Le Chat noir

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Théophile-Alexandre Steinlen, Tournée du Chat noir, 1896, 135,9 × 95,9 cm, The Jane Voorhees Zimmerli Art Museum, université Rutgers

Le Chat noir était un célèbre cabaret de Montmartre, fondé en novembre 1881 par Rodolphe Salis qui fut aussi à l'origine de la revue hebdomadaire du même nom.

Une goguette, la Goguette du Chat Noir, se réunissait dans ce cabaret.

Deux ans après la mort de Rodolphe Salis survenue en 1897, le cabaret est racheté par le chansonnier montmartrois Henri Dreyfus dit Fursy et rebaptisé La Boîte à Fursy.

Le cabaret du Chat-Noir

Situé au pied de la butte Montmartre au 84 boulevard de Rochechouart, le cabaret du Chat-Noir fut l'un des grands lieux de rencontre du Tout-Paris et le symbole de la Bohème à la fin du XIXe siècle.

Le premier établissement, 84 boulevard de Rochechouart

Fils d'un limonadier de Châtellerault, Rodolphe Salis (1851-1897), arrivé à Paris en 1872, gagna d'abord médiocrement sa vie comme artiste en fabriquant des objets de piété, avant de concevoir l'idée d'associer art et débit de boisson. Il imagina de créer un café « du plus pur style Louis XIII… avec un lustre en fer forgé de l'époque byzantine et où les gentilshommes, les bourgeois et manants seraient dorénavant invités à boire l'absinthe habituelle de Victor Hugo (celle que préférait Garibaldi) et de l'hypocras dans des coupes d'or ».

Rodolphe Salis

En réalité, le Chat noir, ouvert en novembre 1881, commença par servir du mauvais vin dans un décor sommaire, mais déjà, à la porte, les clients étaient accueillis par un Suisse splendidement chamarré, couvert d'or des pieds à la tête, chargé de faire entrer les peintres et les poètes tout en laissant dehors les « infâmes curés et les militaires ». Le premier Chat-Noir était situé dans deux petites pièces boulevard de Rochechouart. Il dut son nom à un chat noir perdu sur le trottoir que Salis trouva pendant les travaux. Progressivement, le décor fut amélioré pour donner un aspect pseudo-historique évocateur de l'époque de Rabelais.

Salis avait rencontré, quelque temps auparavant, Émile Goudeau qu'il avait convaincu de transférer ses Hydropathes, qui se réunissaient sur la rive gauche, dans son établissement. Très rapidement, les poètes et les chansonniers qui se produisaient au Chat-Noir attirèrent la meilleure clientèle de Paris. On venait avant tout pour les réparties spirituelles qui fusaient souvent aux dépens des clients, interpellés d'un « Tiens, t'es finalement sorti de prison ? » ou d'un « Qu'est-ce que t'as fait de ta poule d'hier ? » à un nouveau client visiblement accompagné de sa femme. Un soir, le futur roi Édouard VII y fut apostrophé en ces termes : « Eh bien regardez-moi celui-là : on dirait le prince de Galles tout pissé ! »[réf. nécessaire]

On trouvait au Chat-Noir les peintres Willette, Henri Pille, les chansonniers Aristide Bruant (qui créa la chanson emblématique Le Chat noir), Jules Jouy, Léon Durocher, Pierre Trimouillat, Dominique Bonnaud, Jean Goudezki et son ami l'humoriste Alphonse Allais et les poètes Georges Lorin, Charles Cros, Albert Samain, Maurice Rollinat, Maurice Mac-Nab, Jean Richepin,Gordeaux etc. Léon Bloy fut un habitué. Il publia dans la revue du Chat-Noir de nombreux articles de critique littéraire repris pour la plupart dans ses Propos d'un entrepreneur de démolitions. Rodolphe Salis eut l'idée d'installer un piano, ce qui était une première dans un cabaret, de sorte que la chanson de cabaret vit véritablement le jour au Chat-Noir.

