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Rodolphe d'Erlanger

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Rodolphe d’Erlanger
Autoportrait de Rodolphe d’Erlanger.
Naissance
Décès
Voir et modifier les données sur Wikidata (à 60 ans)
TunisVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Activités
Formation
Maîtres
Père
Mère
Marguerite Mathilde Slidell d'Erlanger (d)Voir et modifier les données sur Wikidata
Fratrie
Raphael Slidell von Erlanger (d)
Émile Beaumont d'Erlanger (en)
Frédéric d'ErlangerVoir et modifier les données sur Wikidata
Enfant
Leo Frédéric Alfred Baron d’Erlanger (en)Voir et modifier les données sur Wikidata

Rodolphe d'Erlanger, de son nom complet Rodolphe François, baron d'Erlanger, né le à Boulogne-Billancourt et mort le à Tunis[1], est un peintre, musicologue et orientaliste franco-britannique.

D'ascendance allemande par son père et américaine par sa mère, il s'installe en Angleterre puis adopte en 1894 la nationalité britannique.

Famille

Son grand-père, le baron Raphaël d'Erlanger, fonde en 1848 dans la ville libre de Francfort-sur-le-Main la banque Erlanger et fils qui connaît un succès rapide. Son père, le baron Frédéric Émile d'Erlanger développe la succursale parisienne à un point tel qu'elle devient une banque indépendante d'envergure mondiale. Il est, entre autres, l'un des principaux bailleurs des chemins de fer. Il épouse une Américaine, Marguerite Mathilde Slidell (1842-1927).

Rodolphe d'Erlanger a trois frères. L'aîné est un scientifique et professeur, le baron Raphaël Slidell d'Erlanger (de).

Le deuxième frère, le baron Émile Beaumont d'Erlanger (de), est banquier, musicien, mélomane et mécène des arts. Il se voit confier par son père la présidence de la Compagnie des chemins de fer du Nord. Il finance également la Channel Tunnel Company destinée à percer le tunnel sous la Manche. Il déplace le centre de gravité de la banque familiale de Paris vers Londres, où il obtient la nationalité britannique en 1891 et se voit également confirmé son titre de baron. Il vit avec son épouse à Falconwood, près de Shooter's Hill (en) au sud-est du Grand Londres, mais le plus souvent dans l'ancienne maison de Lord Byron à Rutland Gate, une rue du quartier londonien de Kensington, à proximité de Knightsbridge.

Son troisième frère, le baron Frédéric A. d'Erlanger (de), entame dès sa jeunesse des études musicales à Paris et devient un compositeur de renom. En outre, il travaille également comme banquier à Paris puis Londres.

Il est également le cousin de l'explorateur et ornithologue allemand Carlo von Erlanger. De plus, l'une de ses petites-nièces, Minnie Caroline d'Erlanger, devient l'épouse de Winston Churchill Junior, petit-fils du Premier ministre britannique[2].

Formation

Rodolphe d'Erlanger, le cadet de la fratrie, ne suit pas une formation de banquier comme ses frères, mais développe très tôt de fortes inclinations pour la peinture, mais aussi pour la musique, en particulier arabe[3]. Il étudie dans sa jeunesse à l'académie Julian de Paris, sous la direction de Jules Lefebvre et Tony Robert-Fleury, et commence une carrière de peintre avec une prédilection pour l'orientalisme et les paysages.

Carrière en Tunisie

Arrivée et installation définitive

Rodolphe d'Erlanger peint des paysages, des portraits et des scènes de rue à Paris et Deauville, en Italie, en Angleterre, en Égypte et surtout en Tunisie[4], devenu un protectorat français. La banque familiale y avait été impliquée car la dynastie régnante, les Husseinites, et le grand vizir, Mustapha Khaznadar, avaient emprunté des millions de francs à des banques européennes, y compris chez Erlanger[5]. L'État tunisien est alors contraint par ses créanciers, au travers de leurs gouvernements, de se soumettre à une commission financière internationale[6].

