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Les [[naturaliste]]s français [[Jean René Constant Quoy]] et [[Joseph Paul Gaimard]] ont décrit le squalelet féroce au cours du voyage d'exploration de 1817-1820 de la [[Corvette (navire)|corvette]] Uranie, en lui donnant le nom de ''Scymnus brasiliensis'' parce que le spécimen type a été capturé au large du [[Brésil]]. En [[1824]], sa description fut publiée dans le cadre du ''Voyage Autour du Monde ... sur les corvettes de SM l'Uranie et la Physicienne'', le rapport de [[Louis de Freycinet]] de 13 volume sur le voyage en terre australe <ref name="Gaimard"/>{{,}}<ref name="ebert"/>. En [[1865]], l'ichtyologiste américain [[Theodore Nicholas Gill]] a inventé un nouveau genre pour cette espèce, ''Isistius'' en référence à [[Isis]], la déesse égyptienne de la lumière<ref name="bester"/>{{,}}<ref name="Gill"/>.
Les [[naturaliste]]s français [[Jean René Constant Quoy]] et [[Joseph Paul Gaimard]] ont décrit le squalelet féroce au cours du voyage d'exploration de 1817-1820 de la [[Corvette (navire)|corvette]] Uranie, en lui donnant le nom de ''Scymnus brasiliensis'' parce que le spécimen type a été capturé au large du [[Brésil]]. En [[1824]], sa description fut publiée dans le cadre du ''Voyage Autour du Monde ... sur les corvettes de SM l'Uranie et la Physicienne'', le rapport de [[Louis de Freycinet]] de 13 volume sur le voyage en terre australe <ref name="Gaimard"/>{{,}}<ref name="ebert"/>. En [[1865]], l'ichtyologiste américain [[Theodore Nicholas Gill]] a inventé un nouveau genre pour cette espèce, ''Isistius'' en référence à [[Isis]], la déesse égyptienne de la lumière<ref name="bester"/>{{,}}<ref name="Gill"/>.


L'un des premiers contes de les plaies laissées par le squalelet féroce sur divers animaux, est en samoan ancienne légende, qui a jugé que l'ATU (listao) entrant dans la baie Palauli laisserait derrière lui des morceaux de leur chair comme un sacrifice à Tautunu, le chef de la communauté. Au cours des siècles plus tard, diverses autres explications pour les blessures ont été avancées, y compris les [[lamproie]]s, les [[bactérie]]s et les [[parasites]] d'invertébrés. En 1971, Everet Jones de l'US Bureau de la pêche commerciale (l'ancêtre de la [[National Marine Fisheries Service]]) a découvert que le squalelet féroce était responsable de ces blessures.
L'un des premiers contes de les plaies laissées par le squalelet féroce sur divers animaux, est en samoan ancienne légende, qui a jugé que l'ATU (listao) entrant dans la baie Palauli laisserait derrière lui des morceaux de leur chair comme un sacrifice à Tautunu, le chef de la communauté. Au cours des siècles plus tard, diverses autres explications pour les blessures ont été avancées, y compris les [[lamproie]]s, les [[bactérie]]s et les [[parasites]] d'invertébrés. En 1971, Everet Jones de l'US Bureau de la pêche commerciale (l'ancêtre de la [[National Marine Fisheries Service]]) a découvert que le squalelet féroce était responsable de ces blessures<ref name="jones"/>{{,}}<ref name="compagno"/>.


== Distribution ==
== Distribution et habitat==
Le squalelet féroce se rencontre dans toutes les eaux tropicales et tempérées des bassins océaniques, il est plus fréquent entre les latitudes 20 ° N et 20 ° S, où la température de l'eau de surface est à 18-26 ° C. Dans l'Atlantique, il a été signalé au large des [[Bahamas]], du [[Cap-Vert]], de la [[Guinée]], de la [[Sierra Leone]], mais également au sud de l'[[Angola]], à l'Est l'[[Afrique du Sud]] à l'Est, à l'[[île d'Ascension]] dans le sud et au sud du [[Brésil]]. Dans la région [[Indo-Pacifique]], il a été aperçu de l'[[île Maurice]] à la [[Nouvelle-Guinée]], en [[Australie]] et en [[Nouvelle-Zélande]], y compris la [[Tasmanie]] et l'[[île de Lord Howe]], ainsi qu'à l'extérieur du [[Japon]]. Dans le [[Pacifique]] central et oriental, il vit au nord des [[Fidji]] aux îles Hawaii, et à l'est de l'[[archipel des Galápagos]], de [[Île de Pâques]] et les [[île Guadalupe|îles Guadalupe]]. Les lésions fraîches observées sur les mammifères marins donnent à penser que ce requin peut aller aussi loin que la [[Californie]], pendant les périodes chaudes.
Le squalelet féroce se rencontre dans toutes les eaux tropicales et tempérées des bassins océaniques, il est plus fréquent entre les latitudes 20 ° N et 20 ° S, où la température de l'eau de surface est à 18-26 ° C. Dans l'Atlantique, il a été signalé au large des [[Bahamas]], du [[Cap-Vert]], de la [[Guinée]], de la [[Sierra Leone]], mais également au sud de l'[[Angola]], à l'Est l'[[Afrique du Sud]] à l'Est, à l'[[île d'Ascension]] dans le sud et au sud du [[Brésil]]. Dans la région [[Indo-Pacifique]], il a été aperçu de l'[[île Maurice]] à la [[Nouvelle-Guinée]], en [[Australie]] et en [[Nouvelle-Zélande]], y compris la [[Tasmanie]] et l'[[île de Lord Howe]], ainsi qu'à l'extérieur du [[Japon]]. Dans le [[Pacifique]] central et oriental, il vit au nord des [[Fidji]] aux îles Hawaii, et à l'est de l'[[archipel des Galápagos]], de [[Île de Pâques]] et les [[île Guadalupe|îles Guadalupe]]. Les lésions fraîches observées sur les mammifères marins donnent à penser que ce requin peut aller aussi loin que la [[Californie]], pendant les périodes chaudes<ref name="compagno"/>{{,}}<ref name="bester"/>.


