Utilisateur:Lyrono/Promesses de non-élargissement de l'OTAN à l'est

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Les promesses de non-élargissement l'OTAN à l'Est fait référence à des interprétations débattues de déclarations faites par des dirigeants occidentaux à leurs homologues soviétiques entre 1990 et 1991, lors d'une série de réunions multipartites pour planifier la sécurité de l'Europe à la sortie de la Guerre Froide. Certains spécialistes interprètent ces déclarations comme des engagements, tandis que d'autres critiquent ces interprétations comme des incompréhensions quant au contexte et à la teneur de ces discussions.

Longtemps évoquée sans trace écrite, puis attestée par la déclassification de documents diplomatiques nationaux en 2017[P 1], elle fut un objet de tensions entre Russie et Occident dans les années 2000 et 2010. Elle devient notamment, durant l'Invasion de l'Ukraine par la Russie en 2022, un enjeu de lecture du conflit visant à redistribuer une part des responsabilités de la guerre sur les puissances occidentales, qui auraient « provoquées » la Russie en trahissant leur promesse originelle, une justification que tous les spécialistes contestent.

Contexte historique[modifier | modifier le code]

Dislocation de l'Union soviétique[modifier | modifier le code]

La promesse de non-élargissement à l'est s'est faite dans le contexte de la dislocation de l'URSS. Élu secrétaire général du Politburo en 1985, Mikhaïl Gorbatchev met en place une politique de libéralisation qui favorise les aspirations à l'émancipation des pays Soviétiques. Celles-ci prennent rapidement la forme de mouvements nationalistes, générant des conflits ethniques au sein de l'Union soviétique.

L'aboutissement de cette tendance est la chute du mur de Berlin le , suivi de la tenue d'élections libres dans plusieurs États soviétiques, entre le 24 février et 11 novembre 1990 (Lituanie, Moldavie, Estonie, Lettonie, Arménie), élections que le Parti communiste de l'Union soviétique perd toutes. Le , le pacte de Varsovie est dissolu.

Le , Boris Eltsine, candidat critique de la « dictature du centre » et favorable à l'économie de marché, est élu président du Soviet suprême de la République socialiste fédérative soviétique de Russie. Entre août et décembre 1991, dix républiques de l'Union soviétique (dont l'Ukraine) déclarent leur indépendance.

Le , Gorbatchev démissionne de son poste de président de l'URSS dans un discours télévisé. Dans la soirée du à 19 h 32, après le départ de Gorbatchev du Kremlin, le drapeau soviétique est baissé pour la dernière fois, marquant symboliquement la fin de l’Union soviétique et la renaissance de la nation russe.

Situation de l'OTAN en 1989[modifier | modifier le code]

L'OTAN en 1989 est composé de deux pays américains (États-Unis, Canada), de nombreux pays européens (Allemagne de l'ouest, Belgique, Danemark, Espagne, Grèce, Islande, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Norvège, Portugal, Royaume-Uni) et d'un pays du Moyen-Orient (Turquie). À part l'Espagne (entrée dans l'alliance en 1982), tous ces pays l'ont intégrée entre 1949 et 1955. La France, quant à elle, a quitté le commandement intégré de l'organisation en 1966, tout en conservant des relations étroites avec elle (elle le réintégrera en 2009).

La légitimité de l'OTAN, à cette époque, est relativement fragilisée par la démocratisation en cours dans les pays de l'est, qui remet en cause une dialectique d'opposition nette entre les deux blocs[A 4] (la fin du pacte du Varsovie n'étant, en 1989, pas encore à l'ordre du jour). L'alliance cherche alors à se redéfinir et à réinventer ses relations avec l'est, comme en témoigne les déclarations du sommet de l'OTAN à Londres en juillet 1990 (« Plus que jamais, l'Alliance doit susciter le changement. Nous pouvons aider à l'édification des structures d'une Europe plus unie, en mettant au service de la sécurité et de la stabilité la force que nous donne notre foi commune dans la démocratie, le respect des droits de l'individu et le règlement pacifique des différends »[P 2]).

