde.fr |date=2020-04-17 |lire en ligne=https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2020/04/17/le-coronavirus-fabrique-a-partir-du-virus-du-sida-la-these-tres-contestee-du-pr-luc-montagnier_6036972_4355770.html |consulté le=2020-04-27 }}.</ref>. Cette étude en [[Prépublication (édition scientifique)|prépublication]], très contestée par les spécialistes notamment parce que nombreux virus partagent cette courte séquence, est par la suite retirée. Le professeur [[Luc Montagnier]] s'appuie toutefois sur elle pour arguer d'une possible manipulation humaine<ref name="FabriquéSida"/>.


Lors d’une conférence de presse l'hypothèse est rejetée par [[Fadéla Chaib]], la [[porte-parole]] de l'[[Organisation mondiale de la santé]], qui souligne que toutes les preuves vont vers une « origine animale » et non vers une quelconque manipulation<ref>{{Lien web|auteur1=|titre=Coronavirus : l'OMS rejette l'hypothèse d'une contamination à partir du laboratoire P4 de Wuhan|url=https://www.lesechos.fr/monde/chine/coronavirus-loms-rejette-lhypothese-dune-contamination-a-partir-du-laboratoire-p4-de-wuhan-1196802|site=Les Échos|date=2020-04-21|consulté le=}}</ref>.
Lors d’une conférence de presse l'hypothèse est rejetée par [[Fadéla Chaib]], la [[porte-parole]] de l'[[Organisation mondiale de la santé]], qui souligne que toutes les preuves vont vers une « origine animale » et non vers une quelconque manipulation<ref>{{Lien web|langue=|auteur1=Florian Maussion|titre=Coronavirus : l'OMS rejette l'hypothèse d'une contamination à partir du laboratoire P4 de Wuhan|url=https://www.lesechos.fr/monde/chine/coronavirus-loms-rejette-lhypothese-dune-contamination-a-partir-du-laboratoire-p4-de-wuhan-1196802|site=Les Échos|périodique=|date=2020-04-21|consulté le=}}</ref>.


====Allégations de négligence====
====Allégations de négligence====
Plusieurs mois auparavant, le quotidien américain ''[[The Washington Post|Washington Post]]'' rapporte que « l’ambassade des Etats-Unis à Pékin, après plusieurs visites à l’institut, avait alerté en 2018 les autorités américaines sur des mesures de sécurité apparemment insuffisantes dans un laboratoire qui étudiait les coronavirus issus de chauves-souris »<ref>{{Lien web|langue=fr|titre=Ce que l'on sait sur le labo P4 de Wuhan, au coeur des accusations américaines contre la Chine|url=https://www.huffingtonpost.fr/entry/coronavirus-quel-est-ce-laboratoire-p4-de-wuhan-au-coeur-des-accusations-contre-la-chine_fr_5e9ac4a5c5b6ea335d5bedd7|site=Le Huffington Post|date=2020-04-18|consulté le=2020-04-27}}</ref>.
Plusieurs mois auparavant, le quotidien américain ''[[The Washington Post|Washington Post]]'' rapporte que « l’ambassade des États-Unis à Pékin, après plusieurs visites à l’institut, avait alerté en 2018 les autorités américaines sur des mesures de sécurité apparemment insuffisantes dans un laboratoire qui étudiait les coronavirus issus de chauves-souris »<ref>{{Lien web|langue=fr|titre=Ce que l'on sait sur le labo P4 de Wuhan, au coeur des accusations américaines contre la Chine|url=https://www.huffingtonpost.fr/entry/coronavirus-quel-est-ce-laboratoire-p4-de-wuhan-au-coeur-des-accusations-contre-la-chine_fr_5e9ac4a5c5b6ea335d5bedd7|site=Le Huffington Post|date=2020-04-18|consulté le=2020-04-27}}</ref>.


