Butte Saint-Roch
La butte Saint-Roch était une petite colline située à l'intérieur du périmètre actuel de Paris et aujourd'hui disparue.
Constitution
Elle est parfois confondue avec une autre protubérance, la butte des Moulins, située un peu plus à l'est.
L'origine de cette butte est toujours sujette à débats. Pour les uns, il pourrait s'agir d'un ancien tumulus gaulois et pour les autres d'un ancien dépôt d'immondices et de gravois[1].
D'une manière ou d'une autre, la butte fut surélevée, une première fois au XIVe siècle par les débris des masures démolie par le prévôt, puis une seconde fois lors de la construction de l'enceinte de Charles V.
Histoire
La Justice du roi utilisa la butte comme lieu de supplice pour les voleurs, faussaires, faux-monnayeurs, hérétiques et blasphémateurs dès le XVe siècle. Ceux-ci étaient soit brûlés, soit jetés vifs dans un chaudron d'eau bouillante. C'est ainsi que périt l'écolier Edmond de La Fosse[1] :
- « Edmond de La Fosse, escollier
hérétique particulier
avait prins et cierge et chasuble...
des mains d'un prebstre, il osta
la Sainte Hostie et la brisa...
Contre Dieu fut jugé avoir
le poing coupé pour son debvoir
et, à sa très malle journée
eut, tout vif, os, chair, cuyr et peaulx
bruslés au Marché aux Pourceaux.
Ce cas advint un vendredy
vingt cinquième jour de novembre
l'an mil cinq cent et troys, je dis
qui fut pour luy piteux encombre. »
Il est possible que l'évêque de Paris ait édifié son échelle de justice sur la partie sud de cette butte en raison de la présence de la rue de l'Échelle dans les abords immédiats.
L'autre coté de la butte était occupé par le marché aux pourceaux.
Jeanne d'Arc y avait installé des couleuvrines pour soutenir l'attaque contre la porte Saint-Honoré et y avait été grièvement blessée[2],[3].
En 1536, la butte augmenta de volume, quand après l'avance de Charles Quint en Picardie, François Ier, fit renforcer l'enceinte de Charles V. Il fit construire sur la butte un bastion fortifié avancé qui était incorporé dans la défense de Paris. Les débris des démolitions, les gravois et les terres provenant des travaux y furent amenés.
Lors du siège de Paris par Henri IV en 1590, la butte servit de promontoire à l'artillerie assaillante. Elle fut l'enjeu de plusieurs combats, en particulier le 21 août, ou les troupes royales perdirent une cinquantaine d'hommes.
De 1667 à 1677, Michel Villedo arrasa la butte et les moulins qui la surmontaient furent détruits.
Tout le quartier de la butte Saint-Roch mais aussi celui de la butte des Moulins fut incorporé dans Paris lors de la construction de l'enceinte de Louis XIII. Cet endroit resta toutefois un endroit très mal famé, couverte de masures sordides et de logis de mendiants, de faiseurs de tours, de montreurs d'ours, de sorciers et de charlatans. Sur les pentes, comme sur les pentes de la butte voisine il y avait des guinguettes et des cabarets qui vendaient du vin de Suresnes ou du clos Georgeau[4] tout proche.
Le 16 mai 1750 un officier de police conduisit au poste un enfant de la rue des Nonnains-d'Hyères qui s’était rendu coupable de quelques incartades sans importances. La mère, éplorée, ameuta tout le quartier et rapidement la rumeur courue que Louis XV faisait enlever les enfants âgés de 5 à 10 ans afin qu’ils soient sacrifiés et que leur sang était utilisé pour les bains du roi et de ses courtisans si bien que l’émeute prit de l’ampleur en particulier dans le faubourg Saint-Antoine ou des agents de police furent pris à parti. Les 22 et 23 mai l’agitation se propage dans les quartiers de la porte Saint-Denis, butte Saint-Roch et carrefour de la Croix-Rouge. Environ 2 000 personnes se portent sur la route de Versailles pour attendre le retour du lieutenant général de police Nicolas Berryer, allé prendre des ordres. Ils se heurtent à la troupe et au guet royal qui les dispersent. Ayant pris connaissance de cette émeute et de sa dégénération, Louis XV décide, en représaille, de priver les Parisiens de sa présence. Il fait construire, pour se rendre de Versailles à Saint-Denis et Compiègne, une route évitant Paris, connue sous le nom de route de la Révolte.
La butte a joué un rôle important lors de l'Insurrection royaliste du 13 vendémiaire an IV [5] autour de l'Église Saint-Roch.