Sur la base de relevés de captures, ce requin exécute une [[migration verticale]] [[nycthémérale]] de 3 km dans chaque sens. Il passe la journée à une profondeur de {{unité|1000|m}} à {{unité|3700|m}}, et la nuit, il monte dans la colonne d'eau, restant en général à 85 m, mais il s'aventure parfois près de la surface. Le squalelet féroce est plus tolérant à de faibles concentrations d'oxygène dissous que les requins des genres cousins ''[[Euprotomicrus]]'' et ''[[Squaliolus]]''. Il se trouve fréquemment près des îles, peut-être à des fins reproductives ou parce qu'il suit les groupes de grandes proies. Dans le nord de l'[[Atlantique]], la plupart des adultes se situent entre 11 ° N et 16 ° N, tandis que les jeunes se trouvent à des latitudes inférieures et supérieures respectivement. Il n'existe aucune preuve de ségrégation sexuelle chez cette espèce.
Sur la base de relevés de captures, ce requin exécute une [[migration verticale]] [[nycthémérale]] de 3 km dans chaque sens. Il passe la journée à une profondeur de {{unité|1000|m}} à {{unité|3700|m}}, et la nuit, il monte dans la colonne d'eau, restant en général à 85 m, mais il s'aventure parfois près de la surface. Le squalelet féroce est plus tolérant à de faibles concentrations d'oxygène dissous que les requins des genres cousins ''[[Euprotomicrus]]'' et ''[[Squaliolus]]''<ref name="compagno"/>. Il se trouve fréquemment près des îles, peut-être à des fins reproductives ou parce qu'il suit les groupes de grandes proies<ref name="compagno"/>. Dans le nord de l'[[Atlantique]], la plupart des adultes se situent entre 11 ° N et 16 ° N, tandis que les jeunes se trouvent à des latitudes inférieures et supérieures respectivement<ref name="Biogeography"/>. Il n'existe aucune preuve de ségrégation sexuelle chez cette espèce<ref name="strasburg"/>.
== Description ==
== Description ==
[[Image:Cookiecutter shark head.jpg|thumb|left|upright=1.2|Le squalelet féroce a une petite tête arrondie avec de grands yeux placés en avant et une bouche transversale.]]
[[Image:Cookiecutter shark head.jpg|thumb|left|upright=1.2|Le squalelet féroce a une petite tête arrondie avec de grands yeux placés en avant et une bouche transversale.]]
Le squalelet féroce a un corps allongé, en forme de cigare, avec un petit museau arrondi et renflé. Les narines forment un petit volet de peau à l'avant du museau. Ses yeux verts, gros et ovales, sont placés en avant de la tête, mais il ne possède pas une vaste [[vision binoculaire]]. Derrière les yeux se trouve de grands stigmates, placés sur la surface supérieure de la tête. La bouche est courte, formant une ligne presque transversale et est entourée par des lèvres élargies et charnues. Sa mâchoire supérieure possède 30 à 37 lignes de dents et 25 à 31 lignes dans la mâchoire inférieure, ce qui augmente avec la taille corporelle. Les dents supérieures et inférieures sont très différentes : les dents du haut sont petites, étroites et verticales, elles s'amenuisent en canine aux bords lisses. Les dents du bas sont également à bords lisses, mais beaucoup plus grandes et plus larges, en forme de couteau, rattachées à leurs bases pour former une seule scie de pointes. Les cinq paires de [[fentes branchiales]] sont petites.
Le squalelet féroce a un corps allongé, en forme de cigare, avec un petit museau arrondi et renflé. Les narines forment un petit volet de peau à l'avant du museau. Ses yeux verts, gros et ovales, sont placés en avant de la tête, mais il ne possède pas une vaste [[vision binoculaire]]. Derrière les yeux se trouve de grands stigmates, placés sur la surface supérieure de la tête. La bouche est courte, formant une ligne presque transversale et est entourée par des lèvres élargies et charnues. Sa mâchoire supérieure possède 30 à 37 lignes de dents et 25 à 31 lignes dans la mâchoire inférieure, ce qui augmente avec la taille corporelle. Les dents supérieures et inférieures sont très différentes : les dents du haut sont petites, étroites et verticales, elles s'amenuisent en canine aux bords lisses. Les dents du bas sont également à bords lisses, mais beaucoup plus grandes et plus larges, en forme de couteau, rattachées à leurs bases pour former une seule scie de pointes. Les cinq paires de [[fentes branchiales]] sont petites<ref name="ebert"/>{{,}}<ref name="bester"/>{{,}}<ref name="compagno"/>.


Les nageoires pectorales sont courtes et à peu près de forme [[Trapézoïde|trapézoïdale]]. Deux épines dorsales sont placées loin en arrière sur le corps, la première se situe juste avant les [[nageoires pelviennes]] et la seconde est juste derrière. La deuxième [[nageoire dorsale]] est légèrement plus grande que la première, mais les nageoires pelviennes sont plus grande que celles-ci. La [[nageoire anale]] est absente. La [[nageoire caudale]] est large, avec le lobe inférieur presque aussi grand que le supérieur, qui a une encoche en vue ventrale. Les [[denticule]]s dermiques sont carrés et aplatis, avec une légère concavité centrale et les coins soulevés. Le squalelet féroce est de couleur brun chocolat, devenant subtilement pâle en dessous, et il possède un sombre «collier» qui entoure la région des branchies. Les [[nageoire]]s ont une marge translucide, à l'exception de la nageoire caudale qui a une marge plus sombre. Les organes produisant de la lumière, appelés [[photophore]]s, couvrent densément toute la face ventrale, sauf pour le collier, et produisent une lueur vert vif. La longueur maximale enregistrée pour cette espèce est de {{unité|42|cm}} pour les mâles et {{unité|56|cm}} pour les femelles.
Les nageoires pectorales sont courtes et à peu près de forme [[Trapézoïde|trapézoïdale]]. Deux épines dorsales sont placées loin en arrière sur le corps, la première se situe juste avant les [[nageoires pelviennes]] et la seconde est juste derrière. La deuxième [[nageoire dorsale]] est légèrement plus grande que la première, mais les nageoires pelviennes sont plus grande que celles-ci. La [[nageoire anale]] est absente. La [[nageoire caudale]] est large, avec le lobe inférieur presque aussi grand que le supérieur, qui a une encoche en vue ventrale<ref name="ebert"/>{{,}}<ref name="compagno"/>. Les [[denticule]]s dermiques sont carrés et aplatis, avec une légère concavité centrale et les coins soulevés. Le squalelet féroce est de couleur brun chocolat, devenant subtilement pâle en dessous, et il possède un sombre «collier» qui entoure la région des branchies<ref name="bester"/>. Les [[nageoire]]s ont une marge translucide, à l'exception de la nageoire caudale qui a une marge plus sombre. Les organes produisant de la lumière, appelés [[photophore]]s, couvrent densément toute la face ventrale, sauf pour le collier, et produisent une lueur vert vif. La longueur maximale enregistrée pour cette espèce est de {{unité|42|cm}} pour les mâles et {{unité|56|cm}} pour les femelles<ref name="fishbase"/>.


