Pierre Delhomme

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Pierre Delhomme
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Biographie
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 74 ans)
CarnacVoir et modifier les données sur Wikidata
Pseudonyme
Canard
Nationalité
Allégeance
Algérie française
Activité

Sous-lieutenant au G.C.P.A.

Commando Z.
Autres informations
Conflit

Pierre Delhomme, né le à Sétif en Algérie pendant la période coloniale française, et mort le , est un sous-lieutenant de l'armée française, déserteur et devenu responsable du commando Z de l'Organisation de l'armée secrète (OAS) avec Jean Sarradet.

Condamné à la prison à perpétuité, il devient mystique et rejoint les mouvements catholiques traditionalistes. Il bénéficie d'une mesure de grâce trois ans plus tard.

Biographie[modifier | modifier le code]

Pierre Delhomme passe son enfance à Sétif puis à l'École Militaire Préparatoire d'Épinal où son père avait été nommé. Pendant l'emprisonnement en Allemagne de son père, il vit à Médéa dans la famille de sa mère.[réf. souhaitée]

Il s'engage en 1947 pour l'Indochine, est blessé à Saïgon en 1950. À son retour il est nommé sergent-major à la 2e région aérienne à Paris, jusqu'en 1956 où il exige d'être muté en Algérie. Il est affecté à la 542e demi-brigade de fusiliers de l'air (DBFA). Elle est basée à La Réghaïa[1]. Les hommes s'entraînent à Zéralda, base du 1er REP.

Le 20 mars 1958 Pierre Delhomme joue un rôle déterminant pour sauver son convoi d'une embuscade tendue par les fellaghas dans les gorges de la Chiffa[2]. Il adhère par l'intermédiaire de Souètre au réseau « France-Résurrection » organisation paramilitaire nationaliste et pro-Algérie française. Le , lors de la semaine des barricades, il refuse d'engager son commando pour donner l'assaut aux Facultés.

Le , Pierre Delhomme est nommé sous-lieutenant « au feu »[3] et proposé pour la Légion d'honneur. Début avril 1961, son régiment est au repos à Reghaïa (commune d'Alger) . Delhomme assure à René Villard et Henri Talman du réseau« France-Résurrection » qu'il fera participer son commando à une opération d'envergure destinée à conserver l'Algérie à la France[4]. Lors du putsch des généraux le 21 avril, Delhomme arrête lui-même le colonel Bocquet et le remet au colonel putschiste Godard. Il reste jusqu'à la toute fin du putsch près du général Salan.

Après l'échec de l'opération, Delhomme déserte et rejoint Robert Martel et Salan à l'Organisation de l'armée secrète ; il y prend le pseudonyme de « Canard »[5] et est promu lieutenant par Salan[6]. Delhomme, au départ adjoint de Degueldre[7] (avec lequel il est confondu lors d'une arrestation[6]), s'écarte peu à peu de son chef et de l'action violente des commandos Delta. Il se rapproche alors de Jean Sarradet qui dirigeait les commandos Z[8]. Ce commando était composé de 120 civils armés, recrutés au Front nationaliste, quadrillant le territoire algérois, et contrôlant 5 zones appelées sous-groupes.

Delhomme appartient désormais au maquis de l'Ouarsenis. Il est capturé le , par les GMS, mais saute du camion et tente de s'enfuir ; il est rattrapé par des combattants du FLN[9] le lendemain[10]. Il est ensuite transféré à la Santé où il retrouve le lieutenant Roger Degueldre[11]. Son avocat, Me Tixier-Vignancour lui apprend que « Roger » a beaucoup souffert pendant son exécution[réf. nécessaire]. Il fréquente dans la prison La Tocnaye et bien d'autres condamnés de l'OAS qu'il retrouve à Ré pour la plupart. À Fresnes, il retrouve Bastien-Thiry, avec qui il discute, jusqu'à l'exécution de l'organisateur de l'attentat du Petit Clamart[12]. L'imitant, il rédige une déclaration dans laquelle il se déclare coupable de ne pas avoir tué De Gaulle[13], et l'adresse aux juges, au gouvernement et au chef de l'État[14]:

« Le 12 décembre 1960, sur la base militaire de La Réghaïa, les commandos parachutistes de l'Air furent passés en revue par Charles De Gaulle avant qu'il prît place à bord de son avion. Des camarades et moi devions abattre le chef de l'État policier. C'est par indécision que nous avons laissé échapper là l'occasion de mettre un terme aux activités machiavéliques du tyran, vraisemblablement de sauver l'Algérie française. [...] Ainsi puis que j'ai failli à mon devoir devant l'infamie de ceux dont dépendait le sort de l'Algérie française, ma terre natale, je mérite la peine capitale plutôt deux fois qu'une. »

Il refuse de se présenter devant la Cour de sûreté de l'État[15], et déclare se repentir de ne pas avoir tué De Gaulle[16]. Il est condamné à trois ans de prison comme « chef de bande armée », pour sa participation au maquis de l'Ouarsenis[17], puis le 2 septembre 1963 à 20 ans de détention criminelle pour l'enlèvement du commandant Falaise durant le putsch, et à la réclusion criminelle à perpétuité pour l'ensemble de ses activités au sein de l'OAS dans l'Algérois (dont la Nuit bleue du 5 mars 1962)[15].

