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Château de Madrid

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Château de Madrid
Image illustrative de l’article Château de Madrid
Le château de Madrid vers 1722.
Nom local Château de Boulogne, Château de faïence
Période ou style Renaissance française
Type Château
Architecte Girolamo della Robbia, Pierre Gadier, Gatien François, Philibert Delorme
Destination initiale Habitation
Coordonnées 48° 52′ 27″ nord, 2° 15′ 18″ est
Pays Drapeau de la France France
Région Île-de-France
Département Hauts-de-Seine
Commune Neuilly-sur-Seine
Géolocalisation sur la carte : France
(Voir situation sur carte : France)
Château de Madrid
Géolocalisation sur la carte : Hauts-de-Seine
(Voir situation sur carte : Hauts-de-Seine)
Château de Madrid

Le château de Madrid, d'abord appelé château de Boulogne, est une résidence royale bâtie dans le bois de Boulogne. Construit à partir de 1528[1] sur l'ordre du roi de France François Ier et achevé pour son fils Henri II, il est entièrement démoli à la fin du XVIIIe siècle. Il était situé sur l'actuelle commune de Neuilly-sur-Seine, à l'angle du boulevard du Commandant-Charcot et du boulevard Richard-Wallace, correspondant aujourd'hui à la porte de Madrid, tandis que les jardins s’étendaient jusqu'à la rue du Bois-de-Boulogne[2].

Panneau Histoire de Paris,
« Porte Maillot ».

Les travaux sont dirigés par le Florentin Girolamo della Robbia et les Tourangeaux Pierre Gadier et Gatien François (fils de Bastien, et petit-fils de Guillaume Regnault). On pense que François Ier prit personnellement part à la conception de ce chef-d'œuvre majeur de la Renaissance française. À partir de 1548, l'architecte Philibert Delorme dirige des travaux. Il est remplacé par Le Primatice en 1559, qui rappelle della Robbia. On considère que les travaux sont achevés entre 1568 et 1570[Note 1].

Le château de Madrid, d'après Androuet du Cerceau.

Il a souvent été rapporté que le château aurait été inspiré par l'Alcazar royal de Madrid (Espagne), d'où son nom. Si les deux édifices avaient en commun d'être édifiés en lisière d'une forêt à proximité d'une grande ville, et de comporter un corps de logis central allongé, flanqué de gros pavillons cubiques et entouré de loggias sur deux étages, la reconstruction du palais madrilène par Charles Quint (1537) est postérieure à celle du château du bois de Boulogne, ce qui rend l'hypothèse peu plausible.

Façade du château de Madrid au bois de Boulogne.

Le nom de Madrid pourrait cependant avoir une autre origine comme le rapporte, entre autres, l'historien Sauval. Le roi François Ier s'éclipsant discrètement au château de Boulogne, construit juste après son retour de captivité à Madrid à la suite de la défaite de Pavie, les courtisans prennent l'habitude, par dérision, de dire, quand ils ne voyaient plus le souverain, qu'il était à Madrid[3]. Son décor de carreaux émaillés, à la façon des azulejos espagnols, favorisant aussi cette dénomination. Peu à peu, le château de Boulogne prend le nom de Madrid, comme l'indique Androuet du Cerceau sur ses élévations : Boulongne dit Madril.

La disposition du plan viendrait de la villa de Boffalora, construite près de Busseto en Italie, par l'entourage de Cristoforo Solari au début du XVIe siècle. Ce parti-pris général s'additionne d'influences italiennes, avec la disposition en H de la partie centrale, et françaises, avec le dessin des pavillons cantonnés de tours et la distribution intérieure, qui s'inspire des exemples de Chenonceau et de Chambord, repris ensuite à La Muette et à Challeau.

Le château de Madrid. Gravure de Jacques Rigaud.