Les déclarations des Alliés aux Soviétiques[modifier | modifier le code]

De nouvelles archives déclassifiées des décennies plus tard nous permettent de mieux appréhender le contenu et le contexte des réunions, durant lesquelles auraient été faites des promesses selon les partisans.[P 3],[A 5]

Déclarations faites à Gorbatchev[modifier | modifier le code]

Ces déclarations adviennent après la chute du mur de Berlin. On peut en identifier une première occurrence le 31 janvier 1990, quand le ministre ouest-allemand des Affaires étrangères, Hans-Dietrich Genscher, fait un discours en Bavière sur la réunification allemande. Il y affirme que « les changements en Europe de l’Est et le processus de réunification ne doivent pas aller à l’encontre des intérêts sécuritaires de l’Union soviétique »[A 6], et que l'OTAN doit exclure « d’étendre ses territoires vers l’Est, en s’approchant des frontières soviétiques »[J 1].

L'une des déclarations qui est souvent reprises par les partisans de promesses a cependant lieu quelques jours plus tard à Moscou, le 9 février 1990, quand Mikhaïl Gorbatchev rencontre le secrétaire d’État américain James Baker pour des discussions portant sur le futur statut l'Allemagne réunifiée[A 4]. Gorbatchev affirme alors qu' « il va sans dire qu’un élargissement de la zone OTAN n’est pas acceptable »[A 4],[J 2]. Face aux inquiétudes de son interlocuteur, James Baker confirme à trois reprises que « la juridiction militaire actuelle de l’OTAN ne s’étendra pas d’un pouce vers l’est. »[J 2].

Le 10 février 1990, Elmut Kohl, chancelier allemand, fait part de la même réflexion à Gorbatchev : « Nous pensons que l’OTAN ne devrait pas élargir sa portée [...]. Nous devons trouver une résolution raisonnable. Je comprends bien les intérêts de l’Union soviétique en matière de sécurité »[J 2].

Le 18 mai 1990, une nouvelle rencontre entre Mikhaïl Gorbatchev et James Baker témoigne du souci partagé de trouver un nouveau rôle à l'OTAN, dont la légitimité est questionnée par la libéralisation en cours de l'Union soviétique. Gorbatchev, lors de cette rencontre, déclare même : « Vous dites que l’OTAN n’est pas dirigée contre nous, qu’il s’agit seulement d’une structure de sécurité qui s’adapte à la nouvelle réalité. Nous allons donc proposer de la rejoindre. »[J 2]

Le 12 septembre 1990, la réunification de l'Allemagne, qui fut l'objet de ces pourparlers, est actée par la signature d'un traité à Moscou. On y retrouve une réponse aux préoccupations de Gorbatchev concernant l'extension de l'OTAN en Allemagne de l'Est (« Des forces armées et des armes nucléaires ou des vecteurs d’armes nucléaires étrangers ne seront pas stationnés dans cette partie de l’Allemagne et n’y seront pas déployés »[P 4]), mais rien concernant le reste des pays soviétiques.

Le 5 et 6 juillet 1990, en ouverture du sommet de l'OTAN à Londres, son secrétaire Manfred Wörner déclare : « La Guerre froide appartient désormais au passé. Laissant derrière elle une période d'affrontement, notre Alliance s'engage sur la voie de la coopération ». La déclaration qui résulte du sommet affirme que « L'Europe est entrée dans une ère nouvelle. […] Les peuples d'Europe déterminent leur propre destin. Il font le choix de la liberté, du libéralisme économique, de la paix. Ils font le choix d'une Europe entière et libre. Il faut donc que notre Alliance s'adapte à la situation, et elle ne manquera pas de le faire »[P 2]. À l'issue du sommet, le président américain envoie un message à Gorbatchev : « Il y a quelques heures, nous avons émis une déclaration qui promet la transformation de l’Alliance dans chaque aspect de son travail et, surtout, dans sa relation avec l’Union soviétique. Quand vous lisez la déclaration de l’OTAN, je veux que vous sachiez qu’elle a été rédigée avec vous particulièrement à l’esprit… »[A 4].

Le 5 mars 1991, alors que les pays du pacte de Varsovie viennent d'en annoncer leur retrait prochain, le premier ministre britannique John Major rencontre le président Gorbatchev et Marshal Dmitry Yazov, ministre de la défense soviétique, à Moscou. Rodric Braithwaite, l'ambassadeur britannique à Moscou, rapporte alors dans son journal personnel que John Major aurait assuré à Gorbatchev, qui lui faisait part de ses préoccupations, que « nous ne parlons pas du renforcement de l’OTAN »[P 1]. À Marshal Dmitry Yazov, qui s’inquiétait de l'intérêt des dirigeants de l'est pour une possible adhésion à l'alliance atlantique, Braithwaite aurait répondu que « rien de tel ne se produira »[P 1].