Modèle:Message galerie

En raison d'une maladie des bronches, il séjourne en Tunisie en et acquiert à cette occasion un terrain à Sidi Bou Saïd[1], un village situé à environ vingt kilomètres au nord de Tunis, sur un rocher dominant Carthage et le golfe de Tunis. En , il quitte avec sa femme sa résidence au Plessis-Robinson pour venir s'installer dans sa propriété puis, l'année suivante[1], engage les travaux d'un palais de 2 000 m2 (baptisé Ennejma Ezzahra[7]) avec un jardin en terrasses de cinq hectares, selon les normes de l'architecture andalouse[8]. Achevée en 1921[1], la demeure possède une décoration intérieure raffinée mêlant l'art arabo-andalou, espagnol et italien[9], imitant le palais de l'Alhambra à Grenade[3]. Il obtient dans le même temps que le village entier soit protégé : le décret du , tout en assurant la protection du village, impose le bleu et le blanc et interdit toute construction anarchique sur le promontoire[10].

Apport musicologique

Divers articles et ouvrages

Amateur de musique, il s'initie au kanoun[11].

En 1917, il écrit un premier article intitulé « Au sujet de la musique arabe en Tunisie » dans la Revue tunisienne[3] où il présente son projet musicologique colossal, qui prévoit, entre autres, la collecte, l'enregistrement et la transcription des répertoires de musique arabe classique. Il entame aussi un projet de traduction en français de six traités musicaux arabes rédigés entre les Xe et XVIe siècles[3].

Il reste également de lui un ouvrage manuscrit inachevé, qu'il a dicté en arabe ou fait rédiger par l'historien Hassan Hosni Abdelwaheb, intitulé Tarikh al-musiqa al-arabiyya wa usuluha wa-tatawwuratuha (Histoire de la musique arabe et son évolution), déposé à la Bibliothèque nationale de Tunisie[7]. Il entreprend aussi en 1929 des enregistrements auprès des Touaregs, désormais déposés au Berliner Phonogramm-Archiv[7]. En 1930, il publie un article baptisé « L'archéologie musicale : un vaste champ d'investigation pour les musiciens de la jeune génération » dans La Revue musicale[7].

En 1937 est également publié à titre posthume un ouvrage de transcription des Mélodies tunisiennes hispano-arabes, arabo-berbères, juives, nègres[7].

Traité sur la musique arabe

Avec ses partenaires, en particulier son secrétaire Manoubi Snoussi, le musicologue Henry George Farmer (en), le baron Carra de Vaux-Saint-Cyr, le Syrien Ali Derouiche et le Tunisien Ahmed el-Wafi, il produit un ouvrage en six volumes, La musique arabe, édité par Geuthner[3]. Rodolphe d'Erlanger est encore vivant lors de la parution du premier volume, les cinq autres volumes ayant été publiés après sa mort, en 1935, 1938, 1939, 1949 et 1959. Ce travail est toujours considéré comme une ressource précieuse par les musiciens et les scientifiques :

  • volume 1 (1930) : Al-Fârâbî, Grand traité de la musique (Kitâbu l-Mûsîqî al-Kabîr), livres I et II ;
  • volume 2 (1935) :
    • Al-Fârâbî, Grand traité de la musique (Kitâbu l-Mûsîqî al-Kabîr), livre III ;
    • Avicenne, Mathématiques (Kitâbu' š-šifâ') ;
  • volume 3 (1938) : Safi ad-Din al-Urmawi :
    • Épître à Šarafu-d-Dîn (Aš-šarafiyyah) ;
    • Le livre des cycles musicaux (Kitâb al-adwâr) ;
  • volume 4 (1939) :
    • Traité anonyme dédié au sultan Osmânlî Muhammad II (XVe siècle) ;
    • Al-Lâdhiqî, Traité Al Fathiyah (XVIe siècle) ;
  • volume 5 (1949) : Essai de codification des règles usuelles de la musique arabe moderne / Échelle générale des sons et système modal ;
  • volume 6 (1959) : Essai de codification des règles usuelles de la musique arabe moderne / Système rythmique et formes de composition.

Ses travaux et son intérêt pour la musique sont d'une importance telle que le roi Farouk d'Égypte lui confie l'organisation du premier Congrès de musique arabe du Caire, organisé du au et invitant des musiciens occidentaux comme Béla Bartók et Paul Hindemith ou turcs comme Raouf Yekta Bey (en). Erlanger y travaille avec l'aide de musiciens tunisiens et proche-orientaux ainsi que du baron Carra de Vaux[3]. Toutefois, sa santé ne lui permet pas de se rendre au Caire pour participer au congrès. Le discours d'ouverture, qu'il avait prévu de prononcer, est publié sous le titre « La musique arabe » dans La Revue musicale[7]. Il y insiste en particulier sur l'importance de la pédagogie[7]. De plus, les travaux du Congrès, dont Erlanger a donné l'orientation scientifique, constituent le socle des deux essais des cinquième et sixième volumes[12].

