Hagiotoponymie
L'hagiotoponymie (du grec hagios « saint », topos « lieu » et ónuma, variante dialectale d'ónoma « nom ») est une discipline onomastique qui étudie le nom de lieu en rapport avec un nom de saint, et, par extension, avec la religion.
Définition
On appelle hagiotoponymes les noms de lieu formés à partir d'un nom :
- 1. d'un saint, par exemple Val-Saint-Lambert (Liège, Belgique)
- 2. d'une fête religieuse, par exemple Pokrovsk (Russie)[réf. nécessaire]
- 3. de Dieu, par exemple La Trinité-sur-Mer (Morbihan, France)
- 4. d'une église, par exemple Iglesias (Sardaigne, Italie)
- 5. d'un monastère, par exemple Sinaia (Valachie, Roumanie)[réf. nécessaire]
- 6. d'un pèlerinage, par exemple Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine, France)
- 7. d'une relique, par exemple Aix-la-Chapelle (Nord Rhein, Allemagne).
L'hagiotoponymie d'après la titulature des églises fournit aux historiens et géographes des renseignements sur la diffusion du christianisme, son organisation et, de même, sur l'état démographique, social et économique des paroissiens attachés à ces églises. Elle donne également des informations sur les domaines ayant appartenu à la paroisse, à une confrérie ou à un ordre religieux.
On distingue les hagiotoponymes évidents, par exemple en France les noms précédés du mot saint, et les hagiotoponymes cachés.
Les compositions hagiographiques qui déplacent un saint d'une localité à l'autre afin de relier des légendes topographiques à des hagiotoponymes et microtoponymes locaux, témoignent souvent de la volonté des commanditaires des hagiographies, de marquage ou d'appropriation d'un lieu, mais aussi d'attribution ou de légitimation de ce lieu où le saint n'est pas forcément passé[1].
Hagiotoponymes en France
La France comporte de nombreux hagiotoponymes de villes, villages et hameaux formés pour la plupart au Moyen Âge, surtout après « l'ère des grands défrichements » du XIe siècle. Très souvent les villages prennent le nom de l'église locale dont ils adoptent le vocable (les noms des églises étant quant à elles apparues en relation avec les inventions et translations de reliques)[2], substituant aux vieux noms d'origine celtique ou latine des noms de saints à l'historicité parfois douteuse[3]. Selon le toponymiste Auguste Vincent, cet usage s'introduit dès la fin du VIe siècle, avec des formes d'abréviation telles que Saint-Georges pour Vicus Sancti Georgii (« le Vicus ou bourg de Saint-Georges ») ou Sanctus Stephanus (Saint-Étienne) au lieu de Basilica Sancti Stephani[4]. En 1992, une commune française sur huit portait le nom d'un saint (soit 4 500 communes, ce qui correspondait à un taux d'un peu plus de 12 %)[5]. Ce taux atteignait 29 % pour la Loire (98 communes sur 338), 28,6 % pour l'Ardèche (100 communes sur 349), et 23 % pour le Rhône (63 communes sur 269)[2].
Les hagiotoponymes les plus répandus en France sont pour les saints : Saint-Martin (237 communes), Saint-Pierre (175 communes), Saint-Jean (175 communes), Saint-Germain (126 communes), Saint-Georges (100 communes), Saint-Laurent (94 communes), Saint-Julien (93 communes), Saint-Hilaire (80 communes) ; pour les saintes : Sainte-Marie (44 communes), Sainte-Colombe (28 communes), Sainte-Gemme, Sainte-Eulalie et Sainte-Foy (16 communes), Sainte-Marguerite (12 communes), Sainte-Radegonde (11 communes)[6].
Notes et références
Références
- Bernard Merdrignac, Recherches sur l'hagiographie armoricaine du VIIème au XVème siècle. Les hagiographes et leurs publics en Bretagne au Moyen Age, Centre régional archéologique d'Alet, , p. 96
- Jacques Baudoin, Grand livre des saints : culte et iconographie en Occident, Éditions Créer, , p. 16.
- Nancy Gauthier, Jean-Charles Picard, Noël Duval, Topographie chrétienne des cités de la Gaule, des origines au milieu du VIIIe siècle, De Boccard, , p. 53.
- Emmanuel Le Roy Ladurie, L'Historien, le chiffre et le texte, Fayard, , p. 124.
- Ce taux ne prend pas en compte les communes dotées d'un nom dérivé d'un saint ou d'un éponyme. Cf. Paul Chatelain, Xavier Browaeys, La France des 36000 communes, Armand Colin, , p. 47.
- Jacques Baudoin, Grand livre des saints : culte et iconographie en Occident, Éditions Créer, , p. 16 et 234.