(À RETRAVAILLER) À cet égard, la formule du secrétaire d'État américain James Baker disant que « la juridiction militaire actuelle de l’OTAN ne s’étendra pas d’un pouce vers l’est » est l'une des plus fréquemment citée[J 2]. Une note secrète des services britanniques déclassifiée et découverte par le chercheur américain en politologie Joshua Shifrinson en février 2022 vient préciser cette formule, avec le représentant allemand, Jürgen Chrobog, déclarant lors d'une réunion quadripartite des ministres des affaires étrangères américains, britannique, français et allemand le à Bonn : « Lors des négociations “2+4”, nous avons clairement indiqué que nous n’étendrions pas l’Otan au-delà de l’Elbe. Nous ne pouvons donc pas proposer à la Pologne et aux autres d’adhérer à l’Otan. » Ce même document clarifie plus loin qu'il s'agit plus précisément de la rivière Oder[P 5],[J 3],[J 4]. Par ailleurs, le représentant américain Raymond G. H. Seitz avait déclaré : « Nous avons clairement fait savoir à l'Union soviétique — dans les pourparlers deux plus quatre et ainsi que dans d'autres pourparlers — que nous ne profiterons pas du retrait des troupes soviétiques d'Europe de l'Est. [...] L'OTAN ne s'étendra ni formellement ni officieusement vers l'est[P 5],[J 5]. » En effet, le document montre que les délégations britannique, américaine avec James Baker, allemande avec Hans-Dietrich Genscher et française avec Roland Dumas ont toutes convenu avec la délégation soviétique que l'adhésion à l'OTAN des pays d'Europe de l'Est était « inacceptable »[P 5]. Néanmoins, aucun accord écrit qui exclurait une expansion de l'OTAN vers l'Est n'a été conclu avec l'Union soviétique[P 5],[J 6],[P 6]. L'implication de ces engagements politiques est sujet à différentes interprétations[J 6], dès la sortie de réunion[J 3]. Pour Gensher et Dumas, respectivement ministres des affaires étrangères allemand et français présents à la réunion, l'expansion de l'OTAN à l'Est « irait à l'encontre de l'esprit des ententes de 1990 »[J 3],[J 7]. Dans le même temps, au retour de la réunion au Kremlin, une note d'une communication entre Genscher et Baker montre qu'ils considéraient encore ouverte la possibilité d'une expansion mais « qu'elle ne devait pas être évoquée pour le moment »[A 5],[J 3].

Après la chute de l'URSS (de 1991 à nos jours) : collaboration étroite avec l'OTAN via l'amitié Clinton-Eltsine, opposition orale à son expansion[modifier | modifier le code]

Au sommet de Budapest de décembre 1994, Boris Eltsine réaffirme ainsi l'opposition farouche de la Russie au projet américain d'élargir l'OTAN aux pays d'Europe de l'Est : « Pourquoi semez-vous les graines de la méfiance ? » demande-t-il dans un discours aux 16 dirigeants de l'OTAN, ajoutant que « l’Europe court le risque de plonger dans une paix froide »[J 8].

Le 10 mai 1995, dans une rencontre privée en tête-à-tête avec le président Bill Clinton (alors venu à Moscou célébrer le 50e anniversaire de la défaite de l’Allemagne nazie), Boris Elstine fait part de son émotion face à l'élargissement annoncé de l'OTAN, « ce nouvel encerclement » dans lequel il ne voit « rien d’autre qu’une humiliation ». Il ajoute : « Pour moi, accepter que les frontières de l’Otan s’étendent jusqu’à celles de la Russie constituerait de ma part une trahison du peuple russe »[J 1],[P 7]. Il en accepte néanmoins l'idée, le président américain lui promettant en contrepartie une aide économique conséquente, ainsi que de rejoindre le G7[J 1].

En 1999, de nouveaux pays intègrent l'OTAN, qui sont d'anciens pays du pacte de Varsovie : République Tchèque, Hongrie, et Pologne. Evgueni Primakov, le ministre des affaires étrangères russe, condamne alors une « faute majeure, peut-être la plus grosse depuis la fin de la seconde guerre mondiale »[J 9].