Dès le 20 avril 2020 dans la presse, des photos prises dans l'institut ayant circulé précédemment re-font surface. On y voit des scientifiques effectuant des recherches dans le laboratoire de Wuhan avec des équipements endommagés. Les photos prises à l’intérieur de l'Institut de virologie de Wuhan auraient montré un joint d’étanchéité détérioré dans la porte d'un congélateur contenant 1500 souches de virus mortels selon le Sun, y compris le SARS-Cov V2 <ref>[https://www.thesun.co.uk/news/11439952/china-wuhan-coronavirus-lab-footage-broken-seal/ The Sun le 20 avril 2020]</ref> (l'institut détiendrait la plus grande collection de virus en Asie <ref>{{Lien web|langue=fr|titre=COVID-19: quel est ce labo chinois montré du doigt?|url=https://www.lapresse.ca/international/asie-et-oceanie/202004/17/01-5269848-covid-19-quel-est-ce-labo-chinois-montre-du-doigt.php|site=La Presse|date=2020-04-17|consulté le=2020-05-02}}</ref>).
Dès le 20 avril 2020 dans la presse, des photos prises dans l'institut ayant circulé précédemment refont surface. On y voit des scientifiques effectuant des recherches dans le laboratoire de Wuhan avec des équipements endommagés. Les photos prises à l’intérieur de l'Institut de virologie de Wuhan auraient montré un joint d’étanchéité détérioré dans la porte d'un congélateur contenant 1500 souches de virus mortels selon le Sun, y compris le SARS-Cov V2 <ref>[https://www.thesun.co.uk/news/11439952/china-wuhan-coronavirus-lab-footage-broken-seal/ The Sun le 20 avril 2020]</ref> (l'institut détiendrait la plus grande collection de virus en Asie <ref>{{Lien web|langue=fr|titre=COVID-19: quel est ce labo chinois montré du doigt?|url=https://www.lapresse.ca/international/asie-et-oceanie/202004/17/01-5269848-covid-19-quel-est-ce-labo-chinois-montre-du-doigt.php|site=La Presse|date=2020-04-17|consulté le=2020-05-02}}</ref>).


Le {{date-|21 avril 2020}}, il est établi que ce sont les médias d'État chinois qui auraient par inadvertance publié ces images (dès février) pour prétendre montrer aux scientifiques la ''totale sécurité'' de l'Institut <ref>[https://nypost.com/2020/04/21/china-releases-rare-footage-of-tests-inside-wuhan-coronavirus-lab/ New York Post le 21 avril 2020]</ref>.
Le {{date-|21 avril 2020}}, il est établi que ce sont les médias d'État chinois qui auraient par inadvertance publié ces images (dès février) pour prétendre montrer aux scientifiques la ''totale sécurité'' de l'Institut <ref>[https://nypost.com/2020/04/21/china-releases-rare-footage-of-tests-inside-wuhan-coronavirus-lab/ New York Post le 21 avril 2020]</ref>.

Version du 2 mai 2020 à 17:18

Institut de virologie de Wuhan
Image illustrative de l’article Institut de virologie de Wuhan
Situation
Création 1956
Siège Wuhan, Drapeau de la République populaire de Chine Chine
Coordonnées 30° 22′ 35,12″ N, 114° 15′ 45,08″ E
Organisation
Dirigeant Wang Yanyi
Personnes clés Chen Huagui, Gao Shangyin (fondateurs)
Dépend de Académie chinoise des sciences

Site web (en)english.whiov.cas.cn
(zh)www.whiov.ac.cn
Géolocalisation sur la carte : Chine
(Voir situation sur carte : Chine)
Institut de virologie de Wuhan

L'Institut de virologie de Wuhan (chinois : 中国科学院武汉病毒研究所 ; pinyin : Zhōngguó Kēxuéyuàn Wǔhàn Bìngdú Yánjiūsuǒ) est un institut de recherche en virologie administré par l'Académie chinoise des sciences et situé dans le district de Jiangxia à Wuhan, capitale de la province du Hubei. En 2015, l'institut ouvre un laboratoire P4, le premier en Chine.

Fondation et premiers développements

Le laboratoire de microbiologie de Wuhan est fondé en 1956 par le virologiste Gao Shangyin et le microbiologiste Chen Huagui, sous l'administration de l'Académie chinoise des sciences. En 1962, il est renommé Institut de microbiologie de Wuhan. En 1970, en passant sous l'administration de la commission des sciences et de la technologie du Hubei, il est renommé Institut de microbiologie du Hubei. En 1978, il repasse sous l'administration de l'Académie chinoise des sciences et adopte son nom actuel, l'Institut de virologie de Wuhan[1].