==Biologie et écologie==
==Biologie et écologie==
[[Image:Cookiecutter shark head2.jpg|thumb|upright=0.8|alt|Les lèvres suceuses et ses grandes dents inférieures du squalelet féroce sont des adaptations pour son mode de vie parasitaire.]]
[[Image:Cookiecutter shark head2.jpg|thumb|upright=0.8|alt|Ses lèvres suceuses et ses grandes dents inférieures sont des adaptations pour son mode de vie parasitaire.]]
Bien connu pour ses bouchées de tissus de mammifères marins et de grands poissons, le squalelet féroce est considéré comme un requin [[ectoparasite]] facultatif car il ingère entièrement des proies plus petites. Il possède une large ouverture de la bouche et un morceau costaud, grâce à son cartilage labial et du crâne fortement calcifié. Avec ses petites nageoires et ses petits muscles, ce requin chasse en embuscade, puisqu'il passe le plus clair de son temps en position stationnaire dans la colonne d'eau. Pour maintenir une [[flottabilité]] neutre, son [[foie]], qui peut comprendre environ 35% de son poids, est riche en [[lipide]]s à basse densité. Comme cette espèce a une densité squelettique plus élevée que ''[[Euprotomicrus]]'' ou ''[[Squaliolus]]'', le [[cœlome]] et le foie sont proportionnellement beaucoup plus grands et leur teneur en huile plus élevée. Sa grande [[nageoire caudale]] permet une brusque rafale de vitesse pour attraper plus vite les proies qui passent à sa portée.
Bien connu pour ses bouchées de tissus de mammifères marins et de grands poissons, le squalelet féroce est considéré comme un requin [[ectoparasite]] facultatif car il ingère entièrement des proies plus petites. Il possède une large ouverture de la bouche et un morceau costaud, grâce à son cartilage labial et du crâne fortement calcifié<ref name="widder"/>. Avec ses petites nageoires et ses petits muscles, ce requin chasse en embuscade, puisqu'il passe le plus clair de son temps en position stationnaire dans la colonne d'eau<ref name="compagno"/>{{,}}<ref name="milius"/>. Pour maintenir une [[flottabilité]] neutre, son [[foie]], qui peut comprendre environ 35% de son poids, est riche en [[lipide]]s à basse densité. Comme cette espèce a une densité squelettique plus élevée que ''[[Euprotomicrus]]'' ou ''[[Squaliolus]]'', le [[cœlome]] et le foie sont proportionnellement beaucoup plus grands et leur teneur en huile plus élevée<ref name="compagno"/>{{,}}<ref name="martin"/>. Sa grande [[nageoire caudale]] permet une brusque rafale de vitesse pour attraper plus vite les proies qui passent à sa portée<ref name="martin"/>.


Le squalelet féroce remplace régulièrement ses dents, comme d'autres requins, mais il ne perd pas ses dents une par une, mais des rangées entières. On a calculé qu'un individu de 14 cm de longueur aura perdu 15 ensembles de dents inférieures au moment où il atteindra 50 cm de long, pour un total de 435 à 465 dents. Cela représente un puisement important dans ses ressources et c'est probablement pourquoi les anciens ensembles de dents sont avalées, de sorte que le requin peut recycler le [[calcium]]. Contrairement à d'autres requins, la [[rétine]] du squalelet féroce possède des [[Cellule ganglionnaire|cellules ganglionnaires]] concentrées dans une zone concentrique plutôt que dans un plan horizontal qui zèbrent le [[champ visuel]], ce qui peut aider à se concentrer sur des proies devant le requin.
Le squalelet féroce remplace régulièrement ses dents, comme d'autres requins, mais il ne perd pas ses dents une par une, mais des rangées entières. On a calculé qu'un individu de 14 cm de longueur aura perdu 15 ensembles de dents inférieures au moment où il atteindra 50 cm de long, pour un total de 435 à 465 dents<ref name="strasburg"/>. Cela représente un puisement important dans ses ressources et c'est probablement pourquoi les anciens ensembles de dents sont avalées, de sorte que le requin peut recycler le [[calcium]]. Contrairement à d'autres requins, la [[rétine]] du squalelet féroce possède des [[Cellule ganglionnaire|cellules ganglionnaires]] concentrées dans une zone concentrique plutôt que dans un plan horizontal qui zèbrent le [[champ visuel]], ce qui peut aider à se concentrer sur des proies devant le requin<ref name="retinal"/>.


Ce requin est capable de se déplacer en [[Banc (poisson)|banc]], ce qui peut accroître l'efficacité de son attrait (voir ci-dessous), ainsi que décourager les attaques de ses prédateurs.
Ce requin est capable de se déplacer en [[Banc (poisson)|banc]], ce qui peut accroître l'efficacité de son attrait (voir ci-dessous), ainsi que décourager les attaques de ses prédateurs<ref name="widder"/>.


=== Bioluminescence ===
=== Bioluminescence ===
[[Image:Isistius brasiliensis belly.jpg|thumb|left|upright=1.2|Le collier noir du squalelet féroce est censé agir comme un leurre.]]
[[Image:Isistius brasiliensis belly.jpg|thumb|left|upright=1.2|Le collier noir du squalelet féroce est censé agir comme un leurre.]]
La luminescence verte du squalelet féroce est la plus forte connue de tous les requins, et peut persister pendant trois heures hors de l'eau. Les photophores, sur sa face ventrale, servent à perturber sa silhouette par le bas en faisant correspondre la lumière descendant, une stratégie connue sous le nom de « contre-illumination » qui est commune parmi les organismes [[Bioluminescence|bioluminescent]]s de la [[zone mésopélagique]]. Les [[photophore]]s individuels sont installés autour de la [[denticule]] et sont assez petits pour qu'ils ne puissent pas être distinguées à l'œil nu, ce qui suggère qu'ils ont évolué de façon à tromper les animaux dont l'acuité visuelle est élevée.
La luminescence verte du squalelet féroce est la plus forte connue de tous les requins, et peut persister pendant trois heures hors de l'eau<ref name="martin"/>{{,}}<ref name="Fish Physiology"/>. Les photophores, sur sa face ventrale, servent à perturber sa silhouette par le bas en faisant correspondre la lumière descendant, une stratégie connue sous le nom de « contre-illumination » qui est commune parmi les organismes [[Bioluminescence|bioluminescent]]s de la [[zone mésopélagique]]. Les [[photophore]]s individuels sont installés autour de la [[denticule]] et sont assez petits pour qu'ils ne puissent pas être distinguées à l'œil nu, ce qui suggère qu'ils ont évolué de façon à tromper les animaux dont l'acuité visuelle est élevée<ref name="widder"/>.


