Château de Valognes

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Château de Valognes
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Le château de Valognes est un ancien château fort, construit au XIVe siècle en remplacement d'une résidence ducale du XIe siècle où la cour ducale séjournait fréquemment, de nos jours complètement rasé, qui se dressait à Valognes en Normandie.

Localisation[modifier | modifier le code]

Le château était situé dans le centre de la commune de Valognes, enfoui sous la place centrale dite du Château.

Historique[modifier | modifier le code]

C'est dans le manoir ducal de Valognes que le jeune duc de Normandie, Guillaume, le futur Conquérant, trouva refuge de 1035 à 1040, afin d'échapper aux barons révoltés qui souhaitaient l'assassiner[1]. En 1050, on sait que le duc Guillaume séjourne au château, car, à cette date, il envoie Samson d'Anneville (fl. XIe siècle) chasser les pirates de Guernesey[2].

En 1203, Jean sans Terre y séjourne avec son épouse Isabelle d'Angoulême. Le roi attendant des vents favorables pour traverser la Manche, afin de couronner la jeune reine, visite avec celle-ci le Cotentin. Le , ils sont à Valognes, le à Brix et le à Gonneville[3].

Le roi d'Angleterre Édouard III y coucha le lors de sa chevauchée sur le sol français[4].

Au XIVe siècle, le manoir ducal est agrandi et fortifié par Charles de Navarre (1332-1387)[5].

Au début de la guerre de Cent Ans, la place est aux mains de Charles le Mauvais, qui avait obtenu en , par le traité de Valognes confirmant celui de Mantes, le clos du Cotentin avec la ville de Cherbourg, les vicomtés de Carentan, Coutances et Valognes[6]. En 1364, Bertrand du Guesclin assiège et prend le château. Louis de Navarre récupère la place, mais en 1378 Du Guesclin reprend à nouveau la ville[note 1]. Lors des affrontements entre Français, Navarrais et Anglais, la garnison du château de Bricquebec, enlève dans la basse-cour du château de Valognes les chevaux des hérauts d'Édouard III[8].

De 1418-1449 la place est de nouveau occupée par les Anglais. Après la bataille de Formigny (1450) et la Campagne de Normandie engagée par le roi de France épaulé par les Bretons à bouter l'Anglais hors de duché de Normandie, le capitaine de Valognes, Thomas de Siseval fait sa soumission[9]. Après la guerre de Cent Ans, la ville est donné en dot à Jeanne de Valois (1447-1519), bâtarde légitimée de Louis XI, lors de son mariage en 1466 avec l'amiral Louis de Bourbon-Roussillon (1450-1487)[5]. Elle est alors renforcée et mise au goût du jour[10].

Le château est au XVIe siècle la résidence du gouverneur Hurtebye, avec lequel Gilles de Gouberville entretient des relations cordiales[10].

Lors de la première guerre de Religion, le , les protestants menés par, Henri-Robert aux Épaules, seigneur de Sainte-Marie-du-Mont, et le capitaine François Leclerc, avec une troupe de 70 cavaliers et 2 500 fantassins levée à Carentan, tentent sans succès de s'emparer du château dans lequel sur l'ordre de Jacques de Matignon, lieutenant général du roi en Basse-Normandie, s'est retiré son capitaine et seigneur catholique, Louis Dursus, seigneur de Lestre[6],[11],[note 2].

Gabriel Ier de Montgommery, le [13], entreprend, sans succès, de s'emparer de la place. Les protestants vinrent devant la place avec deux grandes couleuvrines de fonte et deux autres de fer, dont ils s'étaient emparés à la tour de Tatihou. Apprenant que le maréchal de Matignon, qui s'était assuré entre-temps le contrôle de Cherbourg et Granville, s’apprêtait à marcher contre lui, le capitaine huguenot leva le siège au bout de seize jours et se retira dans Carentan, et fut contraint, au cours de sa retraite, d'abandonner un canon[13],[note 3].

En 1590, le château avait pour commandant, Guillaume de Pierrepont[14].