Laboratoire P4

Fondation

L'Institut de Wuhan n'est pas le premier à posséder un laboratoire de virologie en Chine. l'Institut de recherche vétérinaire de Harbin en possède déjà un de nombreuses années auparavant (celui-ci passe P4 en 2018). Mais officiellement, en 2015, l'institut ouvre le premier laboratoire P4 de Chine, pour un coût de 300 millions de yuans (44 millions de dollars). Sa conception, démarrée en 2003, s'est faite en collaboration avec la France[2],[3],[4],[5],[6]. Une partie du personnel s'est notamment formée au laboratoire P4 Jean Mérieux à Lyon[réf. nécessaire]. Selon Le Figaro, les relations entre la France et la Chine ont connu des problèmes sur ce projet à partir de 2014. Les entreprises chinoises ont tenu, d’abord, à assurer l’essentiel de la construction du P4 alors qu'elles n'en avaient a priori pas les compétences. En 2015, déçu que la coopération franco-chinoise ne se concrétise pas, Alain Mérieux quitte la présidence de la commission bilatérale[Quoi ?]. Les 50 chercheurs français qui devaient travailler au P4 de Wuhan pendant 5 ans ne sont jamais partis[7].

En février 2017, le Premier ministre français Bernard Cazeneuve, accompagné de la ministre française des Affaires sociales et de la Santé Marisol Touraine, ainsi que d'Yves Lévy, président de l’INSERM, participe à la cérémonie d'accréditation du laboratoire[8],[9]. L’ambassade de France en Chine rappelle alors que ce projet doit permettre « à la Chine, en partenariat pionnier avec la France, de mieux comprendre et prévenir les épidémies et les pandémies y compris les plus dangereuses comme la grippe aviaire, pour protéger la population chinoise et la santé mondiale »[10].

Une spécialité du laboratoire P4 de l'établissement est la recherche sur les coronavirus transmis par les chauves-souris[11],[12]. En 2017, il est accrédité pour étudier le virus Ebola et l’Henipavirus[10]. Le laboratoire entretient par ailleurs des liens étroits avec le Laboratoire National de Galveston (en) de l'Université du Texas[11].

Selon l'anthropologue Frédéric Keck, ce laboratoire « permet de repérer précocement de nouvelles pandémies passant des animaux aux humains », et « joue ainsi pour le SRAS le rôle qu’a joué Hong Kong pour la grippe aviaire »[5]. Selon le biologiste moléculaire américain Richard H. Ebright (en), « l'Institut de virologie de Wuhan est un institut de recherche de classe mondiale qui effectue des recherches de renommée mondiale en virologie et en immunologie »[11].

Antoine Izambard, journaliste de Challenges, s'interroge sur le délai de réalisation du projet, lancé au lendemain de l’épidémie du syndrome respiratoire aigu sévère de 2003, ce qu'il explique par les soupçons des services de renseignement français et américains à l'égard du manque de transparence de la Chine et de leur crainte que la Chine ne vise à créer des armes biologiques[10]. Il est notamment établi que la Chine a caché la construction d’autres laboratoires P4 sur son territoire, notamment l’un dédié aux animaux à Harbin, alors qu'elle s'était engagée à ne construire que celui de Wuhan[10].

Spéculations et investigations autour de la Covid-19

Genèse de théories du complot

Le vendredi 20 novembre 2015, soit, quatre ans avant le début de la pandémie du Covid-19 paraît un article dans la revue Nature impliquant une équipe internationale de virologues parmi lesquels Shi Zhengli, spécialiste des Coronavirus qui a activement lutté contre l'épidémie du SRAS en 2002-2004.

En utilisant le système de génétique inverse SARS-CoV2, l'équipe annonce avoir généré un virus chimérique (virus hybride conçu artificiellement) en utilisant un coronavirus de chauve-souris SHC014 et un SARS-CoV. Ce virus chimérique aurait été expérimenté sur une souris. Les résultats indiquent que ce type de virus peut se répliquer efficacement dans les cellules des voies respiratoires humaines primaires. Des expériences in vivo démontrent la réplication de ce virus dans le poumon de souris avec une pathogenèse notable[13]. C'est dans un laboratoire de l'Université de Caroline du Nord aux États-Unis que cette équipe a opéré, et nullement à Wuhan même si Shi Zhengli (considérée comme une héroïne du SRAS-2002[14]) exerce aujourd'hui son activité de virologue dans la capitale du Hubei.