Mis à part le dessous brillant, le col non-luminescent, situé autour de la gorge, pourrait servir de leurre en imitant la silhouette d'un petit poisson vu d'en bas. La tentation serait alors multipliée lorsqu'il se déplace en banc. Si le collier ne fonctionne de cette façon, le squalelet féroce serait le seul cas connu chez les organismes bioluminescents, dans lequel l'absence de lumière attire les proies, tandis que ses photophores servent à empêcher la détection par ses prédateurs. Comme le requin ne peut correspondre qu'à une gamme limitée d'intensités lumineuses, ses mouvements verticaux servent à préserver l'efficacité de son déguisement à travers les différents moments de journée et les conditions météorologiques.
Mis à part le dessous brillant, le col non-luminescent, situé autour de la gorge, pourrait servir de leurre en imitant la silhouette d'un petit poisson vu d'en bas. La tentation serait alors multipliée lorsqu'il se déplace en banc. Si le collier ne fonctionne de cette façon, le squalelet féroce serait le seul cas connu chez les organismes bioluminescents, dans lequel l'absence de lumière attire les proies, tandis que ses photophores servent à empêcher la détection par ses prédateurs<ref name="widder"/>{{,}}<ref name="milius"/>. Comme le requin ne peut correspondre qu'à une gamme limitée d'intensités lumineuses, ses mouvements verticaux servent à préserver l'efficacité de son déguisement à travers les différents moments de journée et les conditions météorologiques<ref name="widder"/>.
=== Alimentation ===
=== Alimentation ===
[[Image:Cookiecutter damage.jpg|thumb|La [[grande castagnole]] est l'une des nombreuses espèces parasitées par le squalelet féroce.]]
[[Image:Cookiecutter damage.jpg|thumb|La [[grande castagnole]] est l'une des nombreuses espèces parasitées par le squalelet féroce.]]
Pratiquement tous les types d'animaux océaniques de grande taille partage l'habitat du squalelet féroce : les cicatrices de ses morsures ont été trouvés sur la plupart des [[cétacés]] (y compris les [[marsouin]]s, les [[dauphin]]s, les [[globicéphale]]s, les [[baleines à bec]], les [[Grand cachalot|cachalots]] et les [[baleines à fanons]]), sur de nombreux [[pinnipède]]s (y compris les [[Arctocephalus|otaries à fourrure]], le [[léopard de mer]], l'[[éléphants de mer]] et les [[dugong]]s) mais aussi sur les autres requins (y compris le [[requin bleu]], le [[requin lutin]], et le [[requin grande gueule]]), sur des [[raie]]s d'eau profonde et sur des [[poissons osseux]] (y compris les [[Istiophoridae|marlin]]s, les [[thon]]s, les [[dorades tropicales]], les [[vérin]]s, les [[escolar]]s, [[opah]], et les [[Bramidae|castagnoles]]).
Pratiquement tous les types d'animaux océaniques de grande taille partage l'habitat du squalelet féroce : les cicatrices de ses morsures ont été trouvés sur la plupart des [[cétacés]] (y compris les [[marsouin]]s, les [[dauphin]]s, les [[globicéphale]]s, les [[baleines à bec]], les [[Grand cachalot|cachalots]] et les [[baleines à fanons]]), sur de nombreux [[pinnipède]]s (y compris les [[Arctocephalus|otaries à fourrure]], le [[léopard de mer]], l'[[éléphants de mer]] et les [[dugong]]s) mais aussi sur les autres requins (y compris le [[requin bleu]], le [[requin lutin]], et le [[requin grande gueule]]), sur des [[raie]]s d'eau profonde et sur des [[poissons osseux]] (y compris les [[Istiophoridae|marlin]]s, les [[thon]]s, les [[dorades tropicales]], les [[vérin]]s, les [[escolar]]s, [[opah]], et les [[Bramidae|castagnoles]])<ref name="ebert"/>{{,}}<ref name="martin"/>{{,}}<ref name="martin3"/>.


Le squalelet féroce chasse et mange aussi régulièrement des [[calmar]]s entiers, avec un [[Manteau (mollusque)|manteau]] mesurant 15 à 30 cm de longueur, c'est à dire de taille comparable au requin lui-même. Ainsi que des [[gonostomatidés]], des [[copépode]]s et d'autres proies de dimensions plus modestes.
Le squalelet féroce chasse et mange aussi régulièrement des [[calmar]]s entiers, avec un [[Manteau (mollusque)|manteau]] mesurant 15 à 30 cm de longueur, c'est à dire de taille comparable au requin lui-même. Ainsi que des [[gonostomatidés]], des [[copépode]]s et d'autres proies de dimensions plus modestes<ref name="strasburg"/>.


Les attaques parasitaires du squalelet féroce laissent une plaie semblable à un [[cratère]], avec une moyenne de 5 cm de diamètre et 7 cm de profondeur. La prévalence de ces attaques peut être élevée : presque tous les adultes de [[dauphin à long bec]] au large d'Hawaï portent des cicatrices. Les animaux malades ou affaiblis semblent être plus sensibles : dans l'ouest de l'[[Atlantique]], des [[péponocéphale]]s émaciés se sont [[Échouage des cétacés|échoués]] par dizaines avec de nombreuses plaies cicatrisées, alors que de telles blessures sont rares sur les cétacés non-émaciés. L'impact du [[parasitisme]] sur les espèces proies, en termes de ressources détournées de la croissance ou de la reproduction, est incertaine.
Les attaques parasitaires du squalelet féroce laissent une plaie semblable à un [[cratère]], avec une moyenne de 5 cm de diamètre et 7 cm de profondeur<ref name="martin2"/>. La prévalence de ces attaques peut être élevée : presque tous les adultes de [[dauphin à long bec]] au large d'Hawaï portent des cicatrices<ref name="heithaus"/>. Les animaux malades ou affaiblis semblent être plus sensibles : dans l'ouest de l'[[Atlantique]], des [[péponocéphale]]s émaciés se sont [[Échouage des cétacés|échoués]] par dizaines avec de nombreuses plaies cicatrisées, alors que de telles blessures sont rares sur les cétacés non-émaciés. L'impact du [[parasitisme]] sur les espèces proies, en termes de ressources détournées de la croissance ou de la reproduction, est incertaine.


Le squalelet féroce présente un certain nombre de spécialisations de sa bouche et de son pharynx pour son mode de vie parasitaire. Le requin s'accroche d'abord à la surface du corps de sa proie en fermant ses [[stigmate (zoologie)|stigmates]] tout en rétractant sa basihyal ([[Langue (anatomie)|langue]]) pour créer une pression négative. Ses lèvres suceuses assurent un joint étanche. Il mord alors, en utilisant sa mâchoire supérieure comme point d'ancrage tandis qu'il enfonce sa mâchoires inférieure dans l'épiderme de sa proie. Enfin, le requin se tord et tourne son corps pour effectuer une coupe circulaire, très probablement aidé par l'élan initial et subséquent de sa proie. L'action des dents inférieures peut également être assistée par le va-et-vient des vibrations de la mâchoire, comme le mécanisme d'un couteau électrique. Sa capacité à créer une forte aspiration dans sa bouche est probablement aussi utilisée pour la capture des proies plus petites, telles que les [[calmar]]s.
Le squalelet féroce présente un certain nombre de spécialisations de sa bouche et de son pharynx pour son mode de vie parasitaire. Le requin s'accroche d'abord à la surface du corps de sa proie en fermant ses [[stigmate (zoologie)|stigmates]] tout en rétractant sa basihyal ([[Langue (anatomie)|langue]]) pour créer une pression négative<ref name="widder"/>{{,}}<ref name="martin"/>. Ses lèvres suceuses assurent un joint étanche. Il mord alors, en utilisant sa mâchoire supérieure comme point d'ancrage tandis qu'il enfonce sa mâchoires inférieure dans l'épiderme de sa proie. Enfin, le requin se tord et tourne son corps pour effectuer une coupe circulaire, très probablement aidé par l'élan initial et subséquent de sa proie<ref name="widder"/>. L'action des dents inférieures peut également être assistée par le va-et-vient des vibrations de la mâchoire, comme le mécanisme d'un couteau électrique<ref name="martin2"/>. Sa capacité à créer une forte aspiration dans sa bouche est probablement aussi utilisée pour la capture des proies plus petites, telles que les [[calmar]]s<ref name="widder"/>.