Le , pendant la Fronde, François Goyon de Matignon, lieutenant-général du roi en Basse-Normandie et frondeur aux ordres du duc de Longueville, commence le siège du château. Le gouverneur de la ville, Bernardin Gigault de Bellefonds, resté fidèle au roi, et qui n'a que dix-neuf ans, s'enferme dans la place avec une poignée de soldats et quelques gentilshommes dont le seigneur de Saint-Pierre-Église, Charles Castel, ou François Cadot, seigneur de Sébeville. Matignon avec son contingent de 6 000 hommes mettra 15 jours à prendre la place, après une capitulation honorable des assiégés[15]. Peu de temps après, la même année, les troupes royales, sous le commandement de Callières, lieutenant du roi à Cherbourg, aidé notamment de Philippe Loyer, dit Noiremare, premier capitaine de quartier de la milice de Cherbourg, assiège à leur tour le château occupé « par des princes séditieux »[16].

En 1688, sur ordre de Louis XIV, Louvois décide son démantèlement[17].

Gouverneur/capitaine du château
  • Plusieurs membres de la famille de La Haye Sotteville[18].
  • Nicolas de Sainte-Marie ( 1591), chevalier de l'ordre du roi, gentilhomme de sa chambre[note 4].

Description[modifier | modifier le code]

Aux XIe et XIIe siècles, le château, lieu de résidence où les ducs de Normandie séjournent fréquemment, comporte une grande salle (aula), des appartements privés (camera) et une chapelle (capella).

La place comprenait un donjon rond caractéristique de la fin du XIIe et XIIIe siècles. La tour maîtresse de plan oblong présentait un décrochement correspondant à une division interne par un mur de refend. Elle abritait un puits intérieur et était flanquée sur l'angle d'un escalier en vis logé dans une tour semi hors œuvre[19]. Au milieu du XIVe siècle, le roi de Navarre, Charles le Mauvais, y construit une tour neuve (carrée). Le château sera ensuite régulièrement réparé et renforcé jusqu'à la fin du XVIIe siècle où la décision est prise de le démolir, à l'exception du bâtiment du gouverneur et de la chapelle. Au XIXe siècle il ne subsiste rien de la forteresse.

Du château, il ne subsiste qu'un plan dit « de Gerville » levé en 1688[note 5].

Sondage archéologique[modifier | modifier le code]

Depuis 2011, les différents sondages archéologiques réalisés ont confirmé la démolition massive des fortifications et l'arasement presque total des bâtiments. Lors de ces sondages, furent retrouvé des grands pans de murs basculés dans les fossés, ainsi que des ouvertures, portes et fenêtres et fentes de tir[20].

En 2011, fut mis au jour un bâtiment semi-enterré à contreforts plats, qui devait être adossé à la courtine ouest. Son plan, sa technique de construction ainsi que le mobilier recueilli dans les niveaux conservés, le date de la période romane, avec une fin d'occupation comme cuisine et une démolition au XIVe siècle. Nous serions donc en présence d'un des bâtiments résidentiels décrits dans les textes du Moyen Âge, et probablement la aula citée au XIIe siècle[20].

En 2019, c'est l'accès principal du château en direction de la ville qui a été dégagé. Il était composé de deux portes espacées par un vestibule de 5,60 m de long, avec un mur ouest de 1,20 à 1,30 m d'épaisseur laissant supposer l'existence d'étages. Sous cet accès fut retrouvé une pièce encavée. De même, l'angle sud-ouest de la tour maîtresse (donjon) a été dégagé. Parmi les restitutions possibles, il est possible d'envisager à la sortie de la porte un pont-levis enjambant les fausses braies et une passerelle afin de rejoindre la ville[20].

Protection[modifier | modifier le code]

Au titre des monuments historiques, une tourelle avant sa complète destruction en faisaient l'objet d'une inscription partielle par arrêté du [21],[note 6].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Du Guesclin avait mis en œuvre une grosse bombarde qui fut l'objet d'une anecdote : « À chaque décharge, les assiégés sonnaient une cloche pour se railler des Français et un soldat, s'avançant en dehors, essuyait la partie de la muraille qui avait été atteinte en reprochant ironiquement aux Français de salir inutilement leurs belles pierres. Néanmoins une brèche fut pratiqué entraînant la prise de la place[7]. ».
  2. Parmi les défenseurs du château de Valognes, on trouve Léobin du Saussay[12].
  3. Ce canon pourrait être celui qui git devant le logis du manoir de Graffard.
  4. Nicolas de Sainte-Marie est également le gouverneur du château de Granville.
  5. Le plan est conservé à Cherbourg-en-Cotentin à la bibliothèque municipale Jacques Prévert, fonds Amiot, Ms. 75, 121 num-005.
  6. La tourelle, était probablement celle de l'Hôtel Saint-Michel[10]

Références[modifier | modifier le code]