Incarcéré successivement dans de nombreux établissements pénitentiaires à la suite de tentatives d'évasion, il finit par arriver à l'île de Ré en très mauvaise santé. Là se trouvent de nombreux anciens de l'OAS, dont le statut de prisonnier de droit commun a progressé grâce à des grèves de la faim et autres manifestations à l'initiative de Claude Tenne, membre du commando Delta 1 : ils ont obtenu le statut de prisonniers politiques[18]. Les détenus bénéficient de nombreux avantages auxquels n'ont pas droit les autres[19]. François Ortola décrit la vie de Pierre Delhomme à la maison centrale de Saint-Martin de Ré, insistant sur sa vie de prière comme sur sa violente dénonciation de De Gaulle à qui il écrit des lettres acerbes, et de la franc-maçonnerie[20].

Delhomme participe au chahut organisé pour couvrir l'évasion de Tenne[21]. Il y bénéficie le 23 décembre 1966 d'une mesure de grâce mais refuse d'en profiter et se retranche dans sa cellule. Suivant les sources, il faut le traîner de force hors de la prison[22], ou il quitte la prison de son plein gré[23].

Itinéraire spirituel[modifier | modifier le code]

Notre-Dame d'Afrique

Emprisonné, il est devenu mystique. Visité à Fresnes par un aumônier, le père Devoyod, il retrouve la foi de son enfance avec le père Vernet, de la même manière que le capitaine Darreberg[24]. Il se réfère notamment à Jacques Fesch, autre condamné devenu mystique durant son emprisonnement[25]. Depuis ce moment il approfondit sa vie spirituelle et entre en contact avec Claire Ferchaud, mystique du Sacré-Cœur de Jésus, en octobre 1966[26]. Il se souvient des idées de Robert Martel « le Chouan de la Mitidja »[27], partage sa dévotion au Sacré Cœur. Il a la même vision contre-révolutionnaire que Martel quant au futur de la France.[réf. nécessaire]

Au point de vue politique, il découvre la franc-maçonnerie et affirme que son influence est à l’origine des événements graves qui se sont déroulés au XXe siècle. Il l’accuse d’avoir pris le contrôle de ceux qui luttaient pour l’Algérie française et d’avoir téléguidé aussi bien le 13 mai que le putsch des généraux pour discréditer l’OAS, et regrettant qu'un des avocats de Bastien Thiry ait été franc-maçon[28]. Il adhère à l'ordre des chevaliers de Notre-Dame, et fait de nombreux pèlerinages au sanctuaire Notre-Dame-de-Grâces à Cotignac et va prier avec son ami et biographe Claude Mouton-Raimbault au sanctuaire de Notre-Dame de Laghet près de Nice. Il entretient une correspondance très abondante avec des maisons religieuses tout autant qu’avec des personnalités politiques.[réf. nécessaire]

Il s'installe près de Carnac après la mort de son épouse. La fin de sa vie est marquée par la maladie de Parkinson. Les religieux dominicains du couvent de la Haye aux Bonshommes viennent le visiter. Il meurt le . Les membres de l'ADIMAD-SUD lui ont rendu hommage[29].

Décorations[modifier | modifier le code]

Références[modifier | modifier le code]