=== Reproduction ===
=== Reproduction ===
Comme d'autres squales, le squalelet féroce est [[Ovoviviparité|ovovivipare]], les [[embryon]]s sont munis d'un [[sac vitellin]] jusqu'à la naissance. Les femelles ont deux [[utérus]] fonctionnels et peuvent donner naissance à 6-12 petits par portée. Il s'agit d'un record : une femelle peut porter 9 embryons de 12,4 à 13,7 cm de longueur. S'ils étaient à proximité de la taille de la naissance, ils ont encore leur sac vitellin bien développé, ce qui suggère un faible taux d'absorption et une longue [[gestation]]. Les embryons ont une pigmentation brune, mais n'ont pas le collier noir ou la forte dentition des adultes. Le nouveau-né mesure 14 à 15 cm de longueur. Les mâles atteignent leur [[maturité sexuelle]] à 36 cm et les femelles à 39 cm.
Comme d'autres squales, le squalelet féroce est [[Ovoviviparité|ovovivipare]], les [[embryon]]s sont munis d'un [[sac vitellin]] jusqu'à la naissance. Les femelles ont deux [[utérus]] fonctionnels et peuvent donner naissance à 6-12 petits par portée<ref name="ebert"/>{{,}}<ref name="gadig and gomes"/>. Il s'agit d'un record : une femelle peut porter 9 embryons de 12,4 à 13,7 cm de longueur. S'ils étaient à proximité de la taille de la naissance, ils ont encore leur sac vitellin bien développé, ce qui suggère un faible taux d'absorption et une longue [[gestation]]. Les embryons ont une pigmentation brune, mais n'ont pas le collier noir ou la forte dentition des adultes. Le nouveau-né mesure 14 à 15 cm de longueur<ref name="gadig and gomes"/>. Les mâles atteignent leur [[maturité sexuelle]] à 36 cm et les femelles à 39 cm<ref name="ebert"/>.


== Relations avec l'homme ==
== Relations avec l'homme ==
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<ref name="Gill">{{article |langue=en |nom1=Gill |prénom1=T.N. |année=1865 |titre=Synopsis of the eastern American sharks |journal=Proceedings of the Academy of Natural Sciences of Philadelphia |volume=16 |issue=5 |pages=258&ndash;265}}</ref>
<ref name="Gill">{{article |langue=en |nom1=Gill |prénom1=T.N. |année=1865 |titre=Synopsis of the eastern American sharks |journal=Proceedings of the Academy of Natural Sciences of Philadelphia |volume=16 |issue=5 |pages=258&ndash;265}}</ref>
<ref name="bester"> {{en}} Bester, C. [http://www.flmnh.ufl.edu/fish/Gallery/Descript/CookiecutterShark/CookiecutterShark.html ''Biological Profiles: Cookiecutter Shark'']. Florida Museum of Natural History Ichthyology Department.</ref>
<ref name="bester"> {{en}} Bester, C. [http://www.flmnh.ufl.edu/fish/Gallery/Descript/CookiecutterShark/CookiecutterShark.html ''Biological Profiles: Cookiecutter Shark'']. Florida Museum of Natural History Ichthyology Department.</ref>
<ref name="jones">{{article |langue=en |nom1=Jones |prénom1=E.C. |année=1971 |titre=''Isistius brasiliensis'', a Squaloid Shark, the Probable Cause of Crater Wounds on Fishes and Cetaceans |journal=Fisheries Bulletin |volume=69 |pages=791&ndash;798 |url=http://swfsc.noaa.gov/publications/CR/1971/7116.PDF}}</ref>
<ref name="compagno">{{ouvrage |langue=en |nom1=Compagno |prénom1=L.J.V. |année=1984 |titre=Sharks of the World: An Annotated and Illustrated Catalogue of Shark Species Known to Date |lieu=Rome |éditeur=Food and Agricultural Organization |isbn=9251013845 |pages=93&ndash;95}}</ref>
<ref name="Biogeography">{{journal |langue=en |titre=Biogeography of ''Isistius brasiliensis'' in the north-eastern Atlantic, inferred from crater wounds on swordfish (''Xiphias gladius'') |nom1=Muñoz-Chápuli |prénom1=R. |nom2=Rey Salgado |prénom2=J.C. |prénom3=J. M. |nom3=De La Serna |journal=Journal of the Marine Biological Association of the United Kingdom |année=1988 |volume=68 |pages=315&ndash;321 |doi=10.1017/S0025315400052218}}</ref>
<ref name="fishbase">{{FishBase espèce|696|''Isistius brasiliensis'' (Quoy and Gaimard, 1824) }}</ref>
<ref name="widder">{{journal |langue=en |titre=A predatory use of counterillumination by the squaloid shark, ''Isistius brasiliensis'' |nom1=Widder|prénom1=E.A. |journal=Environmental Biology of Fishes |volume=53 |pages=267&ndash;273 |date=novembre 1998 |doi=10.1023/A:1007498915860}}</ref>
<ref name="strasburg">{{journal |langue=en |titre=The Diet and Dentition of ''Isistius brasiliensis'', with Remarks on Tooth Replacement in Other Sharks |url=http://jstor.org/stable/1441272 |nom1=WidderStrasburg |prénom1=D.W. |journal=Copeia |volume=1963 |numéro=1 |date=30 mars 1963 |pages=33&ndash;40 |doi=10.2307/1441272}}</ref>
<ref name="retinal">{{journal |langue=en |titre=Retinal ganglion cell topography in elasmobranchs |nom1=Bozzano |prénom1=A. and |prénom2=S.P. |nom2=Collin |journal=Brain Behavior and Evolution |volume=55 |numéro=4 |pages=191&ndash;208 |date=avril 2000 |doi=10.1159/000006652}}</ref>
<ref name="Fish Physiology">{{ouvrage |langue=en |titre=Fish Physiology: Reproduction and Growth, Bioluminescence, Pigments, and Poisons |nom1=Hoar |prénom1=W.S. |nom2=Randall|prénom2=D.J. |prénom3=F.P. |nom3=Conte |éditeur=Academic Press |année=1969 |isbn=0123504031 |page=385}}</ref>
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<ref name="martin2">Martin, R.A. [http://www.elasmo-research.org/education/topics/p_cookie_bite.htm Attacked by a Dogfish]. ReefQuest Centre for Shark Research. Consulté le 23 octobre 2010.</ref>
<ref name="gadig and gomes">{{journal |langue=en |titre=First report on embryos of ''Isistius brasiliensis'' |nom1=Gadig |prénom1=O.B.F. |nom2=U.L. |prénom2=Gomes |journal=Journal of Fish Biology |langue=en |volume=60 |numéro=5 |pages=1322&ndash;1325 |date=mai 2002 |doi=10.1111/j.1095-8649.2002.tb01723.x}}</ref>
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== Voir aussi ==
== Voir aussi ==
=== Références taxinomiques ===
=== Références taxinomiques ===