  1. André Davy, Les barons du Cotentin, Condé-sur-Noireau, Éditions Eurocibles, coll. « Inédits et introuvables du patrimoine Normand », , 319 p. (ISBN 978-2-91454-196-1), p. 88.
  2. René Gautier et al. (préf. Jean-François Le Grand, postface Danièle Polvé-Montmasson), 601 communes et lieux de vie de la Manche : Le dictionnaire incontournable de notre patrimoine, Bayeux, Éditions Eurocibles, coll. « Inédits & Introuvables », , 704 p. (ISBN 978-2-35458-036-0), p. 55.
  3. Pinel 2023, p. 35.
  4. André Plaisse, La grande chevauchée guerrière d'Édouard III en 1346, Cherbourg, Éditions Isoète, , 111 p. (ISBN 2-905385-58-8), p. 50.
  5. a et b Gilles Désiré dit Gosset, « Châteaux et fortifications du Cotentin », dans Congrès archéologique de France, Manche, 178e session 2019 - Société Française d'Archéologie, Éditions Picard, (ISBN 978-2-9018-3793-0), p. 16.
  6. a et b Michel Hébert et André Gervaise, Châteaux et manoirs de la Manche, Condé-sur-Noireau, Éditions Charles Corlet, , 176 p. (ISBN 978-2-84706-143-7), p. 22.
  7. Guy Le Hallé, Châteaux forts de Basse-Normandie, t. II, Louviers, Ysec Éditions, , 160 p. (ISBN 978-284673-215-4), p. 112.
  8. Bernard Beck, Châteaux forts de Normandie, Rennes, Ouest-France, , 158 p. (ISBN 2-85882-479-7), p. 98.
  9. Norbert Girard et Maurice Lecœur, Trésors du Cotentin : Architecture civile & art religieux, Mayenne, Éditions Isoète, , 296 p. (ISBN 978-2-913920-38-5), p. 14.
  10. a b et c .Comité Gille de Gouberville et al. (préf. Annick Perrot, ill. Kévin Bazot, sous la direction de Julien Deshayes), Voyage en Cotentin avec Gilles de Gouberville, Éditions Heimdal, , 95 p., 30 cm, illustrations couleur (ISBN 978-2-84048-581-0, EAN 9782840485810, BNF 46897276), p. 88-89.
  11. Université Inter-Âges de Basse-Normandie - Antenne de Cherbourg (préf. Rodolphe de Mons), Blasons armoriés du Clos du Cotentin, Condé-sur-Noireau, Éditions Charles Corlet, , 214 p. (ISBN 2-85480-543-7), p. 115.
  12. Barros 1991, p. 35.
  13. a et b Jean Barros, Le canton de Barneville-Carteret (Côte des Isles) : Le patrimoine, t. 1, Valognes, Éditions de la Côte des Isles, , 391 p. (ISBN 2-9505339-1-4), p. 59.
  14. Le château de Flottemanville - L'histoire de ses propriétaires : Édition salon du livre 17/18 novembre 2012 Valognes, Réal. Joseph Montreuil - Bibliothèque de Caen, , 31 p., p. 3.
  15. Girard et Lecœur 2005, p. 19.
  16. Andrée Gérard, « La Maison de Belessert à Cherbourg-en-Cotentin », Revue de la Manche, t. 65, no 260,‎ avril-mai-juin 2023, p. 14 (ISBN 979-1-0937-0115-8).
  17. Jeannine Bavay, « Cherbourg de 1688 à 1897 », Vikland, la revue du Cotentin, no 4,‎ janvier-février-mars 2013, p. 11 (ISSN 0224-7992).
  18. Michel Pinel (photogr. Patrick Courault), Châteaux et Manoirs de la Manche, t. 5, Rivages de France, coll. « Lumières et histoire », , 256 p. (ISBN 978-2-9561209-6-4), p. 9.
  19. ArchéoCotentin t. 2, p. 36.
  20. a b et c « S'approprier la presqu'île : encadrement, contrôle territorial et développement des lieux de pouvoir », dans Laurence Jeanne, Laurent Paez-Rezende, Julien Deshayes, Bénédicte Guillot, et la collaboration de Gaël Léon, ArchéoCotentin, t. 2 : Les origines antiques et médiévales du Cotentin à 1500, Bayeux, Éditions OREP, , 127 p. (ISBN 978-2-8151-0790-7), p. 23 - Bénédicte Guillot, le château de Valognes.
  21. « Ancien château », notice no PA00110626, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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