  1. Henri Féraud, Les Commandos de l’Air, contribution à l’histoire des Commandos de l’Air en Algérie 1956-1962, Nouvelles Éditions Latines, 1986
  2. Claude Mouton-Raimbault, Pierre Delhomme, de l'Algérie française à l'expiation, éd. de Chiré, 2003, 132 p., pp. 24-29.
  3. Henri Le Mire, Histoire militaire de la guerre d'Algérie, Paris, A. Michel, , 402 p. (ISBN 2-226-01387-3 et 9782226013873), p. 361
  4. Henri Féraud, Les Commandos de l’Air, contribution à l’histoire des Commandos de l’Air en Algérie 1956-1962, Nouvelles Éditions Latines, 1986. p. 230.
  5. Claude Mouton-Raimbault, Pierre Delhomme, de l'Algérie française à l'expiation, éd. de Chiré, 2003, 132 p., p 51.
  6. a et b « Parmi les prisonniers », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  7. « Des officiers condamnés avec sursis après le putsch d'avril servent l'O.A.S. en Algérie », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  8. Philippe Héduy, Algérie française, 1942-1962, Paris, Société de production littéraire, , p. 155
  9. Claude Mouton-Raimbault, Pierre Delhomme, de l'Algérie française à l'expiation, éd. de Chiré, 2003, 132 p. p. 58.
  10. « VINGT OFFICIERS DÉSERTEURS arrêtés en Algérie en deux mois », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  11. Claude Mouton-Raimbault, Pierre Delhomme, de l'Algérie française à l'expiation, éd. de Chiré, 2003, 132 p. p. 59.
  12. Claude Mouton-Raimbault, Pierre Delhomme, de l'Algérie française à l'expiation, éd. de Chiré, 2003, 132 p. pp. 60-62.
  13. Jean Bastien-Thiry, Déclaration du 2 février 1963, éd. Cercle Jean Bastien-Thiry, éd 1998, 40 p.
  14. Claude Mouton-Raimbault, Pierre Delhomme, de l'Algérie française à l'expiation, éd. de Chiré, 2003, 132 p. pp. 62-64.
  15. a et b « LE SOUS-LIEUTENANT DELHOMME EST CONDAMNÉ A LA RÉCLUSION PERPÉTUELLE Il avait refusé de comparaître devant ses juges », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  16. Claude Mouton-Raimbault, Pierre Delhomme, de l'Algérie française à l'expiation, éd. de Chiré, 2003, 132 p. Chapitre VII, La condamnation, pp.59 et 68.
  17. « VINGT-NEUF MILITAIRES DONT SEPT OFFICIERS - déserteurs pour la plupart - racontent sans passion leur aventure dans le maquis de l'Ouarsenis », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  18. Claude Tenne, Mais le Diable marche avec nous, éd La Table Ronde, 1968, 253 p. pp. 135-156.
  19. Jean-Claude Vimont, « Saint-Martin-de-Ré, prison politique. Les photographies d’Armand Belvisi », Criminocorpus. Revue d'Histoire de la justice, des crimes et des peines,‎ (ISSN 2108-6907, DOI 10.4000/criminocorpus.3164, lire en ligne, consulté le )
  20. Claude Mouton-Raimbault, Pierre Delhomme, de l'Algérie française à l'expiation, éd. de Chiré, 2003, 132 p. pp. 71-73
  21. « Claude Tenne, condamné pour l'assassinat du commissaire Gavoury est recherché dans la région parisienne », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  22. Claude Mouton-Raimbault, Pierre Delhomme, de l'Algérie française à l'expiation, éd. de Chiré, 2003, 132 p.
  23. « Après les mesures de grâce prises par le président de la République », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  24. Abbé Henri Perrin : Le Capitaine Darreberg, éd. Pélerins de La Salette, 2011.
  25. Augustin-Michel Lemonnier, Lumière sur l'échafaud : Suivi de Cellule 18 - Lettres de prison de Jacques Fesch, guillotiné le 1er octobre 1957 à 27 ans, éd. Téqui, 2007
  26. Claude Mouton-Raimbault, Pierre Delhomme, de l'Algérie française à l'expiation, éd. de Chiré, 2003, 132 p. p 78.
  27. Claude Mouton-Raimbault, La contre-révolution en Algérie, le combat de Robert Martel et de ses amis, Vouillé, Diffusion de la Pensée Française, 1973 , 675 p.
  28. Claude Mouton-Raimbault, Pierre Delhomme, de l'Algérie française à l'expiation, éd. de Chiré, 2003, 132 p. p. 79
  29. Claude Mouton-Raimbault, Pierre Delhomme, de l'Algérie française à l'expiation, éd. de Chiré, 2003, 132 p. pp. 131-132.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Claude Mouton-Raimbault, Pierre Delhomme, de l'Algérie française à l'expiation, éd. de Chiré, 2003, 132 p.
  • Claude Mouton-Raimbault, La contre-révolution en Algérie, le combat de Robert Martel et de ses amis, Vouillé, Diffusion de la Pensée Française, 1973 , 675 p.
  • Claude Tenne, Mais le Diable marche avec nous, éd La Table Ronde, 1968, 253 p.
  • Jean-Marie Bastien-Thiry, Déclaration du 2 février 1963 , éd. Cercle Jean Bastien-Thiry, 1998, 40 p., (ISBN 9782905602039)
  • Jean-Claude Vimont, Saint-Martin-de-Ré, prison politique. Les photographies d’Armand Belvisi, Carnet de recherche de Crimininocorpus 27/11/2014, no 14, "Métropolitains, Légionnaires et autres intermittents"
  • Armand Belvisi, Les Sacrifiés de l’Algérie française - Île de Ré, ADIMAD, Toulon, sans date, 120 p. [lire en ligne]
  • Armand Belvisi, Saint-Martin-de-Ré. Portraits de détenus, 1963, s. e., 128 pages, Collection Armand Belvisi, p. 20 à 23.
  • Thierry Bouclier, Tixier Vignancour, une biographie, éd. Rémi Perrin, 2003, 331 p.
  • Claude Mouton-Raimbault, Au plus fort de la tourmente, Résiac, 1978, 239 p.
  • Claude Mouton-Raimbault, Et Jésus modela son âme, Claire Ferchaud, Résiac, 1981
  • Claude Mouton-Raimbault, Présence de Claire Ferchaud, Chiré, 2007, 140 p.
  • Abbé Henri Perrin : Le Capitaine Darreberg, éd. Pélerins de La Salette, 2011.
  • Augustin-Michel Lemonnier, Lumière sur l'échafaud : Suivi de Cellule 18 - Lettres de prison de Jacques Fesch, guillotiné le 1er octobre 1957 à 27 ans, éd. Téqui, 2007

Liens externes[modifier | modifier le code]