Version du 23 octobre 2010 à 23:44

Le squalelet féroce (Isistius brasiliensis) est une espèce de petit requin appartenant à la famille des dalatiidés. Ce requin vit dans les eaux océaniques du monde entier, en particulier près des îles, et peut aller jusqu'à 3700 m de profondeur. Il migre verticalement tous les jours, s'approchant de la surface au crépuscule et redescendant à l'aube.

Le squalelet féroce atteint seulement 42 à 56 cm de longueur, il a un long corps cylindrique avec un museau court, émoussé, de grands yeux, deux petites nageoires dorsales sans épines et une grande nageoire caudale. Il est de couleur brun foncé, avec des photophores sur sa face ventrale, sauf autour de son cou et de ses fentes branchiales.

Son nom se réfère à ses habitudes alimentaires qui consistent à prélever des rondelles, comme un emporte-pièce, de grands animaux marins. Les marques faites par des squalelets féroces ont été trouvées sur une grande variété de mammifères et de poissons, ainsi que sur des sous-marins, des câbles sous-marins, et même sur des corps humains. Il consomme aussi des proies entières relativement petites comme les calmars. Le squalelet féroce a des adaptations pour rester dans la colonne d'eau et probablement compter sur la discrétion et de subterfuges pour capturer des proies plus actives. Son col noir semble imiter la silhouette d'un petit poisson, tandis que le reste de son corps se fond dans la lumière solaire grace à ses son photophores ventraux. Quand un prédateur s'approche du leurre, le requin se jette avec ses lèvres suceuses et prélève soigneusement un morceau de chaire, à l'aide de ses dents inférieures acérées. Cette espèce se déplace parfois en banc.

Bien que rarement rencontré en raison de son habitat océanique, on relève une poignée d'attaques documentées envers l'homme. Néanmoins, ce requin n'est pas considéré comme dangereux. L'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) a inscrit le squalelet féroce sous Préoccupation mineure, car il est largement distribué, n'a aucune valeur commerciale et n'est pas particulièrement sensible à la pêche.

Taxinomie

Les naturalistes français Jean René Constant Quoy et Joseph Paul Gaimard ont décrit le squalelet féroce au cours du voyage d'exploration de 1817-1820 de la corvette Uranie, en lui donnant le nom de Scymnus brasiliensis parce que le spécimen type a été capturé au large du Brésil. En 1824, sa description fut publiée dans le cadre du Voyage Autour du Monde ... sur les corvettes de SM l'Uranie et la Physicienne, le rapport de Louis de Freycinet de 13 volume sur le voyage en terre australe [1],[2]. En 1865, l'ichtyologiste américain Theodore Nicholas Gill a inventé un nouveau genre pour cette espèce, Isistius en référence à Isis, la déesse égyptienne de la lumière[3],[4].

L'un des premiers contes de les plaies laissées par le squalelet féroce sur divers animaux, est en samoan ancienne légende, qui a jugé que l'ATU (listao) entrant dans la baie Palauli laisserait derrière lui des morceaux de leur chair comme un sacrifice à Tautunu, le chef de la communauté. Au cours des siècles plus tard, diverses autres explications pour les blessures ont été avancées, y compris les lamproies, les bactéries et les parasites d'invertébrés. En 1971, Everet Jones de l'US Bureau de la pêche commerciale (l'ancêtre de la National Marine Fisheries Service) a découvert que le squalelet féroce était responsable de ces blessures[5],[6].

Distribution et habitat

Le squalelet féroce se rencontre dans toutes les eaux tropicales et tempérées des bassins océaniques, il est plus fréquent entre les latitudes 20 ° N et 20 ° S, où la température de l'eau de surface est à 18-26 ° C. Dans l'Atlantique, il a été signalé au large des Bahamas, du Cap-Vert, de la Guinée, de la Sierra Leone, mais également au sud de l'Angola, à l'Est l'Afrique du Sud à l'Est, à l'île d'Ascension dans le sud et au sud du Brésil. Dans la région Indo-Pacifique, il a été aperçu de l'île Maurice à la Nouvelle-Guinée, en Australie et en Nouvelle-Zélande, y compris la Tasmanie et l'île de Lord Howe, ainsi qu'à l'extérieur du Japon. Dans le Pacifique central et oriental, il vit au nord des Fidji aux îles Hawaii, et à l'est de l'archipel des Galápagos, de Île de Pâques et les îles Guadalupe. Les lésions fraîches observées sur les mammifères marins donnent à penser que ce requin peut aller aussi loin que la Californie, pendant les périodes chaudes[6],[3].

Sur la base de relevés de captures, ce requin exécute une migration verticale nycthémérale de 3 km dans chaque sens. Il passe la journée à une profondeur de 1 000 m à 3 700 m, et la nuit, il monte dans la colonne d'eau, restant en général à 85 m, mais il s'aventure parfois près de la surface. Le squalelet féroce est plus tolérant à de faibles concentrations d'oxygène dissous que les requins des genres cousins Euprotomicrus et Squaliolus[6]. Il se trouve fréquemment près des îles, peut-être à des fins reproductives ou parce qu'il suit les groupes de grandes proies[6]. Dans le nord de l'Atlantique, la plupart des adultes se situent entre 11 ° N et 16 ° N, tandis que les jeunes se trouvent à des latitudes inférieures et supérieures respectivement[7]. Il n'existe aucune preuve de ségrégation sexuelle chez cette espèce[8].

Description

Le squalelet féroce a une petite tête arrondie avec de grands yeux placés en avant et une bouche transversale.

Le squalelet féroce a un corps allongé, en forme de cigare, avec un petit museau arrondi et renflé. Les narines forment un petit volet de peau à l'avant du museau. Ses yeux verts, gros et ovales, sont placés en avant de la tête, mais il ne possède pas une vaste vision binoculaire. Derrière les yeux se trouve de grands stigmates, placés sur la surface supérieure de la tête. La bouche est courte, formant une ligne presque transversale et est entourée par des lèvres élargies et charnues. Sa mâchoire supérieure possède 30 à 37 lignes de dents et 25 à 31 lignes dans la mâchoire inférieure, ce qui augmente avec la taille corporelle. Les dents supérieures et inférieures sont très différentes : les dents du haut sont petites, étroites et verticales, elles s'amenuisent en canine aux bords lisses. Les dents du bas sont également à bords lisses, mais beaucoup plus grandes et plus larges, en forme de couteau, rattachées à leurs bases pour former une seule scie de pointes. Les cinq paires de fentes branchiales sont petites[2],[3],[6].