En 2004, se sont les pays baltes (Lituanie, Estonie et Lettonie), ayant tous une frontière commune avec la Russie (puisque la Lituanie borde l'enclave de Kaliningrad), ainsi que d'autres pays anciennement soviétiques (Roumanie, Slovaquie et Slovénie) qui intègrent à leur tour l'OTAN.

Vladimir Poutine, après quelques années marquées par des tentatives de rapprochement avec l'ouest, prononce à la 43e édition de la Conférence de Munich sur la sécurité, le 10 février 2007, un discours sans appel sur l'élargissement de l'OTAN : « Il me semble évident que l’élargissement de l’Otan n’a rien à voir avec la modernisation de l’alliance ni avec la sécurité en Europe. Au contraire, c’est une provocation qui sape la confiance mutuelle et nous pouvons légitimement nous demander contre qui cet élargissement est dirigé »[J 10]. À cette occasion, il semble plus directement référer à la « promesse trahie » (au prix de ce qui serait alors une erreur dans la chronologie des faits) : « Que sont devenues les assurances données par nos partenaires occidentaux après la dissolution du Pacte de Varsovie ? Où sont ces assurances ? On l'a oublié. »[P 8].

Le 18 mars 2014, dans un discours fait à l'occasion de l'annexion de la Crimée, certaines déclarations de Poutine référent encore implicitement à cette promesse : « Ils nous ont menti à plusieurs reprises, ils ont pris des décisions dans notre dos, ils nous ont placés devant des faits accomplis. Cela s’est produit avec l’expansion de l’OTAN vers l’Est, ainsi qu’avec le déploiement d’infrastructures militaires à nos frontières. »[P 9]

ll y fera ensuite référence sans la moindre ambiguïté, comme lors d'une conférence de presse du 1er février 2022, dans le contexte des tensions diplomatiques précédant l'invasion de l'Ukraine : « Je voudrais expliquer une fois de plus la logique de notre comportement et de nos propositions : comme on le sait, nous avons reçu des promesses selon lesquelles l’Otan ne déplacerait “pas d’un pouce” ses infrastructures vers l’Est, et cela est bien connu »[J 4].

Du point de vue d'Olivier Schmitt (professeur associé au Center for War Studies, University of Southern Denmark), cette « promesse trahie », à laquelle le pouvoir russe réfère de plus en plus fréquemment, « fonctionne comme un motif récurrent servant à alimenter un fantasme d’encerclement », de la Russie, et comme un argument des « admirateurs du régime russe pour justifier son agression en Ukraine, comme si l’OTAN n’avait jamais cessé de vouloir détruire la Russie »[A 7].

Débat académique[modifier | modifier le code]

Depuis la critique du chercheur britannique MccGwyre publiée en 1998 mentionnant l'existence de ces promesses[A 8],[évasif] la question a faite naitre de nombreux débats académiques passionnés sur le sujet, rythmés au fil des années par la découverte de nouvelles archives apportant petit à petit des mémorandums et notes permettant de mieux apprécier le contenu et le contexte de ces réunions occidentaux et soviétiques.

La question a été analysée sous plusieurs aspects: moraux, politiques, historiques et juridiques.

Contestations de Mikhaïl Gorbatchev[modifier | modifier le code]

Mikhaïl Gorbatchev, le dernier dirigeant soviétique, tout en se montrant amer du « manque de volonté » des Occidentaux de « prendre en considération le point de vue de la Russie », nie qu'il y ait eu des discussions à ce sujet lors des réunions 2+4. Son ministre Shevarnadze a aussi déclaré de même.[réf. nécessaire]

Absence de traité signé[modifier | modifier le code]

La valeur diplomatique d'une telle promesse est contestée au sens où, bien que formulée à plusieurs reprise au cours de pourparlers, elle n'a jamais fait l'objet d'un traité signé entre les deux parties. Vladimir Poutine le reconnaît lui-même dans une interview accordée à Oliver Stone en 2005[P 10],[J 2] : « Rien n’avait été couché sur le papier. Ce fut une erreur de Gorbatchev. En politique, tout doit être écrit, même si une garantie sur papier est aussi souvent violée. Gorbatchev a seulement discuté avec eux et a considéré que cette parole était suffisante. Mais les choses ne se passent pas comme cela ! ».

Cet argument est celui implicitement repris par Michael Rühle, ancien secrétaire général de l'OTAN, quand il se défendait de ces accusations en 2014[P 11] : « il n’y a jamais eu, de la part de l’Ouest, d’engagement politique ou juridiquement contraignant de ne pas élargir l’OTAN au-delà des frontières d’une Allemagne réunifiée »[J 2].