Au Second Empire, la butte restait un obstacle sérieux. Tout le quartier entre le Louvre et les grands boulevards était occupé par des rues étroites et considéré comme insalubre et mal famé.
La butte Saint-Roch diparut totalement lors de la percée de l'Avenue de l'Opéra, en 1875. Les énormes déblais servirent à combler les excavations du Champ de Mars. Pour avoir une idée de l'importance de cette butte dans un quartier aujourd'hui complètement nivelé, il suffit de voir l'entrée de l'église Saint-Roch où l'on monte treize marches. Avant l'arasement de la butte, il fallait en descendre sept[2].
Marché aux pourceaux
Le marché aux pourceaux, créé à la fin XIIe siècle, était situé sur le coté oriental de la butte Saint-Roch. Il était précédemment situé près du cul de sac des Bourdonnais.
Selon un édit de 1360, les porchers devaient parquer leurs animaux sur les pentes de la butte au carrefour des chemins du Roule et d'Argenteuil.
Marché aux chevaux
Un marché aux chevaux existait vers 1475, dans un lieu appellé le Pré Crotté. Il était situé approximativement entre les actuelles rues de Tournon et Garancière.
En 1565, le marché est déplacé sur la propriété de l'hôtel des Tournelles, qui est en cours de démolition. Les écuries de cette propriété royale furent réutilisées pour créer le nouveau marché aux chevaux.
Le 29 mars 1605 Henri IV écrivait à Sully :
- «Mon amy, ceste-cy sera pour vous prier de vous souvenir de ce dont nous parlasmes dernièrement ensemble, de cette place que je veux que l'on fasse devant le logis qui se fait au marché aux chevaux pour les manufactures, afin que si vous n'y avez esté vous alliez pour la faire marquer: car baillant le reste des autres places a cens et rente pour bastir, c'est sans doute qu'elles le seront incontinent et je vous prie de m'en donner les nouvelles.»
Ainsi, en 1605, la création de la place Royale entraine le départ du marché aux chevaux qui vient s'installer hors Paris, à côté du marché aux pourceaux, et y restera jusqu'en 1633.
En 1633, le palais Cardinal est agrandi et le marché aux chevaux est installé dans un bastion du nouveau rempart situé approximativement entre le boulevard des Capucines et les rues des Capucines, Gaillon, des Petits-Champs et Louis-le-Grand.
C'est dans ce marché, alors désert, qu'eut lieu le 30 juillet 1652, un duel à cinq contre cinq suite à une querelle qu'avait eu François de Vendôme duc de Beaufort, petit-fils d'Henri IV avec son beau-frère Charles Amédée de Savoie duc de Nemours, dans un cabaret du jardin des Tuileries. D'un côté se trouvait, le duc de Beaufort, le comte de Bury fils du marquis de Rostaing, le comte de Ris, le comte de Brillet et le comte d'Héricourt. De l'autre côté on trouvait le duc de Nemours, le chevalier de La Chaize, le comte de Villars, le comte de Campan et le sieur d'Uzerche capitaine des gardes[6],[7]. Le duel eut lieu avec 2 pistolets chargés de 5 balles chacun :
- Le comte de Villars et le comte de Bury se blessèrent tous les deux.
- Le comte de Ris et le comte d'Héricourt, blessés, moururent dans les vingt-quatre heures.
- Le duc de Nemours tira et blessa duc de Beaufort à la main, qui lui-même tira et toucha le duc de Nemours droit dans le cœur[6].
- Pour les autres, s'il y en eut de blessés, ce fut légèrement[8].
C'est également dans ce marché que furent rassemblé, le 5 juin 1662, une partie des escadrons qui participa au grand carrousel donné en l'honneur de la naissance de Louis de France, premier enfant de Louis XIV, dans la cour du carrousel.
Le marché aux chevaux déménagea une nouvelle fois en 1687, pour s'installer à proximité du boulevard Saint-Marcel et il y resta jusqu'en 1908.
Notes
- Dictionnaire historique des rues de Paris de Jacques Hillairet
- Paris, le guide vert, Éditions Michelin, ISBN 2-06-700352-6 Erreur de référence : Balise
<ref>
incorrecte : le nom « guidevert » est défini plusieurs fois avec des contenus différents. - inlibroveritas.net
- RUE DU CLOS-GEORGEAU
- Mémoires du père Berthod 1652 à 1653 Par François Berthod pages 171 à 175
- 30 juillet 1652 : duel entre le duc de Beaufort et le duc de Nemours sur france-pittoresque.com
- MÉMOIRES DE MLLE DE MONTPENSIER