Il meurt le de la même année.

En 1987, ses cendres sont déplacées à Montreux et ses descendants vendent le palais et le domaine au gouvernement tunisien, qui le convertit en un Centre des musiques arabes et méditerranéennes, inauguré en [7]. Le palais est donc désormais le lieu de concerts, d'expositions et de colloques ; une partie constitue un musée où sont présentés des instruments de musique issus de la collection du baron[7]. Il abrite également une phonothèque et un atelier de lutherie[7].

Hommage posthume

Aimé et respecté de tous, Rodolphe d'Erlanger est d'abord enterré selon ses vœux dans ses jardins. Sur sa tombe, une plaque offerte par les musiciens tunisiens en hommage à l'ensemble de son œuvre indique[13] :

« Témoignage de reconnaissance
De tes précieux bienfaits
Les Arts et les Lettres se souviennent...
Et des larmes sont versées
À ta mémoire par la musique arabe.
Par tes soins, elle renaît, immortelle.
Et embellit de sa parure les siècles ;
Baron, tu as tourné le dos à la vie et, t'élevant dans le ciel, tu as disparu.
Ton souvenir sera gravé dans notre mémoire
Et nous le perpétuerons comme un devoir,
C'est là un témoignage de la fidélité
De l'Art à son Père spirituel.
- Association de la musique tunisienne »

Vie privée

Le , il épouse à Londres, comme ses deux frères aînés, une femme issue de la noblesse européenne : la comtesse Maria Elisabetta Cleofee Scolastica Barbiellini Amidei, née le à Rome, est une descendante de deux anciennes et influentes familles aristocratiques italiennes. Elle est la fille du comte Francesco Barbiellini Amidei des Elmi de Pérouse et de l'Américaine Harriet Lewis, née à New London dans le Connecticut. Le couple vit entre son domicile du Middlesex, en Angleterre, et la maison familiale à Paris.

Le naît à Londres son fils aîné, le baron Léon Frédéric Alfred d'Erlanger (de).

Notes et références

(de) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en allemand intitulé « Rodolphe d'Erlanger » (voir la liste des auteurs).
  1. a b c et d « Biographie du baron d'Erlanger », sur 2006.musiqat.com (consulté le ).
  2. (en) « Descendants of Baron Raphael von Erlanger », sur angelfire.com.
  3. a b c d e et f François Pouillon, Dictionnaire des orientalistes de langue française, Paris, Karthala, , 1007 p. (ISBN 978-2-84586-802-1, lire en ligne), p. 360.
  4. (en) Ronald Alley, Catalogue of the Tate Gallery's Collection of Modern Art other than Works by British Artists, Londres, Tate Gallery and Sotheby Parke-Bernet, (lire en ligne), p. 202.
  5. Gilbert Gehring, Les relations entre la Tunisie et l'Allemagne avant le Protectorat français, Tunis, Publications de l'Université de Tunis, , 155 p., p. 42-43.
  6. Jean-François Martin, Histoire de la Tunisie contemporaine : de Ferry à Bourguiba (1881-1956), Paris, L'Harmattan, , 276 p. (ISBN 2-7475-4626-8, lire en ligne), p. 23.
  7. a b c d e f g h i et j Pouillon 2008, p. 361.
  8. « Le palais », sur cmam.nat.tn (consulté le ).
  9. Catherine Peillon, « Musiques actuelles », La Pensée de midi, no 3,‎ , p. 137-143 (lire en ligne, consulté le ).
  10. Paul Sebag, Tunis : histoire d'une ville, Paris, L'Harmattan, , 686 p. (ISBN 2-7384-6610-9, lire en ligne), p. 454.
  11. « Le saint et le baron », sur ennejmaezzahra-tunisie.org (version du sur Internet Archive).
  12. Pouillon 2008, p. 360-361.
  13. Ashraf Azzouz et David Massey (préf. Frédéric Mitterrand), Maisons de Sidi Bou Saïd, Tunis, Dar Ashraf, , 175 p. (ISBN 978-9973755025), p. 93-94.

Bibliographie

Filmographie

  • « Trésors oubliés de la Méditerranée, le palais du baron d'Erlanger », film de Laurence Thiriat, Arte France et Les Bons Clients, Paris, 2011

Liens externes