Mise en regard avec deux traités signés ultérieurement[modifier | modifier le code]

Cette « trahison de la promesse » ayant été utilisée par Vladimir Poutine pour justifier l'invasion de l'Ukraine en 2022, il lui a alors parfois été opposé l'existence de deux traités concrets et écrits, qui ont eux été signés par la Russie.

Le premier est le mémorandum de Budapest, document signé le 5 décembre 1994 par la Russie avec trois pays voisins (la Biélorussie, le Kazakhstan et l'Ukraine), accordant des garanties d'intégrité territoriale et de sécurité à chacune de ces trois anciennes Républiques socialistes soviétiques (RSS), en échange de leur ratification du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP). Ce traité consistait donc, pour l'Ukraine, a rétrocéder son arsenal nucléaire à la Russie, en échange de ne jamais se voir envahi par elle. Ce traité fut violé, de fait, par l'annexion de la Crimée par la Russie en 2014 - la Russie aurait donc elle aussi « trahi sa parole »[J 11].

Le second traité, moins souvent évoqué, est convoqué pour appuyer l'idée que la Russie avait finalement agréé cet élargissement. C'est L'Acte Fondateur sur les Relations, la Coopération et la Sécurité Mutuelles entre l'OTAN et la Fédération de Russie[P 12], signé à Paris le 29 mai 1997.

Ce traité, signé par la Russie et l'OTAN, met surtout en lumière un effort de coopération entre les deux entités (qui s'est ensuite dégradé), et ne concerne pas directement la question des futures adhésions. Mais il comporte en effet un passage qui semble agréer la possibilité d'inclure de « nouveaux membres » (qui ne peuvent concerner que des adhésions à venir, vu qu'aucun nouveau membre n'a rejoint l'alliance depuis 1982), sous certaines conditions :

« Les Etats membres de l'OTAN réitèrent qu'ils n'ont aucune intention, aucun projet et aucune raison de déployer des armes nucléaires sur le territoire de nouveaux membres, et n'ont aucunement besoin de modifier un quelconque aspect du dispositif ou de la politique nucléaire de l'OTAN - et n'en prévoient nullement le besoin pour l'avenir. »Acte Fondateur sur les Relations, la Coopération et la Sécurité Mutuelles entre l'OTAN et la Fédération de Russie[P 12], 29 mai 1997

Cette acceptation par la Russie d'un élargissement de l'OTAN à l'est est partiellement corroborée par un communiqué conjoint du premier ministre polonais et de Boris Eltsine, en 1993, qui signalait que l’entrée de la Pologne dans l’OTAN « ne serait pas contraire aux intérêts d’autres États, y compris la Russie »[J 9].

URSS et Russie : des frontières et nations différentes[modifier | modifier le code]

La principale opposition à l'idée d'une « promesse trahie » repose sur le fait que celle-ci fut faite à Mikhaïl Gorbatchev à propos de l'URSS et des frontières du pacte de Varsovie - et non de la Russie, pays qui ne ré-existe qu'à partir de 1991, et dont les frontières (et ce qui pourrait les menacer) se trouvent des centaines de kilomètres plus à l'est que celles de la RFA. Analyser les relations entre Russie et OTAN après 1991 au regard de cette promesse de 1990 serait donc un anachronisme, se trompant sur les frontières et enjeux qui étaient discutés dans le cadre de ces pourparlers.

Plusieurs articles de journaux publiés durant l'invasion de l'Ukraine en 2022 avancent ainsi cet argument. Par exemple dans Le Monde :

La version de Vladimir Poutine a été de nombreuses fois critiquée par les membres de l’OTAN, qui expliquent que le contexte de 1990 n’était pas celui de 1991. En 1990, les assurances des Occidentaux sont données alors que l’URSS et ses satellites sont encore liés par l’alliance militaire du Pacte de Varsovie, ce qui rendait inimaginable une extension de l’OTAN. Les événements de 1991 changent la donne : la chute de l’Union soviétique provoque en neuf mois l’émergence de quinze nouveaux pays souverains. Les frontières soviétiques, que les Occidentaux ne souhaitaient pas menacer un an plus tôt, ne sont plus les mêmes : en vertu du droit international, elles ne correspondent plus à l’URSS, mais à celles de la seule Fédération de Russie. Aucune promesse n’aurait ainsi été faite concernant des pays comme la Pologne, la République tchèque et la Hongrie. — Gary Dagorn, Guerre en Ukraine : comment l’OTAN s’est élargie en Europe de l’Est[J 9], Le Monde, 12 mars 2022