Les nageoires pectorales sont courtes et à peu près de forme trapézoïdale. Deux épines dorsales sont placées loin en arrière sur le corps, la première se situe juste avant les nageoires pelviennes et la seconde est juste derrière. La deuxième nageoire dorsale est légèrement plus grande que la première, mais les nageoires pelviennes sont plus grande que celles-ci. La nageoire anale est absente. La nageoire caudale est large, avec le lobe inférieur presque aussi grand que le supérieur, qui a une encoche en vue ventrale[2],[6]. Les denticules dermiques sont carrés et aplatis, avec une légère concavité centrale et les coins soulevés. Le squalelet féroce est de couleur brun chocolat, devenant subtilement pâle en dessous, et il possède un sombre «collier» qui entoure la région des branchies[3]. Les nageoires ont une marge translucide, à l'exception de la nageoire caudale qui a une marge plus sombre. Les organes produisant de la lumière, appelés photophores, couvrent densément toute la face ventrale, sauf pour le collier, et produisent une lueur vert vif. La longueur maximale enregistrée pour cette espèce est de 42 cm pour les mâles et 56 cm pour les femelles[9].

Biologie et écologie

Ses lèvres suceuses et ses grandes dents inférieures sont des adaptations pour son mode de vie parasitaire.

Bien connu pour ses bouchées de tissus de mammifères marins et de grands poissons, le squalelet féroce est considéré comme un requin ectoparasite facultatif car il ingère entièrement des proies plus petites. Il possède une large ouverture de la bouche et un morceau costaud, grâce à son cartilage labial et du crâne fortement calcifié[10]. Avec ses petites nageoires et ses petits muscles, ce requin chasse en embuscade, puisqu'il passe le plus clair de son temps en position stationnaire dans la colonne d'eau[6],[11]. Pour maintenir une flottabilité neutre, son foie, qui peut comprendre environ 35% de son poids, est riche en lipides à basse densité. Comme cette espèce a une densité squelettique plus élevée que Euprotomicrus ou Squaliolus, le cœlome et le foie sont proportionnellement beaucoup plus grands et leur teneur en huile plus élevée[6],[12]. Sa grande nageoire caudale permet une brusque rafale de vitesse pour attraper plus vite les proies qui passent à sa portée[12].

Le squalelet féroce remplace régulièrement ses dents, comme d'autres requins, mais il ne perd pas ses dents une par une, mais des rangées entières. On a calculé qu'un individu de 14 cm de longueur aura perdu 15 ensembles de dents inférieures au moment où il atteindra 50 cm de long, pour un total de 435 à 465 dents[8]. Cela représente un puisement important dans ses ressources et c'est probablement pourquoi les anciens ensembles de dents sont avalées, de sorte que le requin peut recycler le calcium. Contrairement à d'autres requins, la rétine du squalelet féroce possède des cellules ganglionnaires concentrées dans une zone concentrique plutôt que dans un plan horizontal qui zèbrent le champ visuel, ce qui peut aider à se concentrer sur des proies devant le requin[13].

Ce requin est capable de se déplacer en banc, ce qui peut accroître l'efficacité de son attrait (voir ci-dessous), ainsi que décourager les attaques de ses prédateurs[10].

Bioluminescence

Le collier noir du squalelet féroce est censé agir comme un leurre.

La luminescence verte du squalelet féroce est la plus forte connue de tous les requins, et peut persister pendant trois heures hors de l'eau[12],[14]. Les photophores, sur sa face ventrale, servent à perturber sa silhouette par le bas en faisant correspondre la lumière descendant, une stratégie connue sous le nom de « contre-illumination » qui est commune parmi les organismes bioluminescents de la zone mésopélagique. Les photophores individuels sont installés autour de la denticule et sont assez petits pour qu'ils ne puissent pas être distinguées à l'œil nu, ce qui suggère qu'ils ont évolué de façon à tromper les animaux dont l'acuité visuelle est élevée[10].

Mis à part le dessous brillant, le col non-luminescent, situé autour de la gorge, pourrait servir de leurre en imitant la silhouette d'un petit poisson vu d'en bas. La tentation serait alors multipliée lorsqu'il se déplace en banc. Si le collier ne fonctionne de cette façon, le squalelet féroce serait le seul cas connu chez les organismes bioluminescents, dans lequel l'absence de lumière attire les proies, tandis que ses photophores servent à empêcher la détection par ses prédateurs[10],[11]. Comme le requin ne peut correspondre qu'à une gamme limitée d'intensités lumineuses, ses mouvements verticaux servent à préserver l'efficacité de son déguisement à travers les différents moments de journée et les conditions météorologiques[10].

Alimentation

La grande castagnole est l'une des nombreuses espèces parasitées par le squalelet féroce.

Pratiquement tous les types d'animaux océaniques de grande taille partage l'habitat du squalelet féroce : les cicatrices de ses morsures ont été trouvés sur la plupart des cétacés (y compris les marsouins, les dauphins, les globicéphales, les baleines à bec, les cachalots et les baleines à fanons), sur de nombreux pinnipèdes (y compris les otaries à fourrure, le léopard de mer, l'éléphants de mer et les dugongs) mais aussi sur les autres requins (y compris le requin bleu, le requin lutin, et le requin grande gueule), sur des raies d'eau profonde et sur des poissons osseux (y compris les marlins, les thons, les dorades tropicales, les vérins, les escolars, opah, et les castagnoles)[2],[12],[15].

Le squalelet féroce chasse et mange aussi régulièrement des calmars entiers, avec un manteau mesurant 15 à 30 cm de longueur, c'est à dire de taille comparable au requin lui-même. Ainsi que des gonostomatidés, des copépodes et d'autres proies de dimensions plus modestes[8].

Les attaques parasitaires du squalelet féroce laissent une plaie semblable à un cratère, avec une moyenne de 5 cm de diamètre et 7 cm de profondeur[16]. La prévalence de ces attaques peut être élevée : presque tous les adultes de dauphin à long bec au large d'Hawaï portent des cicatrices[17]. Les animaux malades ou affaiblis semblent être plus sensibles : dans l'ouest de l'Atlantique, des péponocéphales émaciés se sont échoués par dizaines avec de nombreuses plaies cicatrisées, alors que de telles blessures sont rares sur les cétacés non-émaciés. L'impact du parasitisme sur les espèces proies, en termes de ressources détournées de la croissance ou de la reproduction, est incertaine.