Néanmoins, c'est sur la base de cet article qu'apparaissent des théories du complot dès le . Rapidement, de telles théories commencent à circuler sur Facebook et Twitter, selon lesquelles le coronavirus 2 du syndrome respiratoire aigu sévère émanerait du laboratoire, voire y aurait été conçu pour nuire[10]. Le journaliste Antoine Izambard souligne qu'« au vu des éléments dont on dispose, les théories qui circulent sur l’émergence du coronavirus dans le laboratoire P4 à Wuhan sont complotistes », en l'absence d’« éléments concrets à ce stade qui iraient en ce sens »[10]. La Direction générale de la Santé française déclare qu'« aucun élément ne permet d’accréditer les allégations liant la crise sanitaire en cours à l’existence à Wuhan d’un laboratoire P4 »[10].

Une étude en pré-publication de chercheurs de l’Indian Institute of Technology de New Delhi relève, le , sur le site bioRxiv « une similarité étrange », « qui a peu de chances d’être fortuite », entre certaines séquences de l’ARN du SARS Covid-2 et celui du VIH[15]. Cette étude en prépublication, très contestée par les spécialistes notamment parce que nombreux virus partagent cette courte séquence, est par la suite retirée. Le professeur Luc Montagnier s'appuie toutefois sur elle pour arguer d'une possible manipulation humaine[15].

Lors d’une conférence de presse l'hypothèse est rejetée par Fadéla Chaib, la porte-parole de l'Organisation mondiale de la santé, qui souligne que toutes les preuves vont vers une « origine animale » et non vers une quelconque manipulation[16].

Allégations de négligence

Plusieurs mois auparavant, le quotidien américain Washington Post rapporte que « l’ambassade des États-Unis à Pékin, après plusieurs visites à l’institut, avait alerté en 2018 les autorités américaines sur des mesures de sécurité apparemment insuffisantes dans un laboratoire qui étudiait les coronavirus issus de chauves-souris »[17].

Dès le 20 avril 2020 dans la presse, des photos prises dans l'institut ayant circulé précédemment refont surface. On y voit des scientifiques effectuant des recherches dans le laboratoire de Wuhan avec des équipements endommagés. Les photos prises à l’intérieur de l'Institut de virologie de Wuhan auraient montré un joint d’étanchéité détérioré dans la porte d'un congélateur contenant 1500 souches de virus mortels selon le Sun, y compris le SARS-Cov V2 [18] (l'institut détiendrait la plus grande collection de virus en Asie [19]).

Le , il est établi que ce sont les médias d'État chinois qui auraient par inadvertance publié ces images (dès février) pour prétendre montrer aux scientifiques la totale sécurité de l'Institut [20].

Fox News cite des sources anonymes exprimant des inquiétudes quant à une fuite du Covid-19 de l'Institut de Wuhan. Pour le général Mark Milley, président des chefs d'état-major interarmées, bien que les preuves semblent pencher pour une origine naturelle du virus, il est encore trop tôt pour conclure avec certitude[21].

Ces photos supposées avoir sonné l'alarme du coronavirus auraient été supprimées à la hâte par la Chine[22].

En effet, Richard H. Ebright, directeur du laboratoire de l'Institut Waksman de microbiologie, affirme que « des preuves documentées indiquent qu'un projet sur les nouveaux virus de chauve-souris […] de l'Institut de virologie employait des standards de biosécurité et d'équipement de protection individuelle, qui poseraient un haut risque d'infection pour le personnel du laboratoire au contact avec un virus ayant les propriétés de transmission du virus de l'épidémie »[23].

Par ailleurs, pour Frédéric Tangy, chercheur à l'Institut Pasteur, « il suffit qu'un chercheur renverse un flacon. Malgré la hotte aspirante, un aérosol se forme et il est infecté sans s'en rendre compte. À la fin de la journée, il quitte le laboratoire, et contamine toute sa famille et ceux qu'il croise[24] ».

Enquêtes et procédures

En Chine, il n'y a pas d'enquête indépendante sur les origines de la pandémie [25].