La célébrité du château tenait, notamment, au riche décor des terres cuites émaillées[4] (terracotta invetriata) en bas-relief dont Girolamo della Robbia avait recouvert la presque totalité des façades[5], et à la somptuosité du décor intérieur. Pour cette raison, il était également appelé le Château de faïence.

Le château fut l'une des résidences parisiennes privilégiées par Charles IX et Catherine de Médicis. Il est notamment au cœur des événements politiques qui précèdent le massacre de la Saint-Barthélemy durant l'été 1572. Délaissé par Henri III, il est habité par Marguerite de Valois à partir de son retour en grâce un peu avant de revenir à Paris en août 1605[6]. Louis XIII fréquente encore un peu cette demeure royale, notamment dans les années 1610[7].

Louis XIV n'y vient pas. Dès l'achèvement de Versailles, le château de Madrid n'a plus d'histoire politique. Par lettres patentes de Louis XIV, Jean Hindret y établit en 1656 la première manufacture de bas de soie au métier en France[8]. Elle compte 79 compagnons en 1672. Le château sert de logement à Fleuriau d'Armenonville, capitaine des gardes de la Muette et des chasses du bois de Boulogne, futur garde des Sceaux sous la Régence. En 1657, le château est déjà en fort mauvais état, « étant exposé à l'injure du temps, le vent et la pluie gastent tout et font tout tomber ». En 1666, la manufacture de bas de soie rend la vie à cette grande ruine, mais pour trop peu de temps[9]. Le monopole n'est pas respecté, avec la création d'autres manufactures de bas de soie à Lyon et Orange en 1662, puis à Nîmes, Montauban et Chambéry. Toutes ces manufactures rencontrent des difficultés en raison du manque d'ouvriers qualifiés et des guerres de Louis XIV[10].

À la veille de la Révolution, le château tombe en ruine. En 1787, un arrêt du Conseil du roi signé de Louis XVI ordonne qu'il soit vendu en vue d'être démoli, conjointement avec plusieurs autres domaines, dont le château de la Muette, le château de Vincennes et le château de Blois. Le château de Madrid est adjugé le à une société d'entrepreneurs de démolition qui le payent en assignats. Leroy, l'acquéreur, en vend les boiseries, les plombs et les terres cuites de Della Robbia mais ne parvient pas à l'abattre. Il abandonne alors l'entreprise et, le le remet en vente pour 34 000 livres et, avec les dépendances, 42 400 livres. Il ne trouve aucun acquéreur[11].

Sous la Restauration, le domaine est loti et le château disparaît progressivement. À sa place, s’élèvent alors une clinique, qui fait faillite, puis un haras et un restaurant[12]. Ce dernier est construit sur les communs de l'ancien château pour le divertissement des promeneurs du bois. Réaménagé sous le règne de Napoléon III, il est remplacé en 1909 par un bâtiment de style néo-Renaissance qui accueille un hôtel-restaurant, reconverti en logements dans les années 1950[13].

De nos jours, il ne subsiste plus du château de Madrid qu'un chapiteau de pierre exposé au château d'Écouen et trois fragments du décor de céramique émaillée (blanc, violet et vert) de Della Robbia conservés dans les réserves du musée Carnavalet[14] et du musée national de céramique à Sèvres.