La nouvelle enseigne, au 12 rue de Laval (rue Victor-Massé)

Le cabaret du Chat noir vu par Albert Robida avec son Suisse splendidement chamarré chargé d'accueillir les visiteurs, les deux énormes lanternes et le chat rayonnant, dessinés par E. Grasset

Le succès aidant, Salis transféra le cabaret dans un immeuble de trois étages situé à proximité au 12 rue de Laval (aujourd'hui rue Victor-Massé). Dans les différentes salles, il fit réaliser des décors pseudo-historiques, sous l'égide d'illustrateurs tels que Henri Rivière et Caran d'Ache. Il créa également, avec l'aide d'Henri Rivière, un théâtre d'ombres en couleurs sur lequel furent donnés de véritables petits chefs d'œuvres dont la musique était composé par Georges Fragerolle. Il déménagea peu après pour s'installer au 68, boulevard de Clichy.

L'établissement de la rue de Laval déploie toute l'identité éclectique et pittoresque voulue par Salis. Deux grosses lanternes dessinées par Eugène Grasset, de style néo-médiéval, ornent le premier étage de la façade. Au deuxième étage, au centre de la façade, un énorme blason place un chat noir en terre cuite, réalisé par Alexandre Charpentier, au centre d'une « gloire » d'autel, affectant la forme de rayons de soleil dorés. A l'extrémité est de la façade, l'enseigne proprement dite, en tôle peinte, illustre un chat noir assis sur un croissant de lune argenté, dessiné par Adolphe Willette[1]. À l'intérieur, les vitraux illuminant la grande salle du rez-de-chaussée sont l'œuvre d'Adolphe Willette, et évoquent l'épisode biblique du veau d'or[1]. Sur les murs sont accrochés des dessins de plusieurs artistes, parmi lesquels Rodolphe Salis lui-même, George Auriol, Henri Rivière, Steinlen, Somm, et Caran d'Ache.

La dernière adresse, 68 boulevard de Clichy

Le Chat noir, boulevard de Clichy, en 1929. Sur la façade on lit : Caveau du Chat Noir.

Le Chat Noir fut, selon Laurent Tailhade, « L'Assommoir et la Divine Comédie amalgamés » et, selon Jean Lorrain, « l'olla-podrida de tous les styles et de toutes les extravagances, le « décrochez-moi-ça » de la brocante artiste, de tout un quartier de rapins et de poètes, un musée picaresque et baroque de toutes les élucubrations de bohèmes venues s'échouer toutes là durant vingt ans, de toutes ces épaves : le mauvais goût le plus sûr à côté de trouvailles exquises ; statuettes polychromes et fresques de Willette ; envolées de nudités graciles et perverses, fouettées de roses et nimbées d'or, et hiboux empaillés, fers forgés et chats de faïence ; vitraux allégoriques, étourdissants de couleur et de cruelle modernité, et bas-reliefs enluminés ; musique de Delmet et chansons de Xanrof… Le Chat Noir, l'hostellerie artistico-commerciale du gentilhomme Salis, seigneur de Chatnoirville-en-Vexin, où d'une main bénissante un malin compagnon à moustaches de reître débitait des chansons, des sonnets, des pochades, des œufs durs et des bocks assaisonnés de gloire dans le décor le plus miraculeusement truqué. »

De nombreux cabarets de par le monde ont pris ce nom depuis. En son temps, Le Chat Noir connut des imitations dont la plus connue fut L'Abbaye de Thélème, place Pigalle, créée par Jules Roques. Le très fameux bal qui ouvre chaque année la saison du Carnaval de Dunkerque porte en l'honneur du cabaret parisien le nom de « Bal du Chat noir ».

L'enseigne du Chat-Noir dessinée par Adolphe Léon Willette, en tôle peinte, qu'on peut apercevoir sur le dessin de Robida montrant l'extérieur du cabaret, est aujourd'hui conservée et exposée[2] au musée Carnavalet à Paris.