Mi-avril 2020, dans le contexte de la pandémie de Covid-19, Josh Rogin (en), chroniqueur spécialiste des affaires étrangères du Washington Post, révèle que l’ambassade des États-Unis à Pékin a alerté à deux reprises le Département d'État des États-Unis en 2018 sur l'insuffisance des mesures de sécurité au sein du laboratoire, évoquant en particulier « des études risquées sur les coronavirus provenant de chauves-souris »[26],[27],[28]. Interrogés, ni Mike Pompeo, secrétaire d'État des États-Unis, ni Donald Trump, président des États-Unis, n'excluent l'hypothèse émise par Fox News, selon laquelle le SARS-CoV-2 pourrait provenir accidentellement de ce laboratoire ; tous deux évoquent une enquête en cours de leur administration[27]. Zhao Lijian, porte-parole de la diplomatie chinoise, dément cette hypothèse[12].

Les soupçons concernant la responsabilité initiale par la Chine de l'épidémie du Covid-19 ne se limitent pas uniquement aux États-Unis, où l'État du Missouri a porté plainte contre la Chine[29]. Le , l'Australie demande une enquête sur le traitement par la Chine de l'épidémie, ainsi qu'une enquête sur les origines et la propagation du virus[30]; suivie par la Nouvelle-Zélande, les jours suivants, ainsi que par l'Union Européenne[31],[32].

Mais la Chine a refusé une telle enquête[33],[34] et son ambassadeur en France avait préalablement qualifié les demandeurs de « responsables de la crise actuelle que traverse leur propre pays »[35],[36] avant de laisser entendre que l'épidémie de Covid-19 viendrait des États-Unis[37],[38].

A ce propos, la Chine « exhorte certains responsables américains à cesser de propager des théories du complot autour de l'origine du COVID-19 »[39],[40],[41].

Les nouvelles préoccupations concerneraient l'exposition accidentelle de chercheurs étudiant à Wuhan les différents coronavirus (sur les chauve-souris) et non sur des coronavirus fabriqués artificiellement[42]. En effet, si (faute d'enquête) aucun élément ne permet encore d’aboutir à une conclusion selon laquelle il s'agirait d'une contamination accidentelle de l’homme en laboratoire, la question reste ouverte[43].

L'hypothèse de l'« origine animale » retenue par l'OMS ne rejetterai donc pas forcément la responsabilité de l'Institut de virologie de Wuhan pour le Docteur Deborah Birx[44].

Le 30 avril 2020, Donald Trump annonce envisager l'instauration de taxes douanières punitives contre la Chine après avoir acquis la certitude que le SARS-CoV-2 proviendrait d’un laboratoire chinois, sans exposer les éléments dont il disposerait[45].

Quelques heures plus tard, l'OMS demande à la Chine « d'inviter » ses représentants afin de mener une enquête sur les origines du Covid-19[46];[47];[48]. Mais la Chine s'obstine à refuser toute enquête[49];[50].

Voir aussi

Notes et références

  1. (en) « About WIV ---- Wuhan Institute of Virology », sur english.whiov.cas.cn (consulté le )
  2. (en) David Cyranoski, « Inside the Chinese lab poised to study world's most dangerous pathogens », Nature, vol. 542, no 7642,‎ , p. 399 (DOI 10.1038/nature.2017.21487, lire en ligne, consulté le )
  3. (en) « Top-level lab gears up to study Ebola virus », sur China News Service, (consulté le )
  4. (en) « China Inaugurates the first biocontainment level 4 laboratory in Wuhan ---- Wuhan Institute of Virology, Chinese Academy of Sciences », sur english.whiov.cas.cn, (consulté le )
  5. a et b Joseph Confavreux, « Frédéric Keck: «Les chauves-souris et les pangolins se révoltent» », sur Mediapart, (consulté le )
  6. « Le laboratoire P4 de Wuhan : une histoire française », sur France Culture, (consulté le )
  7. Isabelle Lasserre, « Comment le laboratoire P4 de Wuhan, exporté par la France, a échappé à tout contrôle », sur lefigaro.fr, (consulté le ).
  8. « Epidémies: nouvelle étape pour le premier laboratoire P4 chinois », sur Le Point, (consulté le )
  9. « Discours de M. Bernard CAZENEUVE, Premier ministre à la cérémonie d’accréditation du laboratoire de haute sécurité biologique P4 Wuhan », sur https://www.gouvernement.fr
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Lien externe