Détails intérieurs du château de Madrid

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Bibliographie

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  • Fernand Bournon : Villiers-la-Garenne et Neuilly, les Ternes, château de Madrid, la porte Maillot, Bagatelle, Sablonville, Sainte-James
  • Léon Emmanuel S.J. Laborde, Le château du Bois de Boulogne, dit Château de Madrid, chez Dumoulin, Paris, 1855
  • (s. dir.), Bertrand Gille : Histoire des techniques, Gallimard, coll. « La Pléiade », Paris, 1978 (ISBN 978-2-07-010881-7)
  • Monique Châtenet, Le château de Madrid au bois de Boulogne, Éditions A & J Picard, Collection De Architectura, Paris, 1987 (ISBN 2-7084-0336-2)
  • Monique Chatenet, Florian Meunier et Alain Prévet, Le château de faïence de François Ier, Les terres cuites émaillées de Girolamo della Robbia au château de Madrid (bois de Boulogne), Bulletin archéologique no 36, Paris, CTHS, 2012, (ISBN 978-2-7355-0769-6)
  • Alberto Faliva, Giuseppe Dattaro et le petit palais de Marmirolo, Francesco Dattaro et le château de Madrid : étude des relations franco-italiennes autour de 1530-1550., dissertation CESR Tours, 2004
  • Alberto Faliva, Francesco e Giuseppe Dattaro. La palazzina del Bosco e altre opere, Cremona, 2003
  • Alberto Faliva, Alain Erlande-Brandenburg, Robert J. Knecht, Richard Ingersoll, Aurora Scotti Tosini, David Ekserdjian, Renaissance franco-Italienne. Serlio, Du Cerceau et les Dattaro, Cremona, 2005
  • Alberto Faliva, Sebastiano Serlio e l'Ordine Composito dei Romani Antichi, Bollettino Ingegneri, Firenze, numéro 12, 2006
  • Alberto Faliva, Jacopo Sansovino e altri dodici casi. Un altro medioevo (questa volta rinascimentale), Bollettino Ingegneri, Firenze, numéro 11, 2007
  • Henri Corbel, Petite histoire de Neuilly-sur-Seine, Paris, Le Livre d'histoire, coll. « Monographies des villes et villages de France », , 216 p. (ISBN 2-84435-133-6) Document utilisé pour la rédaction de l’article

Notes et références

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Références

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  1. Lettres patentes du 28 juillet 1528
  2. à Neuilly-sur-Seine (à ne pas confondre avec la rue du Bois-de-Boulogne située à Paris).
  3. René Sordes, Histoire de Suresnes. Des origines à 1945, édité avec la Société historique de Suresnes, avec le concours de la ville de Suresnes, 1965, p. 107.
  4. spécialité des Della Robbia
  5. Trente fragments de céramiques sont conservés au musée Carnavalet et trois à Sèvres, au Musée national de Céramique [1]
  6. Jean-Pierre Babelon, Henri IV, Paris, Fayard, 1982, p. 873
  7. Charles de Baschi, marquis d'Aubenay, Itinéraire royal depuis et compris Louis VII jusqu'à Louis XIV inclusivement, Paris, Hersant, 1759, 1 vol. (Consultable sur Google Books)
  8. Bertrand Gille, Histoire des techniques
  9. Correspondance administr. de Louis XIV, t. III, p. 788.
  10. Anne-Marie Piuz et Liliane Mottu-Weber, L'économie genevoise, de la Réforme à la fin de l'Ancien Régime : XVIe – XVIIIe siècles, Genève, Georg / Société d'histoire et d'archéologie de Genève, , 668 p. (ISBN 2-8257-0422-9, lire en ligne), p. 450.
  11. Jean Corday, Affiches révolutionnaires, in le Bibliophile, troisième année, no 1, 1933, p. 40
  12. De Laborde, Le château du Bois de Boulogne, dit château de Madrid, Paris, 1855, cité par Jean Corday, op. cit., p. 40-41.
  13. « Château de Madrid, 1919 », vergue.com, 20 octobre 2013, mise à jour le 18 octobre 2014.
  14. Le catalogue complet des fragments conservés du château de Madrid, ainsi que la liste exhaustive de ses représentations, a été publié en 2012 en rapport avec les relevés effectués avant 1866 par l'architecte Victor Parmentier et conservés à la bibliothèque historique de la Ville de Paris (voir la bibliographie : Chatenet, Meunier et Prévet). Notons que ce qui a été présenté comme une découverte en 2011 par les conservateurs, n'en était pas une puisque les fragments étaient déjà présentés dans le no 1 de la revue Le Bibliophile en 1933 (p. 40)

Liens externes

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