La revue Le Chat noir

Pour assurer la promotion du cabaret, Rodolphe Salis et Émile Goudeau créent la revue hebdomadaire Le Chat noir, dont 688 numéros paraissent du à mars 1895 puis 122 dans une seconde série dont le dernier numéro fut publié le [3]. Elle incarna l'esprit « fin de siècle » et avait pour collaborateurs les chansonniers et les poètes qui se produisaient dans le cabaret ainsi que les artistes qui l'avaient décoré : Caran d'Ache y donnait des scènes militaires et Willette des Pierrots et des Colombines.

Le Chat noir fut un des premiers à publier de petits articles de Jean Lorrain. On y trouve la signature d’auteurs prestigieux comme Paul Verlaine ou Jean Richepin, le tout magnifiquement illustré par Théophile Alexandre Steinlen.

Jules Roques, qui avait imité le cabaret du Chat-Noir à l'abbaye de Thélème, imita également la revue avec le Le Courrier français.

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On compte encore parmi les collaborateurs de la revue Le Chat noir les illustrateurs suivants : Louis-Christian Döes, Fernand Fau, Godefroy, Uzès, Poirson, Gustave Verbeck, Marcel Capy, Lucien Pissarro ou encore Henri de Sta[4].

Une légende autour du Chat-Noir

Cette légende autour du Chat noir est née dans le milieu ésotérique français après la publication en 1930 des Demeures philosophales de l'alchimiste Fulcanelli. Pour reprendre les mots mêmes de Fulcanelli, ce cabaret aurait été jusqu'à la mort de Salis « un centre ésotérique et politique » qui aurait attaché une grande importance à toute une série de symboles soigneusement dissimulés.[réf. nécessaire]

Apparitions

L'affiche créée par Théophile-Alexandre Steinlen en 1896 apparaît dans la culture populaire à quelques reprises :

  • dans le film Gray Matters[5] réalisé par Sue Kramer en 2007 ;
  • dans le film Toutes les filles sont folles réalisé par Pascale Pouzadoux en 2003 (dans l'appartement du personnage principal interprété par Barbara Schulz) ;
  • dans le vidéoclip I Still Remember[6] du groupe musical britannique Bloc Party.
  • On peut apercevoir l'affiche dans le jeu vidéo Astérix et Obélix XXL 2 : Mission Las Vegum.
  • L'affiche et la revue du Chat-Noir apparaissent également dans la série des jeux vidéo post-apocalyptique Fallout, et Fallout 2. Une mission consiste à en récupérer 10 exemplaires dans le monde dévasté.
  • L'affiche du Chat-Noir est citée à deux reprises dans les deux disques de Tony Coe Tournée du Chat et Le Chat se retourne (1982 - 1984 nato).
  • Dans la série Bref, l'affiche est placardée au mur dans l'appartement de Cette Fille[7].
  • L'affiche du Golden Cat, lupanar du jeu vidéo Dishonored, reprend la même composition.

Cette affiche fait l'objet de nombreuses reproductions. Elle est ainsi devenue un des symboles parmi tant d'autres du pittoresque parisien, et son image se retrouve dans quantité de produits dérivés vendus dans les magasins pour touristes de la capitale française.

Films

Le cabaret du Chat Noir apparaît dans plusieurs films, citons :

Notes et références

  1. a et b L'enseigne et les vitraux du Chat Noir dessinés par Willette sont aujourd'hui conservés et exposés au musée Carnavalet, à Paris.
  2. Enseigne du cabaret Le Chat noir
  3. Échos poétiques
  4. Théophile Alexandre Steinlen, Louis-Christian Döes, Adolphe Léon Willette, Fernand Fau, Godefroy, Uzès, Victor Poirson, Caran d'Ache, Gustave Verbeck, Marcel Capy, Lucien Pissarro et Henri de Sta, Les Histoires sans paroles du Chat noir, Angoulême, Musée de la bande dessinée, 1998 (ISBN 2-907848-13-5).
  5. (en) Bande-annonce de Gray Matters, Apple.
  6. Bloc Party - I Still Remember, sur le site de MCM.
  7. Bref. J'ai un nouvel appart'. - Episode du 26/01

Voir aussi

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Bibliographie

Articles connexes

Lien externe