Le squalelet féroce présente un certain nombre de spécialisations de sa bouche et de son pharynx pour son mode de vie parasitaire. Le requin s'accroche d'abord à la surface du corps de sa proie en fermant ses stigmates tout en rétractant sa basihyal (langue) pour créer une pression négative[10],[12]. Ses lèvres suceuses assurent un joint étanche. Il mord alors, en utilisant sa mâchoire supérieure comme point d'ancrage tandis qu'il enfonce sa mâchoires inférieure dans l'épiderme de sa proie. Enfin, le requin se tord et tourne son corps pour effectuer une coupe circulaire, très probablement aidé par l'élan initial et subséquent de sa proie[10]. L'action des dents inférieures peut également être assistée par le va-et-vient des vibrations de la mâchoire, comme le mécanisme d'un couteau électrique[16]. Sa capacité à créer une forte aspiration dans sa bouche est probablement aussi utilisée pour la capture des proies plus petites, telles que les calmars[10].

Reproduction

Comme d'autres squales, le squalelet féroce est ovovivipare, les embryons sont munis d'un sac vitellin jusqu'à la naissance. Les femelles ont deux utérus fonctionnels et peuvent donner naissance à 6-12 petits par portée[2],[18]. Il s'agit d'un record : une femelle peut porter 9 embryons de 12,4 à 13,7 cm de longueur. S'ils étaient à proximité de la taille de la naissance, ils ont encore leur sac vitellin bien développé, ce qui suggère un faible taux d'absorption et une longue gestation. Les embryons ont une pigmentation brune, mais n'ont pas le collier noir ou la forte dentition des adultes. Le nouveau-né mesure 14 à 15 cm de longueur[18]. Les mâles atteignent leur maturité sexuelle à 36 cm et les femelles à 39 cm[2].

Relations avec l'homme

Un squalelet féroce capturé sur une palangre près d'Hawaii. On peut distinguer les grands stigmates situés derrière les yeux.

Privilégiant les eaux du large et donc rarement rencontrés par l'homme, le squalelet féroce n'est pas considéré comme très dangereux en raison de sa petite taille. Toutefois, il a été impliqué dans plusieurs attaques : dans un cas notable, une banc de squalelet féroce de 30 cm, avec une dentition émoussée, a attaqué un plongeur photographe pendant une plongée en mer. Des rapports similaires proviennent de survivants d'un naufrage, de petites morsures pendant la nuit. En mars 2009, Mike Spalding, résidant sur l'île Maui, a été mordu par un squalelet féroce en nageant dans le chenal Alenuihaha. Il y a au moins deux enregistrements de corps retrouvés dans l'eau avec des morsures post-mortem de squalelets féroces.

Durant les années 1970, plusieurs sous-marins de l'US Navy ont été contraints de revenir à la base pour des dommages causés par les morsures du squalelet féroce sur certaines bottes en néoprène de leurs dômes sonar AN/BQR-19, qui a provoqué des problèmes de transmission et des fuites. La possibilité qu'il s'agissait d'une arme ennemi inconnue a été suggérée avant que le requin soit identifié comme le coupable, et le problème fut résolu par l'installation de fibre de verre sur les dômes. Dans les années 1980, une trentaine de sous-marins de l'US Navy ont été endommagés par les morsures de squalelets féroces, principalement le câble électrique en caoutchouc sous gaine conduisant à la sonde de sondage, utilisé pour assurer la sécurité lors de remontées en surface dans les zones maritimes. Encore une fois, la solution consistait à appliquer un revêtement en fibre de verre. Des équipements océanographiques et des câbles de télécommunications ont également été endommagés par cette espèce.

Les dégâts infligés par les squalelets féroces sur les filets de pêche et les espèces économiquement importantes n'ont qu'un effet négatif mineur sur la pêche commerciale. Le requin lui-même est trop petit pour avoir une valeur halieutique et n'est que rarement pêché, de façon accidentelle, sur les palangres et les chaluts pélagiques et les filets à plancton. L'absence de menaces et importance des populations, couplée à une distribution mondiale, a conduit l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) à évaluer le squalelet féroce comme une préoccupation mineure.

Références

  1. J.R.C. Quoy et J.P. Gaimard, Voyage autour du Monde...exécuté sur les corvettes de L. M. "L'Uranie" et "La Physicienne," pendant les années 1817, 1818, 1819 et 1820, Paris, Freycinet, L, 1824–1825, 192–401, « Poissons. Chapter IX »
  2. a b c d e et f (en) D.A. Ebert, Sharks, Rays, and Chimaeras of California, University of California Press, , 73–75 (ISBN 0520234847)
  3. a b c et d (en) Bester, C. Biological Profiles: Cookiecutter Shark. Florida Museum of Natural History Ichthyology Department.
  4. (en) T.N. Gill, « Synopsis of the eastern American sharks », Proceedings of the Academy of Natural Sciences of Philadelphia, vol. 16, no 5,‎ , p. 258–265
  5. (en) E.C. Jones, « Isistius brasiliensis, a Squaloid Shark, the Probable Cause of Crater Wounds on Fishes and Cetaceans », Fisheries Bulletin, vol. 69,‎ , p. 791–798 (lire en ligne)
  6. a b c d e f g et h (en) L.J.V. Compagno, Sharks of the World: An Annotated and Illustrated Catalogue of Shark Species Known to Date, Rome, Food and Agricultural Organization, , 93–95 (ISBN 9251013845)
  7. Modèle:Journal
  8. a b et c Modèle:Journal
  9. (en + fr) Référence FishBase : espèce Isistius brasiliensis (Quoy and Gaimard, 1824) (+ traduction) (+ noms vernaculaires 1 & 2)
  10. a b c d e f g et h Modèle:Journal
  11. a et b (en) Milius, S. (August 1, 1998). "Glow-in-the-dark shark has killer smudge". Science News. Consulté le 23 octobre 2010.
  12. a b c d et e (en) Martin, R.A. Deep Sea: Cookiecutter Shark. ReefQuest Centre for Shark Research. Consulté le 23 octobre 2010.
  13. Modèle:Journal
  14. (en) W.S. Hoar, D.J. Randall et F.P. Conte, Fish Physiology: Reproduction and Growth, Bioluminescence, Pigments, and Poisons, Academic Press, (ISBN 0123504031), p. 385
  15. (en) Martin, R.A. Squaliformes: Dogfish Sharks. ReefQuest Centre for Shark Research. Consulté le 23 octobre 2010.
  16. a et b Martin, R.A. Attacked by a Dogfish. ReefQuest Centre for Shark Research. Consulté le 23 octobre 2010.
  17. (en) M.R. Heithaus, Biology of Sharks and Their Relatives, CRC Press, , 487–521 (ISBN 084931514X), « Predator-Prey Interactions »
  18. a et b Modèle:Journal

Voir aussi

Références taxinomiques

Liens externes

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