Amélie Zima, chercheuse spécialiste de l’OTAN au Centre Thucydide (Université Paris 2 Panthéon-Assas) et à l’IRSEM, interrogée par Libération[J 4], rejoint cette analyse :

« La question d’un élargissement plus à l’Est de l’OTAN n’est alors pas envisagée tout simplement parce que cela est inconcevable dans le contexte de l’époque. L’URSS existe encore, les pays d’Europe de l’Est font toujours partie des structures de coercition soviétiques (Pacte de Varsovie et Conseil d’assistance économique mutuelle [CAEM], ndlr). Le Pacte ne sera officiellement dissous qu’en juillet 1991. […] Il est donc inconcevable d’évoquer alors un élargissement de l’OTAN aux pays d’Europe centrale et orientale. il est difficile de parler de trahison car il va y avoir en peu de temps un enchaînement d’événements imprévisibles qui fera entrer l’Europe dans une nouvelle configuration de sécurité ».

Cette vision des choses étaient aussi défendue, en 2009 (c'est-à-dire avant la déclassification des documents diplomatiques) dans un long article[A 9] de Mark Kramer pour le Center for Strategic and International Studies.

C'est également la lecture revendiquée par l'OTAN elle-même (« le débat autour de l'élargissement de l'OTAN s'est déroulé exclusivement dans le contexte de la réunification allemande » écrit ainsi Michael Rühle dans un texte publié dans la Revue de l'OTAN[P 11], en 2014)

Avis politiques[modifier | modifier le code]

Bien que ne relevant pas de leur prérogatives, chaque auteur a fait part de sa propre opinion concernant l'expansion de l'OTAN. En résumé, tous les spécialistes, qu'ils reconnaissent ou pas l'existence de promesses, s'accordent pour critiquer l'expansion de l'OTAN sans y intégrer la Russie, tout en critiquant comme étant fallacieuse la rhétorique russe usant ces promesses pour justifier des interventions militaire.[Interprétation personnelle ?]

Débat politique[modifier | modifier le code]

(rapporter les différentes positions de personnalités politiques, dont ceux de l'époque mais aussi ceux actuels comme Stoltenberg, rapportés par des sources fiables notables)

Écho médiatique[modifier | modifier le code]

Presse[modifier | modifier le code]

Le mardi 12 décembre 2017, le site de National Security Archive, une association américaine à but non lucratif ayant pour mission de publier des documents officiels déclassifiés sur les questions de sécurité nationale, publie une analyse de 30 documents déclassifiés[P 1], réalisée par les chercheurs Svetlana Savranskaja et Tom Blanton, faisant état des pourparlers liés à cette promesse en 1990.

Cette publication trouve un écho dans la presse française, notamment en septembre 2018 dans Le Monde diplomatique[J 2].

C'est néanmoins à l'occasion des tensions précédant l'invasion de l'Ukraine, en 2022, que les médias se font plus largement écho de la "promesse trahie". C'est notamment le cas le 9 janvier 2002 d'un article du New York Times[J 12], et surtout le 15 février 2022 d'un long article du Spiegel[J 3], qui revient en détail sur la question.

La plupart[Interprétation personnelle ?] des articles de presse française écrits à l'occasion (juste avant ou pendant le conflit) visent néanmoins plutôt à démythifier l'idée d'une « promesse trahie », comme par exemple celui de Slate[J 13], de France Info[J 11], de Libération[J 4], ou encore du Monde[J 9]. Un article, celui de L'Obs[J 1], nuance plus fortement ces contestations (« Il est difficile de l’admettre, mais, pour une fois, le président russe a raison. En partie tout au moins. »), notamment par une remise en contexte plus large des rapports de force Elstine-Clinton sur le sujet durant les années 1990.

Monde politique[modifier | modifier le code]

La remise en avant de la « promesse trahie » advient durant la campagne de l'élection présidentielle française de 2022, poussant certaines figures politiques et intellectuelles à se positionner.

Deux candidats à la présidentielles reprennent alors la thèse de la « promesse trahie » : Jean-Luc Mélenchon, qui la reprend dans un tweet à l'occasion d'une conférence de presse du 22 février 2022 sur la guerre en Ukraine (« Quand l'URSS s'est effondré, il a été promis aux Russes que l'OTAN ne s'étendrait pas à l'Est. Cette promesse n'a pas été respectée »)[J 14] ; et Eric Zemmour sur CNews dans l'émission Le grand rendez-vous, le 20 février 2022 (« Il y a un problème géostratégique majeur. L’extension de l’Otan à l’est depuis 30 ans contrairement à toutes les promesses de Georges Bush père à Gorbatchev est vue légitimement comme une agression par la Russie »)[J 14].

Annexes[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Sources de spécialistes académiques[modifier | modifier le code]

  1. André Liebich, « Les promesses faites à Gorbatchev : l'avenir des alliances au crépuscule de la guerre froide », Relations internationales, vol. n° 147, no 3,‎ , p. 85 (ISSN 0335-2013 et 2105-2654, DOI 10.3917/ri.147.0085, lire en ligne, consulté le )
  2. Kristina Spohr et Kaarel Piirimäe, « With or without Russia? The Boris, Bill and Helmut Bromance and the Harsh Realities of Securing Europe in the Post-Wall World, 1990-1994 », Diplomacy & Statecraft, vol. 33, no 1,‎ , p. 158–193 (ISSN 0959-2296, DOI 10.1080/09592296.2022.2041816, lire en ligne, consulté le )
  3. Amélie Zima, « L’Acte fondateur OTAN-Russie, Négociations et influences sur la politique d’élargissement de L’OTAN À L’Europe centrale », Revue d’études comparatives Est-Ouest, vol. 44, no 03,‎ , p. 9–34 (ISSN 0338-0599, DOI 10.4074/s0338059913003033, lire en ligne, consulté le )
  4. a b c et d Liebich, « L’élargissement de l’OTAN: une promesse violée? », Le Temps,‎ (ISSN 1423-3967, lire en ligne, consulté le )
  5. a et b Joshua R. Itzkowitz Shifrinson, « Deal or No Deal? The End of the Cold War and the U.S. Offer to Limit NATO Expansion », International Security, vol. 40, no 4,‎ , p. 7–44 (ISSN 0162-2889, DOI 10.1162/ISEC_a_00236, lire en ligne, consulté le )
  6. Charles Thibout, « L’élargissement de l’OTAN et la Russie : promesse tenue ? », sur iris-france.org, Institut de relations internationales et stratégiques (consulté le )
  7. Olivier Schmitt, Pourquoi Poutine est notre allié?: Anatomie d'une passion française., (ISBN 978-2-36774-084-3 et 2-36774-084-4, OCLC 971018895, lire en ligne)
  8. (en) Michael MccGWIRE, « NATO expansion: 'a policy error of historic importance' », Review of International Studies, vol. 24, no 1,‎ , p. 23–42 (ISSN 1469-9044 et 0260-2105, DOI 10.1017/S0260210598000230, lire en ligne, consulté le )
  9. (en) Mark Kramer, « TWQ: The Myth of a No-NATO-Enlargement Pledge to Russia - Spring 2009 » [archive du ], sur www.csis.org, (consulté le )

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Sources de presse[modifier | modifier le code]

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Sources primaires[modifier | modifier le code]

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  7. « NATO Expansion: What Yeltsin Heard. National Security Archive », sur nsarchive.gwu.edu, (consulté le )
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  9. Vladimir Poutine, « Discours du 18 mars 2014 au Kremlin », Outre-Terre, vol. N° 41, no 4,‎ , p. 278-291 (ISSN 1636-3671 et 1951-624X, DOI 10.3917/oute1.041.0278, lire en ligne, consulté le )
  10. Oliver Stone, Vladimir Vladimirovitch Traduction de : Poutine et Aurélien Blanchard, Conversations avec Poutine, (ISBN 978-2-226-42667-3 et 2-226-42667-1, OCLC 1033489964, lire en ligne)
  11. a et b « Revue de l'OTAN - L'élargissement de l'OTAN et la Russie: mythes et réalités », sur NATO Review, (consulté le )
  12. a et b Organisation du traité de l'Atlantique nord, « Acte Fondateur sur les Relations, la Coopération et la Sécurité Mutuelles entre l'OTAN et la Fédération de Russie signé à Paris, France », sur nato.int (consulté le )

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Autres sources sans catégorie[modifier